SANS GRANDE CONTESTATION, ON PEUT DIRE D’ASTON MARTIN
qu’elle est une marque qui fait rêver et qui n’engendre que peu d’opposition spontanée. Exit l’ostentatoire d’une Ferrari, l’exotisme d’une Mclaren, la qualité de “validation standardisée d’un statut social avancé” d’une Porsche, le lien entre nouveaux riches et Bentley, Aston Martin témoigne d’une image de marque irréprochable. Hommes et femmes plus ou moins jeunes, enfants aussi, tout le monde tourne la tête sur son passage. Mieux ? La simple évocation de ce nom fleure bon l’élégance, la distinction et la discrétion. Même pour les plus aigris, les plus écolos et les plus frustrés, même pour ceux qui n’ont de cesse de vous rappeler à quel point « ça ne sert à rien, surtout pour rouler à 130… ». Mais ça, c’est pour le grand public. Car pour ce qui est des plus avertis, le tableau se noircit immanquablement face à un constructeur qui ne commercialisait jusqu’à peu que des modèles basés sur des plateformes vieillissantes et difficilement actualisables. Depuis dix ans, Aston Martin se repose sur son image et son logo pour écouler les châssis à grand renfort de variantes concoctées par le marketing, une véritable ode à la forme qui renie le fond. Personne n’a jamais pu me taxer d’un quelconque défaut d’objectivité dès lors qu’il s’est agi de prendre le volant d’une voiture de la gamme. J’ai même souvent eu honte de penser a priori du bien de voitures finalement peu rigoureuses et bourrées de défauts. Une
V8 Vantage ne sera jamais aussi incisive qu’une 911. Une DB9 n’aura jamais la fiabilité d’une Allemande. Une Vanquish restera toujours derrière la concurrence en termes de performances. Une Rapide ne sera jamais aussi polyvalente qu’une Panamera. Mais chacune d’entre elles détient un atout, aussi subjectif qu’essentiel : une âme, à part entière. Mon propos n’est pas aujourd’hui d’établir un jugement sur la marque, je tenais juste à souligner ce retard accumulé auquel nous devons aujourd’hui une espèce rarissime. Grâce au récent partenariat avec Mercedesamg, Aston Martin a trouvé un second souffle qui a pris la forme de la DB11. Si notre monture voisine avec elle au catalogue, elle trouve son origine dans des temps anciens comme la DB7 et la Vanquish l’ont été avant les V8 Vantage et DB9. Ce qui est surnaturel est bien souvent éternel, or il est ici question d’une espèce en voie de disparition. Je ne cherche pas là à dramatiser davantage la situation, ni l’évolution future de l’automobile sportive mais, à dire vrai il y a fort à parier que, avec d’autres volumes de vente et d’autres tarifs, les V12 ont encore quelques beaux jours devant eux, tout comme les moteurs atmosphériques et les boîtes manuelles. En revanche, c’est l’alliance de ces trois élémentsclés du plaisir automobile pur qui me poussent à penser que la V12 Vantage S fait partie des toutes dernières survivantes du genre.