Rat-ta-ta-ta-touille !
Grâce à Disney, ce mot bien de chez nous se prononce jusque dans les contrées les plus reculées du globe. Mais revenons aux origines d’un plat provençal qui sent bon l’été.
Comme la saison s’y prête, allons nous installer en bord de Méditerranée. Et plus précisément en Provence, pour aller à la rencontre d’un phénomène nommé ratatouille. Non pas Rémy, le rat gastronome du film de Disney, mais bien le mijoté de légumes qui rassemble tomates, oignons, aubergines, poivrons, courgettes et ail.
L’HISTOIRE DES GRANDES DÉCOUVERTES
La ratatouille est en fait un condensé culinaire des voyages des grands explorateurs à travers les siècles.
Il y a donc la tomate, rapportée d’Amérique par Christophe Colomb au XVe siècle. À cette époque arrive également le piment, traditionnellement cultivé au Mexique, dont il faut attendre le XVIIIe siècle pour déguster la variété que nous appelons poivron, douce et sucrée. La courgette a la même origine : ce sont les Italiens qui s’avisent, au XVIIIe siècle, de déguster avant complète maturité un autre légume du Nouveau Monde et qui lui donnent le nom de « zucchini » (« petite citrouille »), qui devient chez nous petite courge. L’aubergine, elle, n’a pas débarqué des Indes, comme on appelait ces nouvelles terres, mais bien d’Inde, dans les cales des bateaux des navigateurs arabes, dès le IXe siècle. Mais le plus ancien de tous est sans conteste l’oignon, venu lui de Mésopotamie et connu en Europe dès l’Antiquité. Le bassin méditerranéen est à la croisée de toutes ces routes commerciales, il est donc tout naturel que la ratatouille trouve ses racines du côté de Nice et de son port.
CUISSON SÉPARÉE
Mais, au fait, comment fait-on la vraie ratatouille ? Si tout le monde s’accorde sur le fait que les légumes doivent être coupés en morceaux – et avec la peau, pour les puristes –, les modes de cuisson diffèrent. Les pressés feront d’abord revenir l’oignon, l’ail, les poivrons et l’aubergine, avant d’ajouter les courgettes et les tomates. Mais la recette traditionnelle demande du temps et de la patience : presque tous les ingrédients sont cuits séparément dans une huile d’olive de choix. D’abord, les aubergines, que l’on fait revenir 5 minutes pour les dorer et que l’on réserve pour laisser la place aux courgettes. Une fois saisies, celles-ci sont remplacées par les poivrons, qui vont laisser à leur tour la marmite aux oignons et aux tomates cuits ensemble. Un ballet gastronomique dont le bouquet final rassemble tous les ingrédients précuits, avec un bouquet garni, pour un mijotage en douceur d’au moins 45 minutes.
COUSINS D’AILLEURS
Dans le bassin méditerranéen, on ne compte plus les recettes à base de ces légumes du soleil. En France, on connaît le tian et la piperade, mais les recettes de nos voisins sont tout aussi délicieuses. Il y a le briami, en Grèce, où patates douces et fenouils s’invitent dans ce plat que l’on fait compoter au four, et la caponata sicilienne, qui ajoute des câpres, des olives et du céleri – une version proche de la kapunata maltaise. En Espagne, la ratatouille s’appelle pisto manchego alors que, curieusement, la région de la Manche, qui lui donne son nom, n’a aucun accès à la Méditerranée. Enfin, le tour d’horizon ne serait pas complet sans la chakchouka maghrébine, subtilement épicée.