GP Racing

Mag : l’Asie comme horizon....

- Par Michel Turco. Photos Jean-Aignan Museau.

Pour l’endurance, l’avenir passera par l’Asie.

Avec une nouvelle épreuve en Malaisie et des liens de plus en plus étroits entre structures japonaises et équipes européenne­s, le championna­t du monde d’endurance mise sur l’Asie pour se développer.

Alléluia ! Cette année, après le Bol d’Or, les équipes permanente­s du championna­t du monde d’endurance n’auront pas à patienter sept mois pour retrouver le chemin de la compétitio­n. Mi- décembre, l’EWC a en effet rendez- vous en Malaisie, sur le circuit de Sepang, pour la deuxième course de la saison 2019/ 2020. Une toute nouvelle épreuve de 8 heures pour laquelle François Ribeiro, patron d’Eurosport Events, le promoteur du championna­t, s’est démené durant de longs mois. « Quand nous avons repris l’endurance, il y a un peu plus de quatre ans, François avait promis qu’il ajouterait au calendrier une course en Asie, et qu’il y emmènerait tout le monde, rappelle Renaud Jeanfi ls, coordinate­ur des équipes et manager des événements chez Eurosports Events. Nous y voilà. Il a juste fallu trouver le bon partenaire. » Le promoteur de l’EWC l’a trouvé avec Razlan Razali, le directeur du circuit de Sepang et par ailleurs patron du team SRT au sein duquel Fabio Quartararo fait aujourd’hui des étincelles en MotoGP. « Ce rendez- vous sera une grande fête » , promet le Malaisien qui s’est lui aussi beaucoup investi pour monter cet événement qui, le même week- end, réunira l’EWC et le WTCR. Cela fait maintenant plusieurs années que le continent asiatique tient lieu d’Eldorado pour les constructe­urs de motos. Alors que le marché européen perd de la vitesse, l’Indonésie, la Malaisie, la Thaïlande et le Vietnam offrent à l’industrie motocyclis­te de nouvelles perspectiv­es. Il en est de même pour la compétitio­n. En Asie du Sud- Est, le MotoGP tutoie le football en termes de popularité. Alors

pourquoi ne pas permettre à ce public enthousias­te de goûter aux charmes de l’endurance ? Cela pourrait être par ailleurs un bon moyen d’attirer de nouvelles équipes vers une discipline en pleine évolution. Voilà pourquoi les Huit Heures de Sepang seront qualifi catives pour les Huit Heures de Suzuka. Pour Eurosport Events, l’avenir de l’EWC passe donc par des liens toujours plus étroits entre l’Europe et l’Asie. À terme, le Vieux continent devrait organiser trois épreuves de 24 heures – le Bol d’Or, Le Mans et Spa –, alors que le Japon et la Malaisie auraient la charge des deux courses de 8 heures, à Sepang et Suzuka. Cette perspectiv­e conduit aujourd’hui à des rapprochem­ents entre structures européenne­s et équipes japonaises. Juan- Eric Gomez et Yuko Kagayama ont ainsi décidé de s’associer cette saison pour disputer l’intégralit­é du championna­t du monde. Au Bol d’Or, le team JEG Kagayama a fait rouler Greg Leblanc, Naomichi Uramoto et Chris Leesch sur une Suzuki stock. « À partir de Sepang, Suzuki nous fournira une moto d’usine » , confi e Gomez.

« IL FAUT APPRENDRE À SE COMPRENDRE ET À SE FAIRE CONFIANCE »

Candidat malheureux à la reprise du SERT, équipe pour laquelle il a couru pendant huit ans, le Français est installé en Espagne, sur le circuit de Valence, depuis 2008. Il y a monté sa structure et engage des pilotes dans le championna­t de Superbike espagnol, dont Uramoto, le protégé de Kagayama. « Yuko et moi, on travaille ensemble depuis quatre ans, précise Juan- Eric. Naomi a commencé par faire quelques courses avec nous en parallèle de sa participat­ion au championna­t japonais. Yuko a trouvé notre équipe super, et petit à petit est née l’envie de monter quelque chose ensemble. La première idée, c’était le Superbike, et puis fi nalement on a opté pour l’endurance. C’est une discipline que

je connais bien puisque j’y ai couru pendant onze ans. Le fait que le championna­t se dispute aujourd’hui à cheval sur les deux continents va nous permettre de mettre en commun nos compétence­s et nos moyens. Nous gérerons les courses de 24 heures à partir de notre base en Espagne, Yuko celles de huit heures à partir du Japon. » Ce lien entre Européens et Japonais, le team F. C. C. en a été le pionnier. Bruno Beggiano travaille avec Masakazu Fujii depuis maintenant sept ans. « Son fi ls courait chez nous en Moto3, confi e le patron de la société Bruno Performanc­e, installée

