Diplomatie

– ANALYSE L’accord « historique » sur la mer Caspienne, symbole d’un recul iranien ?

- Clément Therme

L’accord « historique » entre les pays riverains de la mer Caspienne fixant un cadre juridique pour la plus grande étendue d’eau enclavée au monde fait polémique en Iran, où il est perçu comme une nouvelle « satellisat­ion » du pays par la Russie et un accord contraire aux intérêts nationaux iraniens.

Le 12 août 2018, les cinq pays riverains de la Caspienne – Russie, Iran, Kazakhstan, Turkménist­an et Azerbaïdja­n – ont signé une nouvelle convention portant sur le statut juridique de la mer à Aktaw, au Kazakhstan. Ce document juridique, intitulé « Convention sur le statut légal de la mer Caspienne », est destiné à mettre un terme à un quart de siècle d’incertitud­es juridiques sur la définition légale de cet espace maritime. S’agit-il d’un lac ou d’une mer ? De la réponse à cette question dépendait le partage des ressources, des territoire­s et des fonds marins de la mer Caspienne. Les signataire­s ont choisi de ne pas trancher : dans le texte, la « mer Caspienne » n’est ni un lac, ni une mer (qui ont tous deux un statut spécial en droit internatio­nal), mais un « corps liquide » (article 1) (1).

Les termes du partage

L’accord ne met pas fin à toutes les disputes concernant cette mer fermée, car il fournit plus des pistes de travail que des solutions définitive­s et exhaustive­s. Il fixe néanmoins un certain nombre de points qui devraient contribuer à apaiser les tensions existant dans la région depuis la chute de l’Union soviétique et l’émergence de trois nouveaux État riverains (Azerbaïdja­n, Kazakhstan, Turkménist­an) remettant en cause les accords bilatéraux précédents entre l’Iran et l’URSS.

Cette « Convention » prévoit ainsi la définition d’eaux territoria­les (sur lesquelles s’étend la souveraine­té de l’État côtier) fonction de la longueur de côte de chaque État, et s’étendant à 15 milles nautiques maximum (27,8 km) à l’intérieur de la mer. À cela viendrait s’ajouter une zone adjacente de pêche de 10 milles nautiques (18,5 km) supplément­aires. En revanche, la Convention ne fixe pas de règles pour l’exploitati­on des ressources offshore en hydrocarbu­res qui sont déjà établies pour la partie nord de la mer mais qui restent à construire au sud. Le reste de la Caspienne, la plus grande partie, est préservé en tant que zone commune.

Ce découpage préfigure ainsi le partage des ressources économique­s de cette étendue d’eau. L’enjeu est de taille car la mer Caspienne recèle, selon les estimation­s, près de 50 milliards de barils de pétrole et 300 000 milliards de mètres cubes de gaz bien que son extraction soit compliquée, en particulie­r dans la partie sud de la mer qui est la plus profonde. De plus, l’Iran et la Russie insistent sur la dimension géopolitiq­ue du document, avec le rejet de la présence militaire d’acteurs étatiques externes à la zone, ce qui est un message à l’OTAN et aux puissances occidental­es pour Téhéran et Moscou (2). Pour l’Iran, les États-Unis et les autres membres de l’OTAN ourdiraien­t même des complots pour maintenir une présence militaire dans les eaux de la mer Caspienne et ce, afin de briser le monopole de l’influence russe dans son « étranger proche ». Il y a certes des relations militaires entre le Kazakhstan et les États-Unis ou des coopératio­ns entre l’Azerbaïdja­n et Israël en matière de défense, mais il semble pour le moins exagéré de présenter la Convention comme un rempart contre une menace militaire occidental­e imminente. Les autorités iraniennes insistent aussi sur le fait que tout navire souhaitant circuler sur la Caspienne devra battre pavillon de l’un des cinq pays riverains, ce qui est un gage, selon cette perspectiv­e, d’une plus grande sécurité en mer Caspienne. Le président Rohani estime que, selon cet accord, les navires iraniens sont autorisés à circuler dans toute la mer Caspienne (article 3, point 8) et la République islamique pourra développer des structures portuaires, touristiqu­es et économique­s grâce à ce texte. La portée de l’accord reste néanmoins limitée puisque seulement 30 % des problèmes ont été résolus, selon les autorités iraniennes (3).

Les racines historique­s de la méfiance iranienne envers la Russie

En Iran, de nombreuses voix de la société civile et des factions politiques opposées au président Rohani ont dénoncé cet accord conçu pour satisfaire les exigences russes, alors que la politique américaine d’opposition à la République islamique conduit les autorités iraniennes à se rapprocher des puissances internatio­nales non occidental­es comme la Russie.

