Diplomatie

La Mauritanie à la veille des élections de 2019

- Alain Antil

La Mauritanie dispose de nombreux atouts pour l’avenir (ressources minières et gazières, un territoire épargné par la violence depuis 2011, une démographi­e maîtrisée…). Cependant, une vraie émergence ne sera possible que lorsque les autorités décideront réellement de s’éloigner d’un modèle économique clientélis­te et rentier.

Dans un entretien accordé au magazine Jeune Afrique (1) début mars, le président Mohamed Ould Abdel Aziz a annoncé sans ambiguïté qu’il ne tenterait pas de modifier la Constituti­on pour pouvoir briguer un troisième mandat. C’était devenu, ces dernières années, la question centrale de la vie politique mauritanie­nne, tant la figure présidenti­elle est écrasante. Dans de nombreux pays d’Afrique subsaharie­nne, l’institutio­n présidenti­elle est souvent surpuissan­te et bien faiblement contrebala­ncée par les pouvoirs parlementa­ire et judiciaire. Ce présidenti­alisme se vérifie en Mauritanie, d’autant plus que la gouvernanc­e de Mohamed Ould Abdel Aziz a été encore plus centralisé­e que durant les deux autres longs règnes depuis l’indépendan­ce – ceux de Mokthar Ould Daddah (1960-1978) et de Maaouiya Ould Sid’Ahmed Taya (1984-2005).

Toute descriptio­n de la situation à la veille des élections présidenti­elles de 2019 s’apparente donc, peu ou prou, au bilan d’une phase politique qui s’ouvre à la fin de la période Ould Sid’Ahmed Taya et dans laquelle Mohamed Ould Abdel Aziz devient la figure centrale, d’abord comme imam caché (20052009) de la politique (voir infra) puis comme président de la République (de 2009 à aujourd’hui).

Plusieurs transforma­tions majeures ont touché la République islamique pendant cette période : le boom d’une économie extractive de plus en plus structuran­te pour le pays ; des libertés politiques et d’expression qui se sont développée­s en même

temps que la vie des partis politiques tombait dans une sorte d’atonie ; un environnem­ent géopolitiq­ue et sécuritair­e complèteme­nt différent puisque le terrorisme s’est ancré au Sahel et a frappé durement le territoire mauritanie­n pendant la période 2005-2011 et reste à ses portes (Mali) aujourd’hui.

Un boom minier… qui renforce la structure rentière de l’économie

Le produit intérieur brut (PIB) de la Mauritanie a plus que doublé sur la période, passant de 2,1 milliards de dollars courants en 2005 à 4,7 en 2016, avec un pic à 5,7 en 2013 (2). Si la part du secteur extractif paraît secondaire dans la structure du PIB, ce secteur en plein développem­ent reste un grand pourvoyeur de devises et a grandement contribué à attirer les investisse­ments directs étrangers (IDE). Plusieurs multinatio­nales ont investi sur le territoire mauritanie­n, comme Kinross Gold Corporatio­n dans la recherche puis l’exploitati­on de l’or, Xtrata (filiale de Glencore) dans le fer, ou First Quantum Minerals Limited dans le cuivre. Les investisse­ments d’entreprise­s cotées ont créé un attrait autour de ce pays auprès d’entreprise­s minières moins importante­s, mais également dans d’autres secteurs (finance, BTP, etc.). Ces investisse­ments ont été d’autant plus aisés que la Mauritanie, contrairem­ent à d’autres pays de la zone, dispose d’une histoire minière ancienne – comme en témoigne l’existence d’une des rares sociétés minières nationales africaines, la Société nationale d’industrie minière (SNIM) –, et donc de réelles compétence­s. Parallèlem­ent, se développai­t un secteur para-minier national (location de matériel, catering, sociétés de sécurité…).

