GP Racing

Ten Kate, l’usine à n° 1

- Par Valentin Roussel. Photos Gold and Goose.

Le team batave s’est offert les services de Baz.

Après la décision inattendue de