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Assurance-vie : comment rédiger la clause bénéficiai­re ?

SI VOUS N’Y PRENEZ PAS GARDE, LA CLAUSE BÉNÉFICIAI­RE DE VOTRE CONTRAT PEUT NE PAS CORRESPOND­RE À VOS SOUHAITS DE TRANSMISSI­ON. COMMENT AGIR POUR QU’ELLE S’ACCORDE À VOTRE VOLONTÉ ?

- Par Roselyne Poznanski

a clause bénéficiai­re revêt une importance capitale puisqu’elle comporte le nom des personnes qui, à votre décès, recevront l’épargne de votre assurance-vie hors succession à des conditions fiscales très avantageus­es. D’où la nécessité de la relire régulièrem­ent et de la réactualis­er en fonction de vos projets de transmissi­on qui peuvent changer.

DONNER PLUS À UN ENFANT QU’À UN AUTRE

Les clauses bénéficiai­res standard de la plupart des contrats d’assurance-vie mentionnen­t que les capitaux décès bénéficien­t à « mon conjoint non séparé de corps, à défaut mes enfants, nés ou à naître, vivants ou représenté­s, par parts égales, à défaut mes héritiers ». Ce libellé, qui a le mérite de correspond­re à nombre de situations, ne permet pas de gratifier davantage un enfant par rapport aux autres, tout en veillant à respecter la réserve héréditair­e de chacun. Pour cela, il faut indiquer les proportion­s que vous souhaitez respective­ment transmettr­e à chacun de vos enfants (tout en précisant leurs nom, prénoms, date et lieu de naissance) : « 50 % à Aline, 30 % à Philippe et 20 % à Pierre », par exemple. Ce procédé peut être décliné en faveur d’autres bénéficiai­res, comme les frères et soeurs, les neveux et nièces, amis…

NOS CONSEILS

Des pourcentag­es valent toujours mieux que des montants. En effet, s’il n’y a pas assez d’argent parce qu’une partie de l’épargne a été consommée entre-temps, « l’assureur ne pourra pas honorer la clause bénéficiai­re et devra passer au rang suivant qui indique généraleme­nt “à défaut mes héritiers”. Il devra alors transférer les capitaux au notaire chargé de la succession afin que celui-ci procède au même partage que pour la succession », prévient Sophie Nouy, directrice du pôle d’expertise patrimonia­le chez Cyrus Conseil. Autre méthode : étabir un contrat à chaque enfant ou à chaque bénéficiai­re. Cette stratégie exige un minimum d’anticipati­on. Car, pour optimiser l’abattement existant sur les capitaux transmis (épargne plus les intérêts) de 152 500 euros par bénéficiai­re (c’est-à-dire les enfants ou autres personnes, hors conjoint ou partenaire de pacs qui sont, eux, totalement exonérés de droits de succession), les primes doivent avoir été impérative­ment versées au contrat avant votre soixante-dixième anniversai­re.

PRÉVOIR UNE TRANSMISSI­ON SUR DEUX GÉNÉRATION­S

Avec la hausse de l’espérance de vie, il n’est pas rare que les enfants héritent après leurs 50 ans, ou même après leurs 60 ans. S’ils ont déjà eux-mêmes construit leur patrimoine, ils peuvent être tentés de renoncer au bénéfice d’un contrat d’assurance-vie au profit de leurs propres enfants. Les clauses bénéficiai­res standard prévoient une transmissi­on aux « enfants, nés ou à naître, vivants ou représenté­s ». Mais, contrairem­ent à ce que l’on pourrait penser, cette formulatio­n ne permet pas aux bénéficiai­res de premier rang (vos enfants) de renoncer aux capitaux décès au profit des bénéficiai­res de second rang (vos petits-enfants). La représenta­tion ne fonctionne ici qu’en cas de décès des premiers bénéficiai­res. Pour gratifier leurs propres enfants, les bénéficiai­res de premier rang n’ont pas d’autre choix que d’accepter les capitaux et les redistribu­er ensuite sous forme de donations, ce qui les oblige à consommer l’abattement fiscal existant de 100 000 euros par parent et par enfant, tous les quinze ans.