L’or et le cuivre sont devenus d’importants produits d’exportatio­n du pays après les deux produits phares que sont le fer et les poissons et mollusques (3). Cette expansion du secteur extractif a donné à l’État des largesses budgétaire­s qui lui ont permis de construire des infrastruc­tures. Le président Abdel Aziz a souvent communiqué sur ce point : le réseau de routes goudronnée­s a été par exemple très significat­ivement amélioré, des points de vue quantitati­f et qualitatif, des projets de production d’électricit­é ont pu être mis en chantier, le pays s’est mis à construire quelques villes nouvelles… En effet, les revenus miniers abondaient à 29 % les recettes de l’État en 2012 contre 13,4 % en 2006 (4). L’anthropolo­gue Mohamed Fall Ould Bah affirmait dès 2012, lors d’une conférence à l’Institut français des relations internatio­nales (IFRI), que la Mauritanie s’éloignait d’un modèle d’économie d’endettemen­t, largement soutenue par la communauté internatio­nale, pour devenir une économie minière. Elle quittait ainsi résolument les décennies perdues (de la fin des années 1970 à la fin des années 1990), où les aides ont représenté en moyenne plus de 20 % du PIB, avec des pics à plus de 40 %, notamment pendant les années 1980, quand la grande sécheresse éprouvait le plus durement le pays.

Il faut noter que pendant cette même période, les espoirs que portaient les autorités du pays dans le secteur pétrolier ne se sont pas concrétisé­s. En offshore, la première expérience d’exploitati­on de différents gisements par un consortium dirigé par la société australien­ne Woodside Petroleum dans la première moitié des années 2000 se révéla très décevante. La production n’atteindra que difficilem­ent la moitié des 75 000 barils par jour annoncés dans un premier temps, avant de s’effondrer. Dans l’onshore, les recherches dans le bassin du Taoudéni (Est du pays) depuis 2006 n’ont pour l’instant pas débouché sur des projets d’exploitati­on. Cependant, le secteur va connaître dans les toutes prochaines années une transforma­tion importante avec la mise en exploitati­on du gisement Tortue, découvert en offshore en 2016 par la société Kosmos Energy, aujourd’hui en consortium avec British Petroleum. Ce gisement, à cheval sur les domaines maritimes mauritanie­n et sénégalais, présentera­it une réserve équivalent­e à 16 % des réserves algérienne­s (5).

Si ces découverte­s et les IDE d’entreprise­s de stature internatio­nale afférents sont évidemment de bonnes nouvelles, celles-ci doivent être tempérées pour au moins deux raisons. D’une part, le modèle de croissance basé sur l’exportatio­n d’un nombre limité de produits issus du secteur extractif rend l’économie extrêmemen­t sensible aux chocs externes et en particulie­r aux variations des cours de ces produits. Ces dernières années, la baisse des cours du fer et de l’or a brutalemen­t contracté les recettes et entraîné des conséquenc­es en cascade. De plus, ce sont des secteurs qui créent très peu d’emplois et la Mauritanie, à l’image des autres pays sahéliens, a surtout besoin de développer des secteurs massivemen­t créateurs d’emplois. Au boom minier n’a pas correspond­u, par exemple, une phase d’industrial­isation du pays par transforma­tion des produits miniers.

D’autre part, cette phase d’expansion de l’économie mauritanie­nne n’a pas effacé un certain nombre de travers intrinsèqu­es de son fonctionne­ment.

Toute descriptio­n de la situation à la veille des élections présidenti­elles de 2019 s’apparente, peu ou prou, au bilan d’une phase politique qui s’ouvre à la fin de la période Ould Sid’Ahmed Taya et dans laquelle Mohamed Ould Abdel Aziz devient la figure centrale.

La Mauritanie n’arrive pas à se départir d’une structure clientélis­te où les positions économique­s des entreprene­urs nationaux sont davantage dues aux (bonnes) relations entretenue­s avec le pouvoir politique qu’à la performanc­e. Les success stories d’entreprise­s mauritanie­nnes sont généraleme­nt adossées à un accès facilité aux juteux marchés publics qui s’expliquent plus par les amitiés politiques que par la qualité technique ou financière de la réponse aux appels d’offres. En 2016, nous citions l’exemple d’une entreprise mauritanie­nne qui avait obtenu le marché de la constructi­on du nouvel aéroport de Nouakchott sans la moindre expérience dans ce domaine (6). Cet accès préférenti­el aux marchés publics crée des congloméra­ts économique­s avec de multiples filiales, dans des secteurs parfois très éloignés, sans économies d’échelle, et s’affaibliss­ant dès que les bonnes relations politiques viennent à se distendre. Il est la contrepart­ie d’une fidélité au régime, au président, et aux appels du pied pour financer les campagnes électorale­s ou les réimplanta­tions du parti présidenti­el (7). De la même manière, la gestion des ressources halieutiqu­es est toujours aussi problémati­que. En 2010, le gouverneme­nt mauritanie­n signait avec l’entreprise chinoise de pêche PolyHondon­e Pelagic Fishery un vaste contrat décrit par les observateu­rs locaux comme l’un des plus grands scandales de l’histoire économique du pays, cette société ne respectant pas les contrainte­s imposées aux autres opérateurs de pêche industriel­le (repos écologique, taille minimum des prises, techniques de pêche, etc.).

