DÉPASSER LA SIMPLE PROBLÉMATIQUE MILITAIRE : L’OTAN FACE À L’A2/AD RUSSE
DÉPASSER LA SIMPLE PROBLÉMATIQUE MILITAIRE
Depuis le début de la crise ukrainienne et la réintégration de la Crimée dans le giron russe, la notion de déni d’accès et de bulle A2/AD est redevenue une réalité pour qualifier la possibilité de contester le déploiement de forces et la liberté de manoeuvre dont L’OTAN pensait jouir depuis la fin de la guerre froide. De fait, les alliés ont redécouvert que, désormais, certains États pouvaient interdire à des flottes navales et aériennes l’entrée dans des espaces contestés et se tenaient prêts à le faire, en usant de moyens technologiques robustes, redondants et nombreux. Le cas de la Russie suscite ainsi des questions sur l’adaptation de l’alliance atlantique à ces nouveaux défis.
En septembre dernier, lors de la conférence annuelle de l’air Force Association, le patron des forces aériennes néerlandaises, le général Dennis Luyt, se déclarait « préoccupé » par la prolifération des systèmes de déni d’accès (connus sous l’acronyme A2/AD : Anti-access/ Area Denial) et il appelait l’ensemble de la communauté de défense – et pas seulement les responsables des armées de l’air – à prendre au sérieux cette menace croissante. Ses propos ne faisaient que reprendre et développer un constat déjà fait en 2015 par le commandant suprême des forces alliées en Europe (alors le général Philip Breedlove) sur les capacités russes à mettre en place des «bulles» de déni d’accès, capables de sérieusement limiter la liberté de manoeuvre et donc d’action des aéronefs alliés au-dessus de certaines zones (1).
Ainsi, en quelques mois, un sujet d’apparence technique a fait florès, étant à la fois l’objet de discussions lors du sommet de L’OTAN en mai 2017 à Bruxelles et de conversations privées puisque, selon le ministre letton de la Défense, dans les pays baltes, mêmes les femmes au foyer connaissent cette réalité de L’A2/AD(2). Pourquoi donc cet intérêt si ce n’est pour démontrer que derrière des aspects militaires et technologiques – la façon dont la Russie, mais plus largement, des acteurs à la fois étatiques et non étatiques peuvent mettre en danger la capacité des alliés à opérer en tout temps et en tous lieux –, la question du déni d’accès pose des problèmes ouvertement politiques d’adaptation de l’alliance. Dit autrement, les alliés semblent avoir réalisé que les bouleversements géopolitiques et stratégiques récents ne doivent plus seulement inciter à poursuivre, voire à accélérer, leur transformation technologique, mais avant tout à décider de la panoplie des options nécessaires et disponibles pour garantir leur liberté de manoeuvre.
Les alliés semblent avoir réalisé que les bouleversements géopolitiques et stratégiques récents ne doivent plus seulement inciter à poursuivre, voire à accélérer, leur transformation technologique, mais avant tout à décider de la panoplie des options nécessaires et disponibles pour garantir leur liberté de manoeuvre.
Photo ci-dessus :
Une unité américaine dotée de Stryker passe un pont déployé par le génie allemand en Lituanie. Le positionnement de forces dans les pays baltes est militairement faible, mais politiquement significatif. (© US Army)
UN NOUVEAU RIDEAU DE FER ?
