Les interventions cubaines en Afrique
Dès ses origines, la révolution cubaine se voulut internationaliste, et ce volontarisme inclut rapidement un volet militaire. La Havane dépêcha notamment très tôt des missions militaires à l’étranger, en particulier sur le continent africain.
La décision d’organiser la première de ces missions militaires fit suite à l’attaque de l’algérie par le Maroc le 25 septembre 1963. La Havane se porta au secours de son allié algérien en dépêchant un groupe d’instruction de 686 hommes, ainsi que nombre d’équipements lourds, y compris un bataillon de chars T-34-85 et deux groupes d’artillerie. Ceux-ci arrivèrent cependant trop tard pour participer au conflit.
La seconde intervention cubaine en Afrique eut lieu en 1965, avec l’envoi de deux colonnes dans le centre du continent. La première, forte de près de 120 hommes et dirigée par Che Guevara, s’infiltra dans l’ex-congo belge afin de soutenir la rébellion des Simbas. Mal préparés et peu au fait des réalités locales, le Che et ses hommes
durent se retirer après quelques mois. La deuxième de ces deux colonnes s’implanta avec 250 hommes au Congo-brazzaville, où elle demeura jusqu’en septembre 1968. Il s’agissait avant tout d’une mission d’entraînement au bénéfice de la milice populaire congolaise ainsi qu’à celui du
(1)
Mouvement Populaire de Libération de l’angola (MPLA), qui avait trouvé refuge dans le pays.
En mai 1967, une mission militaire comprenant une cinquantaine d’instructeurs fut dépêchée en Guinée-conakry afin d’entraîner les
maquisards du Parti Africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-vert (PAIGC) à l’usage d’armes d’appui. La mission fut renforcée à partir de mai 1973 par un petit contingent de techniciens et pilotes chargés de remettre sur pied l’unique escadrille guinéenne de MIG-17F (2). Un autre petit détachement fut brièvement actif en Sierra Leone dans les années 1960, là aussi pour former une milice populaire alors qu’un contingent de conseillers demeura en Somalie entre 1974 et le début de la guerre de l’ogaden.
L’imbroglio angolais
À la suite de la révolution des Oeillets en avril 1974, Lisbonne décida de solder au plus vite son héritage colonial. Les accords d’alvor de janvier 1975, conclus entre les Portugais, le MPLA, le FNLA et L’UNITA – soit les trois mouvements
(3) indépendantistes rivaux – devaient permettre une transition pacifique vers l’indépendance, prévue pour le 11 novembre 1975. Ceux-ci volèrent en éclats dans les semaines suivantes, le FNLA et le MPLA multipliant les affrontements alors que L’UNITA restait en retrait jusqu’en août, où elle se joignit à son tour au conflit. Guerre froide oblige, cette situation ne tarda pas à susciter non seulement l’implication des puissances régionales, mais aussi celle des superpuissances, donnant progressivement naissance à deux blocs dont la cohérence n’était qu’apparente puisque leurs acteurs respectifs poursuivaient des objectifs souvent contradictoires.
En juillet 1975, le MPLA, qui tenait alors la capitale, se tourna vers son ancien allié cubain afin d’encadrer sa branche armée, les FAPLA (4). La Havane dépêcha alors un contingent de près de 600 hommes qui arrivèrent progressivement dans le pays à partir de la fin du mois d’août 1975. Au 20 octobre, la Mission Militaire Cubaine en Angola (MMCA), dirigée par le premier commandant Raul Diaz Argüelles, avait mis en place quatre centres d’instruction et formait ses premières recrues angolaises. La mission prévoyait de former au cours des six mois suivants seize bataillons d’infanterie et des unités d’appui-feu. L’ensemble de ces unités devait être équipé de matériels fournis par La Havane. Une fois opérationnelles, celles-ci devaient permettre aux FAPLA de l’emporter sur ses rivaux.
