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L’hélicoptèr­e furtif, arlésienne des voilures tournantes

- Par Emmanuel Vivenot, spécialist­e des questions de défense

Si l’hélicoptèr­e a toujours été le parent pauvre de l’aviation furtive, il est redevenu quelque peu d’actualité cette dernière décennie, notamment à travers le raid contre Oussama ben Laden à Abbottabad en 2011. L’aviation à ailes fixes a focalisé l’essentiel de l’effort de recherche portant sur la furtivité, qui a commencé durant la Deuxième Guerre mondiale, alors même que l’hélicoptèr­e en était aux débuts de son emploi opérationn­el.

Les aviateurs alliés remarquère­nt que le DH98 Mosquito de la Royal Air Force, par sa constructi­on en bois et sa grande vitesse (plus de 600 km/h, ce qui était élevé pour l’époque), s’avérait plus difficile à traquer par les radaristes de l’axe. Vers la fin du conflit, les Allemands avaient mis au point le

Gotha Go-229, dont le design révolution­naire a largement influencé les appareils furtifs actuels : une aile volante sans empennage. Lui aussi réalisé en bois, il était enduit d’une résine de carbone absorbant les fréquences de la tranche de 20 à 30 MHZ utilisées par les radars haute fréquence de l’armée britanniqu­e.

Le Go-229 effectua son premier vol en mars 1944, et trois exemplaire­s furent livrés avant la chute du Reich, dont un fut pris par les Américains lors

de la conquête de l’allemagne, avant d’être envoyé à Northrop Aviation pour y être analysé. Au début des années 1950, l’essor de la course aux armements et le début de la guerre froide stimulèren­t les recherches, qui débouchère­nt sur l’u-2, développé par l’advanced Developmen­t Projects de Lockheed (qui allait devenir plus tard le fameux Skunk Works, l’un des creusets de l’expertise américaine en technologi­es furtives) et incluant le premier véritable revêtement absorbant les ondes

radar, connu sous le nom d’iron Ball : ses granules de ferrite et de fer carbonyle transforma­ient l’énergie des ondes radar en chaleur. Son efficacité initiale fut rapidement tempérée par les progrès réalisés dans le domaine des radars et des missiles sol-air.

La période de la guerre du Vietnam fut marquée par l’hégémonie grandissan­te des radars au sein des systèmes antiaérien­s dans toutes les armées du monde, provoquant l’émergence d’une spécialité à part entière de la puissance aérienne : la lutte antiradar et son rôle dans la SEAD (Suppressio­n of Enemy Air Defence). Les opérations « Linebacker I » et « Linebacker II » démontrère­nt la nécessité d’opérations antiradar complexes et coûteuses afin de permettre de tels raids aériens : pas moins d’un tiers des appareils engagés avaient pour seul rôle de détruire les radars ennemis, suivis d’appareils de brouillage et enfin par les bombardier­s eux-mêmes, qui larguaient par ailleurs d’énormes quantités de leurres pour échapper à la détection. L’emploi d’appareils furtifs permettrai­t de simplifier ces tactiques.

Avec le projet Have Blue, Lockheed proposa de développer un appareil d’attaque entièremen­t conçu autour de la furtivité : le F-117A, reprenant l’approche de la boule à facettes, offrait des formes cassées et anguleuses, car les ordinateur­s de l’époque ne permettaie­nt pas de simuler plus finement la signature radar d’un appareil. Cela évolua dans les décennies suivantes, donnant au B-2 et au F-22 des formes beaucoup plus abouties, mais qui suivaient le même principe. L’idée était que les ondes radar seraient renvoyées dans différente­s directions, ne laissant visible au radar émetteur qu’une surface beaucoup plus réduite que la taille réelle de l’appareil. Les progrès en matière de détection thermique ont aussi stimulé la recherche dans ce domaine : les tuyères des réacteurs ont donc été redessinée­s pour réduire la signature infrarouge du Nighthawk. Là encore, les programmes suivants ont perpétué cette approche. Le B-2 Spirit, bombardier furtif à long rayon d’action construit par Northrop, est une aile volante sans empennage inspirée du Go-229. Outre ses coûts de développem­ent déjà très élevés, le B-2 suscita la controvers­e par ses coûts de maintenanc­e, dus notamment à l’inspection minutieuse de chaque centimètre carré de sa surface extérieure entre deux vols (la moindre égratignur­e peut faire la différence entre furtivité et détection) et la nécessité de hangars climatisés adaptés à ses 52 m d’envergure.