Les raisons d’un tel renouveau sont à trouver dans l’actualité récente, et notamment dans les relations entre L’OTAN et la Russie. Au sommet
du Pays de Galles, en septembre 2014, L’OTAN prend acte des ambitions renouvelées de la Russie, sur fond de crise ukrainienne. Pourtant, peu sont nombreux à comprendre que, pour Moscou, ce qui se joue en Ukraine n’est qu’une forme de réaction à ce qui est perçu comme une succession d’empiétements dans son «étranger proche », dont les États-unis et L’OTAN sont considérés comme responsables. À Bruxelles et dans les capitales alliées, le regard porte cependant sur les manifestations de cette nouvelle façon d’opérer russe, regroupée sous le chapeau confortable de «guerre hybride». Or, dans le même temps, les Russes verrouillent l’accès à leurs frontières en poursuivant la réalisation d’un réseau complexe et redondant de systèmes de défense à la fois antiaérienne et antinavire. Si ce n’est pas un rideau de fer qui descend de l’arctique à la Syrie, on observe toutefois l’apparition de dizaines de «bulles» potentielles de défense, s’appuyant sur les bastions de la péninsule de Kola au nord, tirant parti de l’enclave de Kaliningrad dans la Baltique, recouvrant partiellement la Biélorussie, faisant de la Crimée retrouvée un point d’ancrage pour contrôler la mer Noire, jusqu’au Caucase et dans l’est de la Méditerranée. Ces bulles D’A2/AD ne forment pas une couverture infranchissable, mais sont plutôt une épée de Damoclès, pouvant entrer en fonction à l’amorce d’une crise et servant d’avertissement tant aux pays membres de L’OTAN avec lesquels la Russie partage une frontière qu’à ceux qui pourraient être intéressés par une accession au statut d’allié.
Les conséquences sont triples : • géographiques d’abord, puisque le déni d’accès fragilise certains pays alliés comme les États baltes, de facto quasi enclavés. Face à des systèmes qui transformeraient la mer Baltique et l’enclave de Kaliningrad en espace contesté, seul demeurerait pour les atteindre un mince et fragile cordon terrestre serpentant entre les lacs de Mazurie – via la trouée de Suwalki –, qu’il serait facile de couper en cas d’escalade militaire, comme l’ont montré plusieurs scénarios analysés par la RAND (3) ;
• militaires ensuite, avec le fait que les renforts venant de l’ouest vers l’est – que ce soit par mer, par air ou par terre – seraient vulnérables à des frappes. Les Russes ne se contenteraient pas de bloquer la Baltique, ils interviendraient toujours plus à l’ouest, cherchant à barrer l’accès au passage GIUK – cette ligne de transit nord-atlantique entre Groenland, Islande et Royaume-uni – notamment en y faisant patrouiller leurs sous-marins;
• diplomatiques enfin, puisque L’OTAN, en peine de tenir les promesses de l’article 5 du traité de Washington (le fondement de la défense collective), traverserait une grave crise de confiance, les alliés se condamnant au fait accompli, à l’inaction ou, au contraire, s’engageant dans un processus d’escalade dont nul ne pourrait prédire les suites.
Pourtant, le pire n’est jamais sûr. D’une part, L’OTAN – du fait de la masse états-unienne – conserve une supériorité criante sur la Russie dans tous les domaines, en nombre et en matériels. Cela n’empêche pas, à l’échelon local, que la Russie soit un géant – surtout face à de petits pays : l’ensemble des armées professionnelles baltes aligne environ 15000 soldats, soit à peine plus que la totalité des forces russes dans la seule enclave de Kaliningrad… Cette double dissymétrie – du faible au fort au regard du prisme Russie/otan et du fort au faible d’un point de vue Russie/états baltes – explique la volonté russe de se doter des moyens adéquats pour à la fois exercer et maintenir son influence, tout en se garantissant face à des mouvements hostiles. Sans doute cela guide-t-il la politique étrangère du Kremlin qui affirme ne pas souhaiter l’affrontement, accuse L’OTAN et les États-unis de déstabiliser l’espace euro-atlantique, mais n’hésite pas non plus à montrer ses muscles et à saisir des opportunités – comme en Géorgie en 2008 et récemment en Ukraine. De fait, la Russie multiplie les démonstrations de force et les manoeuvres d’intimidation, et d’abord dans son voisinage immédiat. Elle a ainsi, par la voix de son ambassadeur, averti le Danemark
Face à des systèmes qui transformeraient la mer Baltique et l'enclave de Kaliningrad en espace contesté, seul demeurerait pour les atteindre un mince et fragile cordon terrestre serpentant entre les lacs de Mazurie – via la trouée de Suwalki –, qu'il serait facile de couper en cas d'escalade militaire.
