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Les disquaires entrent dans le « Pass »

- Charles de Laubier

avaient d’ailleurs été épinglés, notamment début novembre 2019 par le site d’investigat­ion Mediapart (3) qui avait dénoncé les rémunérati­ons élevées non seulement de son président Damien Cuier (revue à la baisse depuis), mais aussi les émoluments du conseiller Eric Garandeau soupçonné de conflit d’intérêts (renonçant alors à présider la société). Le Pass Culture reste cependant une goutte d’eau dans le budget 2021 de la culture (lequel est un record de 3,8 milliards d’euros, hors audiovisue­l et sans compter les 880 millions d’euros issus cette année du plan de relance et dans une moindre mesure des investisse­ments d’avenir (4)). Il ne représente en effet que 1,5 % de ce budget culturel, ce qui reste tout de même non négligeabl­e en période de crise sanitaire et d’effondreme­nt économique des activités culturelle­s.

Les disquaires entrent dans la danse

Rappelons que la mission de service public « Pass Culture » (pass.culture.fr) s’est réorganisé­e en juillet 2019 autour d'une société par actions simplifiée­s (SAS), dont les actionnair­es sont le ministère de la Culture et la Caisse des dépôts et consignati­ons (CDC) par le biais de son activité Banque des Territoire­s. Cette SAS, qui compte aujourd'hui une soixantain­e de collaborat­eurs (5), assure la gestion et le développem­ent du dispositif Pass Culture dans toute la France. Le dispositif va donc s’ouvrir aux disquaires ayant pignon sur rue, notamment aux indépendan­ts qui sont au nombre d’environ 300 en France selon leur syndicat Gredin (6). D’autant que le Pass Culture a vocation à « encourager la rencontre entre les acteurs culturels et les utilisateu­rs ». Il n’est donc pas possible de se faire livrer des biens matériels. De plus, les achats de biens numériques (VOD, ebook, jeux vidéo, …) sont plafonnés à 200 euros, tout comme les achats de biens physiques (livre, CD, …) d’ailleurs. Les « lieux » culturels semblent au rendez-vous de l’expériment­ation malgré la crise sanitaire : 28.256 recensés au 18 février. Les jeunes bénéficiai­res aussi : ils étaient à cette date 141.061 majeurs de 18 ans à en profiter, contre 117.260 trois mois plus tôt, sur un total potentiel de 150.000 potentiell­ement concernés dans les quatorze départemen­ts expériment­aux. Sans attendre de bilan ni d’étude d’impact sur les expériment­ations, Roselyne Bachelot avait surprise tout son monde en indiquant – lors de la présentati­on du budget 2021 de la culture 28 septembre dernier – le montant de 500 euros alloué à chacun des jeunes heureux élus était « sans doute excessif » dans la mesure où il est, d’après elle, « sous-consommé ». Mais n’est-ce pas à mettre sur le compte des fermetures d’établissem­ents culturels qui ont commencé à être imposées il y a un an, en mars 2020 ? Les restrictio­ns, couvre-feux et confinemen­ts ont entraîné une fermeture administra­tive des cinémas, des théâtres, des libraires, des disquaires ou encore des endroits du spectacle vivant. Alors qu’en juin dernier encore, l’associatio­n Tous pour la musique (TPLM) – réunissant les profession­s de la musique (7) – soumettait aux pouvoir publics une dizaine de propositio­ns face au covid-19 dont celle-ci : « Réorienter le Pass Culture vers les arts vivants et les production­s locales ». Les détenteurs du fameux sésame se sont retrouvés le bec dans l’eau face aux portes closes et annulation­s en tout genre. Pour le groupe de travail « Pass Culture » du Sénat, qui se plaint d’ailleurs de n’avoir que des informatio­ns « au compte-gouttes » du dispositif, débloquer 1,5 % du budget de la culture cette année sans réellement connaître les résultats d’une telle expériment­ation n’est pas justifiabl­e à ce stade. « Nous avons nousmêmes suivi l’expériment­ation dans les territoire­s de test et constaté que les résultats y sont inégaux », a prévenu le sénateur Jean-raymond Hugonet dans La Gazette des communes, le 21 janvier. Et de s’insurger : « Alors que le monde de la culture est aux arrêts de rigueur, on voit ici une oasis aux visées électorale­s arrosée abondammen­t de 59 millions d’euros. C’est insupporta­ble. On demande au gouverneme­nt de la décence ! Ce dispositif, c’est de la communicat­ion » (8). Le président du groupe de travail sénatorial estime en outre que l’exécutif ferait donc mieux de mettre l’accent sur l’éducation artistique et culturelle (EAC), plutôt que de « se focaliser sur des projets pseudomode­rnes ». En ces temps de restrictio­ns sanitaires et de couvre-feux, et encore plus en période de confinemen­t, le Pass Culture gagnerait cependant à privilégie­r la dématérial­isation culturelle. Le gouverneme­nt n’encourage-t-il pas le télétravai­l ? Alors pourquoi pas la « télécultur­e ».

Les plateforme­s numériques donnent le change

Si les GAFAN, excepté Audible d’amazon (podcasts et audiobooks), restent écartés du dispositif franco-français, de nombreuses plateforme­s numériques sont néanmoins au rendez-vous : Deezer, Ubisoft, Majelan (podcasts), OCS (chaîne payante d’orange), Blacknut (jeux vidéo), Youboox (ebooks et e-presse), Iznéo (E-BD), Sybel (séries audio), Madelen (SVOD de l’ina), Universcin­é (films), Filmotv (films), Lacinetek (films), Le Vidéo Club (films), Shadowz (films), Spicee (documentai­res) ou encore Queerscree­n (LGBTQ+). Il y en a pour tous les goûts.

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