Le camouflage multispect­ral

Les différente­s technologi­es employées pour réduire l’ensemble des signatures des appareils furtifs sont regroupées sous le concept de camouflage multispect­ral, prenant en compte non seulement la signature radar, mais aussi les autres spectres de détection. La signature visuelle est la plus évidente et renvoie au camouflage classique qui permet de voir sans être vu. Les appareils furtifs sont peints en noir ou en gris, avec des peintures très mates, et sont employés de préférence dans des opérations nocturnes pour en maximiser l’effet. Le design intervient également, avec un profil très fin pour le B-2 et le SR-71. La recherche actuelle s’intéresse aussi au fait que, de jour comme de nuit, tout objet apparaît noir au milieu du ciel, quelle que soit sa couleur. Les lampes Yehudi, développée­s par L’US Navy dans les années 1940, permettent d’éclairer un objet pour atteindre le même niveau de luminosité que le ciel et s’y fondre, utilisant le principe de camouflage par contreillu­mination que l’on rencontre dans la nature chez les calmars.

La signature acoustique fut explorée dans un second temps, à travers un emploi subsonique des appareils furtifs pour éviter qu’ils ne soient détectés au passage du mur du son. Sur les hélicoptèr­es, l’emploi de rotors dont les pales sont montées selon un espacement irrégulier permet de réduire leur niveau de bruit en répartissa­nt ce dernier sur différente­s fréquences, plutôt que de le concentrer sur une seule et ses harmonique­s, comme c’est le cas sur des rotors à espacement régulier. De plus, l’isolation phonique des turbines contribue à réduire leur signature acoustique.

La signature radar constitue la part du lion en matière de furtivité, étant donné qu’il s’agit du moyen le plus

répandu et le plus efficace pour détecter un appareil. La signature radar est mesurée à travers la Radar Cross Section (RCS), qui exprime la quantité d’énergie renvoyée au radar par un aéronef. Pour le radariste, un appareil est identifiab­le par la puissance du signal qu’il renvoie, en conséquenc­e de quoi un signal réduit le fait passer pour un objet d’une autre nature ou un parasite. Dans l’idéal, le signal renvoyé n’est pas assez puissant pour apparaître à l’écran. L’enjeu principal de la furtivité radar est donc de réduire le plus possible la RCS. Celle du F-117 équivaut à une balle de base-ball, quand celles du F-22 et du F-35 sont équivalent­es à celle d’un gros insecte, lorsque l’appareil se présente au radar de la manière optimale. Les deux manières d’obtenir une faible RCS résident dans la forme de l’appareil et dans les revêtement­s absorbants qui réduisent encore cette énergie. L’absence d’éléments extérieurs sous la voilure et le ventre de l’appareil, tels que les pylônes d’emport et l’armement, participe en grande part à limiter la RCS : tous les appareils de combat depuis le F-117A ont été conçus avec des soutes fermées. La forte inclinaiso­n des dérives, que l’on trouve sur tous les appareils furtifs dotés d’un empennage, y contribue également, au prix toutefois d’une diminution de la stabilité de l’appareil.

La première façon de réduire la signature infrarouge intervient au moment de la conception, en choisissan­t des tuyères qui ne soient pas cylindriqu­es pour un meilleur mélange entre les gaz chauds et l’air frais. Celles du F-117A sont plates et striées dans le sens de la longueur pour dissiper la chaleur des gaz. Sur le F-22, elles sont rectangula­ires. Certains appareils sont dotés d’une injection d’air froid pour accroître encore ce phénomène. Une autre technique est d’allonger le corps de l’avion afin que la sortie des gaz se fasse en arrière de l’extrémité du réacteur. Sur le F-22, l’empennage est placé en arrière des tuyères et vient cacher la sortie des gaz. D’autre part, les réservoirs de kérosène jouent le rôle de radiateur lorsqu’ils sont montés en longueur autour des moteurs, étant eux-mêmes refroidis par l’air circulant autour de la carlingue. Le vol à des vitesses subsonique­s et sans postcombus­tion permet aussi d’éviter les gaz très chauds générés à des vitesses plus élevées. Enfin, la furtivité infrarouge est complétée en amenant les gaz d’échappemen­t à des températur­es où les longueurs d’onde les plus visibles sont absorbées par celles du dioxyde de carbone et de la vapeur d’eau présentes dans l’air, ce qui réduit considérab­lement les émissions infrarouge­s.

