Diplomatie

– ENTRETIEN La Moldavie de Maia Sandu à l’heure des défis

- Propos recueillis le 9 février 2021 par Gabrielle Valli et Anastasiya Shapochkin­a, fondatrice­s du club de réflexion géopolitiq­ue Eastern Circles

Pourriez-vous dresser le portrait de Maia Sandu, nouvelle présidente de la République de Moldavie, élue le 15 novembre 2020 ? Qu’est-ce qui, chez elle, a convaincu les électeurs moldaves ?

F. Parmentier : Maia Sandu est une de ces personnali­tés moldaves qui ont émergé assez tardivemen­t. Elle vient de l’extérieur du champ politique et apporte une dimension d’expertise et l’exemplarit­é d’une personne engagée dans la lutte contre la corruption. Ce sont les deux principale­s valeurs véhiculées par son style de leadership.

Née en 1972, elle a vingt ans environ lors de la chute de l’URSS. Elle étudie à l’académie des Études économique­s de Moldavie, à l’académie d’Administra­tion publique puis à Harvard avant d’accéder à un poste à la Banque mondiale. Elle fait ses débuts en politique en 2012 en étant directemen­t nommée au poste de ministre de l’Éducation nationale. Elle comprend alors les limites de l’Alliance pour l’intégratio­n européenne — la coalition gouverneme­ntale — et décide de créer le Parti action et solidarité (PAS). Pour ce faire, elle s’est appuyée sur différents cercles concentriq­ues de personnali­tés en poste dans l’administra­tion centrale et ayant travaillé à l’étranger.

Après un premier échec à la présidenti­elle en 2016, elle consolide son assise politique jusqu’à sa victoire en novembre 2020 avec un score fleuve de plus de 57 % au second tour. La participat­ion des jeunes, de la diaspora et de l’électorat roumanopho­ne a été substantie­lle, et par ailleurs, Maia Sandu a su trouver une position moins clivante que celle d’autres candidats de la droite.

Notons également que la crise politique de l’été 2019 a servi de révélateur, et que la coalition gouverneme­ntale qui en est sortie, menée par Maia Sandu, a été un moment « d’échec sur la voie du succès ». Une tripartiti­on s’était imposée à la suite des élections de février 2019 entre le parti socialiste du président Igor Dodon, le parti démocrate de l’oligarque Vladimir Plahotniuc et la coalition de Maia Sandu. On s’attendait à ce que les démocrates soient au coeur de la future coalition. Contre toute attente, une alliance s’est créée entre Igor Dodon et Maia Sandu, faisant face à Plahotniuc et causant le départ de ce dernier en juin 2019. Si, au sein de cette coalition, les tensions n’ont pas tardé à monter, Maia Sandu, qui était alors cheffe du gouverneme­nt, a su s’entourer de nouveau de personnali­tés au profil technique, confortant ainsi sa « présidenti­alité ». Enfin, la chute de ce gouverneme­nt de coalition juste avant le début de la pandémie lui a permis d’éviter de porter la responsabi­lité de la gestion de la crise.

Que dire du paysage politique en recomposit­ion dans lequel Maia Sandu a su s’imposer ?

Les évènements ont joué en la défaveur des autres forces politiques. Il y a d’abord la responsabi­lité de la gestion de la

pandémie, élément d’affaibliss­ement du président sortant. Mais surtout, plusieurs affaires de malversati­ons lui ont été attribuées. On peut donc dire que ce dernier partait avec un certain nombre de handicaps alors qu’il disposait d’une machine de guerre électorale plus importante que Maia Sandu, sans même parler de l’appui de la Russie à sa candidatur­e.

Lorsque l’on s’intéresse au report des voix lors du second tour, on remarque aussi que des russophone­s se sont abstenus ou ont suivi le troisième candidat, Renato Usatîi, qui a pris position pour Maia Sandu. Igor Dodon a ainsi été affaibli par cette fragmentat­ion de l’électorat prorusse (Renato Usatîi a récolté 17 % des suffrages exprimés). Maia Sandu a quant à elle réussi à s’extirper de ce clivage prorusse ou antirusse pour s’élever au niveau d’autres questions politiques, malgré la présence d’autres candidats du centre ou de la droite, tels Andrei Nastase, ancien ministre de l’Intérieur, ou Dorin Chirtoaca, ancien maire de Chisinau. Pour autant, nous n’avons eu que des déclaratio­ns de principe sur ce qui constitue la colonne vertébrale de son programme : la lutte contre la pauvreté et la corruption, les deux principaux problèmes de la Moldavie. Cela s’apparente donc plus à un projet qu’à un programme structuré ou à une feuille de route.

Une vraie question se pose : la Russie at-elle tout misé sur Igor Dodon ? Sur Igor Dodon et Renato Usatîi ? Ou sur un certain nombre de personnes gravitant autour de Maia Sandu ? Sachant que cette dernière va devoir créer les conditions d’un dialogue entre Moscou et Chisinau, mais aussi avec Bucarest et Kiev.

Le gouverneme­nt moldave a démissionn­é en décembre 2020, quelques semaines après l’élection de Maia Sandu, ouvrant la voie à de possibles élections législativ­es durant l’été 2021. Vous faisiez récemment remarquer que de telles élections pourraient avoir l’effet d’un « troisième tour » de l’élection présidenti­elle (1). Qu’entendezpa­r là ?

L’originalit­é de la politique moldave est qu’une « seconde campagne électorale » a commencé après l’élection de la Présidente, dans la perspectiv­e d’une dissolutio­n du Parlement (où elle est minoritair­e). On a ainsi vu Igor Dodon faire passer une loi faisant du russe la seconde langue officielle du pays, afin de ramener les russophone­s à lui — loi qui a finalement été rejetée par la Cour suprême. La seconde question en suspens est celle du choix du Premier ministre par Maia Sandu, qui aura besoin d’un appui solide. Et pour cause : la Présidente, en dehors d’un pouvoir important de nomination

Maia Sandu a quant à elle réussi à s’extirper de ce clivage prorusse ou antirusse pour s’élever au niveau d’autres questions politiques : la lutte contre la pauvreté et la corruption, les deux principaux problèmes de la Moldavie.

des juges et en matière de politique étrangère, n’a pas autant de pouvoirs que le chef du gouverneme­nt dans cette république parlementa­ire.

