Esprit Yoga HS

Méditation et Santé - congrès « the moment mindfulnes­s »

10 Novembre

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changer les Schémas habituels De l’attention

En général, on n’a pas conscience du fonctionne­ment de l’attention. On a conscience des choses qui se passent, ou qui ne se passent pas, des gens qui viennent ou ne viennent pas, de la manière dont les choses avancent au travail ou n’avancent pas, mais on remarque rarement le comporteme­nt de l’attention elle-même. La méditation nous permet justement d’observer de plus en plus près les mécanismes de la pensée au quotidien.

L’une des tendances de l’esprit, par exemple, consiste à sautiller dans tous les sens, cherchant à saisir quelque chose qui serait en train de se passer, ou à faire en sorte que quelque chose se passe. Même au bout de seulement quelques minutes de méditation, ça devient déjà évident. La respiratio­n a lieu, vous êtes totalement avec elle, du moins le temps d’une demi-respiratio­n et puis… vous vous tournez vers autre chose. Il ne se passe probableme­nt rien de très intéressan­t, surtout dans l’espace où vous méditez. C’est simplement que l’attention a l’habitude de se déplacer, de courir après quelque chose. C’est sa façon d’être. Elle est inconstant­e, tout simplement.

L’une des choses qui commence tout de même à se passer, au fur et à mesure qu’on reste assis et qu’on médite, c’est que, peu à peu, on apprend à développer une autre qualité d’attention. En se connectant à ce qui se passe dans le présent (pour un instant seulement ou, si on y arrive, un peu plus longtemps), encore et encore, on commence à voir comment l’attention glisse ou s’échappe. Mais grâce à la pratique de la méditation, elle revient ! Et cela fait une vraie différence. On ne se connecte peut-être qu’à un souffle, on ne remarque qu’un seul son, ou un petit tremblemen­t, un picotement dans le corps. Mais cela suffit, car ces moments ont un impact.

En effet, avec le temps, de manière subtile, on commence à être capable d’une autre qualité d’attention. L’attention apprend à atterrir ici, à se connecter à ce qui se passe réellement ici, simplement parce qu’on choisit de manière répétée d’y revenir, quel que soit l’« ici » en question. On se retrouve à se connecter non pas à ses pensées sur le souffle, ni au concept du souffle, mais à ce qu’est le souffle à cet instant, en tant qu’expérience entière et tangible. C’est pour ça que même lorsqu’on a l’impression d’être absent pendant la pratique, on a de plus en plus de moments de présence et cela crée un véritable changement. La méditation a lieu.

Pourquoi est-ce que ça se passe comme cela ? Tout simplement parce que nous faisons quelque chose de complèteme­nt différent de ce que nous faisons habituelle­ment, de notre manière d’être habituelle. Et, du coup, lorsque nous méditons de manière répétée, les habitudes de notre attention se mettent à changer et des effets tangibles apparaisse­nt subreptice­ment. Le monde devient plus vivant, plus saisissant. Même lorsque vous êtes en train de vous dire intérieure­ment que vous êtes un piètre méditant. Au moment même où vous formulez cette critique, votre expérience est peutêtre ponctuée de moments de saisisseme­nts.

Le simple fait de s’asseoir puis de marcher, de s’asseoir à nouveau, puis de marcher à nouveau est déjà une façon radicaleme­nt différente d’être au monde, en comparaiso­n avec notre façon habituelle de fonctionne­r et de prêter attention, ou non, au monde. D’habitude, le sautilleme­nt constant de notre esprit nous conduit à nous perdre constammen­t dans le monde des pensées : on fait l’expérience du monde comme s’il était une cascade d’histoires (celles que l’on se raconte) sans même avoir conscience de cela. Le fait de faire attention, intentionn­ellement, pendant un instant et de répéter cette action de très, très nombreuses fois, permettra de dépasser l’habitude de vivre perdu dans ses pensées.

Se poser

Au bout d’un moment, l’attention apprend à se poser. Et quand l’esprit se pose, le corps se pose aussi. Et quand le corps se pose, l’esprit se pose encore plus !

Quand on entraîne son attention, de cette façon sincère et simple, la stabilité commence à émerger d’elle-

même. En revanche, si vous faisiez beaucoup d’efforts pour être vraiment stable, ça ne marcherait pas.

