éditorial
La présence croissante de la Russie en Afrique constitue un marqueur fort de la nouvelle politique étrangère du Kremlin. Contrepoids aux ambitions chinoises dans la région, elle fait l’objet d’une attention particulière en France où elle est perçue comme une remise en cause – parfois agressive – de la sphère d’influence de Paris en Afrique. Si les moyens déployés par Moscou y restent encore limités, l’affichage d’un ambitieux « retour » de la Russie fut néanmoins largement mis en scène lors du sommet de Sotchi en octobre 2019, lequel vit se réunir autour de Vladimir Poutine une trentaine de chefs d’État africains.
Les réseaux sociaux portent témoignage de cette nouvelle guerre d’influence entre Russes et Français, alors même que la politique de la main tendue engagée par le président Macron à l’encontre de son homologue russe n’a guère permis de faire bouger les lignes du Kremlin : en septembre 2019, quelques jours seulement après le discours d’Emmanuel Macron devant ses ambassadeurs appelant la diplomatie française à « repenser » favorablement le lien avec la Russie, une vaste campagne de désinformation russe à destination des réseaux sociaux s’employait à salir l’image de la France en Afrique. Parmi les principaux pays touchés, on comptait la République centrafricaine, la République démocratique du Congo, la Côte d’Ivoire, le Cameroun, Madagascar, la Libye ou encore le Mali. Ces campagnes de fake news furent orchestrées depuis Saint-Pétersbourg par la très opaque Internet Research Agency, une organisation russe de diffusion de propagande prokremlin dirigée, selon une enquête du New York Times, par l’oligarque russe Evgueni Prigojine (un proche de Vladimir Poutine). Le même oligarque suspecté d’être aux commandes du très controversé Groupe Wagner, cette société militaire privée russe assurant, par mercenaires interposés, la défense des intérêts extérieurs du Kremlin en Ukraine, en Syrie… et sur l’ensemble du continent africain.