« Carlota »
Avec l’escalade du conflit, la MMCA se trouva bientôt engagée au combat, les militaires cubains corsetant les bataillons angolais dont l’entraînement avait à peine débuté. Entre le 9 et le 11 novembre 1975, deux de ces bataillons mixtes repoussèrent une offensive contre l’enclave du Cabinda, menée par un conglomérat composé de combattants indépendantistes cabindais, de troupes zaïroises et d’un groupe de mercenaires français. Le 10 novembre, Cubains et Angolais mettaient en déroute une force combinée du FNLA et des forces armées zaïroises aux portes de Luanda. En revanche, le 2 novembre, à Catengue, à environ 70 kilomètres de Benguela, un autre bataillon mixte avait été écrasé par l’un des détachements sud-africains qui avaient pénétré en Angola à partir du 23 octobre. Ces derniers, organisés en battle groups étaient formés d’infanterie légère fournie par le FNLA ou L’UNITA et placés sous les ordres de militaires sud-africains, qui mettaient également en oeuvre l’artillerie et les blindés légers.
La nouvelle plongea La Havane dans un état de panique puisque l’irruption de forces sud-africaines apparemment déterminées à prendre Luanda risquait de se traduire au mieux par une humiliante évacuation, ou au pire par l’anéantissement de la MMCA. Dans la nuit du 4 au 5 novembre, le sommet de l’état cubain lança l’opération «Carlota», soit l’envoi d’un volume massif de renforts. La flotte marchande fut mobilisée, ainsi que la poignée de Bristol Britannia de la compagnie aérienne nationale.
Les premiers éléments à partir furent les 650 hommes du bataillon des forces spéciales du ministère de l’intérieur, qui arrivèrent à Luanda par la voie des airs entre le 9 et le 16 novembre. Dans le même temps, trois navires marchands transportant un régiment d’artillerie avec 664 hommes appareillèrent de Cuba entre le 11 et le 13 novembre. Enfin, la troisième unité à quitter Cuba fut un régiment d’infanterie motorisé, à bord de quatre bâtiments, qui arriva à destination entre le
9 et le 30 décembre. Deux bataillons de cette dernière unité furent utilisés pour sécuriser l’enclave du Cabinda, alors que le dernier fut débarqué à Luanda. À la fin de décembre, un maximum de 4 000 Cubains était donc déployé en Angola, selon une logique similaire à celle de Pretoria. Il s’agissait avant tout d’envoyer des troupes de choc et des spécialistes destinés à corseter l’infanterie d’un allié local.
Les forces spéciales et les artilleurs furent dépêchés vers le sud et parvinrent à établir un front relativement stable en faisant sauter les ponts franchissant la rivière Quévé, parfois quelques heures à peine avant l’arrivée des détachements motorisés sudafricains. Entre la fin du mois de novembre et celle du mois de décembre, une série d’affrontements limités opposèrent les forces cubano-angolaises aux task forces sud-africaines, sans résultats décisifs. Les plus saillants eurent lieu à Ebo le 23 novembre – avec pour effet une défaite sud-africaine – et au pont dit « 14 » entre le 9 et le 12 décembre – avec pour conséquence la destruction d’un bataillon mixte cubano-angolais.
La Havane avait lancé «Carlota» sans solliciter l’accord des Soviétiques. Ces derniers, malgré leurs réticences (5), n’eurent d’autre choix que de soutenir leur allié. Ils accélérèrent donc leurs livraisons d’armes à destination de l’angola et, à partir de janvier 1976, mirent à disposition leur aviation afin de renforcer le pont aérien reliant Cuba à l’angola. L’ampleur du déploiement cubain augmenta dès lors massivement, pour atteindre trois divisions et 36000 hommes à la fin du mois de mars 1976. Alors que, en janvier, les Sud-africains entamaient leur retrait du pays sous la pression internationale, l’afflux de troupes cubaines permit à la MMCA et aux FAPLA de disperser sans grandes difficultés les forces du FNLA dans le nord du pays puis celles de L’UNITA dans le centre et dans le sud. À la fin du mois de mars 1976, l’ensemble des grandes localités angolaises étaient sous contrôle gouvernemental.