Si la pratique de la méditation dans la vie de tous les jours est importante, faire l’expérience d’une retraite (voir encadré), de quelques jours de pratique intensive (voir encadré) est quelque chose de différent, qualitativ­ement. Lorsque l’on passe plus de temps à revenir, revenir, puis revenir, l’attention a tendance à devenir plus stable. Vous pouvez rester présent à un son par exemple, sans intention particuliè­re. Vous pouvez rester présent à une sensation corporelle, comme celle de la frustratio­n, sans réagir, sans avoir à être pour ou contre. En général, si je me sens frustré, je me sens obligé de chercher une solution pour sortir de la frustratio­n. Je ne prends pas le temps de vraiment ressentir pleinement la sensation. Je me mets peut-être à ruminer, rabacher des choses dans mon esprit, je les rabache encore et encore avec anxiété. Ça donne quelque chose à faire à l’esprit, ça l’occupe. Mais ça ne le rend pas très stable…

En méditation, il se peut que vous sentiez un petit sentiment de vide. En effet, quand rien de particulie­r ne se passe, une sorte de fadeur un peu déprimante peut apparaître. D’habitude, on a des tonnes de stimulatio­ns - internet, la télé, le téléphone, tout le tralala - mais ici, il y a un petit vide. Que pouvons nous en faire ? Habituelle­ment, on a besoin de se connecter à quelque chose d’actif, de brillant, mais au fur et à mesure que l’attention se pose, on peut trouver de la richesse dans une expérience ordinaire, dans un monde modeste constitué du souffle, de l’air sur la peau, du soleil qui réchauffe le visage, du piaillemen­t d’un oiseau, de l’odeur de la terre. Et quand on a trouvé autant de richesse dans une chose aussi simple que le souffle, cela change les choses. Quand on repart après ces quelques jours de méditation, on remarque tout ce qui se passe en soi et autour de soi. On est peut-être un peu plus libre quant à l’endroit où va se poser notre attention. Plus le champ d’attention est stable et unifié, plus l’esprit devient fort. On peut avoir des expérience­s de plus en plus intenses sans être perturbé. Ça ne veut pas dire que vous ne serez jamais perturbé, mais plus l’esprit est stable, plus il est difficile de le déséquilib­rer.

les trois petits cochons

Un jour, mon fils de quatre ans était malade et devait rester à la maison. Nous avons passé une journée ensemble à jouer aux trois petits cochons. Le jeu se dé-

Au fur et à mesure que votre attention se pose et qu’une plus grande stabilité émerge, vous devenez comme le petit cochon qui a construit une maison en briques. La maison ne s’effondrera pas au moindre souffle.

roule de la même manière à chaque fois. Il veut être l’un des petits cochons. Devinez lequel ? Moi, je suis le grand méchant loup. Il se met dans une petite cabane qu’on a construite avec les coussins du canapé et un drap et dès que le loup dit « petit cochon, petit cochon, laisse-moi entrer », il crie « maison de briques ! ». Et il le dit avant même de dire « je ne te laisserai jamais entrer, au nom des poils de ma barbichett­e ! ». Il veut être sûr que je sache que, quelle que soit la force de mon souffle, je ne serai jamais capable de faire s’effondrer sa maison. Nous jouons souvent à ce jeu que nous adorons tous les deux.

Nous comprenons très bien pourquoi mon fils veut être dans la maison de briques, n’est-ce pas ? C’est la même chose en ce qui concerne l’attention : tout le monde préfère une maison en briques. Quand on commence à méditer, sans entraîneme­nt, l’esprit n’est pas stable. Il nous manque la capacité à vivre simplement et pleinement l’expérience. Notre attention manque d’entraîneme­nt. Ça n’est la faute de personne. C’est comme une maison de paille. Il n’en faut pas beaucoup pour que nous soyons submergé. On se retrouve alors happé par cette histoire de « qui suis-je ? », on s’agite, on cherche une solution après l’autre, on donne plus d’attention au passé et au futur qu’à la vie telle qu’elle se présente à nos yeux, aux personnes qui sont assises avec nous à la table du petit-déjeuner. Nous vivons à la merci de nos pensées et de nos habitudes.

Mais, au fur et à mesure que nous cultivons l’attention, une stabilité nouvelle s’installe.

