Point de situation
Si les forces américaines peuvent compter sur une augmentation de leurs budgets, leur situation institutionnelle se révèle toutefois délicate. James Mattis, secrétaire à la Défense considéré comme un facteur de temporisation dans l’administration Trump, y semble ainsi de plus en plus isolé. Pour l’heure, on ne parle pas encore de démission, mais la position est difficilement tenable dans un contexte où Donald Trump peut lui-même prendre des décisions délicates à gérer pour le Département de la Défense. C’est certes le cas sur la question de la future force spatiale, mais ce l’est également au regard des coopérations avec l’étranger. Ainsi, une rencontre bilatérale entre le président américain et son confrère polonais, Andrzej Duda, a débouché sur la demande faite par ce dernier d’installer de manière permanente des forces américaines en Pologne.
Pour Varsovie, il s’agit de sanctuariser son territoire face à la Russie en payant le cas échéant le prix fort. Toutefois, si le président américain juge l’option intéressante, il n’est pas du tout acquis que ce soit aussi le cas du DOD. Au-delà de ce qui s’apparentera à une provocation pour la Russie, la question de la configuration du dispositif américain en Europe se posera immanquablement. En effet, quelles forces affecter en Pologne dans un contexte qui reste marqué par le pivotement vers l’asie, mais aussi considérant que le maintien des forces sur son territoire est une garantie donnée à l’allemagne alors que les tensions entre les deux pays se sont accrues ces derniers mois ? Même si la Pologne met en place les installations nécessaires, rien n’indique donc que le Pentagone donnera son feu vert à cette option.
Les forces américaines bénéficient cependant de l’effet Trump. La R&D, et notamment celle sur l’intelligence artificielle, est considérée là comme ailleurs comme une priorité stratégique. C’est en particulier le cas pour la DARPA, qui a annoncé un investissement de deux milliards de dollars pour les prochaines années sur l’initiative « AI Next », partant du principe qu’en travaillant sur l’informatique et l’automatisation depuis les années 1960, elle s’est déjà largement engagée dans les systèmes intelligents. Selon les mots de son directeur, il s’agit de « transformer les ordinateurs d’outils spécialisés en partenaires dans la résolution de problèmes […] nous voulons explorer comment les machines peuvent acquérir des capacités de raisonnement et de communication semblables à celles des humains ». Actuellement, plus de 20 programmes sont déjà engagés et 60 autres font appel à un titre ou un autre à L’IA. On est cependant encore loin des robots tueurs.
Dans un premier temps, les priorités sont l’optimisation des processus d’achat au sein du Pentagone ; les accréditations de sécurité ; la validation de programmes informatiques avant leur engagement en opération ; la détection des failles de cybersécurité et leur résolution ; ou encore la réduction des inefficiences en matière de puissance et de consommation énergétique des ordinateurs. D’autres programmes, comme le fameux projet Maven, attribué à Google et doté de 93 millions de dollars, cherchent à permettre l’extraction d’informations militairement pertinentes depuis des sources images. Il s’agit aussi de financer des programmes pionniers dans l’acquisition d’un sens commun par les IA dans une logique d’investissement à haut risque à travers le programme Artificial Intelligence Exploration, dont la mise en place a été annoncée en juillet. Par ailleurs, les États-unis ne se concentrent pas uniquement sur la DARPA. L’administration Trump devrait prochainement mettre sur pied un Joint Artificial Intelligence Center destiné à coordonner les efforts en matière D’IA au sein du DOD.