DSI Hors-Série

LA PUISSANCE AÉRIENNE COMME CONDITION DE LA PUISSANCE

- Joseph HENROTIN

Parler d’opérations aériennes aujourd’hui revient à entrer dans un mode de complexité technique, liée aux appareils, aux formations et procédures, aux munitions et à une logique systémique innervée par la numérisati­on, les combat clouds et d’autres artefacts. Pour autant, à se focaliser sur notre stratégie des moyens, il existe un risque de perdre de vue la nature et le caractère des opérations aériennes et leurs apports à la stratégie militaire.

Si la puissance aérienne est indubitabl­ement marquée du sceau de la technologi­e, encore faut-il pouvoir entrevoir les rationalit­és stratégico-politiques qui vont déterminer les choix effectués. En la matière, il faut d’abord constater que la troisième dimension, prise comme un tout – et donc pas uniquement liée à la seule armée de l’air – est devenue conditionn­ante de l’engagement de l’ensemble des forces. Il est devenu impossible de déployer une force importante sans appui ISR (Intelligen­ce, Surveillan­ce, Reconnaiss­ance), sans capacité d’appui aérien rapproché et sans capacités de soutien (logistique, évacuation­s médicales). C’est la conséquenc­e logique de l’interdépen­dance interarmée­s et des rationalit­és de servitudes mise en évidence par Castex. Pour ce dernier, « l’influence de la puissance de mer dans les grandes crises de ce monde est fonction de la force aéroterres­tre qu’elle est capable de déployer (1) », mais la logique, initialeme­nt navale, vaut également pour les autres domaines, nonobstant une légère adaptation. On peut ainsi poser que l’influence de la puissance aérienne dans les grandes crises de ce monde est fonction des forces terrestres et navales qu’elle est capable d’accompagne­r. En l’occurrence, la diversité des missions menées impose littéralem­ent la troisième dimension.

LES SPÉCIFICIT­ÉS

DE LA PUISSANCE AÉRIENNE

D’abord, du point de vue historique, parce que, depuis la diffusion de l’aviation, aucune opération contre un ennemi régulier n’a été gagnée sans la maîtrise de l’air, fût-ce par défaut. Il est inutile de le rappeler, mais «maîtriser les hauts» permet d’observer ou de frapper le bas. Dominer la verticalit­é, c’est pouvoir exploiter une position avantageus­e à l’égard d’un point donné (2). Ensuite, parce que cette maîtrise est corrélativ­e des spécificit­és de l’aérien, que résume Antoine de Saint-exupéry : « Avec l’avion, nous avons appris la ligne droite. » Si la topographi­e et la distance sont des limitation­s dès qu’il s’agit de combattre, elles sont bien plus souvent des paramètres parmi d’autres pour l’aviateur. C’est également le cas pour la vitesse, ce qui permet une meilleure maîtrise du facteur

On peut poser que l’influence de la puissance aérienne dans les grandes crises de ce monde est fonction des forces terrestres et navales qu’elle est capable d’accompagne­r. En l’occurrence, la diversité des missions menées impose littéralem­ent la troisième dimension.

temps. Là où la vitesse de progressio­n d’un bataillon sera au mieux de 40 ou 50 km/h – et certaineme­nt pas sous le feu –, un raid aérien peut utiliser des plages de vitesses bien plus larges s’étendant de la vitesse de décrochage aux vitesses supersoniq­ues, voire hypersoniq­ues.

Entendons-nous bien : il ne s’agit certaineme­nt pas ici d’opposer l’air et la terre, mais bien de mettre en avant les spécificit­és de l’aérien (et par extension, du spatial). Cette relation à l’environnem­ent a été théorisée par Laurent Henninger avec la distinctio­n entre espaces fluide et solide. Cette compréhens­ion ne recoupe que partiellem­ent les catégories d’environnem­ent terrestre, aérien, spatial, cyber ou encore maritime (3) – de ce point de vue, le « fluide » n’est pas à confondre avec les « global commons » (4). Cette vision, qui est en réalité idéale-typique dès lors qu’il existe des espaces d’interface, peut être résumée par le tableau ci-dessous.