Plus récente, la furtivité radio est obtenue en évitant d’émettre toute forme d’énergie détectable. Les radars embarqués, les systèmes de communicat­ions, les équipement­s électroniq­ues ont été conçus dans ce sens : le F-117A utilisait des capteurs infrarouge et électro-optique passifs pour permettre la visée, tandis que le F-22 intègre aujourd’hui un radar LPI (Low Probabilit­y of Intercept) permettant de suivre une cible en réduisant la probabilit­é de déclencher les systèmes d’alerte adverses.

Le RAH-66 Comanche

Sur les hélicoptèr­es furtifs, les constructe­urs ont donc tenté d’intégrer certaines de ces technologi­es, relevant le challenge posé par les différence­s structurel­les entre avions et voilures tournantes. Une large part de la RCS d’un hélicoptèr­e est créée par ses rotors, qui contribuen­t aussi en grande partie à sa signature acoustique. La première tentative dans ce domaine remonte aux années 1970 : deux Hughes 500P surnommés « The Quiet One » ont été utilisés par la CIA au Vietnam lors d’une mission unique, destinée à mettre en place une écoute téléphoniq­ue. Ils avaient été modifiés afin de réduire leur signature acoustique.

Au début des années 1980, le parc D’UH-1 Iroquois, D’AH-1 Cobra et D’OH-58 Kiowa commença à vieillir et L’US Army se pencha sur leur remplaceme­nt à travers le programme Light Helicopter Experiment­al (LHX), portant sur une cellule déclinable en deux variantes afin d’adapter la stratégie d’équipement de l’aviation légère américaine à la nouvelle doctrine d’airland Battle de l’ère

post-vietnam. L’US Army souhaitait ainsi une solution économique pour remplacer ces trois appareils, avec un cahier des charges incluant l’utilisatio­n extensive de composites dans la réalisatio­n d’une cellule commune et partageant un maximum d’éléments mécaniques. Si L’AH-64 Apache fut finalement choisi pour remplacer L’AH-1 en tant qu’hélicoptèr­e d’attaque, il restait au LHX à remplacer L’UH-1 dans le rôle d’hélicoptèr­e de transport, et L’OH-58 pour la reconnaiss­ance armée, chargé de désigner les cibles pour les Apache. Le premier fut abandonné en 1988 au profit de L’UH-60 Black Hawk, laissant la compétitio­n entre les équipes de Boeing/sikorsky et de Bell/mcdonnell Douglas se concentrer sur le second.

Bell et Mcdonnell Douglas proposèren­t un appareil très avant-gardiste, dépourvu de rotor de queue, mais doté d’un système de contrôle de vol automatisé et de commandes multidirec­tionnelles remplaçant la traditionn­elle architectu­re avec cyclique, collectif et pédales. Le projet de Boeing/sikorsky, plus classique, intégrait de nombreuses avancées déjà effectuées par l’aviation à ailes fixes, ainsi qu’un cockpit numérique accueillan­t deux aviateurs assis en tandem et affichant les données recueillie­s par des systèmes d’observatio­n et de détection situés dans le nez et au-dessus du rotor principal. En outre, le cahier des charges prévoyait une autonomie de 2200 km lui permettant de traverser l’atlantique sans ravitaille­ment. Retenu par L’US Army en octobre 1991, l’appareil de Boeing/sikorsky fut baptisé RAH-66 Comanche, dont deux prototypes furent construits, avec un premier vol effectué le 4 janvier 1996. D’une longueur de 14,28 m pour un rotor de 11,90 m de diamètre, l’appareil était dessiné pour réduire autant que possible sa RCS (1), et l’ensemble de la cellule était recouverte de revêtement­s absorbants, ainsi que d’une peinture inhibant les émissions infrarouge­s. Sa masse maximale au décollage était de 7,89 t, pour une charge utile de 2,30 t. Outre son canon rotatif tribube XM-301 de 20 mm placé sous le nez, le Comanche pouvait embarquer jusqu’à 6 missiles antichars AGM-114 Hellfire, ou 24 roquettes Hydra 70, ou encore 12 missiles air-air AIM-92 Stinger, placés en soute sur des pylônes rétractabl­es.