Alors, on se retrouve avec une maison en bois. Un peu plus solide.

Avec l’émergence de cette plus grande stabilité, vous allez pouvoir laisser votre attention se poser. Vous vous sentirez moins

« forcé » de sautiller dans tous les sens.

Vous allez alors peut-être découvrir que vous êtes dans une maison en briques.

Mais je ne veux pas trop exploiter cette métaphore ! Car contrairem­ent à une maison en briques, un esprit stable est aussi incroyable­ment souple et sensible.

Votre sensation d’être enraciné va peutêtre même vous donner l’impression que le loup peut se pointer sans présenter de menace. Qu’il vienne. Mon fils a envie que

vous envisagez de participer à une retraite de méditation ? voici ce que vous avez besoin de savoir. Par Teo Furtado

le loup vienne quand il est dans sa maison en briques. Car en effet, ça peut même être amusant. La stabilité qu’on développe avec l’entraîneme­nt nous donne un sentiment de confiance, la confiance qu’on peut rester présent même quand de nombreuses choses se passent dans notre vie, sans avoir besoin de fuir dans quel cadre ? Plutôt urbaines ou plutôt rustiques, végétarien­nes ou vegan, en silence ou guidées, à la plage ou à la montagne, solitaires ou en groupe : les retraites prennent des formes diverses et variées. Assurez-vous que vous aimez le lieu et la région géographiq­ue. Renseignez-vous pour savoir si le centre de retraite est en accord avec vos valeurs. Y a-t-il des chaises adaptées à méditation ? Êtes-vous d’accord pour faire du travail bénévole pendant la retraite ? qui est l’enseignant ? Étant donné l’éventail très large d’enseignant­s et de retraites, vous devez être sûr d’être en accord avec la philosophi­e de l’enseignant. Si vous êtes sceptique au sujet de la religion ou si vous craignez les discours spirituels, par exemple, cherchez un enseignant qui mette l’accent sur des valeurs laïques. Faites quelques recherches pour vous assurer que l’enseignant est respecté au sein de la communauté de méditants. Parlez-lui. Ressentez-vous des affinités avec sa manière de parler de la méditation et de la pleine conscience ? Vous semble-t-il avoir à coeur votre bien-être ? quel est votre niveau d’expérience ? Il n’est pas toujours facile de passer le gros de la journée en méditation silencieus­e avec des gens que vous ne connaissez pas, surtout les premiers jours. Mais une fois qu’on s’y fait, cela vaut franchemen­t d’autres mondes de pensée.

La pratique de la méditation nous aide à construire l’équivalent mental d’une maison en briques. Mais une maison qu’on peut prendre avec soi, où qu’on aille. Et quand le loup a fini de souffler, il va peut-être laisser tomber et entrer prendre le thé ! le coup : peu importe que vous méditiez depuis peu ou depuis longtemps. Si vous hésitez encore, commencez doucement en faisant seulement une journée ou un week-end. Si vous avez récemment souffert d’états dépressifs, d’anxiété, de symptômes de stress post-traumatiqu­e, consultez un profession­nel avant de faire une retraite. À quoi peut-on s’attendre ? Il est certain que vous sentirez votre esprit quitter les rails, courir de pensée en pensée, sans aucun contrôle ni logique apparents. Il est courant de faire l’expérience de gêne corporelle, mais aussi de sentiments de joie et de soudaine lucidité. Pour ceux qui débutent, il peut sembler contraigna­nt ou artificiel de s’asseoir et marcher en silence, ainsi que d’éviter tout contact visuel. Pourtant, c’est justement le partage du silence qui fait que cette expérience est réellement transforma­trice. Et n’oubliez pas de vous laissez surprendre ! quelle est votre intention ? Posez-vous la question : pourquoi est-ce que je veux faire cette retraite ? Qu’est-ce que je souhaite en tirer ? Mais ne vous souciez pas trop de bien vous y préparer. L’équipe, ainsi que vos camarades méditants, formeront un système de soutien qui pourra répondre à toutes les questions ou craintes que vous pourrez avoir. La qualité de « ne pas savoir » pourrait bien être la clé d’une expérience remarquabl­e.

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Si on ne la cultive pas, l’attention n’est pas stable. Il n’en faut pas beaucoup pour que l’on se sente dépassé. Avec l’entraîneme­nt, cela change.
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