EVO (France)

BMW M850i XDRIVE

La M850i, nouveau vaisseau amiral de BMW, se présente comme une GT polyvalent­e moderne évoquant également les coupés du passé. Mais une seule question intéressan­te demeure : est-ce une auto que l’on prend plaisir à conduire ?

- Par Adam Towler et Patrick Garcia

Lorsque le soleil portugais éclaire les lignes élancées de notre M850i recouverte d’une teinte Sunset Orange Metallic voyante, on ne peut rester insensible. C’est prometteur, c’est nouveau, et cela faisait surtout longtemps que BMW n’avait plus cédé aux sirènes du gros coupé pour autobahns qui faisait pourtant sa réputation dans les années 60/70 avec la E9 puis, dans les années 80, avec la E24. Il y a bien eu les Série 6 de ces dernières années mais, cette fois-ci, il ne s’agit pas d’une Série 5 ou d’une Série 7 recarrossé­e mais une auto singulière qui ne doit rien à personne.

L’amour que semble lui porter l’équipe d’ingénieurs qui l’a conçue ne semble vraiment pas feint. Sur le papier, cette Série 8 est un colosse qui cache en premier lieu tout le savoir-faire mécanique et traditionn­el de BMW : un V8 biturbo de plus de 500 ch sans aucun temps de réponse, une boîte automatiqu­e 8 rapports rapide et intelligen­te, quatre roues motrices, des roues arrière directrice­s, des barres antiroulis actives, un châssis mariant les matériaux, et une suspension à double triangulat­ion avant et multibras arrière. Il se dit que la Porsche 911 et la dernière Aston Vantage ont été prises comme référence, mais un coup d’oeil à la fiche technique vous fait comprendre que ça n’est pas forcément le cas.

Il y a déjà le poids de 1890 kg, puis les

530 ch et 750 Nm extraits de son V8 4,4 litres N63 qui a été renforcé pour l’occasion et qui reçoit un nouveau haut moteur, de plus gros turbos et une pression d’injection relevée. De plus, tout cela est déjà délivré dès

1800 tr/mn, ce qui devrait aider à mouvoir sans effort une auto pesant près de deux tonnes. La première chose qui m’a marqué est la position du siège conducteur. La partie inférieure de l’assise est carrément posée sur le plancher. Alors que nous regrettons d’être “assis trop haut” à longueur de voitures essayées, quelle bénédictio­n. BMW a semblet-il choisi de respecter les codes du Grand Tourisme. L’habitacle très haut de gamme séduit

(cuir, Alcantara, aluminium, levier de vitesse en verre en option!) et s’il n’a pas le clinquant d’un intérieur AMG, ce n’est certaineme­nt pas un mal. Derrière vos épaules, vous trouvez deux sièges de taille raisonnabl­e mais limités en garde au toit et, encore plus loin, un coffre de 420 litres.

Si vous vous demandez pourquoi je me perds dans l’évocation de ces détails statiques au lieu d’aller brûler ses Bridgeston­e Potenza, je vous dirais que la M850i n’est pas une voiture de ce type. Le “M” pourrait le laisser croire mais, dès le démarrage, le V8 vient à la vie en toute discrétion.

En mode Confort, la direction se montre très légère mais il est tout de suite évident qu’elle ne manque ni de précision ni de constance, qu’elle est dépourvue de mystérieus­es remontées parasites sans lien avec le bitume qui défile sous les roues. Elle vous connecte très vite à l’auto et il n’est jamais besoin de donner un second coup de volant à l’entrée des courbes une fois que le nez a tangenté.

Pour être franc, elle ne semble pas plus compliquée à conduire qu’une Série 7. Le roulage offre un confort de bon niveau et l’insonorisa­tion n’engendre aucun reproche. Les premières courbes font apparaître une auto étonnammen­t légère sur ses appuis et j’aime beaucoup le fait qu’un effleureme­nt de la pédale d’accélérate­ur suffise à la propulser dès les plus bas régimes, la boîte ne descendant pas automatiqu­ement le rapport inférieur. Et puis, elle chante bien aussi, le son est nettement plus naturel que celui de la M5. J’ai cru un temps que les belles routes qui s’ouvraient à nous seraient bien trop étroites pour que la 850i se sente à l’aise mais, en mode Sport+ et avec la boîte en mode Manuel (via les palettes), cela n’a jamais été le cas. Elle plonge à la corde et se jette à l’autre bout du virage sans jamais fatiguer et lorsque je l’ai poussée aussi fort que possible, elle n’a jamais été hors sujet. Elle ralentit, braque, tourne, et accélère à nouveau. C’est appréciabl­e même si le conducteur se trouve un peu éloigné de tout ce qu’il se passe.

Les trente minutes suivantes ne resteront pas comme l’expérience de conduite la plus formidable de ma vie mais, alors que nous rejoignons la civilisati­on, la Série 8 relâche ses muscles pour retrouver la douceur de comporteme­nt ouaté typique des grandes

GT. Tout ce qu’elle est capable de faire est éminemment respectabl­e.

Sur le circuit d’estoril, la M850i avale sans surprise les longues lignes droites comme son 0 à 100 km/h abattu en 3’’7 le laissait imaginer, tandis que sa V-max limitée à 250 km/h arrive très vite. Par ailleurs, deux points sont à noter. Premièreme­nt, après 6 tours, le freinage amélioré (mais toujours en acier) ne montrait aucune faiblesse, ce qui peut paraître miraculeux. Mais plus que tout, c’est ce qui se produit en courbe qui révèle la nature profonde de cette Série 8. Freinez fort en entrée de virage serré et au moment de braquer, vous sentez que l’auto se jette avec férocité à la corde. Certes, vous pouvez penser qu’il s’agit du beau freinage dégressif dont vous êtes l’auteur qui est à l’origine de ce mouvement mais, tour après tour, il devient clair que les roues arrière directrice­s sont la vraie cause. Lorsque vous reprenez les gaz, vous ressentez une autre rotation notable engendrée par le couple délivré sur la roue appropriée. Cela peut paraître artificiel mais cela n’est jamais aussi nerveux et troublant que sur la Mégane R.S. par exemple. Chaque virage serré est l’occasion de ressentir ces deux rotations distinctes. Là encore, la Série 8 ne se met jamais en position inconforta­ble. Essayer de résumer cette auto est difficile. Ce n’est clairement pas une sportive ni une auto réellement divertissa­nte. Ce n’est certaineme­nt pas une rivale à la 911. Non, elle se situe plutôt entre la Porsche et d’autres engins tels que les AMG S 63 ou Bentley Continenta­l GT. C’est un genre d’autos (une GT polyvalent­e moderne) qui n’a que peu d’équivalent­s de nos jours et, alors que je me presse dans l’aéroport pour attraper mon vol retour, je me perds dans mes pensées en regardant les M850i garée au-dehors. Je ne suis qu’à 1 500 km de chez moi et j’en arrive à la conclusion que, plutôt que l’avion, ce serait un immense bonheur de les parcourir à bord de cet engin. Elle est née pour ça.

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BMW a choisi de respecter les codes traditionn­els du Grand Tourisme.
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Ci-dessous à gauche : les énormes disques acier de 395 mm de diamètre offrent des ralentisse­ments sans faille; la position de conduite extrêmemen­t basse se révèle parfaite; le levier optionnel en verre.

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