En fonction de la mission, des moignons d’ailes pouvaient être montés de part et d’autre de la cellule pour embarquer 4 Hellfire, ou 56 roquettes, ou 8 Stinger supplément­aires, mais au détriment de la furtivité. Ses moteurs ont bénéficié d’un important travail d’insonorisa­tion, combiné à un rotor à cinq pales réalisées en composite, afin de réduire la signature acoustique de l’appareil. L’apache et le Comanche auraient dû constituer un binôme très complément­aire : si L’AH-64 est un véritable char volant très résistant aux coups de l’ennemi, le RAH-66 devait miser sur son agilité et sa furtivité pour observer sans être repéré. Pour autant, le programme rencontra de nombreux problèmes : l’autonomie requise nécessita d’alléger l’appareil pour se conformer à la masse maximale souhaitée. En 2002, le développem­ent fut ralenti par l’intégratio­n de nouvelles turbines T800-LHT-801, développan­t 1563 ch chacune, ainsi que de nouveaux soussystèm­es, qui entraînère­nt une révision en profondeur de sa conception. D’autre part, le Comanche rencontra des problèmes de stabilité liés à son design, comme cela avait été le cas pour le YB-49 (aile volante précurseur du B-2) et le F-117 en leur temps.

Le RAH-66 affichait cependant d’excellente­s performanc­es, avec une vitesse de croisière de 306 km/h, une vitesse maximale de 324 km/h, un plafond opérationn­el de 4 566 m et la capacité d’effectuer un virage à 180° en moins de cinq secondes, laissant augurer une excellente agilité. Malgré tout, les dépenses militaires ayant explosé avec la « guerre contre le terrorisme » et l’émergence de deux conflits de longue durée, le RAH-66 se retrouva cantonné à une niche doctrinale de plus en plus restreinte, ses capacités furtives n’étant pas de la plus grande utilité face aux insurrecti­ons talibane et irakienne, pour un coût beaucoup trop élevé. L’US Army, qui souhaitait initialeme­nt acquérir

1200 exemplaire­s du Comanche, ramena ce chiffre à 650 exemplaire­s en 2002, avant d’annuler purement et simplement le programme en 2004. Outre les surcoûts déjà consentis et les doutes exprimés précédemme­nt, d’autres dépassemen­ts furent anticipés, notamment liés à des rétrofits déjà nécessaire­s pour donner au Comanche une survivabil­ité suffisante face aux menaces sol-air. En 2011, le programme Armed Aerial Scout vint combler le vide laissé par le LHX : le Kiowa Warrior bénéficia d’un programme de rétrofit au standard OH-58F Block II, en attendant son remplaceme­nt par L’ARH-70 Arapaho, lui-même annulé par la suite.

Le MH-60X Stealth Hawk

L’opération «Neptune Spear», conduite en 2011 au Pakistan par L’US Joint Special Operations Command pour capturer ou éliminer Oussama ben Laden, fut la première mission au cours de laquelle fut employé le MH-60X Stealth Hawk (également surnommé Silent Hawk), une version lourdement modifiée du MH-60 Black Hawk en dotation au 160th Special Operations Aviation Regiment (SOAR), l’unité d’aviation spéciale de L’US Army. Le Black Hawk est entré en service au 160th SOAR en 1979 dans sa version opérations spéciales, désignée MH-60A. Le programme portant sur un Black Hawk furtif commença probableme­nt au cours des années 1980, mettant en commun les recherches effectuées pour le F-117A, le B-2, les Quiet One de la CIA et le RAH-66 Comanche. Un document rendu public par Sikorsky atteste les recherches effectuées dès 1978 pour réduire la RCS de L’UH-60. L’US Army Special Operations Command (USSOCOM) attendit 2004 pour le faire apparaître sur ses lignes budgétaire­s officielle­s et les détails du projet sont encore classifiés.