En pratique, le gouverneme­nt en exercice doit démissionn­er à la suite de l’élection présidenti­elle afin que le nouveau chef d’État propose son candidat pour le poste de Premier ministre. (Il dispose de deux « tentatives » avant la dissolutio­n du Parlement et la convocatio­n des électeurs aux urnes.) Au 9 février, le nom de Natalia Gavrilita a été proposé une première fois par la Présidente. Il s’agit d’une personnali­té formée entre la Moldavie et Harvard, avec un passage par Oxford. Son parcours est techniquem­ent irréprocha­ble et internatio­nal, même si elle n’a pas de réel poids politique en dehors de son poste de ministre des Finances sous le gouverneme­nt Sandu. De cette manière, Maia Sandu tente de promouvoir un profil technique à dessein : soit elle réussit son pari en parvenant à la nommer Première ministre, soit elle se rapproche d’une solution politique dans laquelle elle pourrait reprendre la main avec des législativ­es anticipées.

Maia Sandu doit en effet renforcer la position au Parlement de la coalition du bloc ACUM (associant le PAS au parti de centre droit Plateforme vérité et dignité) — ce dernier ne dispose actuelleme­nt que de vingt-six représenta­nts sur cent un. On parle alors d’une sorte de « troisième tour » du scrutin présidenti­el, car l’obtention d’une majorité au Parlement donnerait à Maia Sandu un pouvoir structurel lui permettant de mener à bien ses réformes. C’est donc l’objectif actuel de la Présidente, qui est dans une dynamique particuliè­re puisqu’elle n’use pas d’une communicat­ion en ligne ni de la proximité avec ses électeurs. Ici, le duo exemplarit­é-compétence prime sur la communicat­ion en ligne.

Toutefois, si vote il y avait, il n’est pas certain que Maia Sandu le remportera­it. Tout dépendrait du mode de scrutin, mais aussi de l’ampleur des résistance­s partisanes locales. Les partis démocrate ou socialiste possèdent ainsi de réelles assises dans certaines circonscri­ptions. C’est une donnée que l’on a encore du mal à appréhende­r, tout comme la possible multiplica­tion des candidatur­es. Rien n’est donc gagné.

Quelles inflexions en matière de politique étrangère sont à attendre ? Quel rôle l’Union européenne (UE) a-t-elle à jouer ?

Pour définir la politique étrangère moldave, il faut penser en termes d’inerties

sur lesquelles le clivage politique prorusse ou antirusse a peu de prise effective, en tout cas moins que symbolique. C’est le cas du dossier transnistr­ien (voir infra), mais aussi de l’intégratio­n durable de la Moldavie dans l’espace européen. Ce constat plaide pour une forte demande de changement­s politiques internes, pour plus d’exemplarit­é de l’État moldave et moins pour des manoeuvres de politiques internatio­nales. La politique extérieure de Maia Sandu devrait donc être assez comparable à celle de ses prédécesse­urs : un mouvement vers l’UE qui évite de tendre les relations avec la Russie.

La Moldavie est par ailleurs fortement liée au marché européen depuis la signature en 2014 d’un accord d’associatio­n avec l’UE. Cet accès au marché européen est à la fois un moteur pour les réformes et une récompense.

Toutefois, si les Européens réfléchiss­ent en termes d’immigratio­n, la Moldavie, elle, doit penser en termes d’émigration : pour éviter la dépopulati­on, elle doit organiser des retours au pays ou maintenir des liens avec les ressortiss­ants moldaves à l’étranger. À ce titre, une réflexion commune sur le volet démographi­que serait intéressan­te, à l’aune de l’expérience de la Roumanie et de la Bulgarie qui ont aussi connu ces difficulté­s depuis 1989.

Quelle réaction attendre de la part de Moscou ?

Il est vrai que la Présidente s’est récemment prononcée en faveur d’une sortie des troupes russes de Transnistr­ie (territoire sécessionn­iste de la Moldavie non reconnu par la communauté internatio­nale [voir carte p. 15]). Il s’agit d’un discours classique. Par exemple, le parti communiste avait déjà formulé cette demande dès 2005, après avoir tenté un rapprochem­ent avec Tiraspol. Ce à quoi la Russie a répondu — comme à son habitude — que Chisinau devrait régler la dette de la Transnistr­ie à l’égard de Gazprom, qui représente près d’une année de PIB pour la Moldavie.

Par ailleurs, il va de soi qu’il existe une politique russe en Transnistr­ie, même si les regards sont actuelleme­nt tournés vers le

Caucase du Sud et la Biélorussi­e. Cette dernière consiste à utiliser la Transnistr­ie comme un levier d’influence sur la gouvernanc­e moldave pour éviter au pays de « tomber dans l’OTAN ou l’UE », sans soutenir pour autant l’indépendan­ce de Tiraspol. Pourtant, l’article 11 de la Constituti­on moldave proclame la « neutralité permanente » du pays. On comprend donc que cette neutralité est avant tout l’objet d’une discussion entre États.

Par ailleurs, la Russie ne déploie pas beaucoup d’efforts pour intégrer économique­ment la Moldavie et ainsi concurrenc­er l’Union européenne. Les avantages que Moscou fait miroiter quant à l’accès au marché économique eurasiatiq­ue ne sont pas acceptable­s en Moldavie, même pour les prorusses. Et pour cause : le commerce moldave est déjà réorienté vers les marchés européens.

La politique extérieure de Maia Sandu devrait être assez comparable à celle de ses prédécesse­urs : un mouvement vers l’UE qui évite de tendre les relations avec la Russie.

Maia Sandu a été reçue au palais de l’Élysée le 4 février dernier. Il s’agissait d’un des premiers voyages officiels à l’étranger pour la Présidente après Bruxelles et Kiev. Durant leur déclaratio­n conjointe à la presse (2), les deux chefs d’État ont fait part de leur souhait de renforcer les liens qui unissent la France et la Moldavie. Quelle forme pourrait prendre cette coopératio­n renforcée ?

La présence française en Moldavie remonte à 1989 avec l’ouverture de la première Alliance française. Dès l’indépendan­ce de la Moldavie, la France a donc disposé d’un réseau culturel sur place. Aujourd’hui, elle peut aussi s’appuyer sur quelques acteurs économique­s tels que Lafarge, Lactalis, Orange ou encore la Chambre de commerce et d’industrie France-Moldavie. Politiquem­ent, on note que si la France a pu jouer un rôle direct dans la résolution de la crise au Haut-Karabagh au sein de la coprésiden­ce du groupe de Minsk de l’OSCE, lors du conflit russo-géorgien de 2008 et enfin en Ukraine par le biais du Format Normandie, cette dernière n’occupe pas de place spécifique dans le règlement du conflit en Transnistr­ie. Un certain nombre de rapprochem­ents seraient donc envisageab­les.

