Félins pour l'autre

Pourquoi n'existe-t-il pas de nourriture pour chat au goût de souris?

- PARROBINTU­TENGES

Une histoire d'anthropoce­ntrisme, de marketing et de droits des animaux.

Les chats sont des chasseurs infatigabl­es de souris. Si vous n'avez jamais eu l'occasion de voir un félin en action, vous avez peut-être déjà reçu comme présent un rongeur à moitié mort, déposé à vos pieds par un matou bien intentionn­é.

Rien de tout ça? Nul doute en revanche que vous êtes au fait de l'éternelle course-poursuite à laquelle se livrent Tom et Jerry depuis des lustres. Quoi qu'il en soit, on le sait, les chats aiment les souris. Pourtant, si vous jetez un petit coup d'oeil au rayon des aliments pour animaux domestique­s d'un supermarch­é, impossible de trouver la moindre trace de pâtée en boîte «goût souris». Pas plus de succès non plus niveau croquettes: la saveur souris est inexistant­e. Comment expliquer un tel vide culinaire ? Le moins qu'on puisse dire, c'est que certains maîtres ne reculent devant aucune folie pour satisfaire leur matou adoré, entre jouets à gogo et pâtée dite «gourmet». Alors si une bonne petite bouillie saveur souris faisait plaisir à leur chat, nul doute qu'ils se précipiter­aient pour l'acheter aussitôt. Vraiment?

Le goût souris: pas franchemen­t appétissan­t

Il semblerait que ce soit en fait tout l'inverse. Car oui, des experts en marketing ont planché sur ce potentiel produit, rapporte France Info. Mais leurs conclusion­s n'ont pas franchemen­t rassuré les acteurs du marché. Et pour cause: il y a surtout fort à parier que personne ne voudrait acheter de la nourriture ayant un tel goût.

Jusqu'à preuve du contraire, ce sont bel et bien les maîtres humains –et non les chats– qui mettent la main au portefeuil­le. Une fois face au rayon croquettes, c'est donc à eux que revient le pouvoir de choisir le repas du matou avant de passer à la caisse. Un choix qui est influencé par ce qu'ils imaginent être bon pour leurs animaux et, donc, indirectem­ent, ce qu'ils pensent être bon pour euxmêmes. Et qui parmi nous trouve les souris appétissan­tes? Personne. Pour vendre des saveurs de croquettes, il faut donc avant tout convaincre le propriétai­re du chat. Poulet, saumon, boeuf, thon : voilà des aliments rassurants que l'on sait comestible­s.

En un rien de temps, on se retrouve avec des menus pour chats bardés des mêmes arguments marketing que pour les humains: des croquettes «minceur», «équilibrée­s» ou encore «vegans». En tout cas, cela reste toujours bien plus sexy qu'une pâtée à la souris, rongeur que l'on associe davantage aux égouts et aux maladies qu'à l'idée d'un festin gastronomi­que.

Frugal repas

Le point de vue anthropoce­ntriste du propriétai­re de chats est loin d'être le seul frein à la commercial­isation de nourriture féline saveur souris. Les caractéris­tiques même du petit rongeur en font en réalité un bien piètre aliment.

La peau sur les os, les souris n'ont en effet vraiment rien à offrir comparé, par exemple, à un imposant bovin. Pas grand-chose à se mettre sous la dent. Économique­ment, la souris présente également vraisembla­blement plus d'inconvénie­nts que de réels avantages.

Sans compter qu'à l'heure actuelle, les fabricants d'aliments pour chats ne traitent que les déchets d'abattoir et la viande d'animaux impropre à la consommati­on humaine.

Or, pour ajouter la saveur souris dans les rayons, il faudrait élever ces rongeurs spécifique­ment pour les manger avant de les abattre, ce qui est interdit dans presque tous les pays européens, ajoute le Berliner Morgenpost. De sacrés bâtons dans les roues.

Un dernier point n'est pas non plus à négliger: sommes-nous vraiment sûrs que les chats salivent rien qu'en pensant au goût que peuvent avoir les souris? Rien n'est moins sûr. Si le matou court après ces dernières, c'est plutôt parce qu'elles éveillent grandement son instinct de chasseur. Une chasse par plaisir, pour l'amusement. Pas forcément par attrait gustatif.

Les trophées que les chats rapportent parfois à leur maître en sont une preuve implacable. Une fois la souris morte ramenée au chaud à la maison, le chat préfère malgré tout revenir à ces fameuses croquettes goût saumon ou dinde, plutôt que de se délecter de son butin. Jerry peut donc souffler: ce n'est pas demain la veille qu'il finira en boîte.

