Echappée Belle

L’île de beauté

La Corse comme vous ne l’avez jamais vu

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Embrasser les bouches de Bonifacio

La Corse du Sud se visite autant sur terre que sur mer. «Quand on voit la couleur de l’eau, la beauté de ces criques, pas besoin d’aller jusqu’aux Maldives», sourit en coin Yves, propulsant son hors-bord à 30 noeuds en longeant les falaises calcaires. Installé depuis 28 ans à Bonifacio, ce skipper n’en est jamais reparti, tombé amoureux fou de la pointe sud de l’île, comme bon nombre de ses 3 000 habitants à l’année. C’est en grande partie pour la beauté préservée des bouches de Bonifacio, réserve naturelle marine, qui prennent mille et un visages.

À 5 minutes du port, des mouillages déserts se révèlent. Comme l’anse de Fazzio où l’eau est si claire que l’on y repérerait une pièce de monnaie à 5 mètres de fond. Cap ensuite sur l’île de Cavallo, dite «des millionnai­res» pour ses luxueuses maisons d’architecte­s cachant une poignée de stars. S’arrêter au restaurant de l’hôtel des pêcheurs, pour déjeuner les pieds dans l’eau. De là, la virée vers les îles Lavezzi semble obligatoir­e. On s’y baigne avec les poissons, pas timides pour un sou, en écoutant les pu%ns cendrés, dont le chant rappelle un bébé qui pleure. Les hommes, eux, ont le sourire aux lèvres.

Se mettre au green à Sperone

C’est l’un des plus beaux d’europe, vous diront les golfeurs. L’un des plus beaux du monde, vous corrigeron­t, à raison, les Corses. Le golf de Sperone est en tout cas le plus méridional de France métropolit­aine. Incrustés en plein maquis sur près de 80 hectares, les 18 trous surplomben­t magni"quement le golfe de Bonifacio en épousant les courbes des falaises. Attention à ne pas se laisser distraire par la vue panoramiqu­e sur les criques de sable blanc aux eaux turquoise, les îles Lavezzi et la Sardaigne ne vous laisseront aucune intimité. Le 16e trou oblige même les joueurs à «driver» au-dessus de la mer, tant et si bien que les plus jeunes s’amusent à plonger pour récupérer les petites balles blanches au milieu des poissons…

Admirer la citadelle vue du ciel

Quoi de mieux que de prendre un peu de hauteur pour embrasser d’un seul regard toutes ces merveilles ? Vue du ciel, Bonifacio révèle son caractère véritable. De Porto-vecchio à la citadelle, en survolant les îles Lavezzi, on découvre mieux ce petit bout d’île qui refuse encore le béton et les Mcdonald’s. Une anomalie heureuse, un pied de terre arraché à la mer, à peine dompté par l’homme.

CARNET PRATIQUE $ OÙ DORMIR

Cala di Greco : Le Cala di Greco n’est pas un hôtel comme les autres. Ce lodge de charme ressemble à un petit village méditerran­éen immergé en plein maquis, constitué de suites lumineuses de plainpied isolées par des patios privés. La piscine à débordemen­t de l’hôtel o#re une vue exceptionn­elle sur le port et la citadelle.

Da Passano : Sur le port de Bonifacio, les spécialité­s corses sont revisitées en tapas. Dans un élégant cocon marin designé par Patrice Gardera, collaborat­eur de Philippe Starck, on partage des assiettes résolument modernes qui empruntent au terroir local. Plat phare de la maison, le tartare de loup au crumble de noisette se marie parfaiteme­nt aux Migliaccio­li (beignets à la tomme corses). Un régal. Le restaurant est doublé d’une épicerie "ne de produits locaux.

L’A Cheda : À quelques minutes en voiture de la ville, dans le jardin luxuriant de l’hôtel A Cheda, se cache une belle adresse gastronomi­que référencée dans le guide Michelin. On y goûte des spécialité­s de poissons issus de la pêche locale (de la langouste rémoulade en entrée au pagre à la noisette en plat). Pour les desserts, un chef pâtissier travaille la "gue, fruit phare de l’île, à merveille. Navette gratuite sur demande.

LA CORSE FRANÇAISE, PETITE HISTOIRE

En regard de sa longue histoire de troubles, la Corse a vécu les 2 derniers siècles dans une paix relative. Après son annexion, la France n’est pas restée inerte. La population s’accroît et l’économie se développe. Les !éaux insulaires (vendetta, divisions, banditisme...) déclinent au début du siècle suivant.

L’île pro"tera des progrès techniques (routes, chemins de fer...), notamment sous Napoléon III, qui fera davantage pour l’île que son illustre oncle.

Mais au tournant du XXE siècle, la Corse s’essou&e. Les activités traditionn­elles - production d’huile d’olive, culture de la châtaigne, chênes-lièges - péricliten­t, mises à mal par la concurrenc­e d’autres îles méditerran­éennes. Puis la Grande Guerre décime les Corses, recrutés en masse : 12 000 hommes sont tués sur les 45 000 mobilisés. Or ces hommes sont les dépositair­es du savoir-faire agricole et d’une grande part de la culture corse... Et la Corse, sans aucune industrie ou presque, se cherche, n’ayant d’autre choix que l’émigration : vers l’amérique du Sud ( Venezuela, Porto-rico) et, surtout, la France continenta­le, d’où de nombreux insulaires partiront vers les colonies (on estime que 20 % de la « coloniale » était d’origine corse au début du XXE s). Ceux qui monteront sur Paris réussiront souvent dans les sphères politiques et... le banditisme : il n’est pas si loin, le temps où Pigalle était « tenu » par les Corses.

La Corse libérée par les Corses !

La Seconde Guerre mondiale plonge la Corse dans la tourmente. Pressé de « rendre » l’île à l’italie, Mussolini l’occupe au mépris des accords d’armistice. La Résistance corse s’organise.

L’année 1943 sera particuliè­rement coûteuse pour la Résistance, mais le 8 septembre, la capitulati­on de l’italie donne le signal de l’insurrecti­on, organisée par les résistants corses. 3 000 soldats marocains débarquent à Ajaccio le 23 septembre, suite à l’appel de leur sultan (et futur roi) Mohammed V. Ce soutien décisif est souvent oublié. Ajaccio se libère aussitôt. Bastia, dévastée par les combats et les bombardeme­nts alliés, est également libérée.

« Le fusil ou la canne à pêche »

L’indépendan­tisme corse ne date pas d’hier : avec Sampiero Corso ou Pasquale Paoli, il a souvent mené l’histoire insulaire. Dans les années 1960, la Corse s’ouvre, après une longue torpeur, au bouillonne­ment régionalis­te. Un mouvement surtout incarne cette génération qui veut vivre au pays : L’ARC, l’action régionalis­te corse des frères Siméoni.

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