GP Racing

Le peintre de Marquez..........

- Par Jean-Aignan Museau.

C’est un Français qui peint ses casques spéciaux.

Saviez-vous que les casques « spéciaux » de Marc Marquez étaient peints en France ? Nous non, jusqu’à ce que nous rencontrio­ns Sylvain Renard au moment où il terminait la peinture du casque utilisé par le triple champion du monde MotoGP pour le Grand Prix de Catalogne. Portrait.

« L’ENTRÉE EN MOTOGP A ÉTÉ DIFFICILE. LES ITALIENS ONT LA MAINMISE SUR LE SUJET »

Sylvain est tombé dedans alors qu’il était petit : « Je dessinais tout le temps, et de tout. Je rendais même des devoirs d’anglais sous forme de dessins. Le soir, je faisais mes devoirs à fond pour dessiner. » S’il n’avoue ne plus en avoir de souvenirs, ses parents lui rappellero­nt plus tard que vers l’âge de 10- 11 ans, il dessinait déjà des casques. Naturellem­ent, il s’oriente vers des études de graphiste et en épouse la carrière pendant une douzaine d’années. En parallèle, il s’adonne aux joies du motocross sur les circuits du Lyonnais, sa région natale. C’est à la lecture d’un Moto Verte que le déclic se fait. Un reportage est consacré à Troy Lee Design, l’un des précurseur­s américains qui, au mitan des années 80, barbouille avec grand talent les heaumes des meilleurs pilotes de supercross US. « Avec mon voisin, on s’est dit qu’il fallait essayer. » Ils investisse­nt dans un peu de peinture et s’exercent sur de vieux casques. La production est limitée à quelques exemplaire­s par an. « Je harcelais mes condiscipl­es de classe pour qu’ils me laissent leur couvre- chef. Avec quatre copains d’école de mon école de graphisme, on a démarré Aero Diffusion. Ils étaient internes, et nous nous retrouvion­s dans le garage de mes parents le mercredi après- midi pour bricoler... » Sylvain disputait alors les épreuves de sa ligue et de motocross, et il répond à une demande d’un pilote. Puis d’un autre. Les meilleurs commencent à s’intéresser à son travail, et l’activité croît. L’étape suivante est déclenchée par une rencontre. Celle d’Ivan Muller, le pilote automobile, au demeurant fan de moto. « Il a commencé à me donner du travail, tout en me demandant pourquoi je n’en faisais

pas mon activité principale. À l’époque, je bossais dans une agence de communicat­ion à Mâcon. Et il m’a mis en relation avec Stand 21. » Il monte alors un atelier et s’investit à fond pour satisfaire la clientèle internatio­nale de l’équipement­ier automobile. Ça ne pose aucun problème à son patron de l’époque : « Il voyait bien ce que je faisais et se doutait que je m’ennuyais à créer des logos pour des boulangeri­es... » L’activité s’installe alors autour de sa production

pour l’auto : « L’entrée en MotoGP a été extrêmemen­t diffi cile. Tout est cloisonné et les Italiens ont un peu la mainmise sur le sujet. DID ou Drudi verrouille­nt tout en offrant leurs services sur tous les postes d’un team, de l’hospitalit­y aux motos, en passant, bien sûr, par les casques des pilotes. »

« BOSSER 7 JOURS SUR 7 EST USANT MAIS J’AIME ÇA »

Finalement, la connexion se fait via Michaël Rivoire, qui tient les rênes du Racing Service de Shoei sur les Grands Prix. Marc Marquez a besoin d’une série de casques replica à offrir à ses mécanos en fi n de saison. « C’est un copain commun qui nous a mis en relation. Michaël me fait confi ance et m’explique que le juge, ce sera Marc. » L’affaire se passe au mieux, et Sylvain voit arriver quelques « clients »

parmi les pilotes Shoei. « J’ai Quartararo, Cortese, Alex Marquez, Marc – pour ce qui est des casques spécifi ques, pour les autres, les Japonais s’en chargent eux- mêmes –, Cluzel, Masson, Di Meglio... Je m’entends bien avec les designers, c’est cool de bosser chez Shoei » , continue Sylvain qui, pour tous les pilotes susnommés, ne fait que la peinture alors que pour Mike Di Meglio, il en produit également le dessin... Pour autant, il ne montre aucune volonté à l’expansionn­isme : « En France, il y a quelques peintres, comme OCD ou BS Design, et on s’entend super bien. Nous avons chacun notre domaine ; BS est plus dans le karting et la F1, OCD dans le cross, et moi je travaille principale­ment pour une marque de casques automobile. Le cross est devenu compliqué, même les top pilotes n’ont plus d’argent pour se payer une peinture. Et puis en cross, au bout d’une ligne droite, tu ne vois pas le casque, juste une boule toute marron, alors qu’en vitesse, une peinture reste magnifi que, quelles que soient les conditions de course. » Le milieu fermé du MotoGP semble de prime abord peu propice aux contacts entre pilotes et peintres. « Le vrai déclenchem­ent de l’histoire s’est fait par le biais de mon ami qui m’a présenté à Michaël. J’ai une fi lle qui est handicapée, et j’organisais une vente aux enchères pour l’associatio­n dont nous nous occupons. J’ai demandé à mon ami de contacter Michaël afin qu’il demande une visière de Marc Marquez dédicacée. Trois jours plus tard, je reçois un casque, le sien, dédicacé. J’étais ému. Je ne pensais pas du tout à ça. Et puis j’ai fait les replica pour ses mécanos et son staff. Je l’ai rencontré pour la première fois au Mans l’an dernier. Super. C’est un mec qui aime le design, qui apprécie le travail bien fait... » Depuis un an, Sylvain s’est adjoint un apprenti pour le seconder : « J’aimerais réellement pouvoir me reposer sur quelqu’un. Il m’arrive de bosser sept jours sur sept pendant des mois. C’est usant, et ce n’est pas toujours facile à la maison. Mais j’aime ça, et si parfois, je vais bosser à l’atelier le dimanche soir, c’est vraiment parce que ça me plaît ! »

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