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René fait sa crise d’abdos

À 81 ans, il va en tenter 7 000 en 1 h

- Ch.G.

« Rentre Dylan ! Installeto­i et commence à t’échauffer ! ». À l’autre bout du fil, René Prévost vient de couper la conversati­on pour inviter un de ses élèves à commencer l’entraîneme­nt. Coach sportif, l’octogénair­e, né à la maternité d’Évreux en février 1936, en a toujours sous la semelle. D’une voix ferme et énergique, il reprend, sans s’attarder, la discussion là où elle était restée.

Nous étions en mai 1943 du côté d’Avrilly, près de la voie ferrée où René vivait un cauchemar avec ses frères et soeurs. Son père, « saoul 7 jours 7 » venait de rentrer du boulot avec, entre les mains, « deux bottes de radis et une boîte de sardines ». C’était la première fois depuis longtemps que le paternel ramenait quelque chose à la maison. « Ma mère lui a fait une réflexion, il a sorti une bouteille vide de sa musette pour lui casser sur la tête ». René avait 7 ans, il s’est interposé pour lui sauver la vie. La bouteille est tombée en même temps qu’il encaissait un grand coup de pied dans les reins.

Grièvement blessé, le petit René devait être transporté d’urgence à l’hôpital d’Évreux. Seul à posséder un gazogène, le maire de la commune était absent, « ma mère m’a pris dans ses bras pour aller à pied jusqu’à Évreux, au bout de 300 mètres elle n’en pouvait plus ». Exténuée, Angélique poursuivai­t tant bien que mal sa route quand un camion allemand l’a doublée « dans un nuage de poussière ». « Il s’est arrêté 100 mètres plus loin, un Allemand est descendu, ma mère a cru qu’il allait nous tuer ». L’occupant a sauvé René en le transporta­nt sur ses genoux jusqu’à destinatio­n. Fin de l’épisode. Fin de la guerre.

La mémoire intacte, le coach poursuit son récit. Il a quitté Avrilly, sa mère est décédée à l’âge de 39 ans, épuisée par les mauvais traitement­s, son père l’a abandonné avec ses 10 frères et soeurs. René, hébergé par sa tante, est apprenti dans la boucherie installée sur la friche du Buisson. « Je livrais parfois de la barbaque à la prison » se souvient l’octogénair­e. Et les abdos ? On y est presque.

Plutôt du genre freluquet à ses débuts, « on m’appelait le nain », René a fini par dépasser le mètre 72 et gagner en épaisseur. Tout a commencé à l’armée en 1958, « durant mon service militaire à Bizerte », quand son pote de chambrée lui a fait découvrir la musculatio­n. Une révélation.

Cycliste licencié à Gaillon, René avait lâché le guidon après un critérium avec Jacques Anquetil. « Il m’a mis deux tours dans la vue ! ». Maître Jacques était passé pro depuis

5 ans, quand René s’est mis à la gonflette. Gentiment au

début « avec des barres de fer et des conserves remplies

de ciment », puis intensémen­t quand il quitte Évreux pour les rives de la Loire. Dans la vallée des rois, employé dans la centrale nucléaire de Chinon, Monsieur Muscle remporte son premier concours en 1964, monte une salle à Saumur la même année et passe des diplômes pour enseigner le culturisme. En cinquante-six ans de musculatio­n, il a participé à cent sept concours, gagné cinq titres de champion de France et une coupe d’Europe.

Passé de la musculatio­n au culturisme, puis au body-building, René s’entraîne toujours. Fin 2001, à 66 ans, il a battu le record du monde de relevé couché en réalisant 6 052 abdominaux en une heure. Détenteur du record inscrit au Guinness Book, le seigneur des abdos a décidé de relever son propre défi. Le 7 avril, à 81 ans, il tentera les 7 000 ados en une heure dans la mairie de Tours. Une balade de santé selon René qui, dit-il, passe déjà le cap des 8 000 à l’entraîneme­nt. « 3 à la seconde » assure l’octogénair­e. Sacré René.

Un père alcoolique Sauvé par un Allemand à 7 ans Anquetil lui met deux tours dans la vue Rendez-vous le 7 avril à Tours

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 ??  ?? René s’entraîne quotidienn­ement pour battre le record du monde (photo Ivan Roullet La Nouvelle République)
René s’entraîne quotidienn­ement pour battre le record du monde (photo Ivan Roullet La Nouvelle République)

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