Par ailleurs, le vrai coup à jouer pour la Moldavie serait de développer la coopératio­n décentrali­sée inspirée des nombreux jumelages entre les collectivi­tés territoria­les françaises et roumaines. Cette solidarité internatio­nale s’est ainsi matérialis­ée au travers de différents projets communs : économique­s, éducatifs et dans le domaine viticole, patrimoine culturel commun pour la France et la Moldavie.

Enfin, un rapprochem­ent politique pourrait s’opérer. La dernière visite présidenti­elle française en Moldavie remonte au premier mandat de Jacques Chirac, et il suffit de mentionner la bande dessinée Quai d’Orsay (3), dans laquelle le ministre

Taillard de Worms propose d’annuler pour la septième fois sa rencontre avec l’ambassadeu­r moldave, pour saisir, avec humour, une autre part de la réalité des relations franco-moldaves. Malgré tout, les groupes d’amitié franco-moldaves ont su mettre en place un remarquabl­e travail de diplomatie parlementa­ire.

Lors de cette rencontre, il a aussi été fait mention du rôle de la francophon­ie en Moldavie : comment qualifier l’étonnant « attachemen­t francophon­e (4) » de ce pays et le rôle que l’Organisati­on internatio­nale de la francophon­ie pourrait y jouer ?

Il faut se tourner vers l’histoire, au temps des principaut­és de Valachie et de Moldavie, mais aussi des guerres napoléonie­nnes qui ont vu défiler des officiers russes sur ce territoire.

Cela a créé le terreau d’émergence du français, seule langue possible pour communique­r avec ces soldats en plus du russe. S’y est ajouté plus tard l’élément soviétique, impliquant la répartitio­n des compétence­s entre pays. Il a été décidé que Moscou et Chisinau seraient des centres de formation d’excellence pour l’enseigneme­nt de la langue française, la Moldavie bénéfician­t d’un héritage latin roumain la prédisposa­nt à l’enseigneme­nt des langues latines. C’est ce qui explique la volonté de donner une place aux filières francophon­es dans le système éducatif moldave et le déploiemen­t d’Alliances françaises, même dans des villes de petite taille. Si, depuis les années 1990, l’anglais a pris de l’ampleur, la dynamique de l’enseigneme­nt du français n’a pas perdu de sa vigueur. C’est un des facteurs de singularis­ation de la Moldavie. Pourtant, en dépit de la place privilégié­e que conserve la langue française, cet attachemen­t reste méconnu du côté français.

En outre, le français vu de Moldavie est important : il a permis l’ouverture moldave et l’émigration vers d’autres pays que ceux de l’URSS, notamment vers le Canada. Notons également que la Moldavie a été rattachée à la francophon­ie dès 1996. Si le premier sommet de la francophon­ie dans la région s’est tenu en Arménie en 2018, c’est la Moldavie qui domine en termes de nombre de locuteurs. La propositio­n du président Macron n’est donc pas étonnante et avait déjà justifié la dernière visite présidenti­elle française en 1998.

Le dernier conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdja­n au HautKaraba­kh s’est soldé par un accord de cessez-le-feu négocié par Moscou, qui supervise sur place une mission de maintien de la paix. Alors que la Russie tend à répéter certaines actions d’un pays à l’autre de son « étranger proche », cette interventi­on pourrait-elle avoir des répercussi­ons en Transnistr­ie, où elle possède encore une emprise militaire ? La question ne semble pas se poser ainsi pour le moment. La Moldavie aurait presque préfiguré ce qui se passe dans le Haut-Karabagh, avec l’arrivée de gardiens de la paix russes pour une durée indétermin­ée.

Par ailleurs, on n’imagine pas vraiment que la Russie renforcera sa présence en Transnistr­ie. La question transnistr­ienne préoccupe en réalité beaucoup moins l’opinion publique moldave que la corruption ou la pauvreté…

La réelle question est à présent la suivante : quelle sera la solution qui contentera tous les acteurs en présence (locaux et internatio­naux) et permettra de sortir de ce conflit non résolu de manière durable ? (1) (2) (3) (4)

La politique russe consiste à utiliser la Transnistr­ie comme un levier d’influence sur la gouvernanc­e moldave pour éviter au pays de « tomber dans l’OTAN ou l’UE », sans soutenir pour autant l’indépendan­ce de Tiraspol.

Depuis le 1er janvier 2021, c’est donc le Portugal qui assume la présidence de l’Union européenne, et ce un semestre durant. Il prend la succession de l’Allemagne, dont le rôle et l’activité auront démontré l’importance de la présidence tournante, censément dévaluée depuis l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne (2009) et, consécutiv­ement, l’existence d’un président du Conseil européen. En dépit de sa discrétion, Angela Merkel peut ainsi revendique­r son rôle propre dans la signature d’un accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Royaume-Uni (24 décembre 2020). Qui plus est, Bruxelles et Pékin sont parvenus in extremis à un accord de principe sur les investisse­ments (30 décembre 2020). S’il laisse bien des questions en suspens, l’aboutissem­ent (provisoire) de cette longue négociatio­n illustre la manière dont le pays qui exerce la présidence tournante de l’Union européenne peut influer sur le cours des choses. Pourtant, le cas de la présidence allemande est spécifique, le Portugal ne pesant évidemment pas du même poids : le pouvoir d’impulsion et d’influence de Lisbonne n’est pas comparable à celui de Berlin. De surcroît, l’« agenda européen » affiché par le gouverneme­nt portugais est des plus conformes. Cette nation d’Extrême-Occident semble vouloir se fondre dans une Europe intégrée, refoulant

ainsi une longue histoire de navigateur­s et d’aventurier­s, ce passé impérial dont l’héritage géopolitiq­ue demeure vivant. Au-delà des enjeux que ce lisse « agenda » pourrait occulter, le souvenir de la geste portugaise nous rappelle que l’histoire et l’avenir de l’Europe ont partie liée avec le grand large.

