Feuillet Hebdo de la Revue Fiduciaire
Définition restrictive
En 2014, dans le cadre notamment de l'affaire Molex, la Cour de cassation a redéfini la notion de coemploi, dans un sens restrictif (cass. soc. 2 juillet 2014, n° 13-15208, BC V n° 159). Elle a depuis confirmé cette nouvelle approche, notamment à la suite de l'affaire Continental (cass. soc. 6 juillet 2016, n° 14-27266 FSPB).
Comme par le passé, le coemploi se caractérise par l'existence, entre deux sociétés d'un groupe, d'une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion de la société dominante dans la gestion économique et sociale de la société dominée. La Cour de cassation a cependant apporté à cette définition une restriction de taille : la confusion d'intérêts, d'activité et de direction doit aller au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer.
En d'autres termes, il est normal que, dans un groupe, la société-mère exerce un certain contrôle sur ses filiales, par exemple en décidant de certains aspects de la politique commerciale ou en centralisant des services tels que la recherche et le développement, la comptabilité ou la maintenance informatique.
À titre d'exemple, le fait que les dirigeants de la filiale proviennent du groupe et soient en étroite collaboration avec la société mère ou que la politique du groupe déterminée par la société mère ait une incidence sur la politique de développement ou la stratégie commerciale et sociale de sa filiale n'est pas de nature, à lui seul, à caractériser une situation de coemploi (cass. soc. 10 décembre 2015, n° 14-19316 FSPB ; cass. soc. 6 juillet 2016, n° 14-26541 FSPB).
Pour que l'on puisse conclure à une situation de coemploi, il faut que la filiale soit totalement inféodée à la maison-mère. La Cour de cassation a ainsi consenti à condamner in solidum une filiale et sa maison-mère, dans une affaire où cette dernière avait récupéré les équipes informatiques, comptables et de ressources humaines de la filiale, contrôlait totalement le recrutement et se chargeait de tous les problèmes de nature contractuelle, administrative et financière que pouvait rencontrer la filiale (cass. soc. 6 juillet 2016, n° 15-15481 FSPB).
La Cour de cassation prend toujours soin de préciser que les critères du coemploi s'entendent « hors état de subordination ». En d'autres termes, la société dominante peut aussi être reconnue coemployeur d'un ou de plusieurs salariés d'une filiale sur la base des critères qui servent habituellement à constater l'existence d'une relation de travail, à savoir « l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner le manquement de son subordonné » (cass. soc. 1er juillet 1997, n° 94-45102, BC V n° 240).