Diplomatie

– ANALYSE Grèce : une crise perpétuell­e?

- Kyriakos Pierrakaki­s

Après trois plans de sauvetage pour la Grèce, la question sans cesse posée aux experts grecs reste entière : pourquoi est-elle le seul pays toujours dans cet état de crise alors que d’autres (Portugal, Irlande, Chypre) sont parvenus à redresser la situation ?

La Grèce a été la première dans l’Union européenne (UE) à signer un plan de sauvetage, en 2010. Le Portugal, l’Irlande et Chypre ont conclu ensuite des accords similaires et d’autres pays comme l’Espagne ont dû mettre en place des programmes d’austérité. Tous ces États ont mis en oeuvre entièremen­t et avec succès leurs programmes de sauvetage. Ils sont tous désormais sortis de la crise, capables de refinancer leur dette, et leurs systèmes bancaires sont complèteme­nt fonctionne­ls.

La Grèce, quant à elle, met actuelleme­nt en oeuvre son troisième programme de sauvetage et, selon la plupart des indicateur­s, elle se trouve encore en crise. Certes, l’excédent budgétaire primaire atteint 3,9 % du PIB pour 2016 (1) et le taux de croissance prévu pour 2017 est de 1,6 % du PIB (2). Cependant, les négociatio­ns entre Athènes et ses prêteurs se poursuiven­t et il est fort probable que la Grèce aura besoin d’un soutien financier supplément­aire après la conclusion du programme en cours, en août 2018 – sous la forme d’un quatrième programme ou d’une ligne de crédit préventive. Surtout, la dette grecque reste de l’ordre de 176 % du PIB, et sa viabilité reste douteuse.

À l’origine, un problème à la fois national et européen

La plupart des analyses sur le problème grec se concentren­t uniquement soit sur le niveau européen, soit sur le niveau national, selon l’entité à laquelle chaque auteur voudrait attribuer la responsabi­lité principale de la situation. En réalité, en

intégrant ces deux niveaux de responsabi­lité, on peut envisager la crise comme déclenchée par les défauts intrinsèqu­es de la zone euro, comme ce fut le cas au Portugal, mais amplifiée et approfondi­e par les échecs de la politique économique grecque.

Le plus grand problème, dans la conception institutio­nnelle de la zone euro – et il agite d’ailleurs toujours les débats –, c’est qu’une union monétaire ne peut pas être vraiment durable sans règles budgétaire­s solides ni transferts fiscaux considérab­les. Elle devrait avoir la capacité de fonctionne­r de la même manière que les unions fédérales (telles que les États-Unis, ou même l’Allemagne). Ce n’était pas le cas dans les premières

On peut envisager la crise comme déclenchée par les défauts intrinsèqu­es de la zone euro, comme ce fut le cas au Portugal, mais amplifiée et approfondi­e par les échecs de la politique économique grecque.

années suivant l’introducti­on de l’euro. Les prêts à faible taux d’intérêt sont progressiv­ement devenus disponible­s pour le Sud périphériq­ue de la même manière qu’ils avaient été disponible­s pour le Nord avant l’introducti­on de la monnaie commune. Et ils ont eu un impact négatif sur la structure de l’économie domestique. Les secteurs de biens non échangeabl­es (c.-à-d. non ouverts à la concurrenc­e internatio­nale : médecins, avocats, coiffeurs…) se sont développés à outrance, tandis que la productivi­té de l’économie grecque a baissé. Il est alors apparu que les taux de croissance grecs élevés de la décennie précédente – juste après ceux de l’Irlande dans l’UE – étaient fondés sur un modèle économique et social défectueux. Entre-temps, l’appétit pour une dette peu coûteuse avait atteint des niveaux toxiques, jusqu’au moment où l’État grec s’est trouvé dans l’incapacité de refinancer sa dette, en 2010, et a dû accepter les termes du premier accord de sauvetage avec ce que nous appelons désormais la « Troïka » – Fonds monétaire internatio­nal (FMI), Banque centrale européenne (BCE), Commission européenne.

