MOTO3 TOUJOURS PLUS PRO
Un peu plus de 18 ans d’âge moyen pour les 29 participants 2019, qui sortent quasiment tous de championnats compétitifs. Un nouveau format de qualification calqué sur le MotoGP, et une quasiégalité technique entre KTM et Honda. Pas facile de sortir du lot !
On revient de chez KTM, où l’on a monté les motos » , explique le propriétaire du team CIP et ancien pilote 125 français Alain Bronec. « Pas mal de choses ont évolué. Des détails, comme le faisceau électrique, diverses pièces de partie- cycle. Mais tant qu’on n’a pas roulé, on ne sait pas où en est le moteur face à Honda. Si ça se trouve, cette année, ils auront 2 ch de plus que nous ! » Ce qui était d’ailleurs le cas en début de saison 2018, jusqu’à ce que KTM réplique avec un nouvel ensemble boîte à air/ échappement au Mugello, et qu’ils reprennent le dessus à l’accélération. Sur le papier, tout est fait pour que le niveau technique soit le plus homogène possible dans cette catégorie dont le rôle premier est de sortir des pilotes. « Là aussi, c’est l’inconnu » , reprend Alain, qui a pour sa part engagé le Sud- Africain Darryn Binder et l’Anglais Tom Booth- Amos en 2019. « Six pilotes sont partis ( Martin, Diggia, Bezzecchi, Bastianini, Öttl et Bulega), et ils ont été remplacés par des jeunes, donc ça fait baisser la moyenne d’âge. Des nouveaux comme Tom Booth- Amos qui ont du talent, mais qui ont aussi tendance à monter en l’air tant ils ont à coeur de le montrer. Tom est beaucoup tombé l’an dernier en CEV. Il pense que c’est à cause de ses problèmes de poignet, mais les deux sont liés. Une partie de notre boulot au CIP consiste à les mettre à l’aise pour qu’ils prennent leur temps. » OK, mais la majorité des jeunes qui arrivent en 2019 en championnat du monde viennent effectivement de ce fameux CEV, disputé principalement en Espagne et qui est labellisé championnat du monde junior en Moto3. Ils viennent aussi de l’Asia Cup de la British Talent Cup, voire de la Red Bull Rookies Cup. Ils sont déjà rompus aux confrontations internationales. Ont déjà pas mal voyagé. Connaissent plusieurs tracés du championnat. Parlent anglais. Bref, sont mieux formés que s’ils arrivaient directement d’un championnat national, comme c’était le cas avant. L’exemple le plus parlant est la VR46 Academy, le centre
de formation de Valentino Rossi, où tout est calibré : préparation physique, diététique, mental, pilotage. Pour un vrai mode de vie d’athlète de haut niveau, dont bénéfi cient Celestino Vietti et Dennis Foggia. « Oui, c’est sûr, il y a du talent, concède Bronec. Mais du coup, des pilotes comme Binder, qui ont quatre saisons dans les pattes, font presque fi gure de vétérans ! Ils vont devoir mettre à profi t leur expérience. Il va falloir voir comment se comporte un mec comme Romano Fenati » qui est le plus titré sur le papier avec 10 victoires au compteur ( voir trombinoscope Moto3 p. 108) mais qui est diffi cile à manager, comme le prouvent
ses frasques de l’an dernier en Moto2. « Ou comment l’Argentin Gabriel Rodrigo, qui affi chait une bonne vitesse aux essais en 2018 mais a beaucoup chuté en course, tire son épingle du jeu. Peut- être que la KTM consommait un peu plus de pneus que la Honda ? Ça non plus, on ne peut pas le savoir. On aura plus d’infos après nos trois premiers roulages lors des deux séances d’essais privés les 6 et 7 février à Valence puis les
LES JEUNES QUI ARRIVENT EN 2019 SONT DÉJÀ ROMPUS AUX CONFRONTATIONS INTERNATIONALES
11 et 12 à Jerez, avant les premiers tests offi ciels Irta, du 20 au 22, toujours à Jerez. » Quid du nouveau système de qualif type MotoGP qui sera mis en place pour le Moto2 et le Moto3 en 2019 ? Est- ce que ça va pouvoir éviter que les pilotes se retrouvent à la queue leu leu pour chercher une aspi ?
DU RYTHME ET DU SPECTACLE
Avec tous les risques de percussion que cela entraîne. « Jusqu’ici, ça démarrait peinard aux essais libres, analyse Bronec. Mais là, c’est sûr que ça va nous faire de beaux vendredis. Parce qu’il va falloir décrocher sa place en Q2 dès la FP1. Et même quand tu te retrouves 14e, ce qui est la limite de la qualif en Q2 pour notre catégorie, il faut encore te cracher dans les pognes pour bien te placer devant. Je pense que ça va ajouter du spectacle et que ce sera bien. » Le plus excitant avec cette cuvée 2019, ce seront assurément les plus jeunes, comme Vietti, Ogura, Fernandez, Garcia, qu’on a peu – ou pas – vu en Mondial, mais qui affi chent un potentiel important. Et que dire d’un Can Önccu, qui s’est offert une victoire pour son tout premier GP ? La plupart des stars actuelles du MotoGP comme Dovizioso, Rossi et Marquez ont toutes été titrées en catégorie 125 – l’équivalent du Moto3 à l’époque. C’est une étape indispensable dans la progression vers les sommets. En 2019, nos favoris sont toutefois des pilotes doués mais qui ont déjà un minimum d’expérience, ce qui, comme le dit justement Jorge Martin « permet d’élaborer une stratégie même quand tu es en bagarre » . Il s’agit donc du tout jeune Espagnol Jaume Masia, un diamant brut qui nous a maintes fois éblouis de sa classe en 2018, mais a aussi commis quelques erreurs de jeunesse. Il y a l’expérimenté et talentueux Écossais John McPhee, qui jusqu’ici, n’a pas pu bénéfi cier du support d’un des tops teams de la catégorie, mais sera, en 2019, chez l’ambitieuse équipe malaisienne Petronas Sprinta. Et puis l’Italien Lorenzo Dalla Porta, qui a fi ni la saison 2018 en trombe, et sera aux mains du talentueux
ingénieur Christian Lundberg chez Leopard. Celui- là même qui a orchestré le triomphe de Mir il y a deux ans. Et l’Espagnol Albert Arenas, qui a signé ses deux premières victoires en 2018, et fait preuve d’un remarquable panache dans le paquet de tête, mais a aussi beaucoup chuté. Comme dit Rossi : « L’important, c’est la vitesse. Le nombre de chutes diminue avec le contrôle
quand vient l’expérience. » Valentino sait de quoi il parle : il s’est envolé à de nombreuses reprises lors de sa première saison 125 en 1996. Mais quand il a arrêté de tomber en 1997, il a remporté le championnat. C’est sur le fi l de ce rasoir que les jeunes pilotes de 2019 devront danser. Ce qui nous promet, une fois encore, un sacré spectacle.