VIVRE L'EXPÉRIENCE DU SILENCE
Pratiquer le silence ? Nos conseils et adresses de la méditation
KLAXONS, PROMISCUITÉ, open spaces, notifications constantes de nos appareils électroniques… Le bruit est devenu l'un des principaux facteurs de stress dans les zones urbaines. Une pollution sonore qui perturbe l'organisme, pouvant entraîner des problèmes d'irritabilité, d'insomnie, d'épuisement et de dépression. Peut-être parce qu'il se raréfie, le silence devient plus prisé, comme une denrée rare et précieuse. Pourtant, dans la quasi-totalité des traditions religieuses, le silence monastique et la méditation silencieuse sont des pratiques spirituelles incontournables pour qui souhaite se rapprocher du divin. Les trappistes cisterciens vont même jusqu'à faire voeux de silence et s'engagent à vivre ainsi en communion silencieuse avec leur groupe.
Bien sûr, on peut avoir envie de profiter d'un stage en silence, sans pour autant s'inscrire dans une démarche religieuse. C'est ce constat qui a poussé Jérôme Frugère à créer les retraites en silence laïques Point De… Chut ! à Nantes, en 2018, après avoir lui-même suivi une retraite en silence dans un centre de charité chrétien qui incluait des enseignements de la Bible. « J'avais cette frustration d'avoir adoré le silence mais d'être toujours confronté à la religion — catholique ou bouddhiste — pour pratiquer dans des abbayes ou des monastères. J'avais envie de quelque chose de beaucoup plus simple : juste de silence. Un lieu où l'on peut pratiquer le retour vers soi, l'introspection sans avoir à faire autre chose ». Coach de formation, il propose ainsi une expérience d'introspection guidée grâce à des thématiques et des séances de développement personnel pour accompagner les participants. Une formule qui rencontre l'enthousiasme d'un public en recherche d'intériorité.
« J’avais envie de quelque chose de beaucoup plus simple : juste de silence »
Jérôme Frugère
Le silence comme une révélation
« La plus grande révélation est le silence », aurait dit Lao Tzeu. Et il est vrai que la plupart des personnes ayant participé à des retraites en silence parlent d'une « révélation », d'un « déclic » opéré durant leur expérience. Cela a été le cas de Clémence Jouin qui a effectué son premier séjour en silence de 3 jours à Point De… Chut ! en août 2019 : « j'ai eu des révélations personnelles, et cela m'a permis d'aller plus vite dans mon cheminement. C'est une expérience à la fois indescriptible, très intime, très puissante, mais aussi agréable, de rencontre avec soi-même ».
Même ressenti pour Jeanne Dujardin qui, il y a deux ans, décidait de quitter son travail dans le domaine artistique pour créer Silence, un mouvement de reconnexion à soi via le silence et la nature. Une idée qui lui est venue après un séjour dans la quiétude fascinante du désert marocain et une retraite de méditation Vipassana en Inde : deux véritables « déclics ». Dans Vipassana, technique popularisée par le maître bouddhiste indo-birman Goenka, les participants pratiquent 10 h de méditation immobile par jour pendant dix jours, sans parler, ni lire, ni écrire, avec un réveil à 4 h du matin et dans des conditions de vie rustiques. « J'ai eu une vraie prise de conscience, un dénouement intérieur. Et quand je racontais mon expérience à mes proches ils s'en pensaient incapables. J'ai donc décidé de créer les séjours Silence, avec une inspiration Vipassana mais accessible à tous ». Jeanne se lance ainsi dans la création de ses propres stages avec la mission de redonner sa place au silence, aussi bien lors d'ateliers de quelques heures en entreprises, qu'au sein de retraites immersives allant de 3 jours à une semaine autour de thématiques variées (art thérapie, écologie, yoga, etc.). « Beaucoup de gens viennent car ils cherchent une réponse ou une solution dans leur vie et même de l'inspiration et généralement cela émerge grâce au silence. Nous avons tous des noeuds intérieurs, des blocages et hors des distractions extérieures il y a comme un effet nettoyant et purifiant », explique-t-elle.
« On se soûle de paroles »
Ce sont aussi des retraites silencieuses qui ont participé à changer la vie de Jonathan Lehmann, auteur à succès du blog et du livre Les Antisèches du bonheur. « Avec le silence on ne peut plus trop se cacher de soi-même. Car au quotidien, le bruit nous empêche de développer une vie intérieure et nous sommes constamment tournés vers l'extérieur, vers le factuel. On se soûle de paroles, on se soûle soi-même, on se coupe la parole, le bruit est un véritable fléau de notre société », déplore-t-il. Et d'ajouter : « le silence, c'est la condition sine qua non pour un cheminement spirituel, s'aimer, se connaître et pouvoir avancer ».
Méditant depuis sept ans, il convient que la méditation Vipassana, qu'il a pratiqué à deux reprises, peut être une expérience extrême : « beaucoup de blessures enfouies remontent à la surface, des choses que d'ordinaire on anesthésie avec la parole, la technologie ou la nourriture ». Or tout le monde n'a pas l'envie ni les ressources mentales pour se lancer dans une aventure aussi « remuante ». C'est cela qui l'a notamment amené vers les stages de Jeanne, afin de goûter au silence avec plaisir le temps d'un weekend : « j'avais envie de retrouver le silence mais sans me faire mal ». Et même cet expérimenté de la méditation a été séduit : « j'ai vu des gens transformés et extrêmement émus. Beaucoup de personnes redoutent Vipassana, alors les stages Silence me semblent un très bon premier pas ».
« Beaucoup de gens viennent car ils cherchent une réponse ou une solution dans leur vie et même de l’inspiration et généralement cela émerge grâce au silence »
Jeanne Dujardin
« Le silence, c’est la condition sine qua non pour un cheminement spirituel »
Jonathan Lehmann