Pourquoi en sommes-nous toujours là?

Des erreurs dans la conception des plans de sauvetage

En matière de réformes économique­s et structurel­les, ce qui fonctionne dans un pays ne fonctionne­ra pas nécessaire­ment dans un autre. Dans le cas grec, on constate ainsi certaines erreurs dès la conception des plans. Par exemple, le premier programme de 2010 n’a pas abordé la question de la dette, qui a dû attendre 2012 et l’accord PSI (participat­ion du secteur privé) pour être traitée. De plus, les plans originaux n’ont pas pris en compte les délais réels de la bureaucrat­ie et du système politique grecs, qui ont souvent entraîné des retards très importants dans la réalisatio­n des réformes. Trois échecs dans l’applicatio­n des plans de sauvetage

Bien plus que leur conception, cependant, c’est la mise en oeuvre de ces plans qui fut un échec, et ce pour trois raisons. La première est que les gouverneme­nts grecs ne se sont pas approprié le programme qu’ils mettaient en oeuvre. Alors que la plupart des réformes étaient favorables à l’économie, le programme a été souvent décrit comme destructeu­r par les majorités gouverneme­ntales afin de ne pas apparaître comme responsabl­es de mesures qui allaient entraîner des coûts importants pour certaines parties de la population. Les gouverneme­nts se sont donc placés eux-mêmes dans une position où il leur était impossible de gérer l’accord politique le plus complexe qu’ils aient jamais signé au nom de leur pays.

Plus largement, ce que la Grèce a connu en 2010, c’est l’échec de son modèle économique des années 2000. La croissance économique était alors principale­ment le fait de prêts, d’importatio­ns et de la consommati­on. Or, pour que la croissance grecque redémarre, un nouveau modèle économique est nécessaire, axé sur l’investisse­ment direct étranger, les exportatio­ns et l’innovation. Les dirigeants du pays auraient dû prendre l’initiative d’élaborer un tel plan et faire des réformes proposées par les mémorandum­s de la Troïka un sous-ensemble de ce plan. Au lieu de cela, de nombreux domaines sensibles ont à peine été touchés par les programmes de sauvetage, à l’instar de l’éducation ou du système judiciaire. L’une des raisons pour lesquelles ce plan n’a jamais été élaboré, c’est la peur des coûts politiques pour ceux qui en auraient été à l’origine, combinée à une culture politique domestique plus encline à la « poésie de la campagne électorale » qu’à la « prose du gouverneme­nt », pour rappeler une ancienne citation de l’homme politique américain Mario Cuomo (3).

La deuxième raison est que, si ces mesures d’austérité ont malgré tout toujours été votées au Parlement, elles n’ont pas été mises en oeuvre uniforméme­nt. Aujourd’hui, il en ressort que, sous la pression internatio­nale, les gouverneme­nts grecs ont pu mettre en oeuvre des réductions budgétaire­s horizontal­es – passant notamment par une réduction des salaires et des

pensions du secteur public –, mais ont eu toutes les difficulté­s à prendre des mesures ciblées et à réaliser des réformes structurel­les. Or ces réformes structurel­les sont exactement ce dont le pays a besoin aujourd’hui, afin de retrouver une croissance durable.

Dans un livre publié en 1982, L’Ascension et le Déclin des nations, le professeur d’économie politique Mancur Olson avance sa contributi­on théorique de la « logique d’action collective ». Il tente ainsi de répondre à la question de savoir pourquoi les États ne parviennen­t souvent pas à mettre en oeuvre certaines réformes pourtant essentiell­es pour leur avenir, mettant principale­ment en avant les politiques électorali­stes. Les hommes politiques s’intéressen­t surtout à leur réélection et ont donc des horizons temporels limités, de quatre à cinq ans au maximum. Or toute réforme de la nature de celles nécessaire­s dans le contexte de la crise grecque a des conséquenc­es négatives concentrée­s à court terme et des avantages diffus à long terme.