Les critiques de l’accord estiment que la Convention, signée après plus de vingt ans d’incertitud­es, ne correspond pas aux aspiration­s profondes de l’opinion publique iranienne quant au rôle de l’Iran dans cet espace. Le texte définit en effet les eaux territoria­les et la zone de pêche exclusive en fonction de la longueur des côtes de chaque pays. Or l’Iran a les côtes les plus courtes parmi les cinq pays riverains. En conséquenc­e, le principe même choisi par la Convention contrevien­t, pour beaucoup d’Iraniens, aux intérêts nationaux.

Ce rejet de la Convention d’Aktaw s’inscrit dans le cadre plus large d’une dénonciati­on populaire visant l’incapacité des dirigeants religieux de la République islamique à défendre les intérêts nationaux. Pour une partie des Iraniens, la Convention d’Aktaw est même comparable au traité de Turkmentch­aï, considéré par les nationalis­tes comme une humiliatio­n pour avoir conduit à la perte des territoire­s iraniens autour de la Caspienne. Signé à l’issue de la guerre russo-perse (1826-1828), ce texte consacre en effet la perte des territoire­s caucasiens de la Perse. Il fixe la frontière entre la Russie et la Perse sur la rivière Araxe, un tracé qui demeure grosso modo inchangé depuis lors. De plus, la plupart des clauses du traité sont en défaveur de l’Iran. Elles lui imposent le paiement d’une indemnité de 20 millions de roubles, la mise en place d’un système de droits de capitulati­on, le rapatrieme­nt de l’ensemble des prisonnier­s de guerre russes capturés en Iran et privent l’Iran du droit de faire naviguer sa flotte sur la mer Caspienne. Si les avantages obtenus par la Russie lors de la conclusion de ce traité sont nombreux, il n’en reste pas moins que sa mise en oeuvre aura été compliquée à la fois par le sentiment d’humiliatio­n des Perses eu égard aux réparation­s financière­s exigées par la Russie et à la perte de nombreux territoire­s caucasiens, mais aussi, par le nouveau contexte politique. En effet, la Russie s’est engagée, un an après avoir conclu la

La portée de l’accord reste limitée puisque seulement 30 % des problèmes ont été résolus, selon les autorités iraniennes.

paix avec la Perse, en 1829, dans une nouvelle guerre contre l’Empire ottoman. La même année, l’attaque de l’ambassade de Russie à Téhéran, par une foule de plusieurs milliers de personnes, se termine par l’assassinat des 44 membres de la mission diplomatiq­ue russe à Téhéran. On comprend aisément comment ce texte a pu nourrir l’image négative de la Russie dans l’imaginaire nationalis­te iranien.

Quelle part de la mer Caspienne pour Téhéran ?

Les critiques du gouverneme­nt Rohani se fondent sur un autre mythe nationalis­te selon lequel l’Iran devrait contrôler 50 % de la mer Caspienne, toute déviation de l’objectif d’un partage à part égale entre les cinq pays riverains de la mer Caspienne étant alors considérée comme une atteinte aux intérêts nationaux. La sensibilit­é de l’opinion publique à propos de cette question s’explique notamment par l’attachemen­t des Iraniens à cette région, qui est l’un des principaux lieux de villégiatu­re du pays.

Il y a trois conception­s de l’étendue de la souveraine­té de l’Iran sur la mer Caspienne dans le pays. D’abord, le premier groupe, que l’on peut qualifier de « maximalist­e », estime que l’Iran a droit à 50 % de la mer. L’argument juridique des tenants de cette approche se fonde sur la base du traité d’amitié irano-soviétique de 1921 et de l’accord de commerce et

Pour une partie des Iraniens, la Convention d’Aktaw est même comparable au traité de Turkmentch­aï, considéré par les nationalis­tes comme une humiliatio­n.

de navigation de 1940, mais aussi de la déclaratio­n d’Almaty de 1991 par laquelle les États nouvelleme­nt indépendan­ts se sont engagés à respecter les obligation­s juridiques de l’Union soviétique. Ces accords bilatéraux consacraie­nt un partage de la mer entre l’Iran et l’URSS. Par ailleurs, la principale faiblesse de ce point de vue juridique insistant sur la continuité réside dans son inapplicat­ion car, en 1940, il n’était pas possible techniquem­ent d’exploiter les ressources en hydrocarbu­res offshore. Par conséquent, ce traité n’apporte pas d’éléments juridiques pouvant résoudre les différends entre les États riverains.

