LOTUS EXIGE 380 CUP
La plus extrême des Exige homologuées route devient encore plus rapide et légère. Voici la Cup 380, l’une des meilleures voitures de sport toutes catégories confondues.
JENTENDS L’EXIGE CUP 380 UNE FRACTION DE SECONDE AVANT
DE LA VOIR, SON V6 COMPRESSÉ TOURNANT À PEINE AU-DESSUS DU RALENTI. Il résonne généreusement contre les murs de la rue vide. La première impression compte beaucoup, et cette Lotus ressemble à une voiture de course arrivée par erreur au fin fond de la campagne. Sa silhouette, très “Groupe C des 24 Heures du Mans”, paraît excessivement compacte, basse et agressive au milieu du flot de voitures banales de ce village. En plus, elle a des jantes rouges.
À la fin de l’essai de l’exige Sport 380 “normale”, Richard Meaden concluait par une note maximale de cinq étoiles, en précisant que cette Lotus « figurait parmi les meilleures sportives du monde, toutes catégories confondues ». Quel que soit leur prix.
À ce point, vraiment ?
J’avoue qu’elle me plaît déjà, déjà, rien qu’en l’observant. Sa relative compacité la rendrait presque mignonne, mais sa largeur et sa longueur n’ont rien à voir avec les frêles Exige de première génération.
Celle-là pourrait probablement se défendre quelle que soit la force de ses assaillants, aidée par son V6 Toyota de 380 ch monté en position centrale arrière.
La Cup prend pour base la déjà très épicée Exige Sport 380, et lui rajoute des morceaux d’exige Race 380 (réservée au circuit) pour arriver à un compromis routecircuit idéal. Elle réduit la masse, améliore l’aérodynamisme et optimise davantage le comportement dynamique grâce à une nouvelle suspension réglable.
On note plus de fibre de carbone afin de réduire son poids à vide à 1 057 kg contre 1 110 pour la Sport 380. Rappelez-vous que l’auto lui servant de base faisait déjà une sévère chasse aux kilos. Le carbone verni se retrouve sur le splitter avant, le panneau de capot avant, les jupes latérales, le pavillon de toit, le diffuseur arrière, les panneaux d’ouïe latérales (500 g de gagnés rien qu’à ce niveau), et la face arrière monobloc. Le gros aileron arrière fixe en carbone représente la modification aérodynamique la plus visible. Il va de pair avec un train avant à l’appui aérodynamique augmenté, grâce à de nouvelles prises d’air dans le bouclier avant. Elles permettent de créer une pression négative dans les arches de roues avant, la Cup 380 générerait au total 200 kg de cette force aérodynamique invisible à sa vitesse maximale de 282 km/h. Soit une augmentation de 43 % par rapport à la Sport 380. Lotus promet que ce surplus d’appui se ressent au-dessus de 100 km/h. Au passage, l’essuie-glace se colle désormais au centre du pare-brise pour nuire le moins possible à la finesse aérodynamique.
Les amortisseurs Bilstein de la Sport 380 laissent place à des Nitrons réglables, complétés par des barres antiroulis Eibach. Ces amortisseurs offrent 16 réglages en compression, et 20 en détente. Lotus recommande d’ailleurs une position intermédiaire, pour ceux qui souhaiteraient un compromis valable sur route et sur circuit. Les Nitrons possèdent un diamètre de cylindre plus gros, un piston à la taille adaptée et font l’impasse sur les rotules caoutchouc au profit d’un montage rigide. Cela permet d’éviter les mouvements parasites, et d’accepter une raideur d’amortissement supérieure de 60 %, nécessaire pour supporter l’augmentation de l’appui aéro. Des Michelin Pilot Sport Cup 2 plus larges à l’arrière (section de 285 au lieu de 265 sur la Sport 380) contribuent eux aussi à l’augmentation du grip et de la motricité. La molette grise à votre gauche, le long de la colonne de direction commande l’antipatinage exclusivement. Sur la Cup, L’ESP se règle à part selon 4 modes différents (Touring, Sport, Race et Off). Le contrôle de traction ne se règle que lorsque L’ESP est totalement désactivé : le conducteur peut alors modifier la tolérance maximale de glisse entre 1 et 12 %, ou le désactiver entièrement. Il s’agit d’un système digne de la compétition automobile, qui coupe l’admission lorsqu’il détecte une glisse trop importante et n’agit donc pas sur les freins. Considérant qu’audelà de 5 % de patinage, un pneu ne génère plus de grip, cet éventail de réglages couvre toutes les situations possibles sur circuit.
Mais aujourd’hui sur la route d’arrière-pays, je ne m’en servirai pas. Lotus clame haut et fort que la Cup 380 reste une automobile utilisable sur route autant que sur circuit, ce qui paraît tout de même difficile à croire au vu de cette foule de réglages possibles
pour la piste. Sur la route, les premières accélérations ne permettent pas à mon cerveau dépassé de détailler toutes les sensations de conduite : ma matière grise intoxiquée par l’intensité de la poussée et la sonorité à l’échappement est bien incapable d’analyser quoi que ce soit. Cette tubulure en titane (-10 kg) à sortie centrale, affichant de jolis reflets bleus, émet une sorte de cri de guerre qui s’entend à un kilomètre à la ronde quand vous commencez à pousser. Le 0 à 100 km/h abattu en 3’’6 impressionne pour une machine dotée de trois pédales, sans artifices électroniques pour optimiser ses démarrages. Et jusqu’aux derniers millimètres de la zone rouge, la Cup 380 ne perd rien de cette brutalité.
Le superbe mécanisme du levier de vitesse et la commande parfaite ajoutent à son charme. Chaque changement de rapport procure un plaisir fou, même si la proximité exagérée entre le frein et l’accélérateur (talonpointe oblige) ou la réponse moteur initiale peuvent en dérouter certains. Vous n’imagineriez aucune autre transmission que cette boîte 6 vitesses dans une machine aussi pure. Globalement, l’intérieur de la Cup offre une présentation délicieuse avec de superbes baquets en carbone, de jolies touches d’alcantara et un interrupteur à la place de la radio habituelle. Sur le plan dynamique, cette
Cup 380 évolue bien au-dessus de ce qui peut être atteint sur route ouverte. Mais quel que soit le rythme, l’expérience de conduite extrêmement immersive vous procure plus de joie que la plupart des supercars récentes. Les virages ne demandent généralement qu’un soupçon d’angle au volant et une légère pression dans la bonne direction. Très ferme en amortissement, elle travaille dur sur du mauvais revêtement où son volant vibre et nécessite une solide poigne. Le truc avec cette direction, c’est de sentir quand il faut la laisser corriger toute seule, ou quand il faut la forcer à rester bien droite.
Un régal à piloter, mais à 109 900 euros, il ne pouvait en être autrement.
À cet instant, je devrais normalement vous dire que
“ça fait beaucoup d’argent” pour une Lotus.
Mais jamais une Lotus ne m’avait paru aussi en phase, dans ses prestations, avec un prix de ce niveau. De la finition de son carbone jusqu’à la rigueur de sa construction, la Cup 380 justifie avec brio son élitisme tarifaire. Au final, le seul gros défaut de la Cup 380 tient à la mention “sold out” à la fin de la présentation presse. Mais je suis rassuré sur une chose : Richard Meaden avait raison.
Cette Lotus procure plus de plaisir que la plupart des supercars actuelles combinées