PORSCHE 911 GT3
La nouvelle 911 GT3 propose désormais une boîte manuelle mais c’est en version PDK (donc la plus rapide) que nous l’avons essayée. Cette auto qui offre 500 ch et prend 9 000 tr/mn est simplement géniale.
LA PETITE LUMIÈRE BLEUE AU TABLEAU DE BORD TEMPÈRE VOTRE ENTHOUSIASME. Les pneus avant toujours pas à température ripent légèrement sur le bitume froid à la sortie du parking. Les larges pneus arrière en font de même et glissent d'un bon degré avant que l'électronique n'en reprenne le contrôle. Quand une auto est aussi attendue que la nouvelle Porsche 911 GT3, celle-là même que l'homme qui a assuré son développement et celui des précédentes GT3 affirme être la meilleure de toutes, la première chose que vous cherchez à faire lorsque vous vous retrouvez à son volant, après des mois de photos volées, de photos studio et une présentation à Genève, c'est de mettre le pied dedans. Mais voilà, le moteur et la boîte sont froids. Comme les pneus. Et les routes du parc Snowdonia et de notre Triangle brillent encore de la rosée
evo du matin. Vous inspirez alors profondément pour soulager votre frustration, remuez vos épaules et vos jambes pour vous relaxer au fond de votre baquet. Il va falloir attendre encore un peu. En passant le panneau de fin de limitation de vitesse en agglomération, vous poussez gentiment la GT3 au-delà des 100 km/h, vous en savez déjà beaucoup à son sujet mais vous commencez à comprendre à quel point elle est excellente.
Pour commencer, la direction est tout simplement magnifique. Même si vous n'avez lancé l'auto que dans quelques enchaînements de courbes, vous savez déjà combien elle se montre directe et précise car vous avez senti ce petit volant tourner légèrement entre vos doigts au fur et à mesure que les g latéraux diminuaient doucement en intensité. Cette direction impressionne tant dès les tout premiers kilomètres qu'en fait, vous la déclarez tout de suite
Quasi parfaite sur route comme sur circuit, la 911 GT3 n’a plus besoin d’être présentée. Mais elle est dorénavant de retour plus rapide et plus aiguisée que jamais, serait-elle plus que parfaite?
“meilleure direction à assistance électrique jamais rencontrée”. C'est aussi la plus intuitive. Il y a ensuite la lignée. Vous essayez de rester objectif mais cela ne dure pas car vous savez que la nouvelle GT3 est la dernière née d'une génération de supersportives absolument brillantes et sensationnelles. Et vous êtes certain d'une chose : Porsche Motorsport ne trahira jamais cette lignée.
Vous ne l'avez conduite que sur cinq ou six kilomètres, vous n'avez même pas poussé le moteur au-delà des 3 000 tr/mn, mais vous savez déjà… La nouvelle 911 GT3 fait partie de cette race de voitures merveilleuses.
Vous êtres probablement déjà familier de ses caractéristiques techniques mais je vais en répéter quelques-unes car trois ou quatre indications significatives démontrent à quel point la nouvelle GT3 est différente de l'ancienne version. Non, il ne s'agit pas d'un petit repoudrage, d'un simple restyling de mi-carrière. Tout d'abord, le flat-6 3,8 litres a disparu au profit d'un 4,0 litres qui se trouve être une version lourdement retravaillée du moteur de la GT3 RS et de la 911 R. Il conserve la puissance de 500 ch, volontiers qualifiée de conservative, et parvient cette fois-ci à grimper jusqu'à 9 000 tr/mn, comme sur la précédente GT3 à bloc 3,8 litres (ce n'était pas le cas de la GT3 RS).
Parlons aussi du choix de la transmission, une première sur la GT3. Porsche a en effet réintroduit la boîte manuelle au catalogue quand la précédente se contentait exclusivement d'une PDK. Cette boîte mécanique 6 rapports sera le choix des puristes mais, comme elle ne sera disponible qu'un peu plus tard dans l'année, notre voiture d'essai est équipée de la dernière boîte double embrayage 7 rapports de la maison.