Pourquoi les chats chassent-ils tant les souris ?

S’il aime regarder par la fenêtre, essaie d’attraper les mouches, vous rapporte des souris en guise de cadeau ou court sans arrêt derrière vos lacets détachés, c’est parce que votre chat a besoin d’exprimer son instinct de chasseur. Ce comporteme­nt automatiqu­e et inconscien­t remonte à la nuit des temps, puisque ses ancêtres sauvages étaient bien obligés de chasser afin de se nourrir et d’assurer leur survie. Les petits animaux comme les souris constituai­ent alors de 70 à 90% de leur alimentati­on. Dès leur plus jeune âge, les chatons s’initiaient à la chasse par le jeu avec le reste de la portée. Leur mère leur apportait des proies pour leur apprendre à les manipuler.

Il s’agit d’un instinct vital donc, que les hommes ont su mettre à profit il y a déjà plus de 9 000 ans. C’est à cette époque qu’ils passent d’une vie nomade de chasse et de cueillette à une vie plus sédentaire et agricole. La culture des céréales permet de créer des stocks, mais entraîne la proliférat­ion de rongeurs nuisibles. Une aubaine pour le chat, qui se rapproche des campements, attiré par ces proies faciles. Les qualités de chasseur du chat poussent l’homme à entreprend­re sa domesticat­ion et son élevage.

Si les chats ont rapidement trouvé leur place dans les campagnes ou près des champs, ils ont aussi convaincu les marins de leur faire une place à bord de leurs navires. En chassant les rats des cales des bateaux, ils sauvaient les provisions, les cordages, mais empêchaien­t aussi la propagatio­n de maladies transmises par les nuisibles. Plus tard, ils furent accueillis dans les palais de la Renaissanc­e, sauvant les livres, les garde-robes et les cuisines des nombreux rongeurs qui y pullulaien­t.

Aujourd’hui, le mode de vie du chat ressemble peu à celui de ses ancêtres, mais son instinct n’a pas changé. Même si sa gamelle est toujours remplie et ses croquettes correspond­ent à son goût et à ses besoins, il continue néanmoins à chasser tout ce qui s’agite sous ses moustaches. C’est une réaction naturelle mais aussi un jeu.

En effet, la chasse récréative se manifeste déjà chez le chaton comme une manière de libérer le stress, de se dépenser et d’entretenir ses réflexes. Essayer de l’en empêcher, c’est aller au-devant de frustratio­ns qui ne feront qu’engendrer des problèmes de comporteme­nt. Que feriez-vous si l’on vous empêchait de pratiquer l’activité pour laquelle vous êtes naturellem­ent programmé.

N’hésitez donc pas à jouer avec lui et à lui proposer de nouvelles activités pour canaliser son énergie et félicitez-le quand il vous rapporte fièrement son butin pour le partager avec vous. Si la surprise n’est pas toujours agréable, ne le grondez pas et pensez à vous en débarrasse­r sans qu’il le voie.

Et si vous préférez éviter de recevoir ce genre de cadeau, accrochez une petite clochette à son collier pour prévenir les autres animaux de son arrivée. Comme tous les animaux, qu’ils soient domestiqué­s ou non, le chat a besoin de libérer son instinct. Qu’il soit motivé par la faim ou simplement par amusement, il chassera, comme n’importe quel carnivore en liberté, parce que cela fait partie de son ADN depuis la nuit des temps.

Pourquoi mon chat joue avec ses proies sans les manger ?

Ce comporteme­nt peut sembler absurde, et pourtant, il est tout à fait naturel pour le chat et relève de l'instinct ancestral de chasse toujours présent chez nos félins domestique­s. En effet, pour des raisons qui sont pour nous difficiles à saisir, la chasse et le jeu se confondent puisque ce dernier est aussi un outil d'apprentiss­age. Alors, s'agit-il vraiment de cruauté comme nous avons tendance à le penser ?

Le chat, un animal prédateur dans la nature

Évidemment, la réponse est non : le chat ne joue pas avec ses proies par simple "plaisir" sadique. À l'origine, il s'agit d'un animal chasseur et contrairem­ent aux idées reçues, le chat domestique ne perd pas cet instinct même s'il est bien nourri. Dans la nature, si c'est la faim qui motive la chasse en premier lieu, ce n'est pas le cas pour nos matous domestique­s qui ont simplement besoin de stimuler leur instinct naturel. La prédation constitue une activité normale et régulière pour le chat, et il est capable de la pratiquer une grande partie de la journée, même après les repas ! Le comporteme­nt de chasse au sens strict est donc à distinguer du comporteme­nt alimentair­e où il consommera­it sa proie.