du côté de Barcelone. On a ensuite fait des choses ensemble en Moto2, puis en 2016, on a décidé de passer à l’endurance. Au départ, l’idée était que je mette ma structure à la dispositio­n de son équipe pour les courses européenne­s. Depuis, Honda France a rejoint l’aventure en apportant son fi nancement. L’an dernier, nous avons même décidé de nous installer du côté de Marnela- Vallée pour simplifi er les déplacemen­ts. » Et aujourd’hui, toute l’équipe est directemen­t payée par Honda. Bruno Beggiano facture de son côté ses services de manager et de coordinate­ur logistique d’une structure composée de Japonais, Français, Espagnols, et même d’un Belge et d’un Australien. À terme, l’équipe F. C. C. TSR Honda France devrait posséder, elle aussi, une base européenne pour les courses de 24 heures et une base japonaise pour les épreuves de 8 heures. « Tout cela demande de mettre de l’huile dans les rouages, admet Bruno. Il faut apprendre à se comprendre et à se faire confi ance. J’ai la chance d’être quelqu’un de très structuré dans mon travail, c’est ce qui fait que ça a bien marché avec Fujii. » Juan- Eric Gomez en est également convaincu. « Pour s’associer ainsi, il faut que tout le monde se sente en confi ance, insiste le team manager Suzuki. Les Japonais ont tendance à se méfi er des Occidentau­x du fait des différence­s de mentalité qui nous opposent. Ils ont toujours un peu peur qu’on profi te d’eux. » Patrick Enjolras a eu l’occasion de mesurer les différence­s qui peuvent opposer un manager français d’un manager japonais. L’an dernier, le patron du Tati Team s’était associé à l’équipe Trick Star, là encore pour partager les coûts d’une compétitio­n en pleine mutation. L’union n’aura duré que le temps d’une saison. « On s’était mis d’accord à Suzuka, raconte Enjolras. Ils cherchaien­t une base européenne. De notre côté, s’associer avec Trick Star nous permettait de changer de catégorie. Nous venions de décrocher le titre en Stock, on se retrouvait en EWC.

L’UNION SACRÉE

Ils fournissai­ent tout le matériel : roues, fourche, bras oscillant avec changement rapide, ils nous allouaient un budget et on récupérait un contrat avec Dunlop Japon pour la fourniture des pneus. La saison s’est plutôt bien passée, et puis au mois d’août, Ryuji Tsurata m’a fait savoir qu’il ne souhaitait plus continuer. En fait, ce n’est pas facile de travailler avec des Japonais. Il y a d’une part la barrière de la langue qui rend beaucoup de choses approximat­ives, et puis nos façons de travailler sont différente­s. Avec ça, je dirais que diriger une équipe avec deux patrons, c’est aussi très compliqué. J’ai toujours eu des associés dans mon travail, mais la compétitio­n, c’est autre chose. » Outre le fait de perdre Samu Deguchi, désormais remplacé par Alan Techer, la famille Enjolras doit à présent réunir le budget pour fi nancer sa saison 2019/ 2020. Car bien évidemment, Patrick n’envisage pas de jeter l’éponge. « On va se débrouille­r, assure- t- il. L’endurance évolue et se profession­nalise, c’est une bonne chose. Malheureus­ement, il faut pour cela des moyens que nous ne possédons pas. Je pense qu’il faudrait que le promoteur du championna­t s’inspire de ce que fait la Dorna en MotoGP en aidant fi nancièreme­nt les équipes qui sont sous contrat. »

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 ??  ?? Josh Hook, l’Australien du team F.C.C. Honda France, rêve, comme ses coéquipier­s Freddy Foray et Mike Di Meglio (photo de droite), de récupérer la couronne de champion du monde.
Josh Hook, l’Australien du team F.C.C. Honda France, rêve, comme ses coéquipier­s Freddy Foray et Mike Di Meglio (photo de droite), de récupérer la couronne de champion du monde.
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 ??  ?? 1 Masakazu Fujii et Bruno Boggiano sont des pionniers dans le rapprochem­ent entre l’Europe et l’Asie. 2 Freddy Foray a, lui aussi, apporté son expérience au team F.C.C. Honda. 3 Une Suzuki de plus pour jouer la victoire. 4 Juan Eric Gomez fait son retour en endurance en s’associant avec la structure de Yoko Kagayama. 5 Le Tati team de Patrick Enjolras a repris son indépendan­ce. 6 Une séparation d’avec Trickstar qui demande aujourd’hui de nouveaux investisse­ments pour équiper comme il se doit la Kawasaki numéro 4.
1 Masakazu Fujii et Bruno Boggiano sont des pionniers dans le rapprochem­ent entre l’Europe et l’Asie. 2 Freddy Foray a, lui aussi, apporté son expérience au team F.C.C. Honda. 3 Une Suzuki de plus pour jouer la victoire. 4 Juan Eric Gomez fait son retour en endurance en s’associant avec la structure de Yoko Kagayama. 5 Le Tati team de Patrick Enjolras a repris son indépendan­ce. 6 Une séparation d’avec Trickstar qui demande aujourd’hui de nouveaux investisse­ments pour équiper comme il se doit la Kawasaki numéro 4.
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