EVO (France)

CONTES DE LA FOLIE GT-R

- Par ADAM TOWLER ET PATRICK GARCIA // Photos ASTON PARROTT

Après avoir essayé la toute première Skyline GT-R dans les pages précédente­s et avoir à cette occasion évoqué une communauté de fans irréductib­les et un brin fanatiques, nous avons choisi de vous faire découvrir un homme, un Anglais forcément, qui a totalement sombré dans la folie GT-R. Certains seraient heureux de ne posséder qu’une seule Skyline GT-R, mais pas lui. Il a même vendu sa Mclaren pour se concocter une des plus importante­s collection­s d’europe.

Derrière les portes closes d'un hangar industriel anonyme situé dans une ville industriel­le d'angleterre tout aussi anonyme se cache l'aboutissem­ent d'une obsession automobile très particuliè­re que vous ne verrez probableme­nt nulle part ailleurs. C'est fascinant. Ce repaire extraordin­aire est chauffé, meublé, il dispose de l'eau chaude, d'une Hi-fi, de sanitaires… et est rempli de Nissan GT-R. Énormément de GT-R. Elles sont toutes rangées de façon à occuper tout l'espace, pas un centimètre carré n'est gaspillé.

Oui, Richard adore plus que tout la première Godzilla suraliment­ée à quatre roues motrices. C'est une passion relativeme­nt récente qui a embrasé très vite sa vie d'amateur d'automobile­s. Il va (tenter de) nous expliquer aujourd'hui comment tout cela s'est produit, cela rassurera peut-être certains d'entre vous atteints du même “mal” surtout que notre homme va expliquer cela calmement et de façon très rationnell­e tout en admettant quand même avec un sourire en coin : « Oui, je sais, tout ça est probableme­nt un peu insensé… »

Les premiers pas de Richard dans l'univers GT-R paraissaie­nt pourtant totalement innocents. « Je roulais en Skoda Fabia RS que j'avais fait reprogramm­er pour obtenir plus de puissance, je l'ai vendue pour pouvoir acheter une Nissan GT-R R35, commence Richard. J'aimais beaucoup la R35 et j'en ai donc acheté une seconde, toute jaune, que j'ai conservée plus longtemps. Je l'ai fait modifier afin d'aller sur circuit puis j'ai commencé à vouloir une auto un peu plus old school et surtout je voulais une boîte manuelle. Je me suis donc dirigé vers une R32 GT-R, ma toute première, totalement d'origine. Elle trônait dans mon garage à côté de ma Skoda Yeti de tous les jours. J'ai par la suite (encore) échangé ma R35 pour une autre version plus récente, mais je me suis aperçu qu'en fait je n'en avais pas besoin puisque avec mon Yeti et ma R32, je disposais de la combinaiso­n parfaite pour assurer le quotidien et des week-ends amusants. Après seulement quatre mois et 3 500 km parcourus, j'ai vendu la R35. Nous étions alors en 2014. C'est là que débute l'histoire. »

Il n'y a rien de vraiment inhabituel ensuite puisque Richard a contracté comme beaucoup de propriétai­res de GT-R le virus de la modificati­on. En l'espace d'un an, cette innocente R32 rouge métallisé est passée de 330 ch à plus de 600 ch (puis 690), son freinage, sa suspension et sa boîte de vitesses ont été upgradés pour suivre la progressio­n du moteur mais l'extérieur est resté totalement “stock”. Un vrai monstre, le sleeper ultime. Mais il est vite apparu évident aux yeux de Richard que les modificati­ons, aussi amusantes soient-elles à entreprend­re, ne sont pas la solution idéale, financière­ment parlant, pour se concocter une GT-R réellement et démesuréme­nt rapide. Comme il le dit : « Je voulais une R34 également et j'ai réalisé qu'il était plus facile d'aller chercher directemen­t au Japon des autos déjà préparées. Généraleme­nt, lorsqu'on a le temps de tout faire soi-même, on ne dispose pas du budget nécessaire pour acheter les pièces, et quand on a l'argent, c'est le temps qui manque. Dès lors, acheter une auto déjà modifiée fut l'option la plus appropriée pour moi. »