Les Cubains ne tardèrent pas à rapatrier une partie de leurs troupes (6). En 1977, la MMCA ne comptait plus que 20 000 hommes, organisés en un régiment de contre-insurrection et sept régiments d’infanterie motorisée. Ces derniers étaient structurés en plusieurs groupes tactiques interarmes composés d’un bataillon d’infanterie motorisé, d’une compagnie de chars et d’éléments d’artillerie et de soutien. Leur mission première était de dissuader une nouvelle invasion, que ce soit du Zaïre ou de l’afrique du Sud. La MMCA formait et encadrait également les unités contre-insurrectionnelles des FAPLA, dites d’infanterie légère. En 1982, près de 3 000 membres des Forces Armées Révolutionnaires (FAR) encadraient les brigades d’infanterie légère angolaises. Dans le même temps, les Soviétiques conseillaient les brigades d’infanterie et d’infanterie motorisée angolaises, affectées aux opérations conventionnelles.
Cette dualité allait se révéler une source inépuisable de frictions durant le reste de la guerre. En effet, après sa déroute de 1976, L’UNITA ne tarda pas à se reconstituer puis, grâce à ses appuis extérieurs, à se transformer en puissant mouvement insurgé, mêlant des actions de guérilla à un usage croissant de bataillons, puis de brigades semi-régulières. Dans le même temps, les Sud-africains lancèrent à partir de 1978 des opérations de plus en plus puissantes dans la province de Cunene, afin d’en chasser les indépendantistes namibiens qui y étaient basés. Celles-ci débouchèrent bientôt sur des affrontements entre brigades régulières des FAPLA et forces sud-africaines.
Opération « Baragua »
En février 1977, Cuba avait dépêché une nouvelle mission militaire
en Éthiopie afin d’entraîner la milice populaire levée par le régime du Derg, arrivée au pouvoir deux ans auparavant. En novembre de cette année, et à la suite de l’invasion somalienne de l’ogaden, La Havane décida de déployer un autre corps expéditionnaire en Éthiopie, cette fois en étroite coordination avec Moscou, qui, outre ses propres conseillers, fournissait les équipements nécessaires. Le 5 janvier 1978, les pilotes cubains menaient leurs premiers raids contre les forces somaliennes. Deux semaines plus tard, les premiers éléments des FAR étaient déployés sur le front. Ceux-ci furent bientôt suivis par un nombre croissant de troupes engagées au fur et à mesure de leur arrivée dans le pays. Ces dernières participèrent au refoulement des dernières offensives somaliennes, puis aux contre-offensives qui mirent fin au conflit.
À la fin du mois de mars, les éléments cubains constituaient les 3e et 10e brigades de tanks, la 7e brigade d’infanterie motorisée et la 5e brigade d’artillerie. À la suite de la défaite de Mogadiscio, ces quatre grandes unités restèrent stationnées en Éthiopie afin de dissuader une nouvelle invasion somalienne. Elles ne furent en revanche jamais engagées contre les mouvements en lutte contre le Derg actifs en Érythrée et dans le Tigré. Les forces cubaines se retirèrent ensuite progressivement du pays durant la seconde moitié des années 1980.
Controverses stratégiques
En Angola, les dirigeants cubains prônaient auprès de leurs homologues angolais la concentration de leurs forces contre L’UNITA tandis que la MMCA protégeait le pays d’une éventuelle invasion sud-africaine. Depuis 1978, la majeure partie des unités cubaines étaient en effet concentrées le long d’une ligne de 700 kilomètres reliant Namibe et Menongue verrouillant les axes de pénétration menant au centre du pays. Les Soviétiques en revanche recommandaient aux Angolais de prioriser le renforcement des brigades régulières afin de contrer les forces sud-africaines.
Cependant, entre 1981 et 1983, les unités semi-régulières de L’UNITA infligèrent une série de défaites retentissantes aux forces gouvernementales dans les provinces de Cuando-cubango et de Moxico. En août 1983, les insurgés prenaient Cangamba, avec l’appui de l’aviation sud-africaine. Cette dernière bataille – dans laquelle furent engagés des centaines de Cubains – déboucha enfin sur l’acceptation d’une nouvelle stratégie commune octroyant la priorité à la lutte contre L’UNITA. À la fin de la même année, un accord réduisait également temporairement les tensions avec l’afrique du Sud.