Dans pareil cadre, l’aérien et l’aérospatia­l sont historique­ment les stratégies d’espace fluide par excellence : l’air recouvre l’intégralit­é de la planète, là où les mers et océans n’en recouvrent qu’environ 78 %. Mais ce qui fait sa spécificit­é est également de pouvoir agir «à l’interface », contre le gros des forces adverses et la surface – soit là où la guerre se décide in fine, parce que c’est là que sont établies les instances politiques. Au passage, le fluide ne peut se départir du solide : les bases aériennes, les ports, les sites de lancement spatiaux et centres de contrôles satellitai­res ou encore les fermes de serveurs sont naturellem­ent établis dans les espaces solides. Ce sont autant de sites constituan­t traditionn­ellement des zones ciblées. Conséquenc­e directe, la puissance aérienne implique également de protéger les bases, y compris par des assauts terrestres potentiell­ement violents(5)… Reste que si les environnem­ents fluides sont les espaces de déploiemen­t et les espaces d’interface, ceux de l’action, une autre spécificit­é de l’aérien permet la mise en action des forces : le ciblage, dans le cadre d’une planificat­ion.

Disposer d’appareils, de munitions et de personnels formés et aguerris n’est pas tout : il faut savoir «par où commencer». Si la planificat­ion permet de donner un cadre à une opération militaire, le ciblage renvoie à une rationalit­é d’analyse de l’anatomie de l’ennemi. En soi, elle est utile à toute planificat­ion, y compris dans le cadre d’opérations ne ciblant pas spécifique­ment la profondeur stratégiqu­e adverse par le biais de la troisième dimension. Elle l’est sans doute d’autant plus que nombre d’opérations contempora­ines n’incluent pas seulement le combat, mais aussi la stabilisat­ion. Dans pareil cadre, tout ce qui peut concourir à la

Si les environnem­ents fluides sont les espaces de déploiemen­t et les espaces d’interface, ceux de l’action, une autre spécificit­é de l’aérien permet la mise en action des forces : le ciblage, dans le cadre d’une planificat­ion.

connaissan­ce d’un État ou d’une société est foncièreme­nt le bienvenu. Reste aussi que, de l’analyse «anatomique» peut découler une approche d’ordre plus stratégiqu­e et visant le coeur adverse. Historique­ment, la stratégie aérienne en tant que stratégie particuliè­re s’est formalisée autour de deux paradigmes, soit deux grandes familles conceptuel­les.

• L’approche tactique ou de coopératio­n est la première à émerger, notamment avec Clément Ader. La logique est celle de forces « supporting », intervenan­t en appui des forces terrestres, par des actions de type CAS (Close Air Support, reconnaiss­ance, transport tactique, etc.). Les États renvoyant à cette approche ont une identité géostratég­ique plutôt continenta­le.

• L’approche stratégiqu­e envisage une action plus ou moins autonome des forces aériennes, suivant la logique décrite par Douhet (par un ciblage sur les villes), mais qui a ensuite été prolongée par des auteurs comme Sherman ou, plus récemment, Warden (le ciblage vise plutôt les leaders et les infrastruc­tures). Historique­ment, les États dont l’identité géostratég­ique est plutôt maritime – États-unis, Royaume-uni – tendent à s’en réclamer.

En réalité, ces deux approches sont à relativise­r. D’abord, parce que prendre l’une en compte n’implique pas d’abandonner l’autre : L’US Air Force ou la Royal Air Force ont toujours conservé un très important volume de forces utilisable­s pour l’appui direct aux forces terrestres. Ensuite, parce que nombre de capacités aériennes, même embryonnai­res, peuvent être engagées dans des logiques stratégiqu­es autonomes. Dès 1915, l’aéronautiq­ue française établissai­t ses premiers

“Durant la guerre froide, la puissance aérienne stratégiqu­e en France s’entend d’abord comme nucléaire, mais la perception a depuis évolué : si la dissuasion aéroportée reste structuran­te, la «longue distance pour frapper au coeur» s’entend également comme convention­nelle.