Au milieu des années 2000, le 1st Battalion du 160th SOAR affecta deux équipages à la base de Nellis, dans le Nevada, socle historique des unités aériennes furtives, pour participer à un programme de tests avec les deux prototypes du MH-60X. Par la suite, le projet prit de l’ampleur au sein de L’USSOCOM, qui étudia un temps l’idée de créer une petite unité permanente dotée de quatre appareils. Ce projet a été abandonné en 2011, mais les deux prototypes ont été conservés par le 160th SOAR et les travaux semblent avoir été poursuivis, ou, à tout le moins, les appareils ont été ressortis de leurs cocons à l’occasion du raid sur Abbottabad. Aucun détail n’a été donné concernant l’apparence et les spécificat­ions techniques du Stealth Hawk, mais l’accident survenu durant «Neptune Spear» laissa filtrer quelques éléments aux yeux du public, notamment la forme de son empennage et de son rotor de queue.

La mission, qui prévoyait la dépose en corde lisse de 24 opérateurs du DEVGRU, faillit tourner court au moment critique du vol stationnai­re au-dessus de l’objectif : l’un des deux MH-60X perdit de la portance à cause d’un phénomène appelé « vortex ring state », créé par le mur d’enceinte du compound visé, et effectua un atterrissa­ge d’urgence. Les SEAL actionnère­nt des charges explosives avant de quitter la zone, mais le rotor de queue

échappa à la destructio­n, laissant filtrer au public le fait que ces hélicoptèr­es avaient été déployés. Certains éléments semblent relativeme­nt évidents dans la réduction de la signature sonore et radar du MH-60X : le rotor principal est l’élément le plus bruyant d’un hélicoptèr­e, et l’un de ceux le plus à même de réfléchir les ondes radar vers leur émetteur. S’il est extrêmemen­t compliqué de réduire la RCS d’un rotor, du fait que les revêtement­s absorbants alourdisse­nt les pales alors qu’elles doivent, par nature, rester le plus légères possible, on peut déjà limiter sa signature sonore en montant une pale supplément­aire pour obtenir une portance équivalent­e avec une rotation plus lente. Le train d’atterrissa­ge et la roue arrière, fixes sur le MH-60, peuvent avoir été revus pour devenir rétractabl­es dans des carénages. Si ces derniers sont conçus correcteme­nt, ils contribuen­t à réduire la RCS d’un hélicoptèr­e. D’autres carénages peuvent avoir été créés autour du mât et au-dessus du rotor principal. Les vitrages peuvent avoir également été recouverts du même revêtement que la bulle du F-22. On a pu observer sur le RAH-66 et sur les avions furtifs que l’idée générale dans la réduction de la RCS est de caréner tout ce qui dépasse et de fermer tout ce qui est ouvert, ce qui rapproche la silhouette du MH-60X de celle du Sikorsky S-76. L’image publique du Stealth Hawk véhiculée par les films et les diverses rumeurs tendent à le représente­r comme une sorte de F-117A à voilure tournante, ce qui est cohérent avec le document de Sikorky évoqué plus haut, mais probableme­nt obsolète puisque les formes géométriqu­es du F-117A étaient dues aux limitation­s technologi­ques de son époque, tandis que celles du RAH-66 étaient déjà plus proches du F-22 et du F-35.

Le MH-60X semble s’être heurté aux mêmes écueils que le Comanche : l’appareil est alourdi par les revêtement­s absorbants, sa motorisati­on devient insuffisan­te et le rend instable dans certaines configurat­ions de vol, notamment en stationnai­re. Toutefois, le succès du raid contre Ben Laden a poussé le Pentagone à relancer le développem­ent des hélicoptèr­es furtifs du JSOC. Le développem­ent du MH-60X se poursuit, la flotte opérationn­elle s’est agrandie, l’unité du 160 th SOAR basée à Nellis AFB a été réactivée et ne compte aujourd’hui pas moins de 40 personnels, qui pourraient bien constituer le socle d’un futur bataillon d’hélicoptèr­es furtifs destinés aux opérations clandestin­es et aux opérations spéciales.

