UN PROJET, QUATRE CLASSES
La coopération industrielle dans le secteur de défense est souvent considérée comme une mesure innovante, mais elle n’a cependant rien de nouveau. Avec les huit unités iraniennes, les classes Kortenaer/bremen/elli/ Van Heemskerck auraient ainsi représenté 28 navires ; une série d’autant plus impressionnante que le rythme de construction adopté était élevé. Le volume et la vitesse des admissions ne se sont cependant pas faits au détriment de la qualité. Le Kortenaer, actuel Kountouriotis, a été admis au service en octobre 1978 et va donc prochainement passer le cap des 40 ans de service. Les deux dernières Bremen allemandes, dont la production avait été relancée six ans après une première série de six unités, sont encore en service. De même, les impératifs de l’époque n’ont guère entravé l’adaptabilité des navires au regard de nouveaux capteurs ou armements – il a ainsi été question de doter les Elli d’un système VLS Mk41 –, la carène elle-même ayant montré de surprenantes facultés d’adaptation lorsque deux unités ont été reconverties en super yachts.
Reste que le design des bâtiments est historiquement marqué. S’ils ont été engagés jusqu’au large de la Somalie et qu’ils ont fréquemment traversé l’atlantique, ils ont d’abord été conçus pour des applications régionales, dans le cadre particulier de task-forces de L’OTAN. Bien adaptés au contexte grec – la proximité des îles et des batteries de missiles surface-surface, l’appui de l’aviation –, ils souffrent cependant de leurs dimensions et de leur déplacement, certes dans la moyenne haute de la fin de la guerre froide, mais faible au regard des standards contemporains. Si elles représentaient certes un saut comparativement aux Van Speijk (2 850 t.p.c. (1)), ces frégates n’ont pas l’endurance et le confort des bâtiments modernes. Il est difficile de les envisager engagées dans des stations de longue durée avec rotation des équipages, par exemple. Surtout, leur petite taille, comme celle d’autres frégates telles que les Oliver H. Perry, pose le problème des entretiens majeurs. Le remplacement des turbines à gaz, par exemple, est assez malaisé.
Durant la guerre froide, le volume des forces et la disposition d’infrastructures industrielles adaptées – d’autant plus disponibles que deux pays les fabriquaient – ne posaient guère de problèmes de planification au regard d’arrêts techniques plus longs. Le choix de bâtiments plus polyvalents, plus lourds mais plus coûteux – et donc moins nombreux – facilite ainsi le maintien en condition opérationnelle. Reste que pour la Grèce, ce changement de stratégie des moyens suscite des questions, dans un contexte budgétaire contraint : par quoi les remplacer ? L’hypothèse d’un suivisme des grandes marines, se traduisant par l’achat de FREMM, avait été évoquée avant la crise financière de 2008. Finalement, Athènes se tournera plus probablement vers des bâtiments au tonnage moindre, tels que la Gowind, voire la FTI, ou leur combinaison. Bien qu’ils aient une plus faible endurance, ces bâtiments sont cependant bien adaptés à la stratégie grecque et à la majorité des déploiements d’athènes, tout en laissant augurer des performances accrues dans le domaine des capteurs.