Le consensus fut éphémère. Angolais et Soviétiques se concentrèrent bientôt sur l’organisation d’une offensive voulue comme décisive, et visant Mavingua, puis Jamba, le quartier général de L’UNITA situé aux confins de la province de Cuando-cubango, de la Namibie et de la Zambie. Les Cubains
opposèrent un refus net à toute participation de leur part au motif que de telles opérations, qu’ils surnommaient « Berlin » (7), étaient vouées à l’échec. Les FAPLA devaient en effet opérer très loin de leurs bases logistiques et ne feraient que s’exposer aux coups de l’aviation sud-africaine qui, opérant près de ses bases, ne manquerait pas de secourir L’UNITA. Les militaires cubains préconisaient au contraire une approche graduelle, consistant à mener une multitude d’actions contreinsurrectionnelles contre les maquis insurgés implantés au sein de l’« Angola utile » – quitte à laisser L’UNITA continuer à contrôler sa zone « libérée » dans les confins inhabités du pays.
L’appréciation cubaine se vérifia avec l’échec en 1985 de l’opération « Deuxième Congrès », durant laquelle plusieurs brigades angolaises tentèrent de prendre Mavinga avant d’être décimées par les insurgés soutenus par l’artillerie et l’aviation sud-africaines. Cette défaite fut suivie d’une seconde tentative, mieux préparée et avec des forces plus nombreuses, mais prévoyant une avance le long des mêmes itinéraires. Celle-ci, baptisée «Salut à Octobre», lancée à la fin de l’été 1987, tourna au désastre. Les quatre brigades angolaises engagées dans l’offensive furent prises à partie par les forces terrestres et aériennes sud-africaines alors qu’elles s’approchaient de Mavinga. Après avoir subi de lourdes pertes, elles durent retraiter vers Cuito Cuanavale, leur point de départ. La fin de l’année approchant, les Sudafricains décidèrent de refouler les dernières unités angolaises situées sur la rive sud de la rivière Cuito, ce qui fut interprété par leurs adversaires comme une tentative de s’emparer de la ville elle-même. Luanda fit donc appel aux Cubains afin de renverser une situation perçue comme désespérée.
L’avance vers la frontière
À ce moment, le Groupement de Troupes Sud (ATS), qui chapeautait les unités cubaines défendant la ligne Namibe-menongue, comprenait notamment quatre brigades de tanks, les 40e, 50e, 60e et 70e, avec environ 70 chars, une cinquantaine de blindés, un ou deux groupes d’artillerie, pour un total d’au moins 3000 hommes chacune, unités de soutien incluses. Ces forces étaient couvertes par un bouclier antiaérien composé de batteries de SA-3, ainsi que par au moins deux escadrilles de chasse équipées de MIG-23ML et opérant principalement depuis les bases de Lubango et de Menongue. De fait, la supériorité aérienne sud-africaine fut depuis toujours un facteur déterminant dans la planification de la MMCA, que ce soit pour déterminer le tracé de sa ligne défensive – à bonne distance des bases aériennes ennemies – ou pour systématiquement couvrir ses grandes unités avec une puissante ombrelle antiaérienne.
Le 16 novembre 1987, la direction politique cubaine décida d’accepter la demande angolaise – malgré une féroce opposition des Soviétiques – et lança l’opération «Manoeuvres XXXIE anniversaire des FAR». À compter du 23 novembre, navires marchands et avions commerciaux cubains commencèrent ainsi à acheminer des troupes en Angola et, à la fin du mois de décembre, 5000 hommes, environ 120 chars, cinq batteries de SA-6 et un groupe de pilotes de chasse chevronnés étaient arrivés sur le sol africain. Dans les mois suivants, plusieurs milliers d’hommes et leurs équipements continuèrent à affluer, y compris un escadron entier de MIG-23BN.