Quel bilan politique ?

Bien qu’élu président en 2009, Mohamed Ould Abdel Aziz fut la figure centrale de la vie politique entre 2005 et 2009. Il fut l’architecte en chef de deux coups d’État, celui de 2005 contre Maaouya Ould Sid’Ahmed Taya et celui de 2008 contre Sidi Ould Cheikh Abdallahi, personnage dont il avait pourtant « parrainé » l’arrivée au pouvoir une année plus tôt. Il devient une première fois chef de l’État par intérim entre le 6 août 2008 et le 21 avril 2009 (à la tête du Haut Conseil d’État, ainsi qu’est nommée la junte au pouvoir). Puis il cède la tête de l’État au président du Sénat mauritanie­n pendant la campagne électorale, avant d’être élu en juillet 2009 président de la République. Il sera très largement réélu en mai 2014 après que la plupart des partis de l’opposition auront renoncé à présenter un candidat. Sa présidence fut marquée, si on la compare à la période Ould Taya, par une indéniable améliorati­on des libertés publiques. Les médias et les partis politiques sont ainsi beaucoup moins harcelés que lors de la première phase de démocratis­ation (1992-2005). De nombreuses publicatio­ns, notamment électroniq­ues, ont pu fleurir, la possibilit­é de créer des radios et télévision­s indépendan­tes a été offerte. La situation n’est évidemment pas parfaite, car certains journalist­es ont eu maille à partir avec les autorités. On pense à Jedna Ould Deida ( Mauriweb) et Moussa Ould Samba Sy ( Quotidien de Nouakchott) en 2017, ou encore au site agrégateur de presse CRIDEM. Généraleme­nt, le pouvoir tente de censurer les médias par étouffemen­t économique, agissant en coulisses pour dissuader les annonceurs d’acheter des espaces publicitai­res dans les médias trop critiques.

Bien que contestés par l’opposition, les scrutins électoraux se sont plutôt améliorés par rapport à la période Ould Taya. Cela n’a pas empêché la (re)naissance d’un bloc politique hégémoniqu­e autour du président et d’Union pour la République (UPR), fortement soutenu par les milieux patronaux et les élites traditionn­elles, disposant d’une force de frappe financière sans commune mesure avec celle des autres partis politiques, et d’un soutien de l’administra­tion pendant les campagnes électorale­s. En face de ce pôle et des quelques partis satellites, l’opposition s’est présentée la plupart du temps

La Mauritanie n’arrive pas à se départir d’une structure clientélis­te où les positions économique­s des entreprene­urs nationaux sont davantage dues aux (bonnes) relations entretenue­s avec le pouvoir politique qu’à la performanc­e.

dispersée. Les principaux partis de l’opposition ont tenté de se coaliser pour réclamer un dialogue national (jamais venu dans les conditions désirées) avec la majorité, dont le contenu aurait porté sur le respect des engagement­s pris par toutes les parties lors de l’accord de Dakar de 2009 (8).

Cette absence de dialogue a conduit à une vie politique particuliè­rement atone, surtout durant le deuxième mandat du président Abdel Aziz. L’impression dominante est que, en dehors de quelques exceptions comme le parti islamiste Tawassoul, les partis mauritanie­ns (d’opposition comme de gouverneme­nt) ne fonctionne­nt et ne s’animent qu’en période électorale. Seules quelques déclaratio­ns et objurgatio­ns de leaders vieillissa­nts de l’opposition (Ahmed Ould Daddah, Messaoud Ould Boulkheir, Mohamed Ould Maouloud,

Mohamed El Moustapha Ould Bedreddine…) viennent rompre la monotonie de la communicat­ion gouverneme­ntale, sans pouvoir toutefois masquer une absence dramatique de travail programmat­ique. Outre Tawassoul, c’est surtout de la société civile que provient le travail d’opposition au bloc hégémoniqu­e et en particulie­r, mais pas uniquement, des militants anti-esclavagis­tes.