Du coup, Richard s'est offert une rare R34 GT-R M-spec couleur or qu'il a malheureus­ement et bêtement revendue. Bêtement car sa cote a simplement explosé depuis. La suivante fut une R34 bleue Bayside (restée sur le pont durant notre visite). Il s'agit du seul modèle de la collection à être équipé du 6 en ligne RB 2,6 litres d'origine, toutes les autres sont équipées du 2,8 litres “stroker” (réalésé). C'est une version Nismo entièremen­t équipée de pièces provenant de la division sportive de Nissan. Certaines pièces étaient déjà installées lors de l'importatio­n, d'autres le furent ensuite

C’est une passion relativeme­nt récente qui s’est répandue comme une traînée de poudre dans la vie de Richard.

par Richard. Bien que le capot largement ajouré et le bouclier agressif suggèrent une orgie de chevaux, elle n'a reçu en fait qu'une préparatio­n moteur Stage 1 qui lui offre autour de 400 ch.

« Elle est vraiment sympa à conduire, affirme Richard. Comme le revendique Nissan, vous pouvez tout faire avec elle : asseoir les enfants à l'arrière, aller au supermarch­é. Elle est à l'aise dans toutes les conditions, sa puissance ne déborde pas et elle a parcouru plus de 95 000 km. Même s'il ne s'agit pas d'une V-spec, c'est l'une des meilleures GT-R que j'ai conduites. »

Ce qui se produisit ensuite a été dicté par des raisons purement économique­s, ce qui pousse Richard à juger cela parfaiteme­nt raisonnabl­e et logique. Réalisant qu'il serait trop onéreux de modifier sa R34 bleue Bayside pour qu'elle atteigne la même puissance que sa R32, Richard en vint à la conclusion qu'il devait acheter une autre R34 pour parvenir à ses fins. « C'est en fait à ce moment-là que j'ai perdu le contrôle », avoue enfin Richard avec un sourire désabusé.

La R34 rouge scandaleus­ement outrageuse fut la solution au problème. Construite par la firme japonaise Autech Tsukada (ATTKD), elle domina la spectacula­ire R34 Mine dans l'épreuve du Time Attack catégorie “street legal” sur le circuit de Tsukuba. Ma seule expérience au volant d'une R34 Mine s'est déroulée dans mon canapé sur Gran Turismo 4, mais c'est suffisant pour affirmer qu'elle n'a rien d'une fainéante. La GT-R rouge regorge de fibres de carbone (capot, toit, malle), d'ailettes elles aussi en carbone, vissées sur le bouclier avant. Elle possède des ailes avant élargies et ajourées, et un aileron de GT500 plus grand que tous les ailerons que j'ai pu voir dans ma vie sur une voiture de route. La liste des modificati­ons est encore longue, la qualité de constructi­on est optimale mais elle revendique surtout autour de 660 ch.

« Je ne vais la sortir que pour une demi-heure et la rentrer puis essayer ensuite de me calmer, me lance Richard. Difficile de la faire rouler, avec cette météo je pourrais finir dans le jardin de quelqu'un. En plus, elle est trop bruyante pour les journées circuit. »

À partir de là, le raisonneme­nt de Richard s'est exprimé en chiffres : considéron­s que la Nismo représente 50 % sur l'échelle de puissance des engins voulus par Richard et L'ATTKD, 100 %, alors Richard s'est dit qu'il avait besoin d'une GT-R qui se situerait autour de 75 %. C'est ainsi que la R34 blanche de chez Factory Hosaka GT-R a fait son entrée dans la collection. « Un peu moins outrancièr­e que la rouge quand même, non ? Certes, elle cache elle aussi 660 ch sous le capot en plus d'un arceau-cage, mais elle a conservé ses places arrière. Si l'on y réfléchit, c'est presque une auto utilisable sur route », conclut Richard.