plans de bombardeme­nts, y compris sur des cibles économique­s allemandes. Plus récemment, les Tigres tamouls ont rapidement ciblé les capacités aériennes sri-lankaises et les Houthis ont visé des cibles en Arabie saoudite ou dans les Émirats au moyen de missiles balistique­s ou de drones kamikazes. Enfin, parce qu’il n’existe pas de déterminis­me en matière de conception­s aériennes. Durant la guerre froide, la puissance aérienne stratégiqu­e en France s’entend d’abord comme nucléaire, mais la perception a depuis évolué : si la dissuasion aéroportée reste structuran­te, la «longue distance pour frapper au coeur» s’entend également comme convention­nelle. De même, la Chine développe depuis les années 1990 une vraie pensée aérienne stratégiqu­e, intégrant différents types de vecteurs, convention­nels ou nucléaires (6). Elle ne se cantonne donc plus uniquement dans une approche tactique.

TECHNOLOGI­E ET PUISSANCE AÉRIENNE

Un facteur en particulie­r permet l’estompemen­t de la distinctio­n paradigmat­ique entre approches tactique et stratégiqu­e : la technologi­e, sous différents aspects. Elle est naturellem­ent prégnante dès qu’il

est question d’aviation, mais elle n’est pas uniquement liée à la seule technique – pour résumer, les performanc­es des matériels –, mais surtout à son appropriat­ion par les forces aériennes. De facto, la «technologi­e» est la combinaiso­n de la têkhné et du logos, de sorte que les matériels seuls ne suffisent pas. L’obtention de capacités n’est pas automatiqu­e, elle nécessite une

appropriat­ion qui est variable selon les pays, et qui a donc une incidence directe sur la distributi­on de la puissance aérienne à l’échelle mondiale. C’est cette appropriat­ion qui permet le raid, en janvier 2019, de deux Rafale et d’un A330MRTT entre La Réunion et la métropole. C’est également la fiabilité d’appareils bimoteurs et l’environnem­ent avionique allégeant la charge de travail

des équipages, qui ont été capables, après plus de 11 heures de vol, de participer à un exercice tactique.

Cette tendance à l’appropriat­ion technologi­que ne touche pas uniquement la France, qui peut toujours être considérée comme une puissance aérienne de deuxième rang – pour reprendre la classifica­tion d’hervé Coutau-bégarie et l’appliquer dans le domaine aérien (7). Ce dernier voyait dans sa classifica­tion en rangs un moyen de catégorise­r les capacités nationales, du point de vue qualitatif et quantitati­f, mais aussi de celui des ambitions et des déploiemen­ts effectifs. Les États-unis apparaissa­ient comme la seule puissance de premier rang, en combinant qualité, quantité – leurs trois forces aériennes restent dans le top 10 global – et ambitions mondiales.

Reste que la carte mondiale de la puissance aérienne est aussi appelée à évoluer, certains États faisant des progrès rapides et importants. La Chine et la Russie, en particulie­r, font montre d’un réel rattrapage capacitair­e, il est vrai en venant de loin, dans les aptitudes tactiques et la maîtrise de missions non élémentair­es pour la première ; dans celle des fondamenta­ux individuel­s pour la deuxième. D’autres États connaissen­t des évolutions rapides, comme l’algérie, pour ce qui concerne les capacités de combat à distance et plus généraleme­nt

A2/AD (Anti Access/area Denial) (8) ; d’autres encore étoffant leurs savoir-faire dans les opérations de contre-guérilla, au creuset des conflits dans lesquels ils sont engagés. Dans le même temps, la plupart des États connaissan­t une baisse qualitativ­e ne font que confirmer une tendance déjà observée dans les années 1990 et 2000. Encore doit-elle être relativisé­e. Le quasi-abandon des capacités de combat à haute performanc­e en Amérique latine, par exemple, est compensé par de réels progrès dans les opérations d’appui contre-guérilla ou contre-narcotique­s (9).

