L'Atlas archéologique de la France raconte le passé du pays depuis la préhistoire
Le nouvel "Atlas archéologique de la France" retrace des milliers d'années d'occupation humaine, et révèle d'énormes changements dans les frontières du pays, son climat, sa po‐ pulation et le mode de vie de ses ha‐ bitants.
100 nouvelles cartes ont été créées à partir des résultats de milliers de fouilles effectuées au cours des deux dernières décennies.
Ces données fournissent des indices sur les pratiques des sociétés humaines qui ont enterré des objets, volontaire‐ ment lors de cérémonies funéraires, par exemple, ou par le simple passage du temps.
Publié par l'Inrap, l'Institut natio‐ nal de recherches archéologiques pré‐ ventives, en novembre, le premier ti‐ rage de l'Atlas a été rapidement épuisé et l'ouvrage vient d'être ré‐ édité.
"Le plus souvent, ce qui parvient au grand public, c'est ce qui est visible et préservé. Nous voulons montrer le pa‐ trimoine invisible qui se trouve sous nos pieds", explique Dominique Gar‐ cia, président de l'Inrap.
Les cartes renvoient à des connais‐ sances mais aussi à des "zones blanches, à des questions", ajoute-t-il.
L'histoire de l'origine
L'Atlas commence par une carte de l'Afrique et se poursuit par l'arrivée de l'Homo Sapiens dans ce qui de‐ viendra la France, en retraçant ses premières oeuvres artistiques. Il se ter‐ mine par la Seconde Guerre mondiale et l'histoire de la France coloniale et d'outre-mer.
La section de l'Atlas consacrée à l'archéologie de la Guyane (17951953) étudie l'histoire de l'esclavage, de la colonie pénitentiaire et de l'or‐ paillage.
Une exposition parisienne explore l'histoire de la Seine à travers des ob‐ jets trouvés
Dominique Garcia explique que les auteurs ont voulu "montrer la propre histoire des territoires d'outre-mer, pas seulement à partir du moment où la France y a mis les pieds".
Les archives du sol
Chaque carte représente un pan du passé de la France et est accompa‐ gnée d'un résumé, de photos, de plans et de vues d'artistes pour resti‐ tuer des paysages aujourd'hui disparus.
Il est divisé en grandes périodes et en thèmes qui mettent en évidence les pratiques agricoles, artisanales, funé‐ raires et commerciales que les archives archéologiques révèlent.
L'Atlas montre également com‐ ment s'articulent les processus socioéconomiques et culturels, que ce soit à travers les pierres taillées, les statues, les céramiques et les nécropoles, ou encore les éléments vivants, tels que les squelettes ou les restes consommés comme la faune et les graines.
Egypte : des archéologues dé‐ couvrent la moitié manquante de l'ex‐ traordinaire statue de Ramsès II
Les thèmes abordés comprennent la circulation d'objets précieux au néoli‐ thique, tels que les haches en jade alpin retrouvées jusqu'à la pointe de la Bre‐ tagne, les changements dans les pra‐ tiques de crémation à l'âge du bronze, ou la propagation de la peste entre 1347 et 1351, qui rappelle remarqua‐ blement la carte de la pandémie de Covid-19.
Elle aborde également des ques‐ tions contemporaines telles que les changements climatiques et le dévelop‐ pement des villes.
Histoire des cartes archéolo‐ giques
La première tentative de cartographie archéologique à cette échelle a été réa‐ lisée entre 1858 et 1879 par la Com‐ mission de Topographie des Gaules (CTG).
En 1858, l'objectif de la CTG est de réaliser trois cartes de la Gaule : une de la période celtique avant la conquête romaine, la seconde de la période gallo-romaine et la troisième de la pé‐ riode mérovingienne.
Le projet tel qu'il a été conçu initia‐ lement n'a pas abouti. Si toutes les cartes ont été réalisées, seule une par‐ tie du "Dictionnaire archéologique de la Gaule - Époque Celtique" a été publiée entre 1875 et 1878.
Une loi de 2001, visant à préserver le patrimoine enfoui en réalisant des fouilles avant tout chantier d'aménage‐ ment, a permis d'accélérer le processus de cartographie.
L'Atlas archéologique de la France synthétise aujourd'hui des données de fouilles remontant jusqu'au XIXème siècle.
L'histoire du vin en Gaule
La carte des vins méditerranéens et gaulois montre comment le territoire gaulois, positionné sur la route de l'étain et de l'ambre, a attiré les mar‐ chands méditerranéens, grecs, étrusques, phéniciens et romains, qui y ont installé des comptoirs et des colo‐ nies dès la fin du VIIème siècle avant notre ère.
Le long de la côte de la Gaule méri‐ dionale, de nombreux produits ma‐ nufacturés de grande valeur, tels que des céramiques attiques, des orne‐ ments et des amphores à vin grecques, ont été découverts à la fin du premier âge du fer. Cela suggère un essor des échanges entre les popula‐ tions autochtones et les commerçants méditerranéens.
Après la victoire de Rome sur Car‐ thage à la fin du deuxième âge du fer, les Romains développent leur réseau commercial en Méditerranée occiden‐ tale et plus au nord.
Un plongeur italien découvre un trésor de pièces de monnaie romaines au large de la Sardaigne
En Gaule, ils trouvent des matières premières (métaux et sel), des es‐ claves, des produits agricoles bruts ou transformés, qu'ils échangent contre du vin provenant principale‐ ment de la côte tyrrhénienne (Étru‐ rie, Latium, Campanie), et de la vaisselle.
Les amphores de vin sont transpor‐ tées des ports de la Gaule méditerra‐ néenne vers les territoires romains sep‐ tentrionaux par la Garonne, le Rhône et la Saône.
La seconde moitié du troisième siècle avant notre ère est marquée par un climat plus chaud et plus sec, appelé "optimum climatique romain". Il per‐ met une augmentation de la produc‐ tion agricole dans la Gaule non mé‐ diterranéenne.
Plusieurs grands domaines ruraux, appartenant à l'élite gauloise, pro‐ duisent des excédents qui peuvent être échangés contre des produits importés, en particulier le vin, élément important des banquets, des grands rassemble‐ ments communautaires et de certaines cérémonies religieuses.
Avant la conquête romaine, le vin n'était cultivé que dans le territoire gaulois de Marseille.