Andreas Preuninger, le patron de la division en charge des sportives, et son équipe ont également beaucoup travaillé sur le châssis. La suspension est recalibrée et, pour la première fois, Porsche installe des ressorts auxiliaires sur son essieu arrière. L'aérodynamique n'est pas en reste et désormais l'auto produit 20 % d'appui supplémentaire sans que cela n'augmente la traînée. L'appui global qui est de 155 kg à la vitesse maximale équivaut à celui de la 997 GT3 RS.
La petite lumière bleue a disparu. L'aiguille de la jauge de température d'huile s'est stabilisée à la moitié de son arc et les pneus désormais tièdes semblent ne plus glisser sur le bitume mais s'y accrocher. Il est temps de mettre le pied dedans.
Avec 460 Nm disponibles à 6 000 tr/mn contre 440 Nm à 6 250 tr/mn, le 4 litres se montre plus coupleux que le 3,8 litres précédent mais c'est moins cette valeur maximale qui fait la différence que ce qui se passe en dessous. Dès 2 500 tr/mn, cet engin pousse déjà. Même en troisième ou en quatrième. Cela a beau être un moteur atmosphérique avide de hauts régimes, il n'en reste pas moins très musclé dans le bas du compte-tours. La voiture accélère comme un train de marchandises surchargé sur une voie en descente abrupte, elle prend graduellement de la vitesse au début puis le
rythme s'accélère de façon exponentielle une fois passés les 5 000 tr/mn. Avec la vitesse qui augmente, comme si vous étiez dans ce train, un sentiment de panique vous étreint car vous avez la sensation que rien ne pourra arrêter cette course folle. La tonalité du moteur change une nouvelle fois au passage des 7 000 tr/mn tandis que l'aiguille du compte-tours se rue vers la zone rouge. C'est si violent que vous pensez tout d'abord que quelque chose va exploser. À l'approche des 9 000 tr/mn, le son est celui d'une scie à ruban découpant un bloc de pierre, l'intensité avec laquelle la puissance déboule est multipliée par deux et l'accélération devient insupportable. Si vous ne pressez pas assez vite la palette, le moteur va se crasher dans le limiteur de régime, comme si notre train de marchandises percutait le pied de la montagne ! Tirez cette palette juste avant que l'aiguille ne touche le “9”, et le passage de rapport se montrera sauvagement rapide. Et puis tout recommence. La théâtralité et l'intensité de ces derniers instants avant le rupteur donnent le sentiment qu'une douce nonchalance animait l'ancien 4 litres des GT3 RS et 911 R. Ce nouveau bloc est également beaucoup plus costaud à haut régime que l'ancien 3,8 litres de la précédente GT3. Ce bloc offrait peut-être 1 000 derniers tr/mn plus suffocants mais le nouveau explose littéralement sur les 2 000 derniers tr/mn. J'adore le bourdonnement du volant moteur au ralenti ou à basse vitesse et les expirations du système pneumatique de la boîte lorsque vous montez un rapport. L'ensemble de la voiture
LA GT3 ACCÉLÈRE COMME UN TRAIN DE MARCHANDISES LÂCHÉ DANS UNE DESCENTE ABRUPTE
SUR LE SEC, UNE FOIS
LES MICHELIN PS CUP2 à TEMPÉRATURE, ILS MORDENT SI FORT LE BITUME QUE VOUS PENSEZ ROULER EN SLICKS
se veut efficace et la transmission PDK n'a jamais été aussi rapide et réactive.