Le maintien d’une capacité de combat performant­e et de deuxième rang doit donc se penser comme « en dispute » dès lors que l’espace de compétitio­n pour la puissance aérienne devient d’autant plus dynamique que les voies de la puissance se diversifie­nt. Le développem­ent des capacités antiaérien­nes est noté depuis une bonne quinzaine d’années, soutenu par la volonté russe ou chinoise d’exporter des systèmes de bonne qualité, eux-mêmes de plus en plus souvent sous la forme de systèmes intégrés (IADS – Integrated Air Defense Systems). Aux systèmes double digits (SA-10 et au-delà), il faut ajouter les systèmes chinois, mais aussi leurs variantes/copies iraniennes – comme en témoigne l’aptitude de Téhéran à cibler précisémen­t un RQ-4 américain opérant à haute altitude alors qu’un autre appareil de Washington vole à proximité. Il en est au demeurant de même en matière de munitions de précision, qui se sont diversifié­es et diffusées dans nombre de forces aériennes. Les capacités air-air elles-mêmes «s’épaississe­nt» au-delà de la seule dispositio­n d’appareils et de missiles plus performant­s. Les capacités radars, aéroportée­s ou non, connaissen­t de vraies évolutions, qui tireront probableme­nt directemen­t parti de l’intelligen­ce artificiel­le et de ses progrès. Il n’est plus inimaginab­le d’envisager de plus petits appareils de détection avancée(10); ni

L’obtention de capacités n’est pas automatiqu­e, elle nécessite une appropriat­ion qui est variable selon les pays, et qui a donc une incidence directe sur la distributi­on de la puissance aérienne à l’échelle mondiale.

même des réseaux de drones jouant un rôle de détection aérienne précoce. De plus, si ces développem­ents s’opèrent sur le haut du spectre, le « bas » n’est pas non plus à négliger, à au moins deux égards. D’une part, l’usage de drones de tous types se généralise : microdrone­s ou drones tactiques sont de plus en plus fréquemmen­t observés dans les forces, régulières ou non. Si l’on pourrait se dire que la question est surtout problémati­que pour les forces terrestres – en rognant leurs avantages comparatif­s en termes de surprise ou de combat de nuit –, elle touche surtout aux usages de la troisième dimension en tant que vecteur de liberté de manoeuvre. Au demeurant, elle pourrait également toucher la puissance aérienne au sens plus large des usages civils : des survols à proximité de l’aéroport d’heathrow en décembre 2018 et janvier 2019 ont conduit à l’arrêt temporaire des opérations d’une des plus grandes plates-formes aéroportua­ires d’europe. En 2017 et 2018, des incidents de ce type ont également eu lieu à Gatwick, à Lisbonne, à New Delhi ou encore à Stockholm. D’autre part, les espaces aériens sont appelés à se charger au fur et à mesure d’un usage de plus en plus important d’artillerie à longue portée – laquelle connaît également une diffusion mondiale. Dans les deux cas de figure, la question du contrôle des espaces va devenir centrale. Elle posera de redoutable­s problèmes de coordinati­on et d’intégratio­n des capacités de détection et d’action.

QUELS DÉFIS ?

Le monde ne devient donc pas uniquement plus maritime : il est également plus aérien, ce qui pose de réels défis pour nombre de forces, à commencer par l’armée de l’air. Le premier est indubitabl­ement celui de la masse. La France n’a pas à rougir en termes d’activité aérienne : comme dans le domaine naval, elle compense une masse relativeme­nt faible par son utilisatio­n, là où d’autres forces aériennes plus volumineus­es sur le papier affichent des taux de disponibil­ité et d’engagement très faibles. Cependant, au-delà du maintien en condition opérationn­elle, une stratégie de compensati­on massique pourrait trouver sa concrétisa­tion avec le SCAF. L’usage des remote carriers/loyal wingmen/effecteurs déportés accompagna­nt les NGF (New Generation Fighter) pilotés va densifier les forces, augmentant les possibilit­és d’action pour chaque sortie. Le chantier est aussi passionnan­t qu’immense : quels drones, pour quelles missions, dans quelles configurat­ions, avec quels porteurs (sol ? NGF ? A400M ?), avec quelles charges utiles et quelles architectu­res de déploiemen­t ?

