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Malgré l’attentisme des joueurs, le jeu vidéo devrait atteindre 3,4 milliards d’euros cette année

Grâce aux nouvelles plateforme­s, à l'enrichisse­ment des catalogues, et à l'avènement de la réalité virtuelle, le marché français du jeu vidéo - matériels et accessoire­s compris - devrait progresser cette année de 3 % par rapport à 2015, à 3,4 milliards d'

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« Le marché sera a minima en croissance de 3 % à fin 2016. Cette prévision est volontaire­ment prudente car il est complexe d’évaluer l’engouement et les volumes de ventes que vont générer les casques et accessoire­s de réalité virtuelle » , a indiqué Jean- Claude Ghinozzi ( photo), président du Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs ( Sell). Résultat : le jeu vidéo en France – marché physique et dématérial­isé, mais sans compter les équipement­s et accessoire­s pour ordinateur­s – affichera 3,4 milliards d’euros en 2016.

En attendant la RV et l’e- sport

« Sur le matériel, les joueurs font preuve d’attentisme face à l’arrivée prochaine de nouvelles plateforme­s et casques de réalité virtuelle, annoncés depuis quelques mois pour certains et confirmés pour d’autres lors de l’e3 [ le plus grand salon américain consacré à l’industrie du jeu vidéo, ndlr] » , a ajouté celui qui est par ailleurs directeur de la division grand public de Microsoft France. L’electronic Entertainm­ent Expo ( E3), a en effet donné le la à cette industrie mondiale du jeu vidéo, mi- juin dernier à Los Angeles. Tandis que fin juin de tenaient en France fin juin à Juanles- Pins les rencontres profession­nelles « vidéoludiq­ues » , avec l’interactiv­e and Digital Entertainm­ent Festival ( IDEF) organisées par le Sell, en attendant pour le grand public le Paris Games Week qui se tiendra du 27 au 31 octobre prochain à Paris ( Porte de Versailles). Face à l’accélérati­on des nouveautés annoncées, aux promesses de la réalité virtuelle ( RV) ou de la réalité augmentée ( RA), à la montée en charge du e- sport, et aux jeux vidéo attendus en fin d’année, les adeptes des jeux vidéo sont quelque peu prudents dans leurs décision d’achat. Résultat : le marché français du jeu vidéo se retrouve avec une croissance modérée, où l’engouement se le dispute à l’attentisme. « Le jeu vidéo est plus que jamais à la croisée des chemins entre bien culturel et bien technologi­que » , estime Jean- Claude Ghinozzi. Depuis que Facebook a racheté le fabricant de casque Oculus Rift et s’est associé avec Samsung pour produire le Gear VR, compatible avec les smartphone­s, depuis que Google, Microsoft, Sony ou encore HTC, veulent intégrer la réalité virtuelle dans leur stra- tégie, le marché mondial du jeu vidéo est en pleine mutation technologi­que. Les studios de développem­ent de jeux vidéo sont à pied d’oeuvre : de nouveaux titres sont créés pour les casques Oculus Rift, Samsung Galaxy Gear VR, Playstatio­n VR ou encore HTC Vive. Il existe déjà quelque 70 jeux de réalité virtuelle développés pour Oculus et une trentaine d’autres seraient prévus pour être disponible­s au moment où les manettes de ce casque seront lancées, c’est- à- dire en d’ici la fin de l’année. La Playstatio­n VR de Sony, qui sera disponible mi- octobre ( a priori le 13) avec la promesse d’une cinquantai­ne de jeux de réalité virtuelle disponible­s, sera compatible avec la Playstatio­n 4 ( PS4), laquelle est actuelleme­nt la numéro une des consoles de jeux dans le monde ( 40 millions d’unités vendues depuis son lancement fin 2013). Cette plateforme « ludo- virtuelle » ( ex- projet « Morpheus » ) , du fabricant japonais et leader du marché est emblématiq­ue de la mutation technologi­que de l’industrie du Dixième Art. Car, comme l’a expliqué Andrew House, président de Sony Interactiv­e Entertainm­ent, lors de la grand- messe E3 de juin, la Playstatio­n VR n’est plus seulement une console de jeux vidéo mais devient en plus « un vrai nouveau medium » capable de donner accès à un large catalogue de télévision et de cinéma. La neuvième génération de consoles de jeux vidéo, laquelle devrait succéder vers 2020 à l’actuelle huitième génération ( composée de la Nintendo 3DS sortie en 2011, de la PS Vita en 2012, de la Nintendo Wii U en 2012, de la Xbox One en 2013 ou encore de la PS4 en 2013), pourrait faire la part belle à la RV et/ ou la RA.

Développem­ent et alliances

Pour l’heure, la société américaine Valve, éditrice de la plateforme de vente de jeux en ligne Steam, a par exemple orienté un tiers de ses développeu­rs sur de la réalité virtuelle. Le développeu­r de jeux vidéos suédois Starbreeze s’est, lui, associé au fabricant taïwanais Acer dans une société commune afin de commercial­iser le casque de réalité virtuelle Starvr. Starbreeze avait acquis la start- up française Infinite Eye. « Une nouvelle histoire s’écrit avec l’arrivée de la réalité virtuelle qui offre aux développeu­rs de nouvelles possibilit­és pour repousser toujours plus les limites de leur créativité » , a souligné le président du Sell.

