GP Racing

SBK : CATÉGORIE EVO

- Par Michel Turco. Photos Jean-Aignan Museau.

Comme le CRT en MotoGP, le SBK hérite à son tour d’une catégorie censée sauver la discipline : l’Evo.

Désormais orchestré par Dorna Sports, le promoteur du MotoGP, le championna­t du monde Superbike joue sa survie avec la création de la classe Evo, incarnatio­n du futur de la discipline.

De l’avis d’Adrien Morillas, la création de la catégorie Evo est la meilleure chose qui pouvait arriver au championna­t du monde Superbike. Et si l’Auvergnat le dit, ça n’est pas seulement parce que l’avènement de cette nouvelle classe lui a permis de faire passer Jeremy Guarnoni du Superstock au Superbike. « Pour qu’un championna­t soit intéressan­t, il faut que tout le monde ait la possibilit­é de gagner, note le patron du team MRS. En Evo, tout le monde se retrouve avec le même moteur. C’est au pilote de faire la différence sur la piste et à son équipe de démontrer qu’elle est la meilleure pour la mise au point. » L’essence de la course. Créée avant tout pour réduire les coûts de la compétitio­n, permettre à de nouvelles équipes de s’engager en Superbike mais aussi inciter les constructe­urs absents du MotoGP à se tourner vers les Grands Prix, la nouvelle classe Evo rassemble cette année une douzaine de machines dérivées du règlement Superstock. « On a pris notre moto de l’an dernier et on y a mis des freins et des suspension­s de Superbike, résume Adrien Morillas. Avec un budget inférieur à 400 000 euros, on peut faire une saison en espérant des résultats. » Cette année, on ne trouve dans cette nouvelle catégorie que des Kawasaki, des BMW et une Ducati. Avec sept ZX- 10R sur dix machines engagées en Australie, le constructe­ur japonais y est de loin le mieux représenté. « Parce que nous avons la moto la plus aboutie et la plus accessible du marché, affi rme Fabien Raulo,

« L’AN PROCHAIN, TOUT LE MONDE ROULERA EN EVO»

coordinate­ur technique Kawasaki. Et en plus, nous assurons une assistance à ceux qui roulent avec notre machine. » Des sept Kawasaki Evo, celle de David Salom est la plus performant­e. Gérée par l’équipe offi cielle placée sous la coupe de Ichiro Ioda, elle reprend la partie- cycle de la machine championne du monde avec un moteur stock. « C’est la plus évoluée mais pas forcément la plus performant­e, nuance Raulo qui suit de près l’ensemble des ZX- 10R. Je ne suis pas certain par exemple que travailler à partir du bras oscillant d’origine comme le fait le team MRS soit moins pertinent que d’utiliser un bras plus rigide étudié pour travailler avec trente chevaux de plus. » En revanche, utiliser le carénage des machines de Sykes et Baz permet de gagner de précieux km/ h en vitesse de pointe, sans parler des kilos épargnés. « Notre machine en pèse cent soixante- treize, soit huit de plus que la limite autorisée en Superbike » , témoigne Morillas. L’Evo, c’est un copier- coller de ce que fut il y a deux ans le lancement de la catégorie CRT en MotoGP : une formule servant à la fois de laboratoir­e et d’outil de persuasion pour les plus récalcitra­nts. Si, globalemen­t, tous approuvent la création de cette nouvelle catégorie, les acteurs du championna­t sont encore loin d’accorder leurs violons. Il en va de même de leur implicatio­n. Pourtant offi ciellement retiré de la compétitio­n depuis la fi n 2013, BMW soutient ainsi l’engagement de l’Evo de Sylvain Barrier au travers de la structure Motorrad Italia qui, pour cela, a récupéré le budget qui devait être alloué au programme endurance de Michael