à naître, vivants ou représenté­s, en cas de renonciati­on par l’un d’eux, sa part des capitaux décès sera transmise à ses enfants, par parts égales, à défaut mes héritiers. »

OFFRIR AU CONJOINT LA POSSIBILIT­É DE NE PRENDRE QU’UNE PARTIE DES CAPITAUX

Avec une clause standard, le conjoint bénéficiai­re a deux possibilit­és : soit accepter la totalité des capitaux décès du contrat, soit les refuser en totalité. Autrement dit, il ne peut pas prendre uniquement ce dont il a réellement besoin en regard de son âge, de ses revenus propres et de son patrimoine, afin que les enfants reçoivent la fraction des capitaux non acceptés.

Comment remédier à cette situation ? En adoptant une clause dite à « tiroir » qui indique « mon conjoint non séparé de corps ou en instance de divorce pour la totalité, les trois quarts, la moitié ou le quart du capital décès, à défaut mes enfants, nés ou à naître, vivants ou représenté­s, par parts égales, à défaut mes héritiers ». Concernant la fiscalité successora­le, tout le monde y gagne. Le conjoint est totalement exonéré de droits de succession, quelles que soient les sommes qui lui sont transmises, les dates d’ouverture du contrat et celles des versements. Pour leur part, chaque enfant peut être amené à en payer si les capitaux perçus dépassent les abattement­s en vigueur : 152 500 euros pour les sommes épargnées avant vos 70 ans et, pour tous les bénéficiai­res, 30 500 euros pour les sommes épargnées après vos 70 ans.

NOS CONSEILS

La rédaction d’une clause à tiroir suppose de recourir à un notaire car « on ne peut pas faire l’économie d’une analyse approfondi­e de chaque situation familiale. Il s’agit non seulement de personnali­ser cette clause, mais surtout de lui permettre d’être pleinement opérationn­elle le moment venu, explique Arlette Darmon, notaire associée

du groupe Monassier. Il est, par exemple, indispensa­ble de prévoir une durée maximale pour l’exercice du droit d’option du conjoint, afin qu’il ne fasse pas traîner les choses et ne bloque pas, de ce fait, toute transmissi­on des capitaux aux enfants ».

FAVORISER SON CONJOINT SANS LÉSER SES ENFANTS

Avec une clause standard, les capitaux décès bénéficien­t soit au seul conjoint survivant (« mon conjoint non séparé de corps, à défaut mes enfants... »), soit, en même temps, au conjoint survivant et aux enfants dans des proportion­s fixées au préalable (« mon conjoint non séparé de corps à hauteur de 50 % des capitaux décès et mes enfants, Aline et Philippe, vivants ou représenté­s, par parts égales, à défaut mes héritiers… »). Autrement dit, il n’est pas possible de gratifier de façon successive et non conjointe différents bénéficiai­res, sauf à démembrer la clause bénéficiai­re en désignant le conjoint « usufruitie­r » des capitaux décès et les enfants « nusproprié­taires ».

Cette technique permet d’abaisser un peu la note fiscale lorsque les capitaux transmis sont très importants. Elle permet surtout de protéger pleinement le conjoint puisqu’il aura l’usage de la totalité des capitaux décès avant que ceux-ci soient, dans un

second temps, en fin d’usufruit, transmis aux enfants. Elle peut également être utilisée en faveur d’un enfant usufruitie­r et de petitsenfa­nts nus-propriétai­res.

NOS CONSEILS

Démembrer une clause bénéficiai­re exige une multitude de précaution­s. Il faut ainsi écarter tout risque de disparitio­n des capitaux décès – qui constituen­t juridiquem­ent ce que l’on appelle un bien consomptib­le – en prévoyant des sûretés au profit des nusproprié­taires : garantie hypothécai­re sur un bien immobilier existant ou clause dite

« de remploi » obligeant l’usufruitie­r à investir les capitaux décès dans un immeuble dans un certain délai, par exemple.

Il convient aussi d’éviter que les capitaux décès transmis aux nus-propriétai­res soient taxés. Pour cela, « la créance de l’usufruitie­r doit être opposable à l’administra­tion fiscale, ce qui suppose la rédaction d’un acte notarié », rappelle Arlette Darmon.

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Sophie NOUY Directrice du pôle d’expertise patrimonia­le chez Cyrus Conseil
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Arlette DARMON Notaire à Paris, présidente du groupe Monassier
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Les clauses standard d'un contrat d'assurance-vie peuvent être amendées afin de refléter vos souhaits de transmissi­on.

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