– PORTFOLIO L’accord de pêche UE-Maroc au coeur d’une bataille juridique sur le Sahara occidental
Le conflit sur la souveraineté du Sahara occidental qui oppose le Royaume du Maroc aux indépendantistes du Front Polisario (lire p. 12-16) ne s’arrête pas aux terres. Il s’étend également aux eaux adjacentes à ce territoire, réputées riches en ressources halieutiques. Signe du déplacement du conflit dans le champ juridique, les eaux territoriales sahraouies ont ainsi été, en 2018, l’objet d’une bataille de procédures, dans le cadre de la renégociation du partenariat dans le secteur de la pêche (APP) entre le Maroc et l’Union européenne (UE). Contesté devant un tribunal britannique par la Western Sahara Campaign (WSC), une ONG qui promeut la reconnaissance du droit à l’autodétermination du peuple sahraoui, une première mouture de l’accord avait fait l’objet d’un arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) en février 2018. Ce dernier limitait la portée de l’accord aux eaux sous souveraineté marocaine effective, desquelles il excluait donc les eaux adjacentes au territoire du Sahara occidental, qui n’avaient pas fait l’objet d’une mention explicite. Après des mois de négociations difficiles, le Maroc ayant menacé non seulement de renoncer à l’accord, mais aussi de relâcher ses efforts en matière de contrôle des flux d’immigration clandestines vers l’Europe, une nouvelle version du texte – incluant cette fois explicitement les eaux du Sahara occidental – a finalement été paraphée par Bruxelles et Rabat. Le texte validé permet ainsi à des navires de l’Union européenne d’avoir accès aux zones de pêche du Maroc, en échange notamment d’une redevance annuelle de plus de 16 millions d’euros, d’un soutien au secteur marocain de la pêche hauturière d’environ 14 millions et d’une imposition des armateurs européens évaluée à 10 millions.
Mais l’affaire n’est sans doute pas terminée : alors que les procédures d’approbation par le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne étaient toujours en cours fin 2018, le Front Polisario a affirmé qu’il mènerait de nouvelles actions en justice.