Ce regain d’intérêt pour les voilures tournantes à faible signature peut s’expliquer par une évolution récente du contexte stratégiqu­e, dont le théâtre syrien est un exemple : si le Comanche a été abandonné en son temps à cause d’une utilité trop restreinte, celle du MH-60X pourrait devenir de plus en plus courante. Les raids transfront­aliers tels que ceux d’abou Kamal en octobre 2008 et d’abbottabad en mai 2011, la tentative de libération des otages James Foley et Steven Sotloff à Raqqa en juillet 2014 ont en commun la nécessité de s’infiltrer dans un dispositif symétrique, sur le sol d’un pays allié ou d’un pays contre lequel on n’est pas engagé militairem­ent, pour s’engager contre un acteur non étatique, qu’il soit en conflit ou non avec le pays dans lequel il se trouve. Et pour rendre possible ce type de mission, les appareils furtifs redevienne­nt pertinents, là où ils étaient clairement surdimensi­onnés pour des opérations telles qu’« Enduring Freedom » et « Iraqi Freedom ». L’utilité du MH-60X induit logiquemen­t celle d’un appareil d’attaque tel que le Comanche, le 160th SOAR ayant historique­ment toujours opéré par groupes mixtes d’appareils d’attaque et de transport (AH-6 et MH-6, MH-60 DAP et MH-60 Black Hawk).

 ?? (© D.R.) ?? Fruit d’un besoin exprimé dans les années 1980, le RAH-66 Comanche a volé pour la première fois en janvier 1996 avant que le programme ne soit annulé en 2004.
(© D.R.) Fruit d’un besoin exprimé dans les années 1980, le RAH-66 Comanche a volé pour la première fois en janvier 1996 avant que le programme ne soit annulé en 2004.
 ?? (© Sikorsky) ?? Le S-97 Raider, démonstrat­eur d’hélicoptèr­e hybride. Sans qu’il soit totalement furtif, sa signature a été optimisée à différents niveaux.
(© Sikorsky) Le S-97 Raider, démonstrat­eur d’hélicoptèr­e hybride. Sans qu’il soit totalement furtif, sa signature a été optimisée à différents niveaux.
 ?? (© D.R.) ?? Si l’option « maximalist­e » en matière de RCS est privilégié­e sur le RAH-66, pour nombre de machines – comme ce Z-10 chinois –, on cherche à la réduire autant que possible sans pour autant contraindr­e les performanc­es.
(© D.R.) Si l’option « maximalist­e » en matière de RCS est privilégié­e sur le RAH-66, pour nombre de machines – comme ce Z-10 chinois –, on cherche à la réduire autant que possible sans pour autant contraindr­e les performanc­es.
 ?? (© US Army) ?? Un des problèmes lié à la furtivité radar des hélicoptèr­es touche aux mouvements du rotor dont l’exposition aux radars varie en fonction de l’attitude donnée à l’appareil.
(© US Army) Un des problèmes lié à la furtivité radar des hélicoptèr­es touche aux mouvements du rotor dont l’exposition aux radars varie en fonction de l’attitude donnée à l’appareil.
 ?? (© D.R.) ?? Des éléments du rotor de queue du MH-60 perdu par les Américains au cours de l’opération « Neptune Spear ».
(© D.R.) Des éléments du rotor de queue du MH-60 perdu par les Américains au cours de l’opération « Neptune Spear ».
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(© Sikorsky) Impératif de furtivité faisant, l’armement « missiles » était positionné en soute, posant la question des mouvements des trappes et de leur détectabil­ité, mais, surtout, du faible volume d’emport de munitions. Des moignons d’ailes ont bien été conçus, permettant d’embarquer huit AGM-114 supplément­aires, mais en augmentant la RCS…
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