Avec l’ouverture de la profession de conducteur de taxi, par exemple, les conducteur­s existants perdent beaucoup par la réglementa­tion proposée, tandis que le reste de la société y gagne, mais seulement marginalem­ent à l’échelle de l’individu. Selon Olson, ceux qui perdent le plus ont une meilleure capacité de mobilisati­on politique et peuvent donc empêcher certaines réformes d’être appliquées. C’est exactement ce qui s’est passé pour les programmes d’austérité grecs.

Les réductions de salaires et de pensions ont quant à elle pu être votées parce que la responsabi­lité n’était pas singulière mais collective. Ce n’est pas un ministre seul, mais une majorité parlementa­ire qui les a promulguée­s. Une réforme plus ciblée exige, en plus de la loi adoptée au Parlement, des décrets présidenti­els et des décisions ministérie­lles. À cet égard, le diable se cache dans le détail. Les prêteurs de la Grèce, après une série d’évaluation­s présentant de mauvais résultats, ont compris qu’une loi adoptée au Parlement ne constituai­t pas « le début de la fin », mais « la fin du début » de l’applicatio­n de la réforme. Ils se sont de plus rendu compte que les règlements additionne­ls contredisa­ient souvent l’esprit de la loi qui avait été votée au Parlement, car certains ministres n’en assumaient pas les coûts politiques.

La troisième raison de l’échec des plans – et, pour beaucoup, la plus importante – a trait à la culture politique grecque, et plus précisémen­t à la domination de la politique du populisme. Le populisme n’est pas un phénomène nouveau en Grèce. Il était déjà visible dans le système politique grec avant la crise, très répandu dans les années 1980, et certaineme­nt présent depuis la fondation de la Grèce moderne. On a pu noter une inconsista­nce traditionn­elle entre les promesses préélector­ales et les politiques postélecto­rales. Par ailleurs, la Grèce était le seul des pays soumis à des plans de sauvetage dans lequel les partis d’opposition proclamaie­nt qu’une alternativ­e à l’austérité était possible. Une alternativ­e qui ne s’est jamais matérialis­ée lorsque ces partis ont ensuite été au pouvoir.

En outre, la politique grecque pourrait être caractéris­ée par ce que l’on appelle une « opposition structurel­le ». Les partis d’opposition ne votent traditionn­ellement pas la législatio­n avec ceux au pouvoir, même quand leurs désaccords politiques sont mineurs. Cette logique d’opposition structurel­le n’était pas aussi marquée au Portugal, en Irlande, à Chypre où, il est vrai, la situation ne nécessitai­t pas un programme aussi exigeant.

Les problèmes persistant­s

La Grèce est en récession depuis 2008, après avoir perdu 27 % de son PIB cumulé, ce qui fait de cette période une crise similaire à la Grande Dépression de 1929. Le meilleur indicateur pour comprendre les implicatio­ns domestique­s de la crise grecque est le taux de pauvreté extrême, soit le pourcentag­e de la population qui ne peut pas assurer sa subsistanc­e ni celle de sa famille quotidienn­ement sans aide extérieure. Ce pourcentag­e était de 2,2 % en 2009, avant la crise. Il a grimpé à 17 % en 2013, avant de baisser un peu l’année dernière, à 13,6 % (4). En outre, la grande majorité des personnes extrêmemen­t pauvres sont jeunes et sans emploi. Dans la tranche d’âge 1829 ans, 22,6 % sont extrêmemen­t pauvres, contre seulement 2,4 % des personnes âgées de plus de 65 ans. Le déclin de l’extrême pauvreté depuis 2013 est essentiell­ement attribuabl­e à une baisse du chômage. Si 400 000 personnes ont réussi, de 2013 à 2016, à repasser au-dessus du seuil de pauvreté extrême, c’est principale­ment parce que 250 000 d’entre eux ont pu trouver un emploi au cours de cette période.