Dans l’intervalle, un premier groupe de conseillers cubains fut envoyé à Cuito Cuanavale le 5 décembre afin d’aider à planifier la défense des lieux, suivi le 16 janvier 1988 par le groupe tactique 71 dépêché par la 70e brigade de tanks. Ces éléments contribuèrent à repousser plusieurs offensives sud-africaines contre la tête de pont angolaise au sud de la rivière Cuito, mais au prix de la destruction d’une compagnie mixte angolo-cubaine de T-55 lancée dans une contre-attaque désespérée
le 14 février, et qui se solda par la mort de 14 tankistes cubains.
À partir du 10 mars 1988, le gros des forces de L’ATS dans la province de Cunene commença à progresser vers le sud, en direction de la frontière namibienne, dans une avance très méthodique et couverte par le déplacement concomitant d’un puissant bouclier de batteries antiaériennes. Le 23 mars, le génie commença l’expansion de la piste de Cunene, à 120 kilomètres de la frontière, afin de permettre d’y baser des MIG-23ML. Au 25 juin, pas moins de cinq brigades blindées cubaines
(8) (les quatre précitées et la 80e brigade de chars constituée à partir d’éléments récemment arrivés) et trois brigades d’infanterie légère angolaises étaient concentrées dans le secteur Cahamaxangongo-tchipa. Ces forces étaient couvertes par 19 batteries de missiles antiaériens, et ce sans compter les moyens de défense antiaérienne organiques des brigades.
Poker menteur
Une série d’escarmouches opposa bientôt patrouilles de reconnaissance cubaines et sud-africaines. La plus sérieuse intervint le 4 mai 1988 lorsqu’un détachement de forces spéciales cubaines tendit une embuscade à une colonne mécanisée sud-africaine et détruisit quatre Casspir. Les tensions s’accrurent brusquement dans la soirée du 26 juin, l’artillerie sud-africaine pilonnant durant plus d’une heure les positions cubaines à Tchipa. Le jour suivant, un élément de reconnaissance cubain monté sur BMP-1, bientôt renforcé par une compagnie de T-55, affronta le 61e bataillon mécanisé sudafricain soutenu par des chars Olifant. Chaque camp revendiqua la victoire en surestimant les pertes infligées à l’adversaire.
Les Cubains réagirent en lançant le jour même une attaque aérienne contre le barrage de Calueque, à cheval sur la frontière. Douze MIG-23ML et un unique MIG-23UB décollèrent des bases de Lubango et de Cahama et approchèrent à basse altitude de leur objectif avant que deux paires de MIG-23ML ne grimpent afin de couvrir les huit autres MIG qui larguèrent leurs bombes en une seule passe, suivis par le MIG-23UB chargé d’évaluer les dommages. Une des bombes détona à proximité d’un blindé sud-africain et tua onze soldats. Malgré les apparences, la manoeuvre cubaine ne visait pas à entrer dans une guerre ouverte contre les Sud-africains, mais, au contraire, à offrir à La Havane un levier supplémentaire dans les négociations en cours depuis des années afin de mettre fin au conflit.
L’objectif stratégique cubain consistait en effet à se retirer du bourbier angolais sans devoir admettre de défaite. De fait, les concentrations cubaines à la frontière angolaise et la menace d’escalade massive du conflit qu’elles faisaient peser eurent l’effet désiré, et ce d’autant plus que les Sudafricains cherchaient également à se désengager. Les négociations débouchèrent bientôt sur les accords de paix de New York du 22 décembre 1988 prévoyant la tenue d’élections libres en Namibie et le retrait des forces sud-africaines de ce pays et celui de la MMCA d’angola. Surtout, la solution négociée permit au régime cubain de revendiquer la victoire en présentant la bataille de Cuito Cuanavale comme un Stalingrad africain, à l’origine même de la chute du régime de l’apartheid. À cet égard, l’opération « Manoeuvres XXXIE anniversaire des FAR » fut donc avant tout un exercice risqué de diplomatie
(9) armée. Le retrait d’angola débuta le 11 janvier 1989 et s’acheva à la fin du mois de mai 1991. À ce moment, près de 400 000 militaires cubains avaient été déployés en Angola depuis 1975 et 1 949 d’entre eux y avaient perdu la vie.