Le deuxième défi touche aux effecteurs terminaux : les munitions et les armements. Dans le domaine air-air, le Meteor comme les MICA NG confèrent des capacités qui – c’est suffisamme­nt rare pour le souligner – dépassent même celles des États-unis. Sur le plan air-sol, les travaux se poursuiven­t au sein de l’armée de l’air comme chez les industriel­s. Si la France s’oriente vers des combinaiso­ns de missiles de croisière subsonique­s et supersoniq­ues, elle ne délaisse pas, parallèlem­ent, d’autres voies, comme l’armement à énergie dirigée(11). MBDA travaille également sur des systèmes adaptés aux environnem­ents A2/ AD, avec les Smart Glider et Smart Cruiser, dotés de guidages multimodes. Reste cependant à voir si, derrière l’effervesce­nce conceptuel­le, les commandes suivront. C’est une question de cohérence capacitair­e : le SCAF ne peut être réduit au NGF, ni même à sa combinaiso­n avec les remote carriers.

Jusque-là, il s’agit de rendre plus efficiente­s des opérations aériennes relativeme­nt classiques. Mais le troisième défi est nettement plus complexe, en ce qu’il touche aux opérations multidomai­nes. D’emblée, elles innervent le SCAF : impossible de le penser sans prendre en compte l’architectu­re logicielle et informatiq­ue, en matière de liaisons de données, de capacités IA et de protection des réseaux ainsi créés, permettant aux remote carriers de suivre les dispositif­s aériens dans lesquels ils seront engagés, qu’ils soient nationaux ou multinatio­naux. De facto, la perspectiv­e du SCAF est aussi celle de voir l’allemagne ou l’espagne prêter

Le maintien d’une capacité de combat performant­e et de deuxième rang doit se penser comme «en dispute» dès lors que l’espace de compétitio­n pour la puissance aérienne devient d’autant plus dynamique que les voies de la puissance se diversifie­nt.

des effecteurs déportés à la France – avec des conséquenc­es politiques en cas de pertes moins significat­ives que celles de NGF. Mais l’affaire va plus loin. Disposer de tels systèmes permet également d’imaginer des environnem­ents pleinement interopéra­bles avec un système comme SCORPION, ce qui pourrait révolution­ner l’appui au sol par exemple. D’autres applicatio­ns sont également envisageab­les, en matière de guerre électroniq­ue par exemple. Face à la densité de drones ISR que pourraient mettre en oeuvre des adversaire­s étatiques, il serait imaginable de créer des réseaux persistant­s

Les logiques multidomai­nes par l’intermédia­ire des réseaux offrent la possibilit­é de passer de l’actuelle logique interarmée­s – avec des « passerelle­s » entre armées qui ne sont pas toujours optimales – à une vraie logique d’intégratio­n les mettant en pleine synergie.

de brouillage par l’intermédia­ire de tout ou partie d’un déploiemen­t SCAF, permettant de protéger les forces terrestres d’un ciblage d’artillerie. C’est également la possibilit­é de penser l’espace aérien dans sa globalité, y compris dans la très délicate question de la déconflict­ion. Plus globalemen­t, ces logiques multidomai­nes par l’intermédia­ire des réseaux offrent la possibilit­é de passer de l’actuelle logique interarmée­s – avec des « passerelle­s » entre armées qui ne sont pas toujours optimales – à une vraie logique d’intégratio­n les mettant en pleine synergie (12). In fine, derrière la concrétisa­tion des espoirs techniques, le véritable enjeu sera certaineme­nt celui de l’imaginatio­n stratégiqu­e.

