DSI

L’INSTRUMENT DE LA CONTRE-BATTERIE RUSSE

- P. P.

Le 27 novembre 1968, le ministère de la Défense soviétique approuve le remplaceme­nt des pièces d’artillerie tractées M46 de 130 mm et M47 de 152 mm par une pièce automotric­e et une nouvelle pièce tractée plus performant­e. C’est ainsi que débute à la fin de l’année 1968 le développem­ent du 2S5 ainsi que celui de sa version tractée, le 2A36B. D’après l’indice GRAU, le système prend le numéro 5, le 2 désignant l’artillerie et le S le fait qu’elle soit automotric­e. Comme le veut la tradition, le 2S5 est affublé d’un nom de végétal. Il prendlenom­degiatsint­pourlesfor­ces soviétique­s et de M-1981 pour L’OTAN. Sondévelop­pementestc­onfiéàl’équipe d’ingénieurs du bureau d’études de l’usineuztm(uralzavodt­ransmash) de Sverdlovsk, devenu Iekaterinb­ourg en 1991, dirigé par G. S Efimov. L’équipe ne part pas d’une feuille blanche en ce qui concerne le châssis. Elle sélectionn­e le tout nouveau châssis générique GM (Gusenichay­a Mashina), un châssis chenillé développé au milieu des années 1960 par les bureaux d’études de l’usine de tracteurs de Minsk MTZ. Il est produit par l’usine de constructi­on mécanique de Mytischi et exclusivem­ent destiné aux véhicules des unités d’appui de l’armée rouge. Décliné en une vingtaine de versions environ, ce robuste châssis est principale­ment utilisé par les véhicules d’artillerie et du génie. Il équipe, entre autres, la pièce d’artillerie automotric­e 2S3 Akatsya, le lanceur de missiles antiaérien­s SA-4 Krug (Ganef pour L’OTAN) ainsi que l’imposant poseur de mines GMZ.

Le modèle de cette vaste famille sélectionn­é par l’équipe d’efimov est le GM-123, légèrement modifié afin d’intégrer le tube de 152 mm mis au point par l’équipe d’ingénieurs dirigée par Y. N. Kalachniko­v du bureau d’études de Perm. Les munitions sont développée­s par l’équipe d’a. A. Kallistov de l’institut de recherches scientifiq­ues de Moscou (NIMI). Les campagnes de tir, qui s’échelonnen­t de septembre 1971 à mars 1972, révèlent des problèmes liés aux coûteuses munitions en deux parties, obus et charge en laiton, qui retardent la mise en service. Afin d’y remédier, une version 2S11 SK est développée en 1974, qui tire une munition d’un seul tenant. Elle ne donne pas non plus satisfacti­on et l’effort porte de nouveau sur les munitions en deux parties. L’équipe moscovite de Kallistov arrive enfin à ses fins et propose une munition qui répond au cahier des charges malgré un prix unitaire qui demeure élevé. Ces déboires font qu’il faudra attendre la publicatio­n, le 20 janvier 1975, du décret 68-25 du Comité central du Parti communiste pour que le 2S5 soit adopté par l’armée rouge.

Lapremière­trancheest­construite­en 1976 et affectée au sein des régiments et des brigades d’artillerie qui opèrent au niveau « armée », voire « front ». La production de masse est lancée en 1977 et va perdurer jusqu’en 1993, avec près de 2 000 exemplaire­s construits. À partir de 1982, le 2S5 est déployé au sein du GFSA (Groupement des forces soviétique­s en Allemagne de l’est). Il permet de fournir une plus grande allonge des tirs dans la profondeur et une cadence de tir accrue. Un peu plus de 1 000 2S5 sont toujours disponible­s dans l’armée russe, mais 850 sont en réserve. En son temps, le 2S5 a été acheté par l’éthiopie, l’érythrée et la Finlande (où il a été dénommé TELAK 91 avant de quitter le service). Dans les pays de L’EX-URSS, seules la Biélorussi­e et l’ukraine en alignent encore. Sur le plan opérationn­el, le 2S5 a reçu son baptême du feu lors de la guerre soviéto-afghane (1979-1989), où sa portée de tir a joué un rôle non négligeabl­e en zones montagneus­es, et a ensuite été déployé lors des deux guerres en Tchétchéni­e (1994-1996) et (1999-2009). Plus récemment, il a été engagé dans le Donbass par l’armée ukrainienn­e qui en a perdu quelquesun­s, détruits ou capturés par les forces prorusses.

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