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Mag pneus / essence.........

Ça a l’air simple comme ça, mais la gestion des pneus et de l’essence en MotoGP implique un certain nombre de subtilités. Ajoutez le stress de la course, et vous obtenez un vrai métier.

- Par Thomas Baujard. Photos Jean-Aignan Museau et Gold and Goose.

Rencontre avec les deux référents du team Tech3.

Il est 17 heures dans le stand Tech3, vendredi soir à Brno. Dans l’arrièrebou­tique, c’est- à- dire là où l’on entrepose les racks à pneus ou les pièces de rechange, on se retrouve avec Pierre Laurent, responsabl­e pneus et essence pour Miguel Oliveira, et Nicolas Guichard, son homologue pour Hafi zh Syahrin. Leur mission du jour : nous expliquer en quoi consiste leur travail.

Pierre et Laurent, pouvez-vous éclairer un peu notre lanterne ?

Nous nous occupons de mettre la bonne quantité d’essence pendant les séances d’essais. De faire monter les pneus chez Michelin, de retourner les chercher, de scotcher les plombs ( d’équilibrag­e, ndlr), de mettre les bonnes pressions puis de les vérifi er. De mettre les pneus en chauffe, de contrôler que cette opération se passe bien. Et... de mettre les bons pneus sur les motos !

L’équilibrag­e des roues est-il géré par Michelin ?

Oui. On prépare les jantes, on met des stickers, on vérifi e le kilométrag­e des jantes. On monte les capteurs de pression à l’intérieur des jantes, qui sont obligatoir­es depuis trois ans.

Suite à l’éclatement du pneu arrière sur la Ducati de Loris Baz, c’est ça ?

Oui, exactement.

Comment se passe la gestion des pneus et de l’essence lors du week-end de course ?

Déjà il faut savoir qu’il y a une allocation qu’on ne peut pas dépasser. 12 pneus avant et 12 arrière par week- end. On peut en monter pas mal, mais on ne peut pas tous les faire rouler. On monte les slicks la veille pour le lendemain. Les pneus pluie peuvent être montés juste avant la séance. Parce qu’on ne sait jamais quand ça va arriver. Mais pas les slicks, dont l’allocation est déjà défi nie pour le lendemain ( interview réalisée vendredi soir lors du GP de Brno, ndlr).

On arrive tous sur le circuit le mardi soir, on lave les camions, on s’occupe du montage du camion ( les extensions des remorques

et le toit entre les semis, ndlr). Mercredi matin, on monte le box. Mercredi aprèsmidi, on ouvre nos caisses, on récupère nos jantes, on lave toutes les jantes du week- end précédent. On met en place nos racks de jantes ( rangées de jantes en chauffe) par ordre de kilométrag­e. Les premiers jours, on fait rouler les jantes qui ont le plus de kilomètres. On garde les plus fraîches pour la course. Le jeudi matin, 9 heures, on emporte nos jantes chez Michelin, qui s’occupe du montage. Et nous, pendant ce temps- là, le jeudi matin, on révise les réservoirs. On démonte nos pompes à essence, on nettoie les fi ltres à la souffl ette. On les change si besoin. On nettoie les réservoirs. Jeudi début d’après- midi, on va chercher nos pneus, on fait tout ce qu’il faut pour que les pneus roulent le lendemain. C’est- à- dire qu’on les pèse pour obtenir des données d’usure. On les mesure aussi après, en fonction du nombre de tours.

Vous mesurez quoi exactement ?

Chaque usure a un témoin. On a six témoins sur la bande de roulement. Michelin ne nous le demande pas, mais on fait ça en interne, chez Tech3, pour savoir quel pneu va le plus s’user, ou au contraire le moins s’user. Pour faire une simulation.

J’imagine que ces valeurs sont confidenti­elles, chez Michelin comme chez Marchesini, où, lors de la visite d’usine, les technicien­s ne voulaient pas révéler le kilométrag­e limite des jantes MotoGP en magnésium forgé.

Oui. Et pour les pneus, c’est pareil. Déjà, il faut savoir qu’aucun pneu ne nous appartient. Ils sont tous la propriété de Michelin. À chaque fi n de week- end, on les leur rapporte. Même quand on part en test, ils ne vont jamais monter des pneus à l’avance pour le test d’après. À chaque test et à chaque course, des monteurs Michelin sont là. Ce sont eux qui ont les pneus dans leur camion.

Quel est le timing avant les séances d’essai ?

Le vendredi matin, on met les pneus slicks en chauffe deux heures avant la séance.

Pour les pneus pluie, c’est 45 minutes. Les températur­es de chauffe, c’est 90 ° C pour les slicks, et 45 pour les pluie. On le fait deux heures avant pour les slicks afi n que le pneu soit bien chaud et qu’il soit stable. C’est- à- dire que la températur­e soit la même à l’extérieur et à l’intérieur du pneu. Comme ça, la jante aide aussi le pneu à conserver sa températur­e. C’est pour ça qu’on a les fours ( sorte de tente en tissu où sont entreposés les pneus en chauffe, ndlr). Ça sert aussi à chauffer les jantes et à stabiliser les pressions des pneus. La températur­e, c’est primordial.

C’est vrai que ce matin, je voyais Aleix Espargaro qui causait avec son chef ingénieur chez Aprilia. Ça a duré trente secondes de plus que prévu, du coup, les mécanos ont tout de suite remis des caches au-dessus des couverture­s chauffante­s (« sur-couverture­s », dites « wind stop »).

C’est aussi pointu que la cuisine en fait ! C’est ça. Quand on rapporte les pneus à l’avant du box ( ceux qu’on voit à l’écran lors des séances, ndlr), on met aussi des « wind stop » . Parce que le vent fait beaucoup baisser la températur­e des jantes. Mais par précaution, on le fait tout le temps, même en Malaisie, quelle que soit la températur­e externe. Parce que le plus important pour nous, c’est de conserver la températur­e interne.

Si on hésite entre deux pneus, on ne laissera jamais le second pneu à l’avant du box. Si l’on hésite entre un soft et un medium, dès que le choix est fait, le pneu non sélectionn­é retourne au four pour que ni le pneu ni la jante ne refroidiss­ent.

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 ??  ?? 1 Nicolas Guichard devant l’un des trois fours à pneus du team MotoGP Tech3, où les slicks sont maintenus sous couverture à une températur­e de 90 °C.
Une fois le pneu sélectionn­é, le four est refermé. 2 Le montage des pneus se fait avec couverture­s chauffante­s pour ne pas perdre le moindre degré. Ces dernières sont enlevées lorsque le pilote fait signe aux mécanos qu’il s’apprête à monter sur sa moto. 3 Le thermostat de chauffage des pneus, identique à celui de votre four. Sauf qu’il ne monte pas à 240 °C et n’a pas de fonction grill...
1 Nicolas Guichard devant l’un des trois fours à pneus du team MotoGP Tech3, où les slicks sont maintenus sous couverture à une températur­e de 90 °C. Une fois le pneu sélectionn­é, le four est refermé. 2 Le montage des pneus se fait avec couverture­s chauffante­s pour ne pas perdre le moindre degré. Ces dernières sont enlevées lorsque le pilote fait signe aux mécanos qu’il s’apprête à monter sur sa moto. 3 Le thermostat de chauffage des pneus, identique à celui de votre four. Sauf qu’il ne monte pas à 240 °C et n’a pas de fonction grill...
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