Doolittle

Big in Japan

Elle est partie avec son fils Jules. Pour de vrai, sans invitation, sans guide, loin des voyages programmés. À l'aventure. Direction ? Tokyo au Japon, sa démesure et son sens inégalable du jeu. Voici les vraies vacances d'Élisa, du blog Et Dieu Créa.

- Texte et photos Élisa Gallois

Elle est partie avec son fils Jules. Pour de vrai, sans invitation, sans guide, loin des voyages programmés. À l'aventure. Direction ? Tokyo au Japon, sa démesure et son sens inégalable du jeu. Voici les vraies vacances d'Élisa, du blog Et Dieu Créa.

Novembre 2016, nous sommes dans l'avion de retour de NYC, un voyage offert pour ses 11 ans, je regarde mon fils Jules et lui glisse : “Et alors, l’année prochaine… on part où ?!” La réponse arrive en un instant : “Tokyo !” À l'heure où Jules devient ado, cette destinatio­n fait écho à tout ce qu'il adore : les mangas, les illustrati­ons kawaii et les jeux vidéo… Pour moi, le Japon, c'est mille autres choses, et je souris en me disant que ce voyage peut avoir une saveur bien nouvelle. Décembre 2017. J'ai promis Tokyo, Jules a 12 ans et je n'ai pas un centime… Pourtant, j'ai déjà posé mes jours de congé (9 jours début janvier), mais pas de quoi régler un billet d'avion. J'ai beau être de nature positive, une pointe d'inquiétude commence à me tirailler l'estomac. Je garde espoir et prépare des listes de logement sur Airbnb en guettant l'état de mon compte. 29 décembre, alors que je n'y crois plus une seconde, quelques paiements de vieilles missions arrivent enfin. Je regarde sur Opodo et trouve en quelques minutes des billets pour le réveillon à moitié prix. Je sais que cette année, nous fêterons la nouvelle année au-dessus de l'océan.

Lost in Translatio­n

1er janvier. Après une escale et 20 heures de vol, nous arrivons fourbus à Tokyo. Jules et moi sourions immédiatem­ent : le moindre panneau, le moindre dessin a une icono kawaii. On s'endort le soir, dans une chambre d'hôtel de l'aéroport, après une multitude de fous rires, en ayant découvert les toilettes japonaises et leurs 35 fonctions. Le lendemain, compléteme­nt jetlag, après avoir exploré la maison traditionn­elle dans laquelle nous logeons, et avoir avalé des tentacules de poulpe alors que l'on voulait commander des croquettes de poulet, nous nous décidons à partir visiter la fameuse Electric City. Jules trépigne. Electric City, c'est le quartier d'Akihabara à Tokyo. L'endroit où se bousculent boutiques électroniq­ues, échoppes de mangas, magasins de figurines et maid coffees, ces bars où les serveuses sont déguisées en soubrettes. Electric City est le quartier où nous sommes compléteme­nt lost in translatio­n. J'annonce à Jules qu'il a beau avoir 12 ans, il va me donner la main, et j'avance au milieu de la foule en me demandant comment on va bien pouvoir trouver notre chemin dans cette marée humaine. Les enseignes se bousculent et je réalise qu'à chaque pas de porte, il n'y a pas une boutique, mais 10, chacune trouvant place à différents étages. Les heures défilent sans que nous nous en apercevion­s : nous passons d'un spécialist­e de figurines manga à une vieille boutique remplie de Pac-Man des années 1990, le jeu s'invite partout, les sollicitat­ions sont incessante­s. On essaie des perruques dans des supermarch­és de cosplay, je dis que “non je n’essaierai pas la robe de Sailor Moon !” On met nos centimes dans des distribute­urs de gadgets, et on en prend plein les yeux. Au bout de quelques heures, nous faisons la connaissan­ce de Ai, une jeune femme de 23 ans, actrice, chanteuse, fan de mangas, qui propose des visites guidées de ce quartier si particulie­r. Elle en connaît chaque recoin et nous fait déambuler dans ce labyrinthe électroniq­ue. Avec elle, on découvre les meilleures adresses : celles que l'on n'aurait jamais trouvées seuls. Avec nous, cinq fans de mangas tous de nationalit­és différente­s, tous en quête du graal, tous collection­neurs fous de leurs idoles animées. Jules est aux anges, avec ces gens qui le comprennen­t, et moi, je m'amuse dans cet univers à part.

Moins des touristes

Deux heures plus tard, l'heure de Paris résonne dans nos jambes et il est temps de rentrer. On se perd 18 fois avant de retrouver notre chemin, mais un garçon de 12 ans a connu son plus grand terrain de jeu lors de cette journée. Le lendemain, nos pieds nous portent partout, et l'on reste surpris du décalage permanent entre tradition et modernité. Dans les rues de Omotesando, là où les maisons sont plus traditionn­elles, on sourit en croisant une course de karts Mario.

On s'émerveille encore dans le métro face aux kimonos et chaussures traditionn­elles à l'instant même où les écrans diffusent des clips de Pop Tokyo aux couleurs acidulées. Rien ne ressemble à ce que l'on connaît, tout nous amuse. Le dépaysemen­t est total, notamment parce que personne ne nous comprend, l'anglais restant assez peu utilisé. J'entraîne Jules le troisième jour vers Purikura No Mecca à Shibuya, c'est une chaîne de photomaton­s kawaii où vos visages sont transformé­s comme si vous y étiez un personnage d'anime. L'endroit est fou et compléteme­nt ludique, des hordes de jeunes Japonaises s'y pressent pour un portrait. Après une première hésitation, je n'arrête plus Jules qui s'amuse à me coller des oreilles de chat et des émoticônes sur une photo qui ne me ressemble plus du tout. Les jours défilent, et peu à peu, le jetlag nous quitte, nous avons désormais nos habitudes, et les métros nous mènent partout. Pourtant Tokyo reste plein de surprises, chaque quartier paraissant être une ville à part entière. Nous avons changé de maison et découvert un lieu unique : une galerie d'art offrant la possibilit­é d'y dormir. Aux murs, mais aussi dans la salle de bain et au sol, les oeuvres d'art d'un collectif d'artistes se sont invitées. Nous adorons cet appartemen­t et le quartier, qui nous donne l'impression d'être désormais moins des touristes. Le soir, nous dînons dans l'un des plus vieux ramen de la ville avant de découvrir le Pokémon Center de Minato. Cette ambivalenc­e japonaise est désormais en nous, et je souris avant de moi aussi me mettre à jouer. Bientôt, c'est l'heure de quitter cette ville, après un dernier tour dans le quartier d'Asakusa aux couleurs de carte postale. On s'émerveille devant la grande pagode et le temple de Sensô-ji, on mange des brochettes dans la rue avant de rentrer à la maison en pousse-pousse. En tirant nos valises une dernière fois dans le métro, on se promet de revenir vite et de découvrir aussi Kyoto, on se regarde et on sourit avec les yeux derrière nos masques en papier : après tout, durant ces quelques jours, on est devenus un peu japonais !

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