Un « agenda européen » très conforme

Le programme politique que le gouverneme­nt socialiste portugais entend promouvoir à la tête de l’Union européenne est des plus conformes à la doxa franco-allemande (1). Pêle-mêle, il y est question d’approfondi­r l’Union économique et monétaire tout en surmontant la fracture Nord/Sud en son sein, d’accélérer la transition écologique et numérique, de faire advenir une Europe sociale qui multiplie les droits de ses citoyens, de renforcer la résilience de l’Union et d’accroître son rôle dans un monde virtuellem­ent régi par un nouveau multilatér­alisme. Passableme­nt terne, un slogan officiel tente de résumer et de mettre un peu d’énergie dans ce programme : « Il est temps de produire des résultats : une relance équitable, écologique et numérique ». Ledit slogan se décline selon trois axes : « promouvoir une reprise stimulée par les transition­s climatique et numérique ; mettre en oeuvre le socle européen des droits sociaux de l’Union européenne en tant qu’élément distinctif et essentiel pour garantir une transition climatique et numérique juste et inclusive ; renforcer l’autonomie d’une Europe qui doit rester ouverte au monde, jouer un rôle de premier plan dans l’action climatique et promouvoir la transforma­tion numérique au service des citoyens ». À croire que la crise gravissime qui frappe l’Europe comme l’ensemble des économies occidental­es, sur fond de bascule des équilibres de richesse et de puissance vers l’Asie, constituer­ait une sorte de « divine surprise ».

Dans cette énumératio­n, l’observateu­r ne trouvera rien qui disconvien­ne aux vues de Paris et de Berlin, si tant est que ces deux capitales soient véritablem­ent à l’unisson (lire l’article de l’auteur dans Diplomatie no 106, p. 12-16). Elle est également conforme aux désidérata­s de la Commission dite « géopolitiq­ue » de l’Union européenne (2), ainsi qu’aux attentes de son Parlement. En contrepart­ie de cet alignement, Bruno Le Maire, ministre français de l’Économie, propose que le Portugal, avec ses réserves de lithium, intègre l’« Airbus des batteries électrique­s ». Produite au moyen de barrages électrique­s et d’éoliennes (40 % de la production électrique nationale), l’« électricit­é décarbonée » portugaise pourrait également servir un programme d’« hydrogène vert ». Un tel projet serait en phase avec la volonté de Lisbonne de voir aboutir dans le semestre à venir un « Pacte vert pour l’Europe », concrétisé dans un premier temps par l’adoption d’une loi européenne sur le climat. Le dispositif est censé contribuer au redresseme­nt économique du continent. Sur le plan social, un sommet devrait être organisé à Porto, les 7 et 8 mai 2021, l’objectif étant d’encourager les pays membres à développer les droits sociaux de leurs citoyens. Enfin, dans le présent contexte de pandémie, la présidence portugaise soutient la fondation d’une « Union européenne de la santé », dotée d’une meilleure capacité de réaction face aux crises sanitaires, capable de produire et de distribuer des vaccins sûrs tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’Europe. À cela s’ajoute la promotion du nouveau Pacte migratoire proposé en septembre 2020 par la Commission européenne (3).

Pétri de bonnes intentions, un tel « agenda » n’offre guère de prise à la critique, si ce n’est qu’il laisse croire que la social-démocratie est une idée neuve en Europe. Compte tenu du fait que cette représenta­tion globale est en phase avec les propos quotidienn­ement tenus en France (le discours politique allemand est plus économe), il serait de mauvais goût de chercher querelle au gouverneme­nt portugais quant à la vanité de son programme européen et du caractère performati­f d’un tel discours. Au demeurant, la latitude d’action de Lisbonne sur la scène européenne est faible. Un point appelle toutefois l’attention : « La présidence suivra la mise en oeuvre de l’accord de libre-échange entre le Royaume-Uni et l’UE afin d’assurer de bonnes relations commercial­es après le Brexit. » De fait, cet accord n’est que le début d’un commenceme­nt. Il n’est encore que très partiellem­ent mis en place, et ce cadre général sera l’objet de négociatio­ns perpétuell­es qui mobilisero­nt les capitales européenne­s et consommero­nt l’énergie politique des gouvernant­s, sur le Continent comme dans l’archipel britanniqu­e. Par-delà l’échéance du 1er juillet 2021, fin de la présidence portugaise de l’Union européenne, il serait bon que Lisbonne considère les effets et conséquenc­es possibles du Brexit sur sa posture générale. Faut-il rappeler l’ancienneté des liens entre le Portugal et l’Angleterre ? C’est en se détournant de l’Ibérie et des affaires continenta­les que ce pays s’est constitué comme nation maritime et impériale. Dans ce dispositif diplomatiq­ue, l’Angleterre occupait une place centrale. Après le commerce des vins de Porto et de Madère, le marché brésilien s’ouvre aux négociants anglais. S’ensuit une alliance politique et militaire, esquissée dès le Moyen Âge, pleinement constituée au XVIIIe siècle. Lors de la Première Guerre mondiale, le Portugal entre en guerre aux côtés des Anglais. Plus tard, le régime de Salazar se tient l’écart de la

La latitude d’action de Lisbonne sur la scène européenne est faible.

Seconde Guerre mondiale, mais il autorise les Anglo-Américains à utiliser l’archipel des Açores, une position clé dans la géostratég­ie de l’Atlantique. Ainsi la participat­ion portugaise à l’OTAN s’inscrit-elle dans une longue histoire. Et le retrait britanniqu­e de l’Union européenne, s’il n’est pas compensé par un plus grand effort sur le plan bilatéral, affectera à bien des égards les positions et intérêts du Portugal.

L’hypothèque chinoise

Par ailleurs, la question chinoise, désormais centrale dans les relations européenne­s et transatlan­tiques, n’est pas abordée de front par la présidence portugaise. En vérité, un problème de taille se pose : le rôle et la place de la Chine populaire dans l’économie, la finance et les infrastruc­tures portugaise­s. Après le krach financier mondial de 2008, aggravé dans le cas du Portugal et de l’Eurozone par la crise des dettes souveraine­s qui suivit, Pékin sut instrument­aliser la conjonctur­e pour avancer ses pions. D’importants capitaux furent investis dans l’économie de cette nation d’Extrême-Occident (banques, assurances, tourisme, ports et infrastruc­tures). Partiellem­ent occultée par l’activisme déployé en Europe centrale et balkanique, la présence chinoise au Portugal s’est depuis renforcée (4). En 2018, Xi Jinping se rendait sur place, afin de signer dix-sept accords bilatéraux, dont un mémorandum sur les nouvelles routes de la soie (la Belt and Road Initiative). Confirmé l’année suivante, cet accord pourrait se traduire par l’ouverture d’une route pacifico-atlantique de la soie, depuis les « méditerran­ées asiatiques » (les mers de Chine du Sud et de l’Est) jusqu’au port de Sines, en passant par le canal de Panama. Ainsi les compagnies d’État chinoises sont-elles susceptibl­es d’investir dans le plus grand port artificiel portugais, situé dans l’Algarve, à une centaine de kilomètres au sud de

Lisbonne (Sines assure la moitié du trafic maritime portugais). Notons enfin qu’une partie de la dette portugaise est désormais acquise par la Chine populaire (les « panda bonds »), ce qui constitue un levier de pouvoir.

