Deux fleurons en danger
ALM Basket et festival rock
La cessation de paiement plane sur l’Abordage, dans l’impossibilité de régler ses factures. Seuls ses financeurs peuvent sauver l’association et le festival. La Ville avait proposé de l’intégrer à l’EPCC Le Tangram… qui se déclare finalement dans l’incapacité de préparer l’édition 2017 du Rock dans tous ses États. Retour sur une impasse.
Résumé des épisodes précédents. En charge des concerts organisés au centre omnisports et du festival Le Rock dans tous ses États depuis 10 ans, l’association L’Abordage accumule les déconvenues. Dépossédée de sa mission de diffusion à l’année, avec une salle de musiques actuelles flambant neuve qui lui passe sous le nez au profit du nouvel Établissement public de coopération culturelle Le Tangram créé au printemps, elle devait se concentrer sur la seule organisation du festival. Mais elle accuse un passif structurel qui s’élève désormais à près de 250 000 €.
Un passif, et non un déficit. Concrètement, l’association n’est pas à découvert, elle n’a pas de dette bancaire, mais elle ne peut pas régler ses factures, qui s’accumulent. « On a réglé en priorité les salaires, et les petits fournisseurs, ceux qui auraient été menacés s’ils n’avaient pas été payés » décryptent Guillaume Boulet, le président, et Nadège Batard-Hardy, la trésorière de l’Abordage, lors de l’assemblée générale extraordinaire qui s’est tenue vendredi soir.
L’espoir d’octobre
Pour sortir de cette situation lancinante, l’Abordage a rencontré en octobre dernier ses principaux financeurs publics, la Ville d’Évreux, le Grand Évreux Agglomération, le Département de l’Eure et la Région Normandie. « Une réunion pleine d’espoir qui nous a laissés très optimistes : apurement du passif, reconduction pluriannuelle des subventions, accord sur le recrutement d’un directeur… Nous avons alors commencé à travailler sur l’édition 2017 du RDTSE, sur la programmation avec notre partenaire A Gauche De la Lune, à reconstituer les équipes techniques, solliciter un accompagnement de notre structure pour mettre en oeuvre une SAS au printemps et entamer des relations étroites avec le Tangram », détaille Guillaume Boulet.
Mais « un mois plus tard, quand la Ville a pris la mesure du départ du programmateur du Tangram et du festival Hedi Hassouna, elle a changé d’avis et proposé un transfert de la production du festival vers le Tangram, avec reprise du passif. D’où la convocation à cette assemblée générale exceptionnelle ».
La désillusion de novembre
Or, depuis cette proposition, « et les discussions qui s’en sont suivies avec Christian Mousseau-Fernandez, directeur du Tangram, il apparaît que l’EPCC n’est pas en mesure de garantir la tenue d’une édition en juin 2017 compte-tenu des délais très courts ». En effet, contrairement à une association, un établissement public de coopération culturelle doit procéder par appels d’offres et marchés publics pour choisir tous ses fournisseurs.
Cette « infaisabilité » a amené les responsables, membres et adhérents de l’association à… ne rien voter vendredi soir.
Dans une tentative d’estomper le « flou artistique » qui entoure en ce moment l’association et le festival, Guillaume Boulet a résumé les différentes solutions possibles : déclarer la cessation de paiement, passer ensuite en liquidation judiciaire et, précise-t-il, « que certains se rassurent, je ne serais pas du tout responsable des dettes puisque les comptes ne cachent aucune malversation et qu’ils sont certifiés réguliers et sincères tous les ans par notre commissaire aux comptes » ; ou « demander officiellement à la Ville d’Évreux - seule collectivité, partenaire du festival, en capacité de sauver le festival en nous permettant de payer nos prestataires dans les délais - de nous attribuer une subvention exceptionnelle pour couvrir le passif, lors du prochain conseil municipal, le 12 décembre ».
Dans 15 jours il sera trop tard
« Ce serait un signal, un acte fort pour rassurer les autres financeurs qui s’interrogent aussi sur la lisibilité de la volonté politique de la Ville ». Une demande bien entendue par Jean-Pierre Pavon, adjoint à la culture. Seul représentant de la municipalité présent vendredi soir dans la salle, il a expliqué « qu’il n’y avait rien d’imposé de la part de la Ville, que la ville ne remet pas du tout en cause le Rock dans tous ses États, qu’elle avait toujours soutenu l’Abordage, que le problème n’était que purement financier, et que ce transfert vers Le Tangram était proposé comme une solution ». Des arguments qui n’ont pas convaincu le public.
Aux très nombreuses questions de la salle, Guillaume Boulet a rassuré sur l’édition 2017, « si nous avons la subvention dans les 15 jours, nous serons en mesure de produire un festival en juin, nous avons commencé à y travailler depuis plusieurs semaines, mais il ne faudrait pas attendre davantage ». Il est ensuite revenu sur la « meilleure solution » possible pour l’association, « revenir à la situation d’octobre où la SAS était au coeur de notre projet, soutenu par les collectivités ». « C’est la meilleure structure pour consolider le festival et l’association et stabiliser ses demandes de subventions » a insisté Nadège Batard-Hardy, en espérant que cette hypothèse de travail soit de nouveau évoquée lors de la réunion Ville-Département-Région prévue le 9 décembre.
Thierry Auzoux-Lavallé nouveau président
Gagnés « par une certaine fatigue », Guillaume Boulet et Nadège Batard-Hardy ont néanmoins annoncé qu’ils quittaient leur poste, tout en restant au conseil d’administration. « Charge au nouveau C.A. de relancer les demandes de subventions, de refondre des statuts qui soient plus adaptés aux missions de l’association, et, surtout, de suivre attentivement le recrutement du nouveau directeur délégué aux musiques actuelles du Tangram. Comme il sera a priori programmateur du festival, l’Abordage devrait avoir davantage que la seule voix consultative qu’on lui propose… »
Le nouveau bureau se compose donc de Thierry AuzouxLavallé président, Blanche Bouteloup vice-présidente, Kiven Vollard trésorier, Nadège Batard-Hardy trésorière adjointe, Frédéric Etienne-Roussel secrétaire, Jean-Marie Martin secrétaire adjoint. Administrateurs : Guillaume Boulet, Dominique Cnockaert, Emmanuel Cristobal, David Guyot, Pierre Le Coguiec et Matthias Gérard pour la radio Principe Actif. Sébastien Pernuit « dégoûté par les deux dernières municipalités » et Florent Bonnot étaient démissionnaires.