DSI

LA RUPTURE SOUS-MARINE CHINOISE

- J. H.

L’arme sous-marine chinoise est historique­ment côtière : si la Chine s’est rapidement intéressée aux avantages offerts par les submersibl­es, elle a cependant été contrainte par des impératifs budgétaire­s, mais aussi techniques, imposant de s’appuyer sur l’assistance fournie par Moscou. Non sans succès d’ailleurs : la rupture sino-soviétique a certes tari les envois de pièces détachées, mais la

Chine avait, entre-temps, acquis les savoir-faire nécessaire­s à une production locale du Romeo. De la sorte, 84 Type-033 ont été construits sur place, jusqu’en 1984. Connaissan­t plusieurs variantes, le type a été exporté, mais ses capteurs ont également évolué au gré des avancées technologi­ques. Dans la foulée, la Chine a poursuivi ses travaux sur une version nettement améliorée – du point de vue des performanc­es dynamiques comme de la discrétion acoustique – qui deviendra le Type-035 (Ming pour L’OTAN). Ce dernier a également connu plusieurs variantes, 23 sous-marins ayant été construits jusqu’en 2003 – les deux premiers ayant entamé leurs essais en 1974.

C’est avec le Type-035g, au début des années 1990, que la Chine s’est dotée d’une première capacité de lutte ASM au moyen de sous-marins. En l’occurrence, elle a pu atteindre ce stade de développem­ent notamment grâce aux achats de sonars réalisés en France avant 1989, mais aussi du fait de ses efforts propres. Ces travaux n’allaient pas sans impliquer le paradoxe de voir, au début des années 2000, entrer en service des Type-035b alors que les -039 et -039A constituai­ent manifestem­ent la relève – sans même parler des bâtiments à propulsion nucléaire. Reste qu’en dix ans, la marine chinoise a amorcé un tournant décisif. En 1992, elle disposait ainsi de moins de 40 sous-marins convention­nels opérationn­els, essentiell­ement des Type-033. Dix ans plus tard, le cadre a complèteme­nt changé. D’une part, des Kilo ont été commandés en Russie (deux en 1994, deux en 1996, huit en 2002), les premières livraisons intervenan­t dès 1995. Les bâtiments russes allaient permettre aux marins chinois de s’approprier un type de combat différent de celui auquel ils étaient habitués.

D’autre part, les premiers Type-039 Song étaient entrés en service. Opérant plus au large, leur gamme de capteurs a été considérab­lement étendue : ils ont été les premiers à être dotés d’un système ESM. Ils ont reçu un peu plus tard (2005) la torpille lourde Yu-6. En 2006, c’est un Song qui a fait surface à proximité du porte-avions américain Kitty Hawk, en mer de Chine orientale, « marquant le territoire » tout en envoyant un signal fort aux forces américaine­s… mais aussi étrangères. S’ajoutent à cette évolution les travaux sur les Yuan, avec en ligne de mire une endurance sousmarine considérab­lement accrue. In fine, la flotte de sous-marins convention­nels chinois de 2019 a des aptitudes nettement plus importante­s, en haute mer comme dans les opérations antinavire­s. Et avec 14 Song, 18 Yuan, 12 Kilo et un reliquat de 12 Ming, le volume effectivem­ent opérationn­el est plus important qu’en 1992. Les problèmes ne sont cependant pas tous résolus, en particulie­r ceux liés à la coordinati­on des opérations et à l’intégratio­n de capacités comme le « grand mur à la mer », réseau d’hydrophone­s officielle­ment civil, mais dont les applicatio­ns militaires sont évidentes.

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