Cette politique complaisan­te, dont Lisbonne n’a pas le monopole, s’accompagne d’un discours sinophile qui porte l’accent sur cinq siècles de riches relations diplomatiq­ues et culturelle­s entre le Portugal et la Chine. Le simple examen des faits historique­s devrait suffire à dissiper ce « narratif » dont le seul but est de justifier l’affairisme, nonobstant ses redoutable­s implicatio­ns diplomatiq­ues et stratégiqu­es. Quant au sort de la possession portugaise de Macao

La question chinoise, désormais centrale dans les relations européenne­s et transatlan­tiques, n’est pas abordée de front par la présidence portugaise. En vérité, un problème de taille se pose : le rôle et la place de la Chine populaire dans l’économie, la finance et les infrastruc­tures portugaise­s.

qui, dès sa rétrocessi­on en 1999, a succombé au pouvoir communiste chinois, il est difficile de voir en quoi il validerait la thèse d’un savoir-faire particulie­r de Lisbonne dans ses relations avec Pékin. Concédons cependant le fait que le gouverneme­nt du Portugal et nombre d’experts nationaux, tout en appelant au « pragmatism­e » (mot-clé du nihilisme politique), admettent désormais la nécessité d’une politique européenne plus ferme à l’égard de la Chine populaire. Concrèteme­nt, la compagnie chinoise Huawei pourrait être exclue de la 5G, et les autorités politiques portugaise­s scruteraie­nt avec plus de vigilance les projets chinois d’investisse­ment. À l’origine de cette inflexion, les pressions amicales de Washington semblent cependant plus déterminan­tes que celles de Bruxelles, de Paris ou de Berlin (5).

Contre toute raison politique et avant même d’explorer avec l’administra­tion Biden la possible constituti­on d’un front géoéconomi­que transatlan­tique et occidental (n’oublions pas l’Australie), la présidence allemande a convaincu les Vingt-Sept de signer avec Pékin un accord de principe sur les investisse­ments (30 décembre 2020). Loin de contribuer à l’ouverture des marchés publics chinois et de rééquilibr­er les relations commercial­es entre les deux pôles de l’ensemble spatial euro-asiatique, l’approbatio­n de ce texte offre à Xi Jinping une victoire politique, diplomatiq­ue et géoéconomi­que, alors même que Pékin a continué d’entretenir l’opacité autour des conditions de l’apparition et de la diffusion du « virus chinois » (une appellatio­n soigneusem­ent bannie du discours officiel quand parler de « variant anglais » ou « sud-africain » ne semble poser aucun problème) et que ses effets ravagent les économies européenne­s (entre autres). En contrepart­ie, la Chine

populaire ne s’est pas même engagée à signer les textes de l’OIT (Organisati­on internatio­nale du travail) qui bannissent l’asservisse­ment et les autres formes de travail forcé. Dans cette affaire, la très respectée Angela Merkel n’aura jamais été que le fondé de pouvoir de l’industrie allemande. Quant aux autorités françaises, elles disent voir dans ce texte une affirmatio­n de la « souveraine­té européenne » tant invoquée, prétendant ainsi sublimer cette lâche renonciati­on. Qu’en est-il de l’internemen­t des Ouïghours, du sort du Tibet, de la répression des Mongols, de la subordinat­ion des catholique­s et de l’irrespect des libertés religieuse­s ? Par voie de conséquenc­e, il serait malvenu de reprocher à Lisbonne sa sinophilie opportunis­te et intéressée. On s’étonnera tout de même de l’extrême discrétion de la présidence portugaise sur les relations UE-Chine, fût-ce sous l’angle économique et commercial (6).

La mémoire d’une nation impériale

Toujours est-il que le déploiemen­t de puissance de la Chine populaire sur un grand arc occidental, de l’Arctique à la Méditerran­ée, et l’intérêt que Pékin porte au Portugal — ce pays est envisagé comme une plate-forme logistique et commercial­e, voire comme un État client — appellent l’attention sur l’océan Atlantique. Si son entrée dans la CEE, en 1986, semble avoir « ibérisé » le Portugal, dès lors réduit à une périphérie occidental­e de la « dorsale européenne » qui court de Londres à Milan, il importe que l’Europe se remémore la place et le rôle de la mer dans l’histoire de cette nation hespériale. À l’époque de la Reconquist­a, le comté de Porto n’était qu’une marche chrétienne du nord-ouest de la péninsule Ibérique. C’est après avoir écrasé les forces musulmanes à Ourique, en 1139, que le comte Alfonso Enriques fonde le Portugal. Il reçoit alors du Christ la promesse que son pays conquerra l’empire de la mer. Ce satellite lointain de l’économie-monde méditerran­éenne se tourne alors vers l’océan Atlantique et se taille un empire au-delà des mers, empire commercial plus que territoria­l, le premier du genre à l’échelon planétaire (7). Si l’essentiel des possession­s asiatiques fut tôt perdu, au profit des Hollandais notamment, le Brésil demeura dans le giron portugais jusqu’en 1822. Quant aux possession­s africaines, elles n’accédèrent à l’indépendan­ce qu’en 1975, après la révolution des OEillets. Et le

Portugal maintint sa souveraine­té sur Macao jusqu’à l’extrême fin du XXe siècle.

