Edition Multimédi@

Patrice Gélinet, membre du CSA : « Sans Radio France et France Médias Monde, la RNT ne peut réussir »

Au sein du Conseil supérieur de l’audiovisue­l ( CSA), dont il est membre, Patrice Gélinet préside le groupe « Radios analogique­s et numériques » . Pour EM@, il fait le point sur la RNT. Un deuxième appel à candidatur­es est prévu début juin. Le gouverneme­n

- Interview exclusive de Patrice Gélinet, CSA Propos recueillis par Charles de Laubier

EM@ : Alors que les grandes radios privées boudent toujours la RNT qu’elles considèren­t non rentable que ressort- il de ces quatre études d’impact en termes de viabilité économique, de publicité et de complément­arité avec la FM et Internet ?

Edition Multimédi@ : Le CSA s’apprête à lancer un appel à candidatur­es en vue de la diffusion de la RNT sur Lille, Lyon et Strasbourg. Le calendrier initial le prévoyait avant fin mars : pourquoi ce retard ( 1) et quand est- il prévu de le lancer ? Puis quand l’appel à candidatur­es suivant – sur Nantes, Rouen et Toulouse cette fois – se déroulera ? Patrice Gélinet : Les études d’impact d’éventuelle­s autorisati­ons en radio numérique terrestre ( RNT) et la consultati­on publique, qui doivent précéder les appels à candidatur­es à Lille, Strasbourg et Lyon, ont pris plus de temps que prévu. Ce sont quatre études d’impact – une pour chacune de ces trois villes et une nationale – qui ont été rendues publiques le 19 avril dernier ( 2). Les réponses à la consultati­on doivent être rendues au plus tard le 13 mai, si bien que les appels pourraient être lancés le 1er juin en fonction de ces réponses. Les candidats devront remettre leur candidatur­e dans la seconde quinzaine de juillet au plus tard ; la sélection devrait se faire au mois d’octobre. Quant aux appels suivants prévus à Nantes, Rouen et Toulouse, ils devraient pouvoir être lancés au quatrième trimestre de cette année.

( 3), P. G. : Il ressort des études d’impact que, dans la phase de déploiemen­t et d’initialisa­tion du parc des récepteurs compatible­s, la RNT devrait engendrer des dépenses supplément­aires sans recettes publicitai­res suffisante­s pour les financer. Mais selon les estimation­s faites à partir des expérience­s de Paris, Marseille et Nice, le coût de diffusion de la RNT est inférieur à celui de la FM lorsque les ( Suite en page 2)

couverture­s FM et RNT sont équivalent­es. L’impact de la RNT sur l’audience et les marchés publicitai­res locaux étudiés ne pourra devenir sensible qu’à moyen et long termes. Toutefois, l’enrichisse­ment de l’offre radiophoni­que – que permet la RNT dans la quasi- totalité des zones couvertes par ces études – pourrait être perçu par l’auditeur équipé en récepteur compatible avec la RNT dès le démarrage des émissions. P. G. : En raison du faible équipement du public en postes RNT, il est encore trop tôt pour tirer un bilan économique du lancement de la RNT dans les zones de Paris, Marseille et Nice. L’enrichisse­ment de l’offre est d’ores et déjà bien notable : même à Paris, des formats nouveaux ont vu le jour ! Concernant les éditeurs n’ayant pas démarré leurs émissions à Paris, Marseille et Nice, le CSA a entamé un chantier destiné à permettre la gestion de cette ressource inexploité­e. La première phase s’est traduite par le retrait des autorisati­ons délivrées aux 34 éditeurs qui ne se sont pas mis d’accord sur le choix conjoint d’un opérateur de multiplex. En prévision de l’appel aux candidatur­es sur ces zones prévu en 2017, ce plan d’action va se poursuivre dans les prochaines semaines par l’étude de la compositio­n des multiplex actuelleme­nt exploités au regard des souhaits que certains éditeurs nous ont déjà transmis. P. G. : La présence du service public – Radio France et France Médias Monde ( avec RFI) – est une des conditions nécessaire­s au succès de la RNT. Elle permettrai­t en outre à Radio France de compenser la perte de couverture provoquée par l’arrêt des ondes moyennes et des grandes ondes, et à certaines de ses stations ( FIP, Le Mouv’) de pouvoir couvrir des zones où elles ne sont pas entendues en profitant des avantages que procure la RNT par rapport aux autres modes de diffusion : qualité du son, gratuité, anonymat, données associées, faible coût de diffusion, ou encore meilleure ergonomie des récepteurs. C’est d’ailleurs ce que préconise le rapport de la Cour des comptes du 1er avril 2015 consacré à Radio France ( 4). Jusqu’à présent, en refusant de préempter les fréquences mises en appel à Paris, Marseille et Nice, le gouverne- ment s’est mis dans une position d’attente. Nous verrons ce qu’il fera lors des prochains appels. P. G. : Le seuil des 20 % de couverture à partir duquel les fabricants de récepteurs ont l’obligation d’y intégrer la RNT n’ayant pas été atteint, le parc de récepteurs compatible­s est encore insuffisan­t. En outre, la RNT est encore peu connue du grand public, y compris des propriétai­res de certaines marques de voitures équipées en première monte d’autoradios disposant du DAB ( 5). Le déploiemen­t de ce mode de diffusion numérique, accompagné d’une campagne de communicat­ion, devrait permettre une croissance rapide du parc de récepteurs une fois dépassé le seuil des 20 %, ce qui pourrait être le cas dès 2017. Il est en effet très difficile de se prononcer sur le taux de couverture de la RNT, une fois les émissions sur Lyon, Lille et Strasbourg démarrées. D’une part, le CSA devra fixer sa méthode d’évaluation de la couverture de la RNT. D’autre part, le taux de couverture de la RNT dépend du choix des sites que feront les opérateurs de multiplex. Ces derniers ont des obligation­s de couverture progressiv­e des allotissem­ents mis en appel et peuvent constituer le réseau de diffusion qu’ils souhaitent. Dès lors, le taux de couverture ne pourra être connu qu’a posteriori, une fois que les opérateurs de multiplex constitués auront choisi leurs sites. P. G. : Les smartphone­s ne sont pas nécessaire­ment concernés par cette obligation car la loi ne vise que les équipement­s qui permettent à titre principal la réception de services de radio : un smartphone peut permettre la réception de services mais il permet également de nombreux autres usages sans rapport avec la radio, à commencer par la communicat­ion privée. L’intégratio­n de la RNT dans les smartphone­s relève donc de l’initiative de leurs constructe­urs. Certains ont choisi, comme LG, d’intégrer un « tuner » ( syntoniseu­r) RNT dans un modèle de smartphone : espérons que ce modèle rencontre le succès. Cette intégratio­n présente un avantage pour l’auditeur : l’écoute de la RNT par ce type de smartphone n’est pas décomptée dans la consommati­on des données transmises souvent plafonnées par les forfaits 3G ou 4G. Dans ce cas, l’écoute de la radio peut être illimitée ! @

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