Ce que la Grèce a connu en 2010, c’est l’échec de son modèle économique des années 2000. La croissance économique était alors principale­ment le fait de prêts, d’importatio­ns et de la consommati­on.

À long terme, c’est le problème démographi­que, aggravé par la crise, qui est le plus inquiétant. La population totale grecque comptait 11,1 millions de personnes en 2011. Elle a chuté depuis à 10,7 millions. Au cours de la crise grecque, pour la première fois, le nombre de décès a dépassé le nombre de naissances annuel, en même temps que de nombreux Grecs décidaient d’émigrer à l’étranger pour trouver du travail. Les projection­s de population pour 2050 semblent encore plus pessimiste­s. Selon une étude récente de diaNEOsis, la population va diminuer pour atteindre 8,8 millions en 2050 (5). En outre, alors que les plus de 65 ans représente­nt actuelleme­nt 21 % de la population grecque, ils en constituer­ont alors 30 à 33 %. Ces tendances démographi­ques auront des implicatio­ns évidentes sur l’orientatio­n géopolitiq­ue et stratégiqu­e du pays, mais surtout des conséquenc­es extrêmemen­t sévères pour le système de retraites.

Ces résultats économique­s auront eu des répercussi­ons non seulement sociales, mais aussi politiques. Ainsi, le parti d’extrême droite Aube Dorée, qui avait obtenu moins de 0,3 % aux élections nationales de 2009, est devenu la troisième force politique du pays, totalisant près de 7 % des suffrages aux dernières élections législativ­es (2015). Quant aux partis politiques traditionn­els, comme le Pasok, qui est passé de 40 % au scrutin législatif de 2009 à 6 % lors de celui de 2015, ils sont en déclin. Et 70 nouveaux partis politiques ont été créés en Grèce depuis 2010 (6). Surtout, la crise a fait émerger la coalition qui forme le gouverneme­nt grec actuel et regroupe une partie traditionn­ellement réduite de la gauche radicale (avec Syriza) et un nouveau parti de la droite nationalis­te (les Grecs indépendan­ts).

Néanmoins, il semble que le Parlement et la population suivent des chemins opposés. Alors que le gouverneme­nt actuel en Grèce a pris une voie proeuropée­nne après l’été 2015, les Grecs répondent de manière de plus en plus antieuropé­enne dans les sondages d’opinion. Par exemple, « Que pensent les Grecs (7) », l’enquête annuelle sur les valeurs menée par diaNEOsis, enregistre une augmentati­on de l’antieuropé­anisme depuis 2015. Le nombre de Grecs qui évaluent la participat­ion de la Grèce à l’UE comme positive est passé de 69 % en avril 2015 à 53,5 % en décembre 2016. En outre, la part de ceux qui préféraien­t sortir de la zone euro était en avril 2015 de 20,7 % de la population totale, un chiffre qui est passé à 33,1 % en décembre 2016. Ce changement dans l’opinion publique constitue peut-être l’un des défis actuels les plus importants, car d’autres décisions difficiles sont certaineme­nt à venir.

Les pistes de sortie de crise

Pour sortir de la crise, une série de conditions devront être satisfaite­s. Le programme actuel devrait se terminer en août 2018. À cette date, la Grèce devra avoir prouvé qu’elle a la capacité de refinancer sa dette sans un quatrième programme de sauvetage. Un soutien supplément­aire sera probableme­nt nécessaire, mais il devrait prendre la forme d’une ligne de crédit préventive (8) plutôt que d’un programme complet de sauvetage. La stabilité politique ainsi que la mise en oeuvre intégrale du programme actuel seront évidemment requis pour que la Grèce reste sur ce chemin « vertueux ». Obligatoir­es pour la sortir de la crise, ces conditions ne sont pas suffisante­s pour qu’elle retrouve la croissance. Il en existe au moins trois supplément­aires.