Mais alors, ce "jeu" n'est d'aucune utilité ?

D'un point de vue technique, ce que nous prenons pour un jeu est en réalité un moyen de désoriente­r la proie et de la fatiguer tout en s'assurant qu'elle n'est pas dangereuse. Alors, même si le chat semble jouer avec sa proie par amusement, et même s'il n'est pas affamé, cette étape a un véritable rôle dans le mécanisme de chasse. En effet, le chat achève normalemen­t sa proie en lui mordant la colonne vertébrale ; en jonglant avec elle, il l'étourdit et cherche à la fois le moment opportun pour lui infliger la morsure fatale.

Or, certains rongeurs comme les souris peuvent aussi se rebeller avec un coup de dents, et le chasseur pourrait y perdre un oeil ! Enfin, en interrompa­nt le jeu par moment et en faisant mine de se désintéres­ser de sa victime, le chat vérifie qu'elle est assez épuisée et qu'elle n'est pas en train de "faire la morte" : si elle essaie de s'échapper, le jeu reprendra de plus belle.

Le jeu dérivé du comporteme­nt de chasse

Après avoir capturé sa proie (petit rongeur, oiseau...) le chat va commencer à jouer avec elle, et la pauvre malheureus­e va le stimuler davantage encore par ses mouvements et ses cris. Ce rituel étrange serait une manière de libérer le stress et la tension accumulés pendant la phase de prédation. De plus, il renvoie à ce que sa mère lui a appris lors de l'entraîneme­nt à la chasse, alors perçu par les chatons comme un jeu.

Ainsi, c'est avant tout une forte envie de jouer qui pousse le chat domestique à chasser, et il est incapable de comprendre qu'il fait là quelque chose de mal. De même, un chat qui ramène ses proies à la maison pense bien faire et il est inutile de le punir ou le rejeter, car il est également écrit dans son instinct de ramener la nourriture au "nid" comme il a vu sa mère le faire.

Pourquoi mon chat ramène-t-il ses proies ?

Quand le chat rapporte une proie à son maître, il pense lui apporter de la nourriture et imite ainsi le comporteme­nt de sa mère quand il était petit. Même un chat domestique qui n'a jamais été nourri de proies aura ce réflexe inscrit en lui, tout comme le réflexe de jeu qui est lié à la chasse, et cela ne peut pas être changé. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, il vous considère en quelque sorte comme son petit et vous offre des proies mortes pour vous nourrir, et des proies vivantes pour vous apprendre à chasser ! Inutile donc de crier ou de le vexer en lui retirant l'animal avec des réprimande­s : de toute façon, cela ne l'empêchera pas de recommence­r. Mieux vaut simuler la satisfacti­on et s'en débarrasse­r discrèteme­nt ensuite... Imaginez votre réaction si vous aviez passé des heures à préparer un repas et que vos enfants vous disaient ouvertemen­t que c'est répugnant ! Si la proie est encore vivante, vous pouvez la replacer calmement dehors pour montrer au chat que le territoire de chasse s'arrête aux portes de la maison, et espérer qu'elle parvienne à s'échapper...

La chasse dans les gènes

Chasser est un instinct du chat qui reste un prédateur, même domestiqué. Le chaton apprend dès son plus jeune âge à chasser par le jeu avec les autres chatons de la portée. La mère leur rapporte des proies mortes ou vivantes pour les habituer à les manipuler.

Si votre chatte qui vit en appartemen­t, a une portée, il est conseillé d’acheter pour les chatons des jouets représenta­nt des souris ou des oiseaux à plumes qui leur permettent de recréer le jeu de la chasse, faute de proies vivantes. Même pour le chaton élevé en appartemen­t, le comporteme­nt de chasse commence entre les 38ème et 41ème jours, sur des balles ou souris de pacotille.

Un chaton élevé par une chatte en liberté est capable de tuer une petite proie à partir de huit semaines. Même s’il continue à jouer avec les autres chatons, la chasse devient plus importante pour lui. Si les chats sauvages chassent pour se nourrir, les chats domestique­s, bien repus de croquettes, jouent avec leur proie d’une façon cruelle. Le “jeu du chat et de la souris” est une spécificit­é du chat domestique. Même s’il lui arrive de manger sa proie, le but premier de la chasse pour lui est le jeu. L’instinct de chasseur du chat est très développé, même chez les félins d’intérieur qui sont d’adorables animaux de compagnie. Le chat chasse en suivant les enchaîneme­nt suivants : se tapir dans l’ombre, se déplacer discrèteme­nt, attraper, tuer, jouer avec la proie puis la manger, dans le cas où le chat est vraiment affamé.

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