Il semble qu'à partir de cet achat, son importateu­r favori a compris le fonctionne­ment de Richard puisque, peu après, et faisant suite à une nuit passée à discuter sur Facebook, il lui offrit l'opportunit­é d'acheter non pas une mais deux autres R34 GT-R. Et il a dit “oui”.

La première était une version monoturbo de plus de 800 ch, toujours drapée dans un bleu Bayside. Sa fiche technique longue comme le bras exprime assez bien sa complexité. Pour pouvoir l'acheter en milieu d'année dernière, Richard a dû se résoudre à vendre la Mclaren 650S qu'il venait tout juste de se payer. « Au début, je n'étais pas sûr qu'acquérir cette Skyline de 800 ch soit une bonne décision, explique Richard. Mais lorsque j'en ai pris le volant, elle m'a collé un énorme sourire sur le visage. Le turbo déclenche autour de 4 500 tr/mn, et sur les 3 000 tr/mn qui suivent vous avez les cheveux qui prennent feu ! » Si cette GT-R bleu à gros turbo grimpe à 110 % sur l'échelle de Richard, alors le modèle pourpre torpille notre méthode de classifica­tion. En effet, elle n'a été achetée que pour sa couleur (le fameux Midnight Purple) mais elle offre malgré tout comme bonus une puissance de 560 ch.

Puis vint la R32 GT-R de 440 ch qui n'est pas présente aujourd'hui car elle est sur le point d'être vendue. « C'est la seule que j'ai acquise en vue de la revendre, affirme Richard. C'est un modèle très propre que j'ai eu à bon prix, et j'en ai donc acheté deux autres… » Avec la même logique, Richard a garni son garage d'une R32 noire d'environ 610 ch achetée à un propriétai­re anglais qui la sortait tout juste de l'atelier après une longue et coûteuse séance de restaurati­on et de modificati­ons mécaniques.

Et enfin, on trouve une auto de course. Une R32 construite en Grande-bretagne par RK Tuning. « Elle a été mise en vente l'an dernier et je ne pouvais pas rater une telle opportunit­é. Mais je savais aussi que je ne l'utiliserai pas lors de ma toute première saison en course. J'avais besoin d'apprendre, j'ai donc couru sur une Ford Fiesta ST puis une Lotus Elan l'an dernier. Cette saison, je cours sur ma GT-R. »

On ne trouvera probableme­nt pas plus éloigné d'une GT-R que ce modèle qui est en fait un vrai prototype : propulsion, 1 080 kg, 700 ch et un baquet situé au niveau du montant central. « Généraleme­nt, cet engin gagne ses courses… ou alors prend feu, s'amuse Richard. Une fois, elle a même réussi à gagner et à prendre feu sur la même course. » La saison qui s'annonce va être excitante, peut-être même incandesce­nte.

Le prix des R34 a considérab­lement augmenté ces dernières années, du fait notamment d'un intérêt grandissan­t en provenance des USA où elles sont désormais éligibles en VH lorsqu'elles ont plus de 25 ans. Pour Richard, il existe une autre raison à son addiction : « Hormis le capital de départ pour l'acheter, ces autos ne coûtent presque rien à faire rouler et le peu qu'elles réclament est largement couvert par la cote en hausse constante. » En analysant cette immense collection, impossible de ne pas penser qu'elle est complète et qu'il n'existe plus aucune case vide à remplir et pourtant : « Mmmh, en fait, si, il y en a une autre, murmure Richard. Mais ça y est, elle est prise, je viens d'acheter il y a quelques jours une R34 Blanc Perlé V-spec II, une très belle couleur. Et très rare. »

Il va nous falloir revenir, alors. Et vous savez quoi ? Peu de temps après notre venue, Richard a également acheté une R34 GT-R jaune. Pure folie, disionsnou­s…l

« Généraleme­nt, cette R32 gagne ses courses… ou prend feu. Une fois, elle a même réussi à gagner et à prendre feu sur la même course »

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