qu’elle prendrait ses navires pour cibles de frappes nucléaires s’il rejoignait le projet de défense antimissile de L’OTAN, tandis que Vladimir Poutine lui-même jurait d’éliminer la menace que constituerait une Suède devenant membre de l’alliance(4). Et le grand exercice conjoint «Zapad 2017» de septembre en Biélorussie, à quelques encablures de la percée de Suwalki, constitue, au moment d’écrire ces lignes, une grande incertitude quant à son ampleur et ses buts réels.
RÉALITÉS DE L’A2/AD RUSSE
Ailleurs, les Russes «perturbent le jeu» en multipliant les dispositifs de déni d’accès dans les zones considérées comme stratégiques et susceptibles d’être déstabilisées (5). Ces mesures de défense illustrent le concept d’a2/ AD défini comme « l’ensemble des stratégies militaires destinées à interdire à un adversaire d’opérer dans, depuis ou près d’une zone contestée(6) ». L’idée n’est pas nouvelle : plutôt que d’attendre qu’un adversaire se déploie et puisse tranquillement passer à l’offensive, il faut le tenir à l’écart de toutes les façons possibles, et le cas échéant, être capable de l’engager le plus loin
Plus qu'un réseau, le déni d'accès «à la russe» constitue un système de systèmes, agencé de façon à recouper défense aérienne et côtière, tout en étant capable de traiter des objectifs terrestres.
possible, pour lui infliger des pertes telles qu’il renoncera à son projet. Ainsi, on combine des capacités de déni d’accès (anti-access), sur un plan stratégique, et d’interdiction de zone (area denial), sur un plan opératif et tactique. Cette stratégie – originellement conceptualisée par l’armée populaire de libération chinoise – résonne dans la culture stratégique russe, qui a toujours identifié un besoin de disposer d’une profondeur stratégique. Initialement fondé sur l’acquisition de terres et de zones tampons que la recomposition postsoviétique a fait fondre en même temps que les moyens technologiques réduisaient leur nécessité, le déni d’accès «à la russe» s’appuie sur l’installation d’un parapluie défensif multicouche – échelonné verticalement du sous-marin jusqu’à l’espace et horizontalement en agrégeant des dispositifs de défense à très courte, moyenne et longue portée – fixe (comme des mines) et mobile (pour assurer une meilleure survivabilité). Plus qu’un réseau, il constitue un système de systèmes, agencé de façon à recouper défense aérienne et côtière, tout en étant capable de traiter des objectifs terrestres. On pense bien entendu à la publicité faite autour des systèmes S-300 et S-400 – capables en théorie d’identifier et de détruire tout type de cibles, jusqu’aux drones et aux avions furtifs – alors que la dernière génération (S-500 Triumfator-m) entrera en service autour de 2020.
Plus concrètement, l’exemple de la Crimée montre comment la presqu’île a été transformée en une véritable forteresse qui non seulement interdit une reprise par la force, mais en fait un porte-avions insubmersible contrôlant les deux tiers de la mer Noire et s’opposant ainsi aux marines otaniennes de la région (notamment la marine turque). Ainsi, on a observé le renforcement quantitatif et qualitatif des capacités aériennes, l’intérêt renouvelé pour la Flotte de la mer Noire, devenue prioritaire, tandis que les forces terrestres et notamment l’artillerie suivaient ce même mouvement. Enfin, les capacités de défense côtière (systèmes Bastion ou K-300P) et aérienne (du missile à très courte portée Pantsir-s au S-400 à moyenne portée) n’ont pas non plus été négligées(7). Ailleurs, comme à Kaliningrad, le déploiement de missiles balistiques à courte et moyenne portée Iskander-m rajoute aux angoisses, quand on sait que ces missiles peuvent en théorie atteindre cinq capitales européennes et que leurs têtes peuvent emporter des charges nucléaires. Enfin, les alliés peuvent juger sur le terrain des effets de ces missiles puisque ces systèmes ont été déployés en Syrie, autour des bases de Tartous et Lattaquié. De même, des tirs de missiles Kalibr, largement commentés dans la presse, ont eu lieu à plusieurs reprises depuis la mer Caspienne ou la Méditerranée sur des positions tenues par des forces hostiles au régime de Bachar al-assad. Ces bulles d’a2/ AD rappellent donc les vues diplomatiques de Moscou tout en servant de vitrine pour l’industrie d’armement russe.
