UN POTENTIEL IMPORTANT
L'arrivée du T-X dans L'US Air Force implique pour elle un changement de paradigme en matière d'entraînement avancé, avec une rationalité « avion/simulateur/ cours » semblable à celle adoptée en France avec le PC-21. Dans cette optique, le nombre d'heures de vol pourrait être réduit, mais l'entraînement, paradoxalement, accru. Si c'est le cas d'un point de vue quantitatif, ce l'est également qualitativement. L'entraînement avancé ne vise plus uniquement à savoir manier des appareils de haute performance, mais aussi à acquérir des schémas tactiques complexes, y compris contre des scénarios générés et simulés par l'avion lui-même. C'est très au-delà de ce qu'il est possible de faire avec le T-38C et cela permet, surtout, d'économiser nombre d'heures de vol sur les appareils de cinquième génération en conversion opérationnelle, les acquis tactiques devant avoir été acquis avant le passage sur F-22 ou F-35.
Pour Washington, la première commande n'est, de facto, qu'un début : 475 appareils et 120 simulateurs pourraient en définitive être acquis pour la seule fonction d'entraînement avancé. Si la priorité est au remplacement des T-38C qui accusent leur âge, d'autres fonctions pourraient rapidement s'y adjoindre, à commencer par le remplacement des F-5 et F-16 utilisés pour les missions red air (aggressor) au sein des trois services qui en disposent. L'option est séduisante à deux égards. D'une part, environ 60 appareils dont le potentiel sera épuisé seront à remplacer dans les années 2020. D'autre part, l'appui sur des firmes extérieures (Draken, ATAC) est coûteux. Or les coûts opérationnels du T-X sont estimés à un quart de ceux d'un appareil de quatrième génération et à un cinquième de ceux d'un F-35. Le potentiel de croissance en matière d'électronique embarquée ou de pods permettrait alors une adaptation aisée et à bon compte. De plus, plusieurs observateurs notent que L'US Navy et les Marines devront également remplacer leurs T-45 à partir des années 2030. À voir cependant quelles seront les contraintes du processus de navalisation du T-X…
Son potentiel, au demeurant, ne s'arrête pas au seul marché américain. Le secteur des LIFT (Lead-in Fighter Trainer) s'est considérablement rétréci ces vingt dernières années. Dans le monde occidental, seules l'italie (M-345 monoréacteur, M-346 biréacteur), la Corée du Sud (T-50 monoréacteur) et la Suisse – mais avec le monoturboprop PC-21 – proposent des options de nouvelle génération. Autrement dit, l'appareil ne constitue pas uniquement un ballon d'oxygène bienvenu pour Boeing et Saab. C'est aussi la préemption d'une part potentiellement considérable du marché des LIFT dans un contexte où bon nombre d'états, européens notamment, doivent encore remplacer des capacités arrivant en fin de potentiel. Et en l'occurrence, le grand vainqueur pourrait, aussi paradoxalement qu'il y paraisse, être la Suède, qui n'avait plus conçu d'appareil d'entraînement avancé depuis le Saab 105 dont le premier vol remonte à 1963.