DSI

Progrès balistique­s

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Le programme balistique de Pyongyang continue de progresser, dans un contexte marqué par l'échec du pari de Washington quant à la réduction de ses capacités nucléaires. Ainsi, la Corée du Nord a procédé à dix tirs du missile KN-23, le 4 et le 9 mai, le 25 et le 31 juillet, puis le 9 août – deux engins ayant été lancés à chaque occasion. À au moins une reprise, les tirs de KN-23 se sont produits alors que des roquettes de gros calibre étaient également testées. Présenté pour la première fois en février 2018, l'engin ressemble extérieure­ment à l'iskander-m russe, mais est tiré depuis un TEL chenillé. Surtout, sa portée semble accrue. Celles observées au cours des essais étaient comprises entre 240 km (premier essai) et 690 km (l'un des essais du 24 juillet). Plusieurs sources estiment que sa charge explosive, nucléaire ou convention­nelle, est de 500 kg. Comme celle de l'iskander (voir p. 78), sa trajectoir­e n'est pas intégralem­ent balistique. Les différents essais ont ainsi montré une apogée à environ 50 km d'altitude. Sa phase de rentrée est suivie d'une ressource, de sorte que sa trajectoir­e s'« aplatit », avant une rentrée à 90°, rendant plus difficile non seulement l'intercepti­on mais aussi la détection, à deux égards.

D’une part, de telles trajectoir­es réduisent la durée de vol et donc le préavis d'alerte : le délai pendant lequel une détection peut s'opérer est plus court. D'autre part, la manoeuvrab­ilité peut prendre en défaut les radars. Ainsi, les radars sud-coréens n'ont pas été en mesure de détecter la manoeuvre, du fait de la courbure de la Terre et de la direction du lancement (vers le nord-est). Séoul estime cependant qu'une telle manoeuvre pourrait être détectée si un tir s'effectuait vers le sud. Reste cependant à voir si, dans la foulée, il serait possible de déterminer le point d'impact probable, dès lors que les plages de portées du KN-23 sont relativeme­nt étendues. De plus, le missile est mobile et nécessite moins de temps de préparatio­n au lancement du fait d'une propulsion solide, ce qui réduit également sa vulnérabil­ité.

Les conséquenc­es stratégiqu­es de ces essais ne sont pas minces. Leur multiplica­tion suggère une appropriat­ion par les forces nordcoréen­nes : les essais n'auraient donc pas un but uniquement déclaratoi­re, mais également opérationn­el, au niveau de la formation des artilleurs et, sans doute, de la chaîne de ciblage. En outre, la portée potentiell­e du missile permet à Pyongyang de couvrir l'ensemble de la Corée du Sud, installati­ons américaine­s comprises, dans un contexte où une intercepti­on balistique est nettement plus délicate et où la pertinence des missiles THAAD déployés par Washington dans la péninsule n'est pas avérée.

S’ajoutent à cela les questionne­ments autour d’un deuxième sousmarin lanceur d'engins à propulsion convention­nelle, dont le chantier a été visité par le président nordcoréen fin juillet. Selon le ministère de la Défense sud-coréen, le nouveau bâtiment de Pyongyang serait en cours d'achèvement. Il pourrait embarquer trois missiles balistique­s, contre un seul pour le Sinpo, serait légèrement plus grand que ce dernier et reprendrai­t une architectu­re dérivée des Romeo avec, cependant, un allongemen­t substantie­l du kiosque. Néanmoins, aucune percée majeure n'est attendue en matière de discrétion. •

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Un des tirs d'essai du KN-23. (© KCNA)

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