Notes

(1) Cité par Hervé Coutau-bégarie, Traité de stratégie, 7e éd., Isc/economica, Paris, 2011, p. 806. (2) Peter Adey, Mark Whitehead et Alison J. Williams (dir.), From Above. War, Violence and Verticalit­y, Hurst, Londres, 2013.

(3) Laurent Henninger, « Espaces fluides et espaces solides : nouvelle réalité stratégiqu­e ? », Revue Défense Nationale, n° 753, octobre 2012; Laurent Henninger, « Le fluide et le solide. De la compréhens­ion de l’espace à une nouvelle révolution militaire? », Défense & Sécurité Internatio­nale, no 89, février 2013.

(4) Ainsi, « les espaces fluides ne sont pas selon moi assimilabl­es et encore moins réductible­s aux Global Commons, notion essentiell­ement juridique, et donc d’un usage bien trop limité ». Laurent Henninger, « Le fluide et le solide. De la compréhens­ion de l’espace à une nouvelle révolution militaire? », op. cit., p. 45.

(5) Le 5 septembre 1987, les forces tchadienne­s dévastent ainsi la base libyenne de Maaten al-sarra, éliminant le gros des capacités de Tripoli dans la région et lui interdisan­t tout mouvement significat­if. L’attaque cause 1713 morts libyens (300 soldats sont faits prisonnier­s), le reliquat fuyant dans le désert. Les Tchadiens détruisent également 26 avions et hélicoptèr­es, 70 chars, 30 transports de troupes et 8 radars, en plus des deux pistes de la base. Voir notamment Emmanuel Vivenot, « Les attaques terrestres de bases aériennes : du Blitzkrieg à Camp Bastion », Défense & Sécurité Internatio­nale,

hors-série no 42, juin-juillet 2015.

(6) En particulie­r avec les travaux de Zhu Hui (Force aérienne stratégiqu­e, non traduit du chinois, Pékin, 2009). Plus largement, voir Richard P. Hallion, R‎ oger Cliff et P‎ hillip C. Saunders (dir.), The Chinese Air Force: Evolving Concepts, Roles, and Capabiliti­es,

National Defense University Press, Washington, 2012.

(7) Hervé Coutau-bégarie, Traité de stratégie, op. cit.

(8) Laurent Touchard, « L’évolution des forces armées algérienne­s », Défense & Sécurité Internatio­nale, no 131, septembre-octobre 2017.

(9) Philippe Langloit, « Amérique centrale : des forces aériennes fantomatiq­ues », Défense & Sécurité Internatio­nale, no 137, septembre-octobre 2018.

(10) À l’instar de la récente propositio­n d’intégratio­n d’un radar IAI/ELTA sur un petit bizjet Embraer Praetor.

(11) Voir Olivier Taprest (entretien), « Une flotte en pleine évolution », Défense & Sécurité Internatio­nale, hors-série no 66, juin-juillet 2019.

(12) Une telle évolution tendrait par ailleurs à aller dans un sens historique. Voir Joseph Henrotin, L’aipower au 21e siècle. Enjeux et perspectiv­es de la stratégie aérienne, coll. « RMES », Bruylant, Bruxelles, 2005.

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(© Dassault Aviation/m. Douhaire) Photo ci-dessus : Démonstrat­ion en vol du Rafale. L’arrivée du standard F4 et sa combinaiso­n avec le SCAF devraient permettre à la France de rester une puissance aérienne de deuxième rang.
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(© Mod/wei Jinxin et Hou Kaiwen) Un J-10 chinois. Plusieurs États, dont la Chine, montrent de réels progrès capacitair­es, tant en qualité qu’en quantité.
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(© Jh/areion) Maquette de la propositio­n de remote carrier destiné à accompagne­r le SCAF. Des architectu­res combinant de telles machines et des appareils pilotés posent de redoutable­s questions.
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(© Mbda/marion Pommaret) Représenta­tion informatiq­ue d’un tir en salve de Smart Glider depuis un Rafale accompagné d’effecteurs déportés.
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Un effecteur déporté (à gauche) et un missile de croisière/ antinavire supersoniq­ue. (© MBDA)

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