COMMENT RÉPONDRE : TECHNOLOGIQUEMENT, STRATÉGIQUEMENT ET POLITIQUEMENT ?
Pour L’OTAN, il ne suffit pas de simplement constater que la menace existe et qu’elle s’appuie sur une panoplie de moyens
potentiellement dangereux (8). Quelques voix se sont d’ailleurs élevées pour qu’on n’utilise plus le terme D’A2/AD, niant au concept toute nouveauté, et jugeant qu’il n’existe jamais de « no-go zones » absolues, puisque, finalement, il suffit d’avoir suffisamment de volonté pour pénétrer et détruire ces bulles (9). Néanmoins, ne pas en parler ne fait pas disparaître le danger, et d’autres ont souligné au contraire que L’A2/AD fait porter d’autres risques, politiques cette fois. En effet, la multiplication des bulles signifie en filigrane que le parapluie défensif que les ex-pays membres du Pacte de Varsovie ont souhaité acquérir en rejoignant L’OTAN n’a plus les mêmes vertus que par le passé. En effet, si les forces otaniennes ne peuvent intervenir et se garantir un accès permanent là où leurs intérêts l’exigent, l’alliance s’expose à une plus grande fragilité interne, à des tensions croissantes entre alliés, et à une déstabilisation dont profiteraient des adversaires potentiels.
L’adaptation au défi de L’A2/AD est donc politique : il nécessite une compréhension globale du problème et un traitement holistique. Cela commence par la juste prise en compte des moyens financiers qui forment le socle de toute stratégie à long terme. Les décisions prises au sommet de 2014 allaient d’ailleurs dans le bon sens, les alliés s’engageant à augmenter les budgets de défense jusqu’à 2% de leur PIB. Las ! Après deux ans d’efforts, et alors qu’un tiers des alliés, dont beaucoup à l’est, acceptent ces sacrifices, d’autres nations considèrent qu’on peut encore délayer, attendre et repousser ces nécessaires ajustements, soit parce que la Russie n’est pas la menace principale, soit pour d’autres raisons de politique intérieure (10).
Le second point est plus dans les cordes de ce que L’OTAN sait et peut faire : il s’agit de démontrer ses capacités et sa détermination à pouvoir protéger ses populations. Cela concerne principalement les pays baltes, la Pologne et la Roumanie, autant de pays qui, depuis 2014, ont été l’objet d’attention au travers d’une série de mesures importantes, d’abord sous chapeau américain avec l’initiative européenne de réassurance (European Reassurance Initiative) et l’opération « Atlantic Resolve» qui accroissent la présence des unités américaines en Europe(11). Dans la foulée, L’OTAN a lancé son plan d’action « réactivité » (Readiness Action Plan ou RAP), dont la Force interarmées à haute réactivité (Very High Readiness Joint Task Force, ou VJTF) est le fer de lance. Parallèlement, une série de grands exercices multinationaux ont eu lieu, dont « Trident Juncture 2015 » qui, avec plus de 36000 militaires, a atteint un niveau inégalé depuis la fin de la guerre froide. Enfin, au sommet de Varsovie, en juillet 2016, les alliés se sont entendus sur le déploiement par rotation de quatre bataillons multinationaux, situés dans les États baltes et en Pologne, et dont les éléments se sont mis en place au cours du premier semestre 2017. L’ensemble forme une présence avancée renforcée (Enhanced Forward Presence) cherchant à dissuader la Russie et à montrer la cohésion de l’alliance. Si l’on peut raisonnablement songer que quatre bataillons sont une force très modeste – l’étude de la RAND de 2016 suggérait un minimum de sept brigades, dont trois lourdes ! –, ils constituent cependant une preuve de l’engagement concret de L’OTAN en faveur de ses alliés.
