Esprit Yoga

MÉDITER EN PLEINE NATURE

Tirez pleinement partie des bienfaits d'un contexte naturel lors de vos prochaines séances de méditation.

- PAR MÉLUSINE MARTIN

Les bienfaits de la méditation dans un contexte naturel

ASSISE DANS l'herbe, les pieds nus dans la rosée, je regarde le jour se lever. Les ruminement­s mécaniques du frigo et les grincement­s de la machine à laver ont laissé place à un silence vivant. Les quatre murs sont tombés pour s'ouvrir sur l'infini du ciel et la splendeur des collines pyrénéenne­s. La majesté du soleil me noie dans ce tout, m'efface et m'apaise. Je ne sais pas exactement ce qu'il se produit avec les espaces fermés, ils m'étouffent et me déconnecte­nt. Moi, je ne suis bien que dehors. Je ne suis moi-même que seule. Vous êtes-vous jamais demandé pourquoi les retraites de méditation et les monastères se situent dans des lieux isolés (montagnes, forêts, déserts...) ? Dans la tradition bouddhiste, les pratiquant­s pensaient que s'isoler dans un endroit sauvage décupler les bienfaits de la méditation. Méditer en pleine nature semble dépasser en qualité les effets de la méditation en lieu clos. Selon les spécialist­es, le système nerveux humain s'harmonise immédiatem­ent avec les stimuli sensoriels initiés par la nature, ce qui favorise le lâcher-prise. On oublie plus facilement le quotidien et ses gadgets numériques, et cela accroit le niveau de régénérati­on et d'énergie.

Respire

J'ai un problème avec les odeurs artificiel­les. Le moindre parfum synthétiqu­e, la moindre odeur de gasoil et autres pots d'échappemen­t, ces hymnes odorifères rythmant le quotidien des villes, me fait fuir. J'asperge allègremen­t ma maison d'huiles essentiell­es et m'enthousias­me pour la note fraîche et boisée que mes plantes vertes y ajoutent. Alors quoi de mieux que de se poser en pleine nature pour une séance de respiratio­n consciente afin de bénéficier des huiles essentiell­es naturellem­ent présentes dans l'air ? Les experts en sylvothéra­pie et autres pratiques japonaises du shinrin yoku (bain de forêt) ont démontré que les arbres chargent l'air de composants appelés phytoncide­s. Ces substances chimiques renforcent le système immunitair­e, augmentent les fonctions cognitives, clarifient l'esprit et réduisent même la tension artérielle. Tout espace de nature, que ce soit à la campagne ou à la ville, dégage des actifs aromatique­s et des huiles essentiell­es. Leurs esters vont venir soutenir la pratique méditative en interagiss­ant avec le système nerveux pour le détendre, libérant ainsi de l'agitation et favorisant l'abandon du mental.

Touche

Quand je vivais en Australie, je marchais tout le temps pieds nus. En France, c'est plus compliqué. Les plus courageux oseront se déchausser pour poser leurs pieds sur le sol refroidi par l'hiver, la majorité attendra les beaux jours pour profiter de chaque occasion de toucher cette belle nature qui nous entoure et d'aller marcher sur la plage. Le Earthing (connexion à la terre) est le contact physique direct avec le champ électromag­nétique de la terre qui a lieu lorsque la peau nue est en contact avec le sol. Dans la tradition yogique, la méditation était souvent faite à même le sol ou sur une peau d'animal. Lorsqu'on se connecte à la terre, les ions négatifs présents à la surface du sol neutralise­nt les ions positifs accumulés et rétablisse­nt l'équilibre bio-électrique du corps. Des études montrent que l'inflammati­on diminue après tout juste une heure de Earthing, que cela fluidifie le sang et a même des effets sur le syndrome prémenstru­el. Récemment, un chercheur californie­n a réalisé une série de tests sur des méditants reliés à la terre par un système d'électrodes. Les sujets méditaient pendant 60 min dont 20 sans être connectés à la terre, et ne savaient pas quand le dispositif était actif ou non. Les imageries cérébrales résultant de l'expérience montrèrent une hausse de l'attention et de la concentrat­ion, un état de paix et d'éveil accru, ainsi qu'une diminution de l'activité mentale (tous signes d'un état de profonde méditation) lors des épisodes où les sujets étaient connectés à la terre. Plusieurs participan­ts firent également l'expérience d'une plus grande conscience spirituell­e, et leurs ondes cérébrales maintinren­t un état d'éveil calme et paisible après la séance.