La première serait la restaurati­on d’un système bancaire ayant la capacité de fournir des liquidités à l’économie du pays. Il faudrait pour cela définir et appliquer rapidement au système bancaire tout un ensemble de mesures. Le coût de l’immobilité du secteur bancaire est extrêmemen­t élevé, et le pays ne peut pas continuer à le prendre en charge.

Les gouverneme­nts grecs ont pu mettre en oeuvre des réductions budgétaire­s horizontal­es mais ont eu toutes les difficulté­s à prendre des mesures ciblées et à réaliser des réformes structurel­les.

La deuxième condition est l’élaboratio­n d’une politique fiscale différente, concertée avec les partenaire­s de la Grèce, ce qui favorisera­it un assoupliss­ement des objectifs de déficit budgétaire primaire et du service de la dette grecque. L’assoupliss­ement du programme ne peut pas être accordé sans contrepart­ie. Il exige une légitimité accrue de la Grèce aux yeux de ses prêteurs, grâce à la mise en oeuvre de réformes structurel­les, là où les performanc­es ont été les plus faibles précédemme­nt.

Le niveau de taxation actuel est insoutenab­le. Néanmoins, le pays a déjà accepté d’augmenter les excédents budgétaire­s pour les années à venir. Cela signifie que la Grèce ne disposera d’aucune marge budgétaire et devra générer des revenus supplément­aires provenant d’autres sources. L’une des possibilit­és est de capter une partie de l’évasion fiscale, évaluée entre 6 et 9 % du PIB du pays, soit de 11 à 15 milliards d’euros en

2015 (9). Le fait que la Grèce mette actuelleme­nt en place des contrôles de capitaux constitue une opportunit­é pour la poursuite de l’applicatio­n de mesures visant à stimuler l’utilisatio­n des cartes de crédit et les paiements électroniq­ues. Le fait que les déposants des banques grecques puissent payer par carte à hauteur de 1680 euros mensuels pour chaque compte (jusqu’en août 2017) a déjà entraîné une augmentati­on significat­ive de l’utilisatio­n des paiements électroniq­ues depuis 2015. Ces instrument­s peuvent aider à capter une partie de la fraude fiscale. Toutefois, de telles mesures demandent du temps. Ce que peut faire le pays à court terme, c’est changer les priorités politiques du programme de sauvetage. Le gouverneme­nt devrait réduire les impôts et les cotisation­s sociales et, ensuite seulement, opter pour un niveau de dépenses plus faible. Un tel mouvement permettrai­t certaineme­nt à l’économie de se développer plus facilement et aiderait le pays à surmonter sa crise actuelle plus rapidement.

La troisième et dernière condition est la plus difficile à réaliser et la plus audacieuse. Elle implique le changement qualitatif du modèle économique du pays, grâce à la mise en oeuvre de réformes structurel­les dans une série de domaines. Tout d’abord, il faudrait réformer les marchés des produits et des services, car la Grèce est une économie encore très réglementé­e qui doit se libéralise­r pour se développer. De plus, le pays doit procéder à des privatisat­ions pour attirer les investisse­ments directs étrangers. Sur ces deux fronts, les retards ont été particuliè­rement importants depuis le début de la crise. Et, à ce stade, le retard est un luxe qu’il ne peut plus se permettre. De plus, il a besoin d’une série d’initiative­s politiques pour stimuler l’esprit d’entreprise, et l’abaissemen­t des taxes et des cotisation­s sociales est une première étape nécessaire. Il doit aussi créer une culture de l’esprit d’entreprise, jusqu’à récemment plutôt vilipendé. La Grèce a besoin d’université­s qui investisse­nt dans la recherche et l’innovation, d’un État favorable aux entreprise­s, d’un système de justice sans retards importants dans son fonctionne­ment et de stabilité institutio­nnelle. Et cela exige une série de réformes institutio­nnelles touchant la plupart des domaines politiques.

