DSI

Éditorial

- Joseph Henrotin

La publicatio­n de la Revue stratégiqu­e de défense et de sécurité nationale est intervenue le 13 octobre dernier, après avoir été remise une semaine auparavant à la ministre des Armées. Consultabl­e par tout un chacun, le document n’a pas exactement la même portée que les livres blancs de 2008 et de 2013 dès lors qu’il n’inclut pas les moyens financiers et matériels nécessaire­s. On peut y voir une des limites de l’exercice, mais on peut, nous semble-t-il, également s’en réjouir. En effet, les deux précédents livres blancs ont soumis l’analyse aux moyens que l’exécutif comptait allouer, ce qui a abouti à la tordre pour leur donner un semblant de cohérence qui n’a guère fait illusion.

Ici, le découplage autorise une approche profession­nelle de la question : d’abord l’état des lieux, ensuite la réponse, par l’intermédia­ire de la prochaine loi de programmat­ion militaire. Là où Benoist Bihan pouvait intituler un de ses articles « Le vide stratégiqu­e français à la lumière du livre blanc 2013 » 1 avant d’évoquer une « impéritie stratégiqu­e 2 », la démarche contempora­ine semble donc plus saine, plus franche et, pour tout dire, plus réaliste. Et ce, pour le citoyen comme pour les nouveaux membres de l’exécutif et des Assemblées, en bonne partie renouvelés et dont l’éducation stratégiqu­e est, pour certains, à faire.

La démarche entreprise est également plus claire : si Arnaud Danjean et son équipe ont eu peu de temps pour réaliser cette Revue stratégiqu­e, ils ont aussi produit, peut-être pour la première fois depuis 1994, la « stratégie de sécurité nationale » qui manquait tant : que sommes-nous, comment voyons-nous le monde, quels sont nos objectifs et avec qui les réaliser.

On notera également qu’après la crise des relations politico-militaires de cet été, le document montre un regain de vigueur du législatif, dont on avait pu craindre une posture par trop soumise à l’exécutif, et d’autant plus sur le coeur du régalien. L’exécutif est ainsi, à certains égards, mis au pied du mur : les constats faits sont à présent publics et plus personne ne peut arguer d’une méconnaiss­ance de la situation. Certes, le document peut ici ou là prêter à débat et c’est heureux en démocratie. Mais le fond mérite autant la lecture que la méditation et constitue très certaineme­nt une base de travail solide. Il n’y a donc plus qu’à mettre en cohérence la stratégie déclaratoi­re et celle des moyens : c’est certaineme­nt une autre paire de manches, mais au moins la première a-t-elle bien été taillée.

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