La défense de l'UE, un enjeu secondaire d'après les électeurs européens
Plus d'un tiers des électeurs les plus eu‐ rosceptiques pensent que l'UE devrait donner la priorité à une politique de défense commune, selon un sondage exclusif réalisé pour Euronews.
Une enquête Ipsos menée auprès de 26 000 électeurs européens a montré que près de la moitié d'entre eux sont favorables à la mise en commun des pouvoirs militaires - un résultat qui de‐ vrait réconforter la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui a fait de la défense l'un des axes centraux de sa campagne de réélection.
Le sondage, qui a été réalisé dans des pays représentant 96 % de la popu‐ lation de l'Union européenne avant les élections européennes prévues en juin, montre que les électeurs sont surtout préoccupés par l'inflation, les inégalités et les migrations.
Toutefois, le renforcement des dé‐ fenses serait toujours plus populaire que l'envoi d'aide à l'Ukraine, déchirée par la guerre, ou que la protection des minorités, selon l'enquête.
De nombreux États membres de l'UE commencent à renforcer leur ar‐ mée après l'éclatement d'une véritable guerre en Ukraine, et compte tenu des signes indiquant que les États-Unis di‐ rigés par Donald Trump pourraient se montrer moins attachés à l'OTAN.
Bien qu'elle soit davantage une su‐ perpuissance économique et réglemen‐ taire qu'une superpuissance militaire, l'UE a commencé à chercher à rendre l'achat d'armes plus efficace, et le com‐ missaire européen chargé du marché unique, Thierry Breton, a même évo‐ qué la création d'un fonds de défense de 100 milliards d'euros.
Selon l'enquête, le renforcement de la défense européenne est particulière‐ ment populaire dans des pays tels que la Finlande et la Pologne, peut-être parce que les voisins de la Russie s'in‐ quiètent de sa belligérance accrue.
En revanche, la Hongrie, dont le gouvernement a bloqué à plusieurs re‐ prises les sanctions à l'encontre de la Russie et le soutien à l'Ukraine, et l'Autriche, dont la constitution garantit la neutralité, sont beaucoup moins fa‐ vorables à un tel renforcement.
Le soutien est le plus élevé parmi les électeurs de plus de 50 ans et dans les partis centristes qui sont suscep‐ tibles de soutenir la candidature de Mme von der Leyen pour un second mandat.
Mais il est aussi étonnamment fort parmi ceux qui se méfient habituelle‐ ment de l'idée de confier des pouvoirs à Bruxelles. Près de la moitié (45 %) des électeurs des Conservateurs et Ré‐ formistes européens (CRE) et plus d'un partisan sur trois du groupe plus natio‐ naliste Identité et Démocratie (ID) sont favorables à des politiques militaires renforcées.
Elections européennes : les nationa‐ listes-conservateurs adoptent leur charte des valeurs Elections euro‐ péennes : quelles sont les priorités des électeurs de l'UE ? Les libéraux euro‐ péens défient (à nouveau) les conven‐ tions et misent sur trois noms pour les élections européennes
"La défense commune des fron‐ tières et des intérêts européens est l'une des rares choses pour lesquelles l'Union européenne est utile", a déclaré le législateur Nicola Procaccini (Ita‐ lie/ECR) lors d'un débat en février.
Toutefois, les promesses de Mme von der Leyen d'européaniser les dé‐ penses de défense pourraient se heurter à des obstacles, car dans le passé, ce sont toujours les États membres qui ont levé les armées.
Le fait que l'Europe devienne une superpuissance en matière de défense est une "atteinte directe à la souverai‐ neté de nos nations", a déclaré JeanPaul Garraud (France/ID) au cours du même débat, ajoutant que _"_Le soldat n’est pas prêt à mourir pour l’Europe".
Ce scepticisme est partagé par ceux qui envisagent de voter pour l'extrême gauche, dont le manifeste pour 2024 - pour une alliance qui comprend de nombreux partis communistes et le parti allemand Die Linke - s'engage à réduire les dépenses militaires et à libé‐ rer l'Europe des armes nucléaires.