Doolittle

Miraculeux

Ils sont de plus en plus nombreux au Brésil. Capables dès le plus jeune âge d’animer des prières devant des centaines d’adultes et surtout de soigner d’une simple apposition de la main, les enfants prêcheurs sont souvent la fierté de leur famille. Et leur

- texte Léo Ruiz & Amelia Dollah photos Sebastian Liste

Le public l’attend depuis bientôt deux heures, quand elle monte enfin sur la scène. “Bonsoir, commençons tout de suite avec une prière”, lance Alani Santos. Les 200 personnes regroupées face à la jeune fille, sur la place Trindade de São Gonçalo, lèvent les mains au ciel et reprennent en choeur les paroles de l’évangile, les yeux fermés, les poings serrés, parfois. “L’heure est venue, crie Adauto, le père d’Alani, une fois la prière terminée. Approchez-vous, approchez-vous !” Le public, un mélange de fidèles et de curieux, est venu pour elle. La misionarin­ha dont les affiches disent d’elle qu’elle fait des miracles. Comment ? Par un simple toucher. Adauto, le pasteur organisate­ur de l’événement, a chauffé la – petite – foule à l’aide d’une flopée de chanteurs gospel, pour la plupart des anciens bandits des favelas de Rio, “récupérés par les évangélist­es”, comme lui. Il doit maintenant prouver qu’Alani, 13 ans, est bel et bien “touchée par Dieu”. Les premiers invités à s’exprimer sont des témoins. Il y a, par exemple, cette femme, venue avec sa mère et sa nièce, un “pur produit de Dieu”, puisque sa soeur – la maman – n’arrivait pas à avoir d’enfant. Mais ça, c’était avant qu’Alani passe sa main sur son ventre. “Vous voyez ? Vous voyez ?” répète Adauto, en cherchant parmi le monde présent les plus mal en point. Une vieille dame qui se déplace difficilem­ent et une femme avec le bras en écharpe sont invitées à les rejoindre, Alani et lui, sur la scène. À la demande de son père, la misionarin­ha touche les zones sensibles des deux femmes. La première marche un peu moins difficilem­ent, la deuxième bouge son bras du haut vers le bas. “Hallelujah !”, crient deux ou trois convaincus. Ce sera tout pour les miracles. Après une dernière prière au cours de laquelle elle passe ses mains sur la tête des gens pour extirper les démons qui somnolent en eux, Alani retrouve les deux amies qui l’ont accompagné­e à côté de la scène, où elle semble plus à l’aise. “Nous aussi, elle nous aide, explique l’une des deux copines. Quand il faut prendre une décision importante, elle nous dit quelle est la meilleure.”

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