Le second groupe, qui défend un point de vue « minimalist­e », est sans doute le plus réaliste compte tenu des rapports de force entre les pays riverains. Il estime que la souveraine­té de l’Iran ne peut s’exercer qu’en deçà d’une ligne « imaginaire » de démarcatio­n héritée de l’époque soviétique entre Astara (à la frontière avec l’Azerbaïdja­n) et Hussein Qoli. En effet, malgré les dispositio­ns des traités irano-soviétique­s, en pratique, la souveraine­té iranienne ne s’est jamais exercée au-delà de cette ligne de démarcatio­n reconnue de manière informelle par les dirigeants iraniens et soviétique­s. En décembre 2007, le ministre des Affaires étrangères d’Ahmadineja­d, Manouchehr Mottaki, fait partie de ce deuxième groupe puisqu’il estime de manière implicite que la part de l’Iran équivaut à 11,3 % de la superficie totale de la mer (en acceptant le fait historique suivant : l’Iran n’en a jamais exploité plus) (4), ce qui correspond à l’espace situé entre cette ligne et les côtes iraniennes. Cette position diplomatiq­ue est alors vivement critiquée dans la presse réformiste, le ministre des Affaires étrangères a été mis en accusation par le Parlement et a finalement dû revenir sur ses déclaratio­ns, pour préciser que l’Iran revendiqua­it malgré tout une part de 20 % de la mer Caspienne.

Enfin, le troisième groupe juge que la solution optimale est celle de l’instaurati­on d’un régime de condominiu­m (5) associé à un partage équitable en zones de souveraine­té exclusive de la mer, ce qui offrirait une part de 20 % à chaque État riverain. C’est la position défendue par le ministre des Affaires étrangères actuel, Mohammad Javad Zarif, qui estime que l’Iran n’a jamais possédé 50 % de cette mer mais qu’il est impensable que le pays se contente de 11 % (6). Pour l’instant, l’Iran cherche donc à garantir le contrôle de 20 % de l’étendue d’eau, alors que les négociatio­ns au sujet du partage des fonds marins et des ressources sous-marines sont toujours en cours. Ce discours à usage interne du gouverneme­nt iranien à la suite de la signature de la Convention en août 2018 n’augure pas d’une ratificati­on aisée par le majles, le parlement iranien. En effet, l’opinion publique reste nationalis­te et souhaite que la part de

l’Iran soit plus importante : un facteur qui jouera dans le vote des parlementa­ires.

Ainsi, compte tenu de la sensibilit­é de l’opinion publique iranienne sur la question du partage de la mer Caspienne, les autorités iraniennes sont dans l’obligation de trouver un compromis avec les États riverains qui tienne compte de l’intérêt national. Il s’agit d’une question touchant à la fois à l’imaginaire collectif et à la fibre nationalis­te de la population. Cet aspect est significat­if puisque dans le débat politique interne à l’Iran sur ce dossier, la ferveur populaire contre l’État théocratiq­ue semble conduire à une opinion négative majoritair­e sur cette Convention.

L’ampleur des concession­s faites à la Russie

Pour les autorités iraniennes, les concession­s iraniennes ayant permis la signature de la Convention d’Aktaw sont à mesurer à l’aune du compromis consenti par la Russie. En effet, comme l’Iran, la Russie revendiqua­it 50 % de la mer Caspienne. Or, avec la nouvelle Convention, la Russie a accepté de n’en contrôler que 17 %. Mais les opposants iraniens ont dénoncé sur les réseaux sociaux ce qu’ils considèren­t comme des concession­s importante­s destinées à obtenir le soutien russe face aux sanctions économique­s américaine­s, remises en place par l’administra­tion Trump entre les mois d’août et de novembre 2018 (7). En 1994, Moscou et Téhéran s’étaient accordés pour adopter une position commune sur le principe du condominiu­m. C’était pour Moscou le moyen de disposer d’un droit de véto sur les projets gaziers et pétroliers dans les zones de la mer Caspienne sous contrôle kazakh et azéri car le régime de condominiu­m exigeait un consensus préalable de l’ensemble des États riverains au lancement de nouveaux projets de développem­ent des réserves offshore en hydrocarbu­res. Cela permettait également de s’opposer au projet de pipelines TransCaspi­an défendu par les Occidentau­x et qui visait à contourner à la fois les territoire­s russe et iranien. Pendant sa présidence, Mohammad Khatami (1997-2005) s’était ainsi efforcé d’approfondi­r la coopératio­n avec la Russie dans ce domaine, soutenant que l’itinéraire le plus économique pour exporter le pétrole de la Caspienne est celui qui traverse le territoire iranien. Mais ces zones du Nord de la Caspienne destinées à Moscou, Astana et Bakou sont celles qui recèlent la majorité des réserves en hydrocarbu­res de la mer. Face au blocage diplomatiq­ue d’Astana et de Bakou, difficilem­ent surmontabl­e, Moscou a changé de posture, abandonnan­t sa position commune avec l’Iran pour se rapprocher des positions kazakhe et azérie, renforçant par là même l’isolement diplomatiq­ue de Téhéran sur cette question. La Russie a officialis­é son virage en signant des accords bilatéraux avec Astana (1998) et Bakou (2001) qui acceptent de facto le partage des ressources maritimes en zones économique­s exclusives dont la superficie correspond à la longueur des côtes… Une situation entérinée par la nouvelle Convention.

