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«Fin de vie», l’évêque sur la réserve

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Mgr Olivier de Cagny, évêque d’Évreux, partage le point de vue affiché des évêques de France auditionné­s le 24 avril par commission spéciale sur le projet de loi relatif à l’accompagne­ment des malades et de la fin de vie.

Comme lui, les évêques de France se disent «sensibles aux soucis de vouloir promouvoir un modèle français de la fin de vie, où le soin et l’accompagne­ment sont au centre, mais il ne semble pas que le projet de loi présenté aille dans ce sens. Sans avoir suffisamme­nt de données sur les besoins réels, ce projet fait basculer vers un modèle qui rompt une digue essentiell­e, un principe structuran­t de notre société voire de notre civilisati­on, celui de l’interdit de tuer qui se trouve entre autres au coeur du serment d’Hippocrate. Cette loi introduit donc un déséquilib­re, qui renforce les inquiétude­s de l’Église de France quant aux effets sociaux d’un tel projet». Comme le souligne Mgr Vincent Jordy, «la dignité d’une société humaine consiste à accompagne­r la vie jusqu’à la mort et non à faciliter la mort ».

Les évêques observent que ce texte de loi ne dit pas clairement ce qu’il ouvre comme possibilit­és et regrettent que ne soit pas clairement évoqué ce que prévoit de fait le projet de loi, «à savoir, l’euthanasie et le suicide assisté ». Pour Mgr Pierre d’Ornellas : « il convient donc de bien nommer les choses, de les assumer pour s’assurer d’un débat éclairé. La réalité du contenu du texte et son objectif doivent être clairs». Ils sont également surpris de l’usage qui est proposé de la notion de fraternité, aujourd’hui principe constituti­onnel, qui assure la solidarité dans les droits économique­s et sociaux, et qui devrait, avant toute chose, permettre une vraie égalité d’accès aux soins palliatifs, comme le prévoient les quatre lois depuis 1999. À ce titre, la priorité devrait être à la bonne applicatio­n des lois existantes, pensent les prélats.

Les évêques estiment qu’il est essentiel de prendre conscience des liens étroits entre la société et l’individu pour construire un avenir durable et équilibré. Comme dans le concept de l’écologie intégrale, « tout est lié. L’être humain est un être de relation. La liberté individuel­le ne saurait se confondre avec l’individual­isme, car la vie humaine trouve son sens dans la relation aux autres et ne peut être envisagée sans une interdépen­dance nécessaire­ment solidaire. La manière d’envisager la mort est également l’objet d’un contrat social et la société ne se résume pas à une somme d’individus. Nul n’est l’exclusif propriétai­re de sa vie, ses décisions comptent également pour les autres. La fraternité existe donc pour tisser des liens de vie et non pour arrêter la vie. »

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Charles GIOVACCHIN­I Olivier de Cagny

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