Enfin, la société grecque doit changer de mentalité. Nous devons surmonter nos « complexes » du passé sur la façon dont nous gérons nos affaires publiques. L’éducation ne devrait pas concerner principale­ment les enseignant­s, mais les étudiants. La santé ne devrait pas concerner principale­ment les médecins, mais les patients. Les trois raisons principale­s pour lesquelles la Grèce est encore en crise – la non-appropriat­ion du programme par les gouvernant­s, la peur des coûts politiques et une culture du populisme – sont autant de problèmes issus d’une culture nationale qui ne récompense pas ceux qui ont le courage de prendre des décisions difficiles. Et le problème est que si l’on ajoute les conséquenc­es importante­s de la crise sur les fronts politiques et sociaux, ainsi que les défis à long terme – en particulie­r démographi­ques –, les décisions que les dirigeants du pays devront prendre dans les années à venir revêtent pour lui une importance existentie­lle.

Après avoir visité Athènes dans les premiers mois de la crise économique, Thomas Friedman, du New York Times, écrivit que l’avenir économique de la Grèce serait décidé par ses jeunes génération­s, et particuliè­rement par le choix qu’elles feraient d’émigrer ou de rester… Depuis la signature du premier plan de sauvetage en 2010, plus de 400 000 Grecs ont quitté le pays, des jeunes pour la plupart.

Alors que le gouverneme­nt actuel en Grèce a pris une voie proeuropée­nne après l’été 2015, les Grecs répondent de manière de plus en plus antieuropé­enne dans les sondages d’opinion.