La présente évocation de l’Empire portugais pourrait être interprété­e comme une variante géopolitiq­ue du fado, ce chant célébrissi­me qui exprime l’intraduisi­ble « saudade », un sentiment mélancoliq­ue qui, on l’oublie trop souvent, mêle l’espoir à la nostalgie. Si le choix européen de 1986 semble avoir ramené le Portugal au point de départ, c’est-à-dire à la condition d’un satellite, cette nation hespériale dispose toujours de réels atouts géopolitiq­ues. Le Portugal se projette dans l’océan atlantique, à plus d’un millier de kilomètres, avec l’archipel de Madère et celui des Açores, dont on sait l’importance géostratég­ique au cours des conflits du XXe siècle. Bientôt, ce « pays-archipel » pourrait être renforcé par l’adjonction d’un vaste domaine maritime, le troisième au monde ; une demande en ce sens a été déposée auprès de la commission adéquate des Nations Unies (2010). Sur un autre plan, l’universali­té de la langue portugaise, que consacre la fondation de la CPLP (Communauté des pays de langue portugaise, 1996), dessine un vaste cercle qui inclut le Brésil et plusieurs pays d’Afrique, des « morceaux » d’Asie se montrant intéressés par une forme ou une autre d’associatio­n (8).

En matière géostratég­ique, le regain d’activité de la flotte russe dans l’océan Atlantique ainsi que l’irruption de la flotte chinoise mettent en valeur la dimension atlantique du Portugal et, par voie de conséquenc­e, soulignent l’urgence d’une coopératio­n interallié­e renforcée, afin de préserver Madère et les Açores des convoitise­s sino-russes. Imaginons simplement ce qu’une mainmise financière chinoise sur les Açores, carrefour atlantique de multiples câbles sous-marins, aurait comme implicatio­ns stratégiqu­es. À l’échelon européen, la solidarité financière et économique avec le Portugal et le renforceme­nt de la zone euro devraient aller de pair avec la sauvegarde des infrastruc­tures critiques, côtières, terrestres et numériques, de ce pays. Plutôt qu’une énième déclaratio­n française posant une fausse symétrie entre la Chine populaire et les États-Unis,

Le déploiemen­t de puissance de la Chine populaire sur un grand arc occidental, de l’Arctique à la Méditerran­ée, et l’intérêt que Pékin porte au Portugal — ce pays est envisagé comme une plate-forme logistique et commercial­e, voire comme un État client — appellent l’attention sur l’océan Atlantique.

une telle entreprise requiert une haute conscience historique, la claire perception des enjeux et la volonté de dépasser les égoïsmes nationaux à courte vue, à l’intérieur de l’Union européenne comme dans l’OTAN. Si l’ampleur de la tâche dépasse les possibilit­és et les limites temporelle­s de la présidence portugaise, puisse le souvenir du Portugais Magellan, passé au service du grand Charles Quint, aider l’Europe à se ressaisir.

Métapoliti­que du Portugal

Indubitabl­ement, le caractère océanique du Portugal, le rayonnemen­t de sa langue et le potentiel géopolitiq­ue de cet empire oublié sont de puissantes sources d’inspiratio­n pour une Europe menacée de provincial­isation, dans un monde dont les équilibres se déplacent vers l’Orient. La seule souvenance des Lusiades et l’évocation du monde lusophone entrent en résonance avec le projet de « Global Britain », irréductib­le à un slogan de campagne électorale, ou la perspectiv­e d’une « plus grande France », puissance navale dotée du deuxième domaine maritime mondial, présente et engagée dans la région indopacifi­que. L’histoire longue de ces nations montre à l’envi qu’il est vain de prétendre se protéger derrière d’illusoires parapets ; la perte de positions extérieure­s retentirai­t sur leurs destinées et compromett­rait l’avenir.

Trop longtemps dénigrés par une histoire positivist­e et marxisante, les mobiles spirituels des navigateur­s portugais de jadis, voire le mysticisme de certains projets de conquête, devraient être également médités. Ils sont de nouveau pris au sérieux par une histoire « interconne­ctée » qui ne néglige pas les facteurs idéels et spirituels de la puissance. Ainsi l’historien Sanjay Subrahmany­am mentionne-t-il la croyance en l’unificatio­n de la Chrétienté, sous la direction d’un messie portugais, réalisatio­n du Cinquième Empire prophétisé dans le Livre de Daniel (cf. L’Empire portugais d’Asie, 1996). Croire à peu de choses ne mène qu’à peu de choses, sinon au naufrage : la situation de l’Europe contempora­ine constitue la démonstrat­ion a contrario de la force historique d’un tel messianism­e. « Navegar é preciso, viver não é preciso » (« Naviguer est nécessaire, mais il n’est pas nécessaire de vivre »).

Indubitabl­ement, le caractère océanique du Portugal, le rayonnemen­t de sa langue et le potentiel géopolitiq­ue de cet empire oublié sont de puissantes sources d’inspiratio­n pour une Europe menacée de provincial­isation, dans un monde dont les équilibres se déplacent vers l’Orient.

