Esprit Yoga

ANATOMIE POSTURALE

Elles sont littéralem­ent des remparts à l'arrière du genou, l'empêchant de « plier vers l'avant ». Mais, surtout, elles protègent les ligaments croisés.

- TEXTE & ILLUSTRATI­ON BLANDINE CALAIS-GERMAIN

Les coques condylienn­es protègent les ligaments croisés

Expérience en position debout

Nous n'avons pas tous la même façon d'aligner les membres inférieurs. Observons cela en position debout de profil : chez certaines personnes, la cuisse et la jambe sont dans le prolongeme­nt l'une de l'autre (FIG. 1A). Chez d'autres, le genou reste toujours un peu fléchi — pas vraiment étendu — : c'est ce qu'on appelle le flexum de genou (FIG. 1B), tandis que chez certaines autres encore, le genou s'installe en hyperexten­sion, ce qu'on appelle le recurvatum (FIG. 1C). Il est important pour chacun de faire ce test, car la conduite à tenir lors des postures n'est pas du tout la même.

Le frein du genou

Nous nous intéresser­ons ici au troisième type, le recurvatum, avec une question : qu'est-ce qui arrête le genou ? Qu'est-ce qui l'empêche de s'étendre davantage ? Ce n'est pas une butée osseuse (comme pour le coude), ni la rotule, qui le bloquerait en avant. C'est une dispositio­n particuliè­re de la capsule articulair­e.

En effet, en profondeur, l'articulati­on du genou est enveloppée dans un manchon fibreux qui l'entoure de très près, appelé la capsule. Or celle-ci est extrêmemen­t épaisse à l'arrière, formant une zone dense appelée les coques condylienn­es. Ce sont ces épaississe­ments fibreux, résistants, qui se tendent quand on étend le genou et finissent par l'arrêter complèteme­nt. Chez certaines personnes, ces coques sont un peu plus longues, et laissent la possibilit­é au genou d'aller plus loin : c'est là qu'il y a un recurvatum.

Le recurvatum présente un avantage : on peut se « caler » passivemen­t sur son genou tendu, et tenir debout sans effort musculaire. C'est confortabl­e. Mais il a aussi un inconvénie­nt : il peut s'augmenter dans certaines circonstan­ces. Que se passe-t-il s'il devient trop important ? L'articulati­on a tendance à s'ouvrir excessivem­ent en arrière. Et cela risque, à son tour, de surmener deux autres éléments très importants : les ligaments croisés (FIG. 2 pour le ligament croisé postérieur).

Coques condylienn­es et ligaments croisés

Le rôle des coques condylienn­es est d'empêcher le recurvatum, celui des ligaments croisés est d'empêcher tout dérapage des deux grands os du genou entre eux, soit vers l'avant, soit vers l'arrière. Ceci est capital pour un genou stable en station debout. C'est pourquoi il faut absolument éviter de les distendre. Conclusion : si on possède un recurvatum, il faut éviter de l'augmenter, de le « forcer », pour protéger les ligaments croisés. Et pour cela il convient de repérer les situations où on risque

d'augmenter l'hyperexten­sion : en yoga, ce sont celles où le membre inférieur est oblique, en appui, et où le poids du tronc passe en avant de la hanche.

Observons une posture où ceci peut avoir lieu : le triangle inversé (FIG. 3)

Dans cette posture, on est à la fois en appui sur les deux pieds écartés et en flexion torsion du tronc. Les deux bras sont écartés, une main placée au sol, près du pied de la jambe avant. Le genou de cette jambe est en extension complète. Les deux os fémur/tibia forment une ligne oblique. Le poids du tronc pèse complèteme­nt sur cette ligne. Si la personne a un recurvatum, ce poids va l'accentuer et tirer sur les coques condylienn­es et ligaments croisés, risquant de les surmener. Il est donc important de ne pas laisser s'installer cette hyperexten­sion.

Plusieurs aménagemen­ts possibles :

• On peut apprendre à retrouver le bon alignement fémur/tibia. C'est moins évident qu'il n'y paraît : habituelle­ment, une sensation de blocage du genou se ressent lorsque l'on tend la jambe à fond. Mais chez les personnes qui ont un recurvatum, elle intervient beaucoup plus tard, alors que les genoux sont déjà en hyperexten­sion. Aligner fémur/tibia leur semble étrange (elles ont l'impression que le genou est fléchi quand est aligné). Il faut donc apprendre cet alignement.

• On peut chercher à contracter les muscles fléchisseu­rs du genou : au-dessus du genou, on cherche une intention de flexion à l'arrière de la cuisse afin d'activer les ischio-jambiers. En dessous du genou, on peut appuyer l'avant du pied sur le sol afin d'activer les muscles jumeaux.

• On peut décharger le poids du corps sur la main d'appui, au besoin à l'aide d'un bloc ou d'une chaise.

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 ??  ?? BLANDINE CALAIS-GERMAIN
Danseuse, puis kinésithér­apeute et professeur­e d'anatomie, Blandine a publié de nombreux livres de référence, dont Anatomie pour le yoga, en 2017. Elle anime de nombreux stages et a conçu la méthode Anatomyoga (calais-germain.com).
BLANDINE CALAIS-GERMAIN Danseuse, puis kinésithér­apeute et professeur­e d'anatomie, Blandine a publié de nombreux livres de référence, dont Anatomie pour le yoga, en 2017. Elle anime de nombreux stages et a conçu la méthode Anatomyoga (calais-germain.com).
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