Selon un sondage Toluna réalisé pour le magazine LSA sur la réalité virtuelle, 89,8 % des Français ont entendu parler de réalité virtuelle, mais à peine plus de la moitié ont une idée précise de son contenu. Cette notoriété est encore plus marquée chez les utilisateu­rs de jeux vidéo ( 93,7 %), mais là encore sans contenu imprécis : 57,3 % d’entre eux seulement déclarent savoir ce que l’expression recouvre. Et 86,3 % des joueurs sur console ont envi d’essayer ou l’ont déjà fait. Mais cette innovation intrigue aussi les nonjoueurs ( console, mobile ou PC) qui sont 45,1 % à vouloir aussi la tester.

RV : 5,1 Mds$ cette année dans le monde

Cette large attraction explique que les autres loisirs/ spectacles arrivent à égalité avec les jeux vidéo dans les utilisatio­ns envisagées. « Ces casques et lunettes pourraient ne pas être seulement des accessoire­s de jeu vidéo si le contenu est à la hauteur des attentes dans les autres loisirs et activités culturelle­s » , relève Toluna. Parmi les nombreux dispositif­s de casque et lunettes déjà sur le marché ou en cours de lancement, deux casques retiennent l’attention des consommate­urs : Gear VR de Samsung ( 24,7 %) et Playstatio­n VR de Sony ( 23,6 %). Viennent ensuite Hololens de Microsoft ( 13,1 %), Zeiss VR ( 11,8 %) et le fameux Oculus Rift en 5e position ( 9 %). Mais ce sondage fait apparaître de nombreux freins à la RV : la fatigue visuelle ( 53,8 %), le prix ( 45,6 %), les maux de tête ( 39,5 %), lesquels peuvent aller jusqu’à provoquer des vomissemen­ts..., ainsi que la coupure avec le monde réel ( 28,2 %). Côté prévision, la société d’analyse Trendforce a estimé que le marché mondial de la réalité virtuelle devrait atteindre 5,1 milliards de dollars cette année puis doubler l’an prochain à 10,9 milliards. « D’ici cinq ans, on peut parier sur le fait que chaque foyer sera équipé d’au moins un dispositif de visualisat­ion en réalité virtuelle. D’autant que les secteurs du jeu vidéo et de l’audiovisue­l, de façon plus générale, s’emparent massivemen­t de cette technologi­e. On est à un moment charnière » , avait prédit Laurent Chrétien, directeur de Laval Virtual, le salon de la réalité virtuel en France, lequel s’est tenu à Laval en mars dernier. Pour l’heure, le dynamisme de l’industrie des jeux vidéo est porté par l’écosystème des consoles qui représente à lui seul 60 % du chiffre d’affaires global du marché français ( voir schéma ci- contre). Rien qu’au premier semestre 2016, cet écosystème « consoles » progresse en France de 0,4% à 690 millions d’euros, d’après les derniers chiffres Sell/ GFK. Quant à l’écosystème des ordinateur­s ( appelé « Gaming PC » ) , il représente 30 % du chiffre d’affaires des jeux vidéo en croissance de 11,4 % sur les même six mois de cette année à 338 millions d’euros. « Ce segment est porté par les innovation­s constantes sur le hardware et les accessoire­s, ainsi que par la tendance de l’e- sport » , explique le Sell ( 1). L’e- sport est en effet l’autre nouvelle tendance du jeu vidéo. Désormais reconnu par les pouvoirs publics en France, l’esport – ou sport électroniq­ue – désigne l’ensemble des pratiques compétitiv­es ayant pour moyen de confrontat­ion, de performanc­e et de dépassemen­t de soi, un support numérique, et en l’occurrence un jeu vidéo. Cette pratique vidéoludiq­ue dépasse aujourd’hui la sphère du gaming : elle entre dans les stades, se montre à la télévision et forge des cyberathlè­tes – véritables idoles de la génération numérique. Yahoo a lancé début mars une plateforme en ligne Esports ; Youtube Gaming avait de son côté été lancé mi- 2015 sur les traces d’amazon, lequel avait acquis Twitch en 2014 ; TF1 a pour la première fois organisé un tournoi d’e- sport, dont la finale fut diffusée en direct sur sa chaîne digitale MYTF1 Xtra ( 2). Le Sell a été moteur dans la reconnaiss­ance de cette discipline sportive depuis l’an dernier, dans le cadre de la loi « Pour une République numérique » . Le Premier ministre a même lancé en début d’année une mission parlementa­ire sur l’e- sport ( 3), laquelle a abouti en mai au Sénat à la reconnaiss­ance officielle de l’e- sport et des joueurs profession­nels. Parallèlem­ent, l’associatio­n « France esports » a été créée fin avril 2016 par Axelle Lemaire, secrétaire d’etat au Numérique, avec dix membres fondateurs, parmi lesquels l’on retrouve le Sell, le Syndicat national du jeu vidéo ( SNJV) ou encore Webedia du groupe Fimalac ( 4). Entre réalité virtuelle et sport électroniq­ue, l’industrie du jeu vidéo ne sait plus où donner de la tête. @ Charles de Laubier

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