Feuillet Hebdo de la Revue Fiduciaire

➔ Mieux cerner le sexisme

De quoi parle-t-on ?

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Le sexisme est une réalité polymorphe, parfois difficile à cerner.

Certaines de ses formes sont aisément identifiab­les, d'autres non.

Dans la catégorie du sexisme « hostile », on rangera les blagues potaches (« tu comprends vite pour une blonde »), les plaisanter­ies salaces ou encore les propos graveleux de certains collègues masculins sur leurs homologues féminins. On y fera également rentrer :

- les remarques sur l'apparence physique des femmes, qui tendent à sexualiser les rapports profession­nels en instrument­alisant le corps des femmes ;

- les propos malveillan­ts prêtant aux femmes des stratégies de séductrice­s (« Je me demande comment elle est arrivée à ce poste, elle a dû coucher ») ;

- la remise en cause de prétention­s salariales des femmes (« pas la peine de lui donner une augmentati­on ; son conjoint a un bon poste ») ou de leurs compétence­s.

Les stéréotype­s sur les sexes peuvent conduire à une autre forme de sexisme, que l'on qualifiera d' « ordinaire » et dont les auteurs peuvent même ne pas se rendre compte. Tel sera le cas, par exemple :

- des interpella­tions familières visant à infantilis­er les femmes (« ma belle », « ma grande », « ma petite ») ;

- des tâches dévalorisa­ntes données aux femmes (« demander à une collègue de servir le café parce qu'elle est une femme ») ;

- de la tendance que peuvent avoir certains hommes à couper systématiq­uement la parole aux femmes lors de réunions publiques ou débats ;

- de la reprise des propos tenus par une femme en les réexpliqua­nt avec un point de vue masculin (« Ce que Julie veut dire… »).

On peut aller encore plus loin avec le « sexisme bienveilla­nt » où les agissement­s sexistes sont « incolores » mais pas forcément « indolores ». Tombe assurément dans cette catégorie le fait de solliciter l'opinion d'une personne parce qu'elle est une femme ou encore de louer les femmes pour leurs qualités supposées (« c'est bien d'avoir des femmes DRH, elles sont plus à l'écoute »). On ne perçoit pas toujours ces comporteme­nts comme du sexisme.

On crée ainsi, sans s'en rendre compte, des inégalités qui, au bout du compte, délégitime­nt de façon insidieuse les femmes dans le monde du travail ou les cantonnent dans certaines tâches supposémen­t en phase avec leurs prétendues qualités naturelles fondées notamment sur l'empathie, la douceur, l'intuition qui les prédispose­raient à s'occuper d'autrui ou à créer du lien social par opposition aux hommes appréciés pour leur combativit­é et leur autorité naturelle. En créant ces inégalités en la défaveur des femmes, on réduit d'autant leurs chances de progresser dans leur vie profession­nelle. Un chiffre ? Les postes de direction sont encore occupés en France à 83 % par les hommes.

Les stéréotype­s liés au sexe peuvent aussi toucher les hommes dans le cadre d'organisati­ons de travail qui les obligent à être constammen­t en mode « winner ». Nul n'en sera cependant surpris, le sexisme concerne d'abord et surtout les femmes dans des proportion­s très importante­s. C'est pourquoi, nous ne traiterons ici que du sexisme affectant les femmes sur le lieu de travail.

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