SE RÉGÉNÉRER, CORPS ET ÂME
Profitons de cette période difficile pour accueillir le renouveau
NOUS AVONS vécu une suspension inédite dans notre histoire humaine. Sans faire de distinction de couleur, de peau, de culture, de revenu ou de religion, le virus s'est immiscé dans nos vies. En l'espace de quelques semaines, le monde d'avant s'est évanoui. Comme un deuil brutal, il y aura désormais le monde d'avant le Covid-19 et celui d'après. Pour certains, dans le monde d'avant vivaient encore un parent, un grand-père, une voisine ou l'ami d'un ami, c'était une époque où l'espace collectif était moins contraint, où régnait peut-être une certaine insouciance. C'était aussi le monde où la vie se déroulait à un rythme effréné, où nous étions stressés et pressés. Et puis tout s'est arrêté. Le confinement nous a pris de court. Nous avons été contraints de ne plus bouger. Moins d'agitation, plus de retenue, moins de dispersion, plus de concentration, plus de lecture, des relations plus bienveillantes. Et, quand l'extérieur est interdit, le besoin aigu de trouver un espace d'apaisement en soi. Mais le contexte est particulièrement difficile, rythmé par des chiffres et des informations anxiogènes, ceux des morts et des hospitalisés. Bien vivre ce temps particulier demande de la confiance pour ne pas se figer sur le passé et nourrir l'espoir d'aller vers de nouveaux horizons.
La régénération, du corps à l’individu et à la planète
Se régénérer est un processus de renouveau. Un retour vers ce qui fonde notre véritable nature. Pendant le confinement, la Nature nous a donné des indices : les eaux et le ciel se sont éclaircis, la pollution a diminué, la terre s'est régénérée. Or, d'où venons-nous ? Du Vivant, de la Nature. Depuis notre première inspiration, la Nature offre à chacun de quoi grandir. Cette retraite imposée et éprouvante par bien des aspects est nécessaire pour se poser et interroger nos modes de vie. Peut-être devons-nous apprendre à renouer avec des sources de régénération subtiles plutôt que de se tourner vers des divertissements polluants ? On peut s'interroger : qu'est-ce qui nous nourrit vraiment, corps et âme ? L'air pur, la lumière du soleil, les abords apaisants d'une rivière, notre espace intérieur, les rires qui jaillissent, des relations aimantes et constructives. Sur le plan physique, des fruits et des légumes au contact du Vivant. Des abricots, des cerises, des fraises, des courgettes, des tomates, des salades qui ont grandi au plus près des énergies du Cosmos. Les racines enveloppées par la Terre Mère, nourrie des rayonnements du soleil et de la lune, des caresses des nuages et du vent. Encourager ce type d'alimentation, c'est aussi encourager des circuits courts qui nourrissent d'autres personnes, formant à terme des cercles vertueux. Cet arrêt brutal est peut-être une invitation pour apprendre à se ressourcer au plus proche de la Vie elle-même.
« Se régénérer est un processus de renouveau. Un retour vers ce qui fonde notre véritable nature »
Au coeur de la crise, revenir à la paix en soi
Pendant plusieurs mois encore, nous allons devoir faire preuve de vigilance et d'attention. Comme si la vie nous incitait à une nouvelle manière d'être, à une discipline nécessaire pour qu'ait lieu cette renaissance. Une rétractation, un ralentissement en attente d'un nouveau déploiement. Au village des Pruniers, en Dordogne, lieu de retraite par excellence qui favorise la contemplation et la paix, le son du gong rythme la journée, invitant chacun au retour à soi et à la méditation. La cuisine, la marche, le rangement, la lecture, les discussions, les soins des potagers sont suspendus pendant quelques minutes. Chacun s'arrête pour revenir à la conscience de sa respiration. Cette attitude, le maître zen Thich Nhat Hanh à l'origine de la fondation du village des Pruniers, l'a pratiquée sans relâche jusque dans les crises les plus périlleuses de son existence. Dans les années soixante, alors que son pays, le Vietnam, s'enlisait dans la guerre, son esprit ne cessait d'être préoccupé par les solutions à mettre en oeuvre pour rétablir la paix. Nombreux sont ceux qui se seraient laisser emporter par le flot de pensées et d'émotions que cause une telle situation. Mais les compagnons du jeune moine, en particulier soeur Cham Kong, lui rappelaient de revenir à la conscience de l'instant présent, même au coeur de ce conflit terrible. C'est ainsi que le jeune moine se forgeait continuellement « un esprit neuf », le laissant toujours équanime face aux circonstances, libre d'interagir avec toutes les parties, jusqu'aux Américains, sans jamais s'enfermer dans des croyances. Mais toujours habité par la foi que l'autre est en mesure de changer et d'évoluer.
Le yoga et la méditation sont de formidables portes vers le ressourcement et une vie créative. L'attention au moment présent est l'opportunité de transformer perpétuellement nos actes, en les dotant d'une authenticité et d'une fraîcheur inégalée, aptes à produire des miracles. Prendre le temps de se relâcher démultiplie les possibles. Au contraire, nos schémas de pensées, lorsqu'ils sont répétitifs, nous maintiennent dans des postures figées et nous usent. Au fil du temps, l'accumulation de tensions va perturber le fonctionnement
POUR ALLER PLUS LOIN
Céline Chadelat, Thich Nhat Hanh, une vie en pleine conscience,