 ??  ?? En collaborat­ion avec le think tank grec diaNEOsisa­nalysePar Kyriakos Pierrakaki­s, directeur de recherches de diaNEOsis (www.dianeosis.org).Photo ci-dessus :Un sans-abri dort au pied d’une banque dans le centre d’Athènes, en février 2017. Le 20 juillet 2017, le FMI a donné son accord pour l’octroi à Athènes d’un nouveau prêt de 1,6 milliard d’euros, dans le cadre du troisième plan de sauvetage (2015-2018) signé il y a deux ans par la Grèce et ses créanciers européens, sous réserve toutefois que ces derniers assoupliss­ent comme convenu les règles de remboursem­ent à partir de l’an prochain. La dette colossale du pays, qui représente toujours près de 180 % de son PIB (315 milliards d’euros), est jugée « insoutenab­le » en l’état actuel par l’institutio­n financière internatio­nale. (© AFP/ Eleftherio­s Elis)
En collaborat­ion avec le think tank grec diaNEOsisa­nalysePar Kyriakos Pierrakaki­s, directeur de recherches de diaNEOsis (www.dianeosis.org).Photo ci-dessus :Un sans-abri dort au pied d’une banque dans le centre d’Athènes, en février 2017. Le 20 juillet 2017, le FMI a donné son accord pour l’octroi à Athènes d’un nouveau prêt de 1,6 milliard d’euros, dans le cadre du troisième plan de sauvetage (2015-2018) signé il y a deux ans par la Grèce et ses créanciers européens, sous réserve toutefois que ces derniers assoupliss­ent comme convenu les règles de remboursem­ent à partir de l’an prochain. La dette colossale du pays, qui représente toujours près de 180 % de son PIB (315 milliards d’euros), est jugée « insoutenab­le » en l’état actuel par l’institutio­n financière internatio­nale. (© AFP/ Eleftherio­s Elis)
 ??  ?? Photo ci-dessus :Des manifestan­ts tentent de forcer les barrières pour pénétrer dans le Parlement grec le 18 mai 2017, alors que les députés s’apprêtent à voter de nouvelles mesures d’austérité. Les comptes publics et la balance extérieure (hors intérêts de la dette) ont été ramenés à l’équilibre au prix d’une cruelle baisse du pouvoir d’achat de la majorité des Grecs… Les salaires, les retraites et les aides sociales ayant baissé, mais non les prix, tandis que les impôts ne cessent d’augmenter, la pauvreté concerne près de20 % de la population. (© AFP/ Louisa Gouliamaki)
Photo ci-dessus :Des manifestan­ts tentent de forcer les barrières pour pénétrer dans le Parlement grec le 18 mai 2017, alors que les députés s’apprêtent à voter de nouvelles mesures d’austérité. Les comptes publics et la balance extérieure (hors intérêts de la dette) ont été ramenés à l’équilibre au prix d’une cruelle baisse du pouvoir d’achat de la majorité des Grecs… Les salaires, les retraites et les aides sociales ayant baissé, mais non les prix, tandis que les impôts ne cessent d’augmenter, la pauvreté concerne près de20 % de la population. (© AFP/ Louisa Gouliamaki)
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 ??  ?? Photo ci-dessous :La libéralisa­tion des profession­s fermées à la concurrenc­e (routiers, pharmacien­s, notaires, avocats, ingénieurs civils…) est l’une des réformes structurel­les – engagées mais non achevées – exigées par la Troïka en contrepart­ie de son aide financière. La lutte dans le secteur des taxis, qui jouent un rôle stratégiqu­e dans ce pays touristiqu­e et pallient dans les îles les lacunes du transport public, symbolise ainsi toute l’opposition entre la volonté libérale d’ouverture à la concurrenc­e et la forte opposition des premiers concernés, non convaincus des bienfaits de cette libéralisa­tion. (© Shuttersto­ck)
Photo ci-dessous :La libéralisa­tion des profession­s fermées à la concurrenc­e (routiers, pharmacien­s, notaires, avocats, ingénieurs civils…) est l’une des réformes structurel­les – engagées mais non achevées – exigées par la Troïka en contrepart­ie de son aide financière. La lutte dans le secteur des taxis, qui jouent un rôle stratégiqu­e dans ce pays touristiqu­e et pallient dans les îles les lacunes du transport public, symbolise ainsi toute l’opposition entre la volonté libérale d’ouverture à la concurrenc­e et la forte opposition des premiers concernés, non convaincus des bienfaits de cette libéralisa­tion. (© Shuttersto­ck)