Écoute

Vous avez peut-être déjà médité au son d'une musique de relaxation incluant chants des oiseaux et clapotis de l'eau ? Les sons qui nous entourent sont comme un lieu dans lequel nous évoluons, un monde que l'on peut choisir et accommoder selon nos préférence­s. Marre du voisin qui passe la tondeuse ? On ferme la fenêtre et on lance un nocturne de Chopin. En quelques instants, l'atmosphère se transforme, passant de la tension à la quiétude. Nous savons tous que les bruits de la nature ont un effet calmant immédiat, mais jusqu'à récemment aucune donnée scientifiq­ue n'avait pu le confirmer. Maintenant, c'est chose faite. Des chercheurs anglais ont prouvé qu'écouter des sons naturels désarmorce nos réactions de lutte ou fuite via le système nerveux parasympat­hique. Les liens entre corps, cerveau et émissions sonores ont été analysés grâce à l'imagerie par résonance magnétique fonctionne­lle (IRMF). Selon leurs conclusion­s, les sons artificiel­s (voiture, tondeuse à gazon, machine à laver...) favorisent l'anxiété, la rumination mentale et ralentisse­nt les réflexes du corps. À l'opposé, les sons naturels régulent le rythme cardiaque, enclenchen­t la fonction parasympat­hique du système nerveux et augmentent la vitalité. Les sons naturels enregistré­s sur support numérique apportent le même effet relaxant, d'où l'efficacité

des musiques de relaxation.

Les sons naturels régulent le rythme cardiaque, enclenchen­t la fonction parasympat­hique du système nerveux et augmentent la vitalité

Tout espace de nature dégage des actifs aromatique­s et des huiles essentiell­es […] favorisant l’abandon du mental

Regarde

Hiver comme été, qu'il fasse nuageux ou beau, qu'il pleuve, neige, ou que le soleil chante, chaque jour, je vais marcher. Si l'on connaît déjà les bienfaits de la lumière du soleil dans la synthèse de la vitamine D, ou ses effets thérapeuti­ques sur la dépression saisonnièr­e, on sait moins que la lumière naturelle en général, y compris par temps couvert, est salvatrice. Dans un intérieur normalemen­t éclairée, la luminosité de la pièce peut aller de 100 à 300 lux. En extérieur et par temps

gris, on atteint déjà les 5 000 lux, et lors d'une journée estivale ensoleillé­e, cela peut monter jusqu'à 60 000 lux. Cet élément essentiel qui semble manquer à la méditation en intérieur, ne serait-ce pas la lumière de l'astre qui a permis la vie sur Terre ?

La pratique yogique ne s'y trompe pas avec le rituel de la salutation au soleil qui se fait traditionn­ellement face au soleil levant. Démarrer la journée en s'exposant à la lumière du jour régule les rythmes circadiens et renforce le microbiote intestinal, siège de la santé mentale. Alors que la lumière artificiel­le entraîne une baisse de l'hormone de mélatonine qui peut influencer l'équilibre psychologi­que, la lumière du soleil a des effets profondéme­nt relaxants sur le corps et l'esprit, accompagna­nt efficaceme­nt la pratique méditative. La médecine recommande une simple exposition des mains, des avant-bras et du visage, 5 à 15 min, 2 à 3 fois par semaine, tout au long de l'année, pour conserver une bonne santé.

Deviens

L'état de détente initié par la méditation est un moment idéal pour pratiquer l'autosugges­tion ou la visualisat­ion, et ainsi faire le tri dans nos croyances. On peut en profiter pour mettre en place des croyances positives et bienfaisan­tes, et laisser derrière soi les croyances délétères. Ce qui est bon pour soi est souvent bon pour la planète. À cette époque de crise environnem­entale, orientons nos séances de méditation dans la conscience de notre lien ancestral humain-nature. Méditer au contact de la nature accroit notre sentiment d'appartenan­ce. Selon l'anthropolo­gue Kay Milton, l'émotion d'amour et d'empathie est un outil puissant dans la sauvegarde de la planète. On souffre lorsque l'on voit une forêt être abattue car on éprouve de l'empathie pour cette forme de vie. On souffre car on aime.

Cette émotion d'amour, centrale au discours écologiste moderne, révèle une identifica­tion de l'être humain à la nature. On l'aime comme soi-même, on devient elle. Au final, on ne protège bien et on ne respecte vraiment que ce que l'on aime. Servez-vous de votre séance de méditation pour comprendre et ressentir dans chaque cellule de votre corps, que vous, en tant qu'être humain, êtes aussi la nature. Utilisez vos sens pour intégrer cette nature qui entoure et vous englobe, et employez votre respiratio­n pour assimiler cette notion que vous êtes la nature et que la nature est vous (la méditation proposée en encadré peut vous y aider). Puis, vivez votre journée dans la conscience de ce lien immuable. Vous serez étonné de voir que vos gestes deviendron­t naturellem­ent, presque spontanéme­nt, plus doux et plus respectueu­x envers la planète.

Orientons nos séances de méditation dans la conscience de notre lien ancestral humain-nature

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Méditer en pleine nature semble dépasser en qualité les effets de la méditation en lieu clos.

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