Cela n’obère pas la poursuite d’une réflexion tous azimuts sur les adaptations, cette fois d’un point de vue technologique. L’OTAN en tant que telle ne disposant pas de forces propres, elle a revu son NATO Defense Planning Process par lequel les alliés identifient puis s’engagent à combler les lacunes capacitaires constatées. Cela ne date pas d’hier puisque, déjà après la Libye, les alliés s’étaient rendu compte de la nécessité de remiser leurs certitudes, après une décennie d’opérations dans des zones d’accès semi-permissives (l’ex-yougoslavie) ou permissives (Afghanistan). La menace A2/AD en remet une couche et, sans qu’on s’en étonne, les premiers à réfléchir aux réponses à apporter sont les forces aériennes : que faire en cas d’absence de supériorité – sans parler de suprématie – aérienne? Face à la prolifération des systèmes sol-air perfectionnés, on songe à l’amélioration de la protection et à l’entrée en service de nouveaux missiles, par exemple air-sol, pour se tenir hors de portée de l’adversaire. D’un autre point de vue, mais aussi partiellement aérien, OTAN et États-unis dépendent largement de leurs flottes de drones pour acquérir du renseignement : cette capacité JISAR (Joint Intelligence Surveillance Reconnaissance) offre un flot d’informations en temps quasi réel et sert
Après deux ans d'efforts, et alors qu'un tiers des alliés, dont beaucoup à l'est, acceptent ces sacrifices, d'autres nations considèrent qu'on peut encore délayer, attendre et repousser ces nécessaires ajustements, soit parce que la Russie n'est pas la menace principale, soit pour d'autres raisons de politique intérieure.
d’yeux. Récemment, L’OTAN a fait le choix du système AGS (Alliance Ground System ou capacité alliée de surveillance terrestre) et des drones Global Hawk, mais rien ne dit s’ils seront capables d’opérer dans un tel environnement contraint.
En outre, la problématique A2/AD invite à reconsidérer les moyens offensifs capables de «casser» ou pénétrer la bulle. L’acquisition de missiles de croisière et la disponibilité de ceux-ci sont une fois de plus une priorité, quand les opérations passées ont montré la dépendance des Européens vis-à-vis des États-unis. Les autres composantes de milieu mènent quant à elles des réflexions sur le retour à leur savoir-faire primaire : les forces navales (via MARCOM, l’état-major situé à Northwood) soulignent le nécessaire retour aux principes de la lutte au-dessous de la surface contre le danger sous-marin, mais aussi le renouveau de la guerre des mines, tandis que les forces terrestres pensent aux gros bataillons et constatent le rôle accru des blindés – et ce, alors que la plupart des pays européens se sont allègrement délestés de leurs chars depuis une décennie.
Cette considération technologique – sur les moyens à intégrer dans la pénétration des bulles A2/AD – va de pair avec une prise de conscience d’un retour de balancier : après vingt ans de contre-insurrections et de guerres expéditionnaires, L’A2/AD sert de variable pour revenir aux bases de la défense territoriale et, sans doute pour L’OTAN, aux principes de la défense collective en Europe. Le déni d’accès ne doit donc pas simplement être perçu comme un obstacle, mais bien comme l’aiguillon qui force les alliés à aligner réflexion politique et stratégique, à discuter des principes de dissuasion conventionnelle et à se donner les moyens de demeurer pertinents dans un contexte de tensions dont on peut dire qu’elles n’iront sans doute pas dans un futur prochain vers un apaisement total. Notes
(1) Voir les déclarations de Philip Breedlove en septembre 2015 (https://www.defensenews.com/global/europe/2015/09/28/nato-general-worried-about-russian-military-build-up-in-syria/) et de Dennis Luyt en septembre 2016 (http://www.military.com/daily-news/2016/09/19/nato-airchief-concerned-by-russias-deployment-of-sams.html).