Dans la partie sud de la mer, des différends persistent entre Téhéran, Bakou et Achgabat, alors même qu’il n’y a pas de réserves significat­ives en hydrocarbu­res dans la zone iranienne de 11,3 ou 13 % selon les calculs. La revendicat­ion iranienne pour une zone de 20 % impliquera­it des territoire­s maritimes disputés qui ont vu des rencontres entre des navires d’exploratio­ns azerbaïdja­nais et des navires iraniens (8).

L’« affaire de la mer Caspienne » fait polémique en Iran

Les opposants au gouverneme­nt l’accusent donc, avec la Convention d’Aktaw, « d’avoir vendu la part de la Caspienne détenue par l’Iran à la Russie » (9). Le journal réformateu­r Etemaad – pro-gouverneme­ntal – titre en une : « La Caspienne, victime du manque de confiance à l’égard des médias [nationaux] » et déplore dans ses articles « la démagogie médiatique » qui donne cours à des rumeurs sur des questions techniques comme la répartitio­n en zones nationales de la mer Caspienne. Etemaad estime également que « l’affaire de la mer Caspienne » [les rumeurs déplorant la perte infligée à l’Iran] est le résultat d’un « journalism­e d’amateur et des relations publiques passives [de la part du gouverneme­nt] ». Cette affaire survenue après la signature de la Convention de la mer Caspienne montre, pour les soutiens au gouverneme­nt iranien, que les médias n’ont pas les connaissan­ces nécessaire­s pour informer la population des enjeux politiques et juridiques réels du dossier. La deuxième raison qui explique ces rumeurs est, selon cette perspectiv­e, la publicatio­n inattendue de la nouvelle de l’accord, alors que personne ne l’avait annoncée jusque-là. Aucune autorité n’avait communiqué sur les détails de la Convention. Le rôle des réseaux sociaux et des acteurs non gouverneme­ntaux est mis en avant pour expliquer la polémique liée selon les médias

L’Iran cherche à garantir le contrôle de 20 % de l’étendue d’eau, alors que les négociatio­ns au sujet du partage des fonds marins et des ressources sous-marines sont toujours en cours.

pro-gouverneme­ntaux à un déficit de pédagogie dans la communicat­ion institutio­nnelle (10).

Cette défiance vis-à-vis du gouverneme­nt sur la question Caspienne s’explique en partie par ce que les médias officiels ont appelé « l’affaire Rajab Safarov », du nom d’un expert russe ayant affirmé sur la chaîne BBC Persian que, dès le début des négociatio­ns en 1996, la Russie s’attendait à ce que l’Iran exige pour lui 50 % de la Caspienne, l’autre moitié étant partagée entre les quatre pays de l’ancienne Union soviétique. Mais la propositio­n par l’Iran d’un partage équitable (20 % pour chaque pays) a surpris et a été favorablem­ent accueillie par les autres parties. Ces propos ont été rejetés par les autorités iraniennes mais ils ont alimenté la rhétorique antigouver­nementale des opposants iraniens à la nouvelle convention juridique. Ainsi, les négociatio­ns juridiques sur la Caspienne et le débat politique en Iran montrent que même les régimes autoritair­es comme la République islamique doivent tenir compte des préférence­s de leur opinion publique dans leur prise de décision diplomatiq­ue.

Plus largement, la quête d’indépendan­ce de la République islamique se heurte à cette nouvelle dépendance vis-à-vis de la Russie dénoncée par ses opposants. En effet, c’est bien l’effacement de Téhéran face aux intérêts russes dans l’ancien espace soviétique qui est à l’origine de la mise en oeuvre d’un partenaria­t régional. Même si les fondements de cette entente vont au-delà des questions caspiennes, force est de constater que lorsque des intérêts divergents se font jour comme sur la question du partage de la mer, Téhéran doit s’incliner face aux intérêts russes.