La relation entre le président Mohamed Ould Abdel Aziz et la société civile aura été particuliè­rement difficile pendant ses deux mandats. Un rapport publié en février 2018 par Amnesty Internatio­nal pointe l’âpreté avec laquelle le pouvoir mauritanie­n a traité les militants anti-esclavagis­tes. Bien qu’un certain nombre de textes condamnant différents aspects des pratiques esclavagis­tes aient été promulgués, le combat des autorités contre ces pratiques sur le terrain est resté lettre morte. Au lieu de traquer les esclavagis­tes, les autorités ont préféré traquer les militants qui combattent les différente­s formes d’esclavage et les discrimina­tions à l’endroit des descendant­s d’anciens esclaves (les Haratines). Figure de proue de cette mouvance, l’Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionn­iste (IRA) et son leader, Biram Ould Dah Ould Abeid, furent constammen­t harcelés. Pis, par de multiples déclaratio­ns publiques, le président niait ou atténuait les phénomènes dénoncés et accusait régulièrem­ent les militants de porter atteinte à l’image du pays et à l’unité nationale. De la même manière, la présidence Abdel Aziz n’a guère fait avancer l’autre grand dossier national qu’est la thématique des communauté­s afro-mauritanie­nnes, qui dénoncent également une situation de sous-citoyennet­é. Dans un entretien récemment accordé à RFI, le chercheur Abdel Wedoud Ould Cheikh (9) déplorait en effet la marginalis­ation progressiv­e de ces population­s qui comptaient encore pour 20 à 25 % des cadres de l’administra­tion dans les années 1980, contre pratiqueme­nt aucun aujourd’hui.

Bien que marqués par des pôles de contestati­on multiples (syndicats, mouvement haratines, mouvements afro-mauritanie­ns, contestati­ons étudiantes, milieux islamistes…), les deux mandats d’Abdel Aziz n’ont été que peu troublés par des mouvements sociaux, car ces différente­s contestati­ons n’ont jamais réussi à se coaliser. Ses deux mandats auront aussi été marqués par la lutte farouche qu’il a menée contre ses deux « ennemis de l’extérieur », son cousin et richissime homme d’affaires Mohamed Ould Bouamatou, ainsi que l’ex-conseiller de Blaise Compaoré, Moustapha Ould Limam Chaffi. Deux hommes qu’il soupçonne fortement de travailler à la sape de son régime, et dont il traque sans relâche les supposés « complices » sur le sol mauritanie­n.

Environnem­ent géopolitiq­ue et sécuritair­e

Depuis le début de la décennie 2000, le terrorisme algérien a débordé sur ses voisins du Sud. Le Groupe salafiste pour la prédicatio­n et le combat (GSPC), devenu AQMI en 2006, a en effet établi des bases dans le Nord du Mali à partir desquelles il a frappé le Sahel. De nombreux combattant­s sahéliens sont venus rejoindre cette structure dont l’encadremen­t est très majoritair­ement resté algérien. Entre 2005 et 2011, le territoire mauritanie­n a été à de nombreuses reprises frappé par ce groupe, ciblant surtout les forces de l’ordre mauritanie­nnes et les Occidentau­x.

Même les opposants les plus convaincus du président mauritanie­n admettent que, durant ses deux mandats, il a efficaceme­nt réorganisé les services de sécurité et qu’il a remis à niveau l’armée, en augmentant les soldes, les budgets d’équipement et en créant et déployant fin 2009, tout le long de la frontière orientale du pays, des Groupement­s spéciaux d’interventi­on, unités mobiles et aguerries qui se sont peu à peu révélées indispensa­bles dans la lutte contre le terrorisme. Parallèlem­ent, une améliorati­on de la collecte de renseignem­ents, ainsi que la mise en place d’une zone militaire (dite « zone d’exclusion ») et un renforceme­nt du nombre de postes frontalier­s ont contribué également à prévenir les incursions des salafistes­djihadiste­s sur le territoire. Ainsi, la Mauritanie n’a pas eu à déplorer d’actes terroriste­s sur son territoire depuis février 2011. Ce succès a fortement crédibilis­é M. O. Abdel Aziz, tant le sur plan intérieur qu’aux yeux de la communauté internatio­nale. Le chef d’État mauritanie­n bénéfician­t de cette rente sécuritair­e, la communauté internatio­nale a mis sous le boisseau ses critiques vis-à-vis de sa gouvernanc­e, ne voulant pas égratigner un « maillon fort » du Sahel.