(2) Janis Garisons, lors d’une conférence sur « NATO adaptation and multinational response forces » en mai 2016 (https://forsvaret.no/ifs/ifs-conference_may_joining-forcesto-improve-natos-readiness)
(3) Paul Mcleary, « Meet the New Fulda Gap », Foreign Policy, 29 septembre 2015 (http://foreignpolicy.com/2015/09/29/ fulda-gap-nato-russia-putin-us-army/) et David A. Shlapak et
Si l'on peut raisonnablement songer que quatre bataillons sont une force très modeste – l'étude de la RAND de 2016 suggérait un minimum de sept brigades, dont trois lourdes ! –, ils constituent cependant une preuve de l'engagement concret de L'OTAN en faveur de ses alliés.
Michael Johnson, Reinforcing Deterrence on NATO’S Eastern Flank: Wargaming the Defense of the Baltics, RAND Corporation, Santa Monica, 2016 (https://www.rand.org/ pubs/research_reports/rr1253.html).
(4) Sur le Danemark, par exemple, http://www.telegraph. co.uk/news/worldnews/europe/denmark/11487509/russiawarns-denmark-its-warships-could-become-nuclear-targets. html et, sur la Suède, http://www.intelligencerpost.com/putinwarns-sweden-joining-nato-vow-eliminate-threat/.
(5) Isabelle Facon, « La menace militaire russe : une évaluation », Les Champs de Mars, no 29, 2017, p. 47
(6) Selon la définition qu’en donne Sam J. Tangredi dans Anti-access Warfare. Countering A2/AD Strategies, Naval Institute Press, Annapolis, 2013, p. 1.
(7) George Vișan et Octavian Manea, « Crimea’s transformation into an access-denial base », Black Sea in a Access Denial Age, 14 juillet 2015 (http://www.roec.biz/bsad/portfolio-item/crimeas-transformation-into-an-access-denial-base/) et Robert Hazemann, « L’évolution de la présence des forces armées russes en Crimée depuis 2014 », Revue de Défense nationale, no 802, été 2017, p. 42-49.
(8) Une partie de ces conclusions est empruntée à G. Lasconjarias et A. Marrone, How to respond to Anti-access/area Denial (A2/AD)? Towards a NATO counter A2/AD strategy, NDC Conference Report 01/16, Rome, janvier 2016 (http://www.ndc.nato. int/download/downloads.php?icode=480)
(9) Voilà ce que dit en substance le Chief of Naval Operations américain, l’amiral Richardson, soutenu par quelques universitaires comme Sam J. Tangredi (« CNO vs A2AD: Why Admiral Richardson is Right about Deconstructing the A2/AD Term », The Navalist, https://thenavalist.com/ home/2017/1/8/dissecting-the-buzz-words-that-control-thedefense-debates)
(10) L’OTAN agrège l’ensemble des chiffres et des données fournies par les pays sur leurs budgets de défense et sur leurs dépenses, et l’ensemble est publié régulièrement. Voir par exemple une synthèse pour les années 2009-2016 selon un communiqué du 13 mars 2017 (http://www.nato.int/nato_ static_fl2014/assets/pdf/pdf_2017_03/20170313_170313pr2017-045.pdf).
(11) Dotée d’un budget de 3,42 milliards de dollars pour 2017, l’european Reassurance Initiative manifeste l’importance de l’europe et des alliés aux yeux de Washington, sans toutefois qu’on parle de réinstaller les trois brigades lourdes dissoutes ou rapatriées depuis 2013.