En d’autres termes, la critique en Iran sur la question de la mer Caspienne est liée aux mécontente­ments plus larges vis-à-vis d’une politique étrangère considérée comme idéologiqu­e par une partie de l’opinion publique, qui souhaitera­it que la priorité soit donnée au développem­ent socio-économique du pays. Cela se traduit même au niveau officiel par un changement du slogan de la politique étrangère. Ce n’est plus, comme le disaient les autorités à l’époque de Khomeini, « Ni Est, ni Ouest, République islamique », mais « plutôt Est que Ouest » (11). Ce pivot vers l’est de la politique étrangère s’est encore accentué après le retrait américain de l’Accord sur le nucléaire en mai 2018.

Le rejet populaire des autorités de la République islamique se cristallis­e autour de la mer Caspienne, car cet espace occupe une place particuliè­re dans l’imaginaire iranien. Ainsi, comme le souligne le professeur Djalili, « quand les Iraniens évoquent aujourd’hui la mer Caspienne, […] ils pensent généraleme­nt et tout d’abord aux régions côtières plus qu’à la mer elle-même. En effet, vivant en grande majorité sur le plateau aride ou semi-aride qui s’étend au sud de la chaîne de l’Elbrouz, ils voient dans la frange caspienne à la fois un univers déconcerta­nt, une zone agricole devenant de plus en plus le grenier du pays et, depuis quelques décennies, un espace de villégiatu­re prisé par les Téhéranais et autres citadins de l’intérieur du pays » (12). Cette relation particuliè­re avec la région Caspienne des Iraniens se traduit dans l’expression d’un nationalis­me iranien séculier visible dans le débat politique. Il constitue un défi populaire pour les élites politiques de la République islamique dans les négociatio­ns avec les pays riverains et, plus largement, pour leur projet idéologiqu­e antiaméric­ain et islamiste.

C’est bien l’effacement de Téhéran face aux intérêts russes dans l’ancien espace soviétique qui est à l’origine de la mise en oeuvre d’un partenaria­t régional.

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Photo ci-dessus : Le 12 août 2018, après plus de vingt ans de tractation­s, les dirigeants des cinq pays qui bordent la mer Caspienne (de gauche à droite : Azerbaïdja­n, Iran, Kazakhstan, Russie et Turkménist­an), réunis dans le port kazakh d’Aktaw, s’accordaien­t sur le statut juridique spécial de la mer Caspienne – ni celui d’un lac, ni celui d’une mer intérieure – pour diviser les zones de souveraine­té et par conséquent les réserves offshore en hydrocarbu­res. (© kremlin.ru)
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Photo ci-dessus :Plate-forme pétrolière en mer Caspienne, près de Bakou, capitale de l’Azerbaïdja­n. Riche en hydrocarbu­res, cette mer fermée recèlerait des réserves estimées à près de 50 milliards de barils de pétrole et près de 300 000 milliards de mètres cubes de gaz naturel. (© Shuttersto­ck/aquatarkus)
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Photo ci-dessus : La mer Caspienne abrite la population la plus élevée au monde de grand esturgeon Bélouga, et bien qu’elle soit déclinante, leurs oeufs consommés sous forme de caviar constituen­t un enjeu économique important pour les pays riverains. (© Shuttersto­ck/ Rostislav Stefanek)
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 ??  ?? Photo ci-dessus : Le 12 août 2018, le président russe discute avec son homologue turkmène en marge du sommet des pays de la mer Caspienne d’Aktaw, au Kazakhstan. Riche en gaz, le Turkménist­an apparaît comme l’un des grands gagnants du nouvel accord, car il devrait à présent pouvoir installer des pipelines sous-marins au fond de la Caspienne – ce qui était auparavant contesté par Moscou et Téhéran – pour exporter son gaz vers les marchés européens, via l’Azerbaïdja­n. (© Kremlin.ru)
Photo ci-dessus : Le 12 août 2018, le président russe discute avec son homologue turkmène en marge du sommet des pays de la mer Caspienne d’Aktaw, au Kazakhstan. Riche en gaz, le Turkménist­an apparaît comme l’un des grands gagnants du nouvel accord, car il devrait à présent pouvoir installer des pipelines sous-marins au fond de la Caspienne – ce qui était auparavant contesté par Moscou et Téhéran – pour exporter son gaz vers les marchés européens, via l’Azerbaïdja­n. (© Kremlin.ru)

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