Notre modèle d'essai est équipé du pack Clubsport qui comprend l'arceau cage arrière, un extincteur et un harnais 6 points pour le pilote. Nous bénéficions également des magnifiques baquets sport optionnels en carbone qui savent aussi se montrer confortables même après plusieurs heures de route. Le petit volant de 360 mm de diamètre remplace profitablement l'ancien volant de 380 mm de la précédente génération qui paraissait bien trop large et vous faisait secouer l'auto entre chaque virage. Ce modèle plus petit vous donne le sentiment que l'auto est plus agile, sans plus. En fait, la direction dans son ensemble est si bien conçue que vous oubliez très vite que se cache derrière une mécanique complexe qui actionne également les roues arrière. Sa précision et sa consistance sont telles que vous avez la sensation de l'inscrire en virage par la pensée, elle offre également un retour d'informations qui vous connecte directement au train avant et vous emplit de confiance. Vous ne pouvez pas imaginer la quantité de grip que parviennent à dénicher ces pneus avant.
C'est la même excellence qui régit l'amortissement, ici comme sur tous les produits de Porsche Motorsport. En fait, l'efficacité du PASM est telle qu'on pense cette GT3 posée sur une mince couche d'air comprimé plutôt que sur des amortisseurs, des ressorts, des jantes et des pneus. Elle semble attachée à la route, et dans le même temps flotter à quelques millimètres au dessus. Le contrôle de caisse est magistral, on ressent une certaine souplesse, tant et si bien que toutes les routes que vous aborderez vous paraîtront bidimensionnelles. Elles tournoieront, s'étireront à l'infini mais resteront toujours plates, comme débarrassées des bosses, des nids-de-poule, des compressions ou des crêtes.
Et ça continue. Sur le sec, une fois les Michelin Pilot Sport Cup2 à température, ils mordent si fort le bitume que vous penserez rouler en slicks. Pas une seule fois en plus de 400 km de routes difficiles je n'ai senti de sous-virage. Et ce n'est seulement qu'à l'attaque sur un revêtement vraiment dégradé lors de remises des gaz précoces que j'ai aperçu le voyant D'ESP orange clignoter.
La motricité fait partie des atouts de la Porsche 911 GT3. Rien d'inhabituel pour une auto qui clipse son moteur derrière l'axe des roues arrière mais, grâce aux ressorts d'amortisseurs auxiliaires qui offrent quelques millimètres de débattement supplémentaires avant que le ressort principal commence à être comprimé, l'adhérence est encore meilleure. Bien meilleure que sur n'importe quelle propulsion. Cette poupe est magnifiquement domestiquée désormais.
Sur les routes du parc Snowdonia, châssis, groupe motopropulseur et direction s'allient pour délivrer la plus extraordinaire et la plus complète expérience de conduite pour une supersportive du marché. Sur des kilomètres de route parcourus, il est quasiment impossible d'exprimer la moindre critique à son encontre. Mais il y a aussi le côté émotionnel. L'intensité de la bande-son, la sauvagerie avec laquelle la puissance débarque et le riche ressenti offert par la direction (et le châssis tout entier) connectent l'homme à la machine avec une proximité inégalée. Cette osmose vous transporte quasiment dans un autre monde.
Le soir venant, je décide de ralentir pour descendre paisiblement des montagnes et contempler la GT3. J'ai dit plus haut qu'il était difficile de la critiquer et c'est vrai que je peine à lui trouver des défauts. Je préférerais une boîte manuelle mais il suffit pour cela de cocher la bonne case au moment de signer le bon de commande. Philosophiquement, je pense qu'une auto de ce type devrait remuer un peu plus et ne pas être désespérément scotchée à la route. Vous devriez pouvoir jouer avec son équilibre, pourquoi pas déstabiliser son train arrière à l'accélérateur. Mais avec cette poupe parfaitement suspendue et ce grip latéral phénoménal, il faudra être très déraisonnable pour parvenir à cela. Toutefois je dois avouer que cela ne me vient à l'esprit que maintenant car tout à l'heure, en pleine attaque, j'étais absolument comblé et ne souhaitais rien de plus.
Sur route, la nouvelle Porsche 911 GT3 s'est révélée être une sportive sans aucun vice. Peut-être allons-nous lui découvrir quelques lacunes sur le circuit d'anglesey ?