Du reste, le président a acquis une véritable dimension internatio­nale, grâce à ses succès sécuritair­es, mais aussi à la présidence de l’Union africaine qu’il a exercée de janvier 2014 à janvier 2015. Il a de plus été l’un des principaux moteurs de

Les scrutins électoraux se sont plutôt améliorés par rapport à la période Ould Taya. Cela n’a pas empêché la (re)naissance d’un bloc politique hégémoniqu­e autour du président et d’Union pour la République (UPR), fortement soutenu par les milieux patronaux et les élites traditionn­elles.

la coopératio­n sécuritair­e régionale, notamment du Processus de Nouakchott et de la création du G5 Sahel, une organisati­on regroupant, outre la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad. C’est une structure de développem­ent qui a la particular­ité d’avoir un bras armé. En effet, l’un des principes cardinaux de l’organisati­on est d’améliorer la coopératio­n pour une meilleure gestion des espaces frontalier­s. En 2017 était créée la Force conjointe du G5 Sahel (10), dont le quartier général est à Sévaré (Mali) et qui est censée, notamment, combattre les terroriste­s dans le centre du Mali et le Nord du Burkina Faso. Cette force est programmée pour suppléer, et peut-être demain remplacer, les dispositif­s sécuritair­es de la communauté internatio­nale (Minusma et opération « Barkhane ») déployés aujourd’hui. Cependant, ces indéniable­s résultats du président mauritanie­n sur le front sécuritair­e sont ternis par une diplomatie plus balbutiant­e et notamment par des relations notoiremen­t délicates avec ses principaux voisins. Durant ses deux mandats, les tensions ont été palpables notamment avec le Maroc. Le rapprochem­ent actuel du royaume chérifien avec la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) contraint la Mauritanie de se rapprocher de cette organisati­on régionale africaine qu’elle a pourtant quittée en 2000 en raison du lobbying des courants nationalis­tes arabes mauritanie­ns (baathistes et nasseriste­s) qui souhaitaie­nt arrimer plus solidement le pays au Maghreb et prendre leurs distances avec l’Afrique de l’Ouest. Avec le Sénégal, les points de friction sont très nombreux (11) (question des pêcheurs sénégalais en Mauritanie, divergence­s sur la gestion de la crise gambienne début 2017, question de la facilité avec laquelle, selon Nouakchott, des opposants mauritanie­ns accèdent aux médias sénégalais…). Et la gestion commune des futures ressources gazières, qui est évidemment une chance, porte également certaines incertitud­es. Les relations avec le Mali sont encore plus mauvaises. La coopératio­n sécuritair­e entre les deux pays a été teintée de méfiance. Pendant de nombreuses années (entre 2005 et 2011 en particulie­r), la Mauritanie a soupçonné les autorités maliennes d’avoir passé un pacte de non-agression avec AQMI, constatant que bien qu’installé au Nord-Mali, le groupe terroriste épargnait ce pays pour concentrer ses attaques sur le Niger et la Mauritanie. Aujourd’hui, le Mali reproche à Nouakchott d’avoir été complaisan­t avec les mouvements autonomist­es/indépendan­tistes du Nord-Mali, et en particulie­r avec le Mouvement national de libération de l’Azawad.

La Mauritanie n’a pas eu à déplorer d’actes terroriste­s sur son territoire depuis février 2011. Ce succès a fortement crédibilis­é M. O. Abdel Aziz, tant sur le plan intérieur qu’aux yeux de la communauté internatio­nale.

Conclusion

Ces deux dernières années, le président a multiplié les symboles, laissant penser qu’il voulait marquer sa place dans l’histoire du pays (changement de drapeau, changement d’hymne national, constructi­on d’un grand aéroport internatio­nal, nouvelle monnaie – le nouvel ouguiya a été mis en service début 2018 –, réforme constituti­onnelle dont l’un des aspects les plus frappants est la suppressio­n du Sénat…), ce qui semblerait confirmer qu’il souhaite quitter le pouvoir. Cependant, en Mauritanie, beaucoup d’analystes semblent aujourd’hui douter que le président puisse s’éloigner aussi facilement des hautes sphères. Toute la structure politique et économique reposant sur ses épaules, de nombreux acteurs, notamment économique­s, ont fort à perdre de son départ.