UN MOTEUR STOCK DANS UNE PARTIECYCL­E SUPERBIKE

Bartholemy. Victime d’une fracture du bassin lors des tests organisés à Phillip Island une semaine avant l’ouverture de la saison, et absent de la première épreuve, le champion Superstock 1000 demeure néanmoins un candidat au titre de meilleur pilote Evo. Fort de l’excellente base de la S1000 RR, Barrier sait qu’il dispose en effet cette année d’une machine capable de talonner les vraies Superbike. « Par rapport à la moto avec laquelle j’ai remporté l’an dernier le titre Superstock, l’Evo permet de reculer la limite du fait de suspension­s plus performant­es qui offrent un meilleur feeling et de possibilit­és de réglages plus larges, explique le Dijonnais. Pourtant, hormis les tés de fourche, les biellettes de suspension­s, l’amortisseu­r et les freins, cette moto est très proche de la S1000 RR de série. » Une Evo, en quelques mots, c’est une partie- cycle de Superbike équipée d’un moteur Superstock. Une norme qui devrait être étendue l’an prochain à l’ensemble du plateau. Voilà pourquoi Ducati avec Canepa, BMW avec Barrier et Kawasaki avec Salom s’y impliquent sérieuseme­nt dès cette année. Faute d’un moteur stock suffi samment performant, Aprilia préfère préparer l’avenir avec Alex Hoffmann, son pilote de tests, lors de séances d’essais privés, alors que Honda, Suzuki et Yamaha font pour l’instant l’impasse sur la suite en espérant des aménagemen­ts pour le règlement 2015. « Pour Honda, l’Evo n’a actuelleme­nt aucun sens, affi rme Carlo Fiorani, le responsabl­e de l’activité sportive de Honda Motor Europe. On ne peut pas demander à une moto de série

COMME LE MOTOGP, LE SBK SE RETROUVE À LA CROISÉE DES CHEMINS

comme la CBR d’être aussi performant­e qu’une Ducati Panigale vendue deux fois plus cher. Pour Honda, le Superbike est une vitrine pour vendre des motos de série. Aujourd’hui, le marché des sportives est en déclin, on ne peut pas fabriquer une sportive avec pour seul objectif de gagner des courses de SBK. La compétitio­n, c’est le MotoGP. Le Superbike, c’est pour montrer qu’on sait faire une machine performant­e pour rouler sur circuit le dimanche et avec laquelle on peut aussi aller travailler le lundi. La réduction des coûts est une nécessité, mais il faut trouver un équilibre au niveau du règlement pour que toutes les machines se retrouvent avec des niveaux de performanc­es équivalent­s. On doit pouvoir changer les arbres à cames, travailler la culasse... On peut permettre des modifi cations en fi xant un budget maxi pour la préparatio­n du moteur. Sans cela, le Superbike n’a plus de raison d’être. » Paul Denning partage ce point de vue. « Tout le monde est d’accord pour faire en sorte que le Superbike coûte moins cher, glisse le manager de l’équipe Suzuki. Mais le règlement actuel de la classe Evo n’est pas satisfaisa­nt. Quel intérêt de mettre un moteur standard dans une partie- cycle de Superbike ? Il faut trouver des solutions pour que tout le monde s’y retrouve comme cela se fait dans le championna­t britanniqu­e. »

LE SUPERBIKE DOIT COÛTER MOINS CHER

En Australie, fi n février, durant les essais de la première course du championna­t 2014 organisée sur le circuit de Phillip Island, Niccolò Canepa a fait forte impression en roulant quasiment aussi vite avec sa Ducati Evo que Giugliano et Davies avec leurs motos offi cielles. Avec ses bielles en titane et son électroniq­ue de haut vol, le bicylindre de la Panigale 1199 R fait merveille en version stock. « Cela nous permet de rivaliser avec les quatre- cylindres plus facilement qu’en version Superbike où nous sommes limités au niveau de la préparatio­n, avance Paolo Ciabatti, le directeur sportif de l’usine italienne qui a longtemps présidé à la destinée du Mondial Superbike. Pour nous, l’Evo est une très bonne chose et c’est pour cela que nous avons décidé de suivre de près le programme du team Althea Racing. C’est très bien que l’on gèle le développem­ent afin que le Superbike coûte moins cher. Les autres constructe­urs n’ont qu’à faire, eux aussi, une bonne moto de série. » Autant dire que les violons sont encore loin de tous jouer la même partition.

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En Australie, pour l’ouverture du championna­t du monde, David Salom et sa Kawasaki ont terminé par deux fois à la première place du classement Evo.

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