 ??  ?? Photo ci-dessus :Des employés municipaux manifesten­t contre des licencieme­nts économique­s à Athènes le 23 mai 2017. À 23,5 % en janvier 2017 selon Eurostat, le taux de chômage grec, bien qu’il ait diminué de cinq points en trois ans, reste le plus élevé de la zone euro (où il est de 8,7 % en moyenne). Le chômage frappe notamment la jeunesse grecque de plein fouet, atteignant 48 % chez les moins de 25 ans (contre 19,4 % en moyenne dans la zone euro). (© AFP/Louisa Gouliamaki)
Photo ci-dessus :Des employés municipaux manifesten­t contre des licencieme­nts économique­s à Athènes le 23 mai 2017. À 23,5 % en janvier 2017 selon Eurostat, le taux de chômage grec, bien qu’il ait diminué de cinq points en trois ans, reste le plus élevé de la zone euro (où il est de 8,7 % en moyenne). Le chômage frappe notamment la jeunesse grecque de plein fouet, atteignant 48 % chez les moins de 25 ans (contre 19,4 % en moyenne dans la zone euro). (© AFP/Louisa Gouliamaki)
 ??  ?? Photo ci-contre :Alexis Tsipras le 19 mai 2014 à Bologne (Italie), à la tribune du mouvement « L’autre Europe avecTsipra­s » créé en Italie pour les élections européenne­s de 2014. Devenu Premier ministre en janvier 2015, le jeune leader du parti radical de gauche Syriza a fini par renoncer à ses promesses de campagne et à mettre en oeuvre la rigueur économique que les Grecs avaient massivemen­t rejetée lors du référendum du 25 juillet 2015, qu’il avait organisé après l’échec d’un round de négociatio­ns avec la Troïka. (© Lorenzo Gaudenzi)Pour aller plus loin• « La crise grecque : regards croisés », journée d’étude sur la crise grecque organisée par DiaNEOsis et le CERI Sciences Po à Paris, le 7 décembre 2016. Travaux accessible­s en ligne : https:// www.sciencespo.fr/ceri/fr/ content/la-crise-grecquereg­ards• Consulter les études et articles de diaNEOsis : www. dianeosis.orgNotes(1) http://www.capital.gr/oikonomia/3206199/elstatprot­ogenes(2) http://www.kathimerin­i.gr/916366/article/ oikonomia/ellhnikh-oikonomia/tte-sto-16-toy-aepkatevai­nei(3) La citation originale serait « On fait campagne en poésie. On gouverne en prose. »[ NdlR].(4) http://www.dianeosis.org/2017/04/greece_poverty_2017/(5) http://www.dianeosis.org/2016/09/greece_demographi­c_crisis/ (6) http://www.kathimerin­i.gr/904118/article/epikairoth­ta/politikh/ sthn-ellada-twn-mnhmoniwn-idry8hkan-panw-apo-60-nea-kommata (7) http://www.dianeosis.org/2017/03/tpe_2017/(8) Dispositif du FMI pour prévenir les crises dans des pays aux fondamenta­ux sains, mais qui présentent encore certaines vulnérabil­ités. Voir : https://www. imf.org/external/np/exr/facts/fre/pclf.htm(9) http://www.dianeosis.org/2016/06/tax_evasion_in_greece/
Photo ci-contre :Alexis Tsipras le 19 mai 2014 à Bologne (Italie), à la tribune du mouvement « L’autre Europe avecTsipra­s » créé en Italie pour les élections européenne­s de 2014. Devenu Premier ministre en janvier 2015, le jeune leader du parti radical de gauche Syriza a fini par renoncer à ses promesses de campagne et à mettre en oeuvre la rigueur économique que les Grecs avaient massivemen­t rejetée lors du référendum du 25 juillet 2015, qu’il avait organisé après l’échec d’un round de négociatio­ns avec la Troïka. (© Lorenzo Gaudenzi)Pour aller plus loin• « La crise grecque : regards croisés », journée d’étude sur la crise grecque organisée par DiaNEOsis et le CERI Sciences Po à Paris, le 7 décembre 2016. Travaux accessible­s en ligne : https:// www.sciencespo.fr/ceri/fr/ content/la-crise-grecquereg­ards• Consulter les études et articles de diaNEOsis : www. dianeosis.orgNotes(1) http://www.capital.gr/oikonomia/3206199/elstatprot­ogenes(2) http://www.kathimerin­i.gr/916366/article/ oikonomia/ellhnikh-oikonomia/tte-sto-16-toy-aepkatevai­nei(3) La citation originale serait « On fait campagne en poésie. On gouverne en prose. »[ NdlR].(4) http://www.dianeosis.org/2017/04/greece_poverty_2017/(5) http://www.dianeosis.org/2016/09/greece_demographi­c_crisis/ (6) http://www.kathimerin­i.gr/904118/article/epikairoth­ta/politikh/ sthn-ellada-twn-mnhmoniwn-idry8hkan-panw-apo-60-nea-kommata (7) http://www.dianeosis.org/2017/03/tpe_2017/(8) Dispositif du FMI pour prévenir les crises dans des pays aux fondamenta­ux sains, mais qui présentent encore certaines vulnérabil­ités. Voir : https://www. imf.org/external/np/exr/facts/fre/pclf.htm(9) http://www.dianeosis.org/2016/06/tax_evasion_in_greece/

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