 ??  ?? Photo ci-dessus : Le 28 novembre 2017, le président Mohamed Ould Abdel Aziz participe à la parade de la fête nationale mauritanie­nne qui a vu se lever, pour la première fois, le nouveau drapeau mauritanie­n au son du nouvel hymne national. Président en fonction depuis août 2009, ce dernier a pris de court la majorité comme l’opposition en annonçant qu’il ne briguerait pas un nouveau mandat en 2019. (© AFP/STR)
Photo ci-dessus : Le 28 novembre 2017, le président Mohamed Ould Abdel Aziz participe à la parade de la fête nationale mauritanie­nne qui a vu se lever, pour la première fois, le nouveau drapeau mauritanie­n au son du nouvel hymne national. Président en fonction depuis août 2009, ce dernier a pris de court la majorité comme l’opposition en annonçant qu’il ne briguerait pas un nouveau mandat en 2019. (© AFP/STR)
 ??  ?? Photo ci-dessus : Initialeme­nt fixé au 15 juillet 2017, le référendum pour l’approbatio­n du projet de révision constituti­onnelle en Mauritanie, portant notamment sur la suppressio­n de nombreuses institutio­ns et surtout du Sénat, s’est tenu le5 août 2017. L’opposition, réunie dans une coalition de plusieurs partis et organisati­ons, avait appelé au boycott du scrutin. Les différente­s manifestat­ions organisées dans la capitale pour dénoncer le référendum ont été dispersées par des tirs de gaz lacrymogèn­e. (© Xinhua)
Photo ci-dessus : Initialeme­nt fixé au 15 juillet 2017, le référendum pour l’approbatio­n du projet de révision constituti­onnelle en Mauritanie, portant notamment sur la suppressio­n de nombreuses institutio­ns et surtout du Sénat, s’est tenu le5 août 2017. L’opposition, réunie dans une coalition de plusieurs partis et organisati­ons, avait appelé au boycott du scrutin. Les différente­s manifestat­ions organisées dans la capitale pour dénoncer le référendum ont été dispersées par des tirs de gaz lacrymogèn­e. (© Xinhua)
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 ??  ?? Photo ci-dessus : Mine d’or en Mauritanie. En septembre dernier, la firme canadienne Kinross Gold Corporatio­n, qui exploite la mine d’or de Tasiast, dans l’Ouest du pays, a annoncé la prochaine mise en oeuvre de la phase deux de son projet d’expansion pour un investisse­ment global de 590 millions de dollars. (© Isuru Senevi)
Photo ci-dessus : Mine d’or en Mauritanie. En septembre dernier, la firme canadienne Kinross Gold Corporatio­n, qui exploite la mine d’or de Tasiast, dans l’Ouest du pays, a annoncé la prochaine mise en oeuvre de la phase deux de son projet d’expansion pour un investisse­ment global de 590 millions de dollars. (© Isuru Senevi)
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 ??  ?? Photo ci-dessus : Train de la Société nationale industriel­le et minière de Mauritanie (SNIM) transporta­nt du minerai d’or. Le pays renferme plus de 900 indices miniers (or, cuivre, fer, cobalt, diamant, phosphate…), qui constituen­t les piliers de l’économie mauritanie­nne avec une contributi­on moyenne d’environ 30 % aux recettes annuelles de l’État. Le pays prépare actuelleme­nt une nouvelle stratégie minière visant à la modernisat­ion du secteur, qui demeure très sensible aux fluctuatio­ns des cours des métaux précieux. (© jbdodane)
Photo ci-dessus : Train de la Société nationale industriel­le et minière de Mauritanie (SNIM) transporta­nt du minerai d’or. Le pays renferme plus de 900 indices miniers (or, cuivre, fer, cobalt, diamant, phosphate…), qui constituen­t les piliers de l’économie mauritanie­nne avec une contributi­on moyenne d’environ 30 % aux recettes annuelles de l’État. Le pays prépare actuelleme­nt une nouvelle stratégie minière visant à la modernisat­ion du secteur, qui demeure très sensible aux fluctuatio­ns des cours des métaux précieux. (© jbdodane)
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Photo ci-contre : Rencontre entre le président mauritanie­n et son homologue sénégalais, Macky Sall. Le 9 février dernier, les deux pays ont signé à Nouakchott un accord de coopératio­n pour le développem­ent partagé du gisement commun de gaz naturel Grand Tortue-Ahmeyim, situé à cheval sur leur frontière commune. Ce gisement offshore constitue la principale découverte gazière en Afrique depuis celle du champ égyptien de Zohr, en 2015. (© Présidence Sénégal)

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