STANFLEX : UN SYSTÈME TYPIQUEMENT DANOIS
Dans les années 1980, la marine danoise réfléchit à maximiser son efficience dans le cadre du remplacement de trois types de navires, en jouant d’une logique de modularité de ses systèmes de capteurs et d’effecteurs. Cette vision débouche sur le système Stanflex (Standard Flex), qui sera appliqué pour la première fois aux patrouilleurs polyvalents de la classe Flyvefisken (voir DSI no 52). On envisage alors de construire 16 unités pour en remplacer 22 et de les gréer « à la demande » en bâtiments de patrouille lance-missiles antiaériens et antinavires, de guerre des mines (avec des modules de commande de drones navals) ou encore hydrographiques. Si 14 unités seulement seront commandées, chacune pouvant recevoir trois modules, la logique sera également appliquée aux autres bâtiments de surface de la flotte, qui peuvent alors être catégorisés en fonction du nombre de modules embarqués : les Niels Juels (2 lors de leur refonte, les navires ayant depuis quitté le service), mais aussi les Absalon (5), Iver Huitfeldt (6), Knud Rasmussen (2), les patrouilleurs légers Dana (1), les Thetis (3), et les drones MSF (1) et MRD (2).
Les modules eux-mêmes ont une longueur de 3,5 m, une largeur de 3 m et une hauteur de 2,5 m, le système accueilli étant positionné à leur sommet. Ils comprennent toutes les connexions nécessaires (électricité, données, air, eau, etc.) et peuvent être positionnés ou retirés facilement, en un peu moins de 48 heures. Douze types de modules existent : canon de 76 mm ; quatre lanceurs Harpoon ; lanceur pour six missiles RIM-7 Sparrow : lance-torpilles MU90 ; sonar à immersion variable ; commandement de drones antimines ; grue ; océanographie ; recherche ; stockage ; lutte antipollution ; renseignement électronique. Reste cependant qu’il y a loin entre le concept et la pratique. Le Stanflex promettait une « marine Lego », adaptée au mieux en permanence aux missions rencontrées, mais, à la fin des années 2000, la configuration des navires a été « figée ». De fait, la modularité a ses limites. D’abord, parce que disposer de canons ou de missiles n’est pas disposer des capteurs nécessaires à leur mise en oeuvre et que certaines configurations potentielles sont donc sous-optimales.
Ensuite, parce que la modularité des systèmes n’est pas celle des hommes. Les systèmes de combat intégré tels que les 9LV Mk3 facilitent considérablement le travail des opérateurs, mais la lutte antimines est une spécialité en soi, assez éloignée de la lutte anti-surface. Elle requiert une formation poussée et une réelle expérience. On peut certes imaginer d’attacher les équipages non aux bâtiments, mais aux modules… Mais la dynamique d’équipage serait alors cassée… Enfin, parce la rationalité modulaire elle-même n’est pas toujours la plus pertinente. De facto, il est difficile de faire évoluer le rôle des Absalon, Huitfeldt ou même Thetis et Rasmussen : ces bâtiments restent marqués par les missions pour lesquelles ils ont été conçus. Un Rasmussen ne sera jamais un destroyer. De même, tous les emplacements ne permettent pas de tout faire : sur les Huitfeldt, les emplacements sont situés derrière le mât principal, sur la superstructure. Difficile d’imaginer le positionnement dans cette zone d’un module hydrographique par exemple… La modularité se pense donc comme une modalité d’adaptation relative.