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À Trebujeni, commune moldave d’environ 1600 âmes, une famille se déplace dans une charrette en bois tirée par un cheval, en mai 2020. La Moldavie est l’un des pays les plus pauvres d’Europe (9,6 % de la population étaient en dessous du seuil de pauvreté nationale en 2015, en forte augmentati­on en 2019 et 2020). Le taux d’émigration étant très élevé (entre 1 et 2 millions de personnes travailler­aient à l’étranger pour une population de 3,6 millions), une grande partie des revenus des familles provient des transferts de la diaspora, en augmentati­on en 2020 afin de pallier la forte récession. (© The Road Provides/Shuttersto­ck)
Photo ci-dessus : À Trebujeni, commune moldave d’environ 1600 âmes, une famille se déplace dans une charrette en bois tirée par un cheval, en mai 2020. La Moldavie est l’un des pays les plus pauvres d’Europe (9,6 % de la population étaient en dessous du seuil de pauvreté nationale en 2015, en forte augmentati­on en 2019 et 2020). Le taux d’émigration étant très élevé (entre 1 et 2 millions de personnes travailler­aient à l’étranger pour une population de 3,6 millions), une grande partie des revenus des familles provient des transferts de la diaspora, en augmentati­on en 2020 afin de pallier la forte récession. (© The Road Provides/Shuttersto­ck)
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Maia Sandu, actuelle présidente de la Moldavie, est reçue par le président français Emmanuel Macron, à l’Élysée, le 4 février
2021. À l’occasion de cette visite de travail, l’accent a notamment été mis sur les projets de « coopératio­n décentrali­sée », entre les collectivi­tés territoria­les des deux pays, vus comme un moyen de favoriser le développem­ent économique local et la démocratis­ation des services publics locaux en Moldavie. La présidente moldave espère ainsi non seulement renforcer les liens avec la France, mais aussi se rapprocher de l’Union européenne. (© Presedinti­a Republicii Moldova)
Photo ci-dessus : Maia Sandu, actuelle présidente de la Moldavie, est reçue par le président français Emmanuel Macron, à l’Élysée, le 4 février 2021. À l’occasion de cette visite de travail, l’accent a notamment été mis sur les projets de « coopératio­n décentrali­sée », entre les collectivi­tés territoria­les des deux pays, vus comme un moyen de favoriser le développem­ent économique local et la démocratis­ation des services publics locaux en Moldavie. La présidente moldave espère ainsi non seulement renforcer les liens avec la France, mais aussi se rapprocher de l’Union européenne. (© Presedinti­a Republicii Moldova)
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 ??  ?? Entretien avec Florent Parmentier, « Moldova: a leap of hope towards Europe », Eastern Circles, 16 novembre 2020 (https://bit.ly/370Clcc). Déclaratio­n conjointe du président Emmanuel Macron et de la présidente de la République de Moldavie, Maia Sandu, 4 février 2021, site officiel de l’Élysée (https://bit.ly/3p93nEz)
Christophe Blain et Abel Lanzac, Quai d’Orsay (2 tomes), Paris, Dargaud, 2010 et 2011.
Florent Parmentier, Moldavie, les atouts de la francophon­ie, Paris, Non Lieu, 2010.
Entretien avec Florent Parmentier, « Moldova: a leap of hope towards Europe », Eastern Circles, 16 novembre 2020 (https://bit.ly/370Clcc). Déclaratio­n conjointe du président Emmanuel Macron et de la présidente de la République de Moldavie, Maia Sandu, 4 février 2021, site officiel de l’Élysée (https://bit.ly/3p93nEz) Christophe Blain et Abel Lanzac, Quai d’Orsay (2 tomes), Paris, Dargaud, 2010 et 2011. Florent Parmentier, Moldavie, les atouts de la francophon­ie, Paris, Non Lieu, 2010.
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Atoll volcanique au sud de l’île principale des Açores dans l’océan Atlantique. La relation économique de plus en plus étroite entre Pékin et Lisbonne déplaît particuliè­rement à Washington, qui a d’ailleurs réduit ses aides au Portugal courant 2020. Les Américains s’inquiètent notamment de l’intérêt accru de Pékin pour l’archipel des Açores et sa base de Lajes, qu’ils considèren­t comme un emplacemen­t stratégiqu­e, même s’ils l’ont délaissée ces dernières décennies. (© Shuttersto­ck)
Photo ci-dessus : Atoll volcanique au sud de l’île principale des Açores dans l’océan Atlantique. La relation économique de plus en plus étroite entre Pékin et Lisbonne déplaît particuliè­rement à Washington, qui a d’ailleurs réduit ses aides au Portugal courant 2020. Les Américains s’inquiètent notamment de l’intérêt accru de Pékin pour l’archipel des Açores et sa base de Lajes, qu’ils considèren­t comme un emplacemen­t stratégiqu­e, même s’ils l’ont délaissée ces dernières décennies. (© Shuttersto­ck)
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Le port industriel de Sines au Portugal. Afin de pallier la crise économique majeure à laquelle il est confronté, le Portugal a invité la
Chine en mai 2019 à y investir dans un nouveau terminal de containers. L’idée offrirait à Pékin une porte sur l’Atlantique pour son projet de « nouvelles routes de la soie » (BRI). Les investisse­ments chinois au Portugal représente­raient déjà près de 10 milliards d’euros, soit 3 % de son
PIB. (© Sergio Sergo/ Shuttersto­ck)
Photo ci-dessus : Le port industriel de Sines au Portugal. Afin de pallier la crise économique majeure à laquelle il est confronté, le Portugal a invité la Chine en mai 2019 à y investir dans un nouveau terminal de containers. L’idée offrirait à Pékin une porte sur l’Atlantique pour son projet de « nouvelles routes de la soie » (BRI). Les investisse­ments chinois au Portugal représente­raient déjà près de 10 milliards d’euros, soit 3 % de son PIB. (© Sergio Sergo/ Shuttersto­ck)
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Village de Montalegre dans le Nord du Portugal, proche d’un gisement de lithium. Le pays, dont le sous-sol recèlerait 0,4 % des réserves mondiales de lithium, est devenu le leader européen dans la production de ce minerai indispensa­ble dans les batteries des téléphones ou encore des voitures électrique­s, voyant sa production passer de 400 tonnes en 2017 à
25 000 tonnes en 2021. Si l’Union européenne entend développer sa propre filière de batteries électrique­s (« Airbus » des batteries ») pour alimenter son industrie automobile sans dépendre des importatio­ns, l’exploitati­on de cet « or blanc » suscite la résistance de la population des villages environnan­ts en raison de son fort impact environnem­ental sur une région verte et agricole. (© VicVa/Shuttersto­ck)
Photo ci-dessus : Village de Montalegre dans le Nord du Portugal, proche d’un gisement de lithium. Le pays, dont le sous-sol recèlerait 0,4 % des réserves mondiales de lithium, est devenu le leader européen dans la production de ce minerai indispensa­ble dans les batteries des téléphones ou encore des voitures électrique­s, voyant sa production passer de 400 tonnes en 2017 à 25 000 tonnes en 2021. Si l’Union européenne entend développer sa propre filière de batteries électrique­s (« Airbus » des batteries ») pour alimenter son industrie automobile sans dépendre des importatio­ns, l’exploitati­on de cet « or blanc » suscite la résistance de la population des villages environnan­ts en raison de son fort impact environnem­ental sur une région verte et agricole. (© VicVa/Shuttersto­ck)
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Le 10 septembre 2019, Ursula von der Leyen, qui s’exprimait devant le Parlement européen dont elle attendait le vote pour pouvoir prendre la présidence de la Commission, avait présenté son programme pour une Europe plus verte, plus numérique et plus « géopolitiq­ue » (https://ec.europa.eu/commission/ presscorne­r/detail/fr/ip_19_5542). Un thème largement repris et développé dans son discours sur l’état de l’Union européenne, le 16 septembre 2020 devant le Parlement européen [NdlR]. Présenté le 23 septembre 2020, le texte de la Commission européenne a pour ambition de réformer la politique migratoire de l’Union. Il propose de modifier en profondeur le système de Dublin, qui régit les demandes d’asile dans l’Union européenne, et invite les États membres à plus de solidarité dans l’accueil des immigrés arrivant sur le sol européen.
Mis en place en 2012, le « 16 + 1 » est un forum qui regroupe la Chine et les seize pays d’Europe centrale et orientale qui suivent : Estonie, Lettonie, Lituanie, Pologne, République tchèque, Slovaquie, Hongrie, Roumanie, Bulgarie, Slovénie, Croatie, Serbie, Bosnie-Herzégovin­e, Monténégro, Albanie et Macédoine. En 2019, la Grèce rejoint lesdits pays, ce forum devenant alors le « 17 + 1 ». Depuis le 11 octobre 2020, un mécanisme européen pour surveiller les investisse­ments en provenance des pays tiers est appliqué. Basé sur l’échange d’informatio­ns entre les États membres, il vise à mieux protéger les intérêts stratégiqu­es de l’Union européenne. Précisons cependant que Lisbonne prévoit l’organisati­on d’un sommet entre l’Union européenne et l’Inde, afin de diversifie­r les partenaire­s de Bruxelles. Par sa nature, l’Empire portugais (tardivemen­t nommé ainsi) rappelle celui des Phéniciens, dans l’Antiquité méditerran­éenne, ou encore celui de Venise au Moyen Âge, longtemps au centre de l’ « économie-monde » méditerran­éenne.
Outre le Portugal, la CPLP comprend l’Angola, le Brésil, le Cap-Vert, la GuinéeBiss­au, la Guinée équatorial­e, le Mozambique et Sao Tomé-et-Principe. En 2002, après son indépendan­ce, le Timor oriental a rejoint l’organisati­on. Depuis 2018, la France est un État « observateu­r ». En Asie, l’État de Goa (l’ex-Inde portugaise, intégrée à l’Union indienne en 1961), Macao (Chine populaire), l’Indonésie, la Malaisie ou encore les Philippine­s pourraient se rapprocher de la CPLP.
Depuis le 26 octobre 2019, le socialiste António Costa est le chef du XXIIe gouverneme­nt constituti­onnel de la République portugaise, le Parti socialiste disposant d’une majorité relative au sein de l’Assemblée de la République (108 députés sur 230). Le 10 septembre 2019, Ursula von der Leyen, qui s’exprimait devant le Parlement européen dont elle attendait le vote pour pouvoir prendre la présidence de la Commission, avait présenté son programme pour une Europe plus verte, plus numérique et plus « géopolitiq­ue » (https://ec.europa.eu/commission/ presscorne­r/detail/fr/ip_19_5542). Un thème largement repris et développé dans son discours sur l’état de l’Union européenne, le 16 septembre 2020 devant le Parlement européen [NdlR]. Présenté le 23 septembre 2020, le texte de la Commission européenne a pour ambition de réformer la politique migratoire de l’Union. Il propose de modifier en profondeur le système de Dublin, qui régit les demandes d’asile dans l’Union européenne, et invite les États membres à plus de solidarité dans l’accueil des immigrés arrivant sur le sol européen. Mis en place en 2012, le « 16 + 1 » est un forum qui regroupe la Chine et les seize pays d’Europe centrale et orientale qui suivent : Estonie, Lettonie, Lituanie, Pologne, République tchèque, Slovaquie, Hongrie, Roumanie, Bulgarie, Slovénie, Croatie, Serbie, Bosnie-Herzégovin­e, Monténégro, Albanie et Macédoine. En 2019, la Grèce rejoint lesdits pays, ce forum devenant alors le « 17 + 1 ». Depuis le 11 octobre 2020, un mécanisme européen pour surveiller les investisse­ments en provenance des pays tiers est appliqué. Basé sur l’échange d’informatio­ns entre les États membres, il vise à mieux protéger les intérêts stratégiqu­es de l’Union européenne. Précisons cependant que Lisbonne prévoit l’organisati­on d’un sommet entre l’Union européenne et l’Inde, afin de diversifie­r les partenaire­s de Bruxelles. Par sa nature, l’Empire portugais (tardivemen­t nommé ainsi) rappelle celui des Phéniciens, dans l’Antiquité méditerran­éenne, ou encore celui de Venise au Moyen Âge, longtemps au centre de l’ « économie-monde » méditerran­éenne. Outre le Portugal, la CPLP comprend l’Angola, le Brésil, le Cap-Vert, la GuinéeBiss­au, la Guinée équatorial­e, le Mozambique et Sao Tomé-et-Principe. En 2002, après son indépendan­ce, le Timor oriental a rejoint l’organisati­on. Depuis 2018, la France est un État « observateu­r ». En Asie, l’État de Goa (l’ex-Inde portugaise, intégrée à l’Union indienne en 1961), Macao (Chine populaire), l’Indonésie, la Malaisie ou encore les Philippine­s pourraient se rapprocher de la CPLP.
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• Géopolitiq­ue de l’Europe,
« Que sais-je ? » no 4177, Paris, PUF, octobre 2020.
• Le monde vu de Moscou. Géopolitiq­ue de la Russie et de l’Eurasie post-soviétique­s, Paris, PUF, octobre 2020.
Photo ci-contre :
Marcelo Rebelo de Sousa, président du Portugal reconduit pour un mandat de 5 ans lors de l’élection du 24 janvier 2021. Le conservate­ur modéré de 72 ans a obtenu 60,7 % des voix. Ces élections ont toutefois été marquées par une abstention massive de 60,8 %. À noter également, la poussée de l’extrême droite avec l’arrivée à la troisième place du candidat du parti Chega, André Ventura (11,9 % des voix), — une première pour ce pays qui faisait jusquelà exception en Europe. (© Luis Boza/Shuttersto­ck).
Du même auteur • Géopolitiq­ue de l’Europe, « Que sais-je ? » no 4177, Paris, PUF, octobre 2020. • Le monde vu de Moscou. Géopolitiq­ue de la Russie et de l’Eurasie post-soviétique­s, Paris, PUF, octobre 2020. Photo ci-contre : Marcelo Rebelo de Sousa, président du Portugal reconduit pour un mandat de 5 ans lors de l’élection du 24 janvier 2021. Le conservate­ur modéré de 72 ans a obtenu 60,7 % des voix. Ces élections ont toutefois été marquées par une abstention massive de 60,8 %. À noter également, la poussée de l’extrême droite avec l’arrivée à la troisième place du candidat du parti Chega, André Ventura (11,9 % des voix), — une première pour ce pays qui faisait jusquelà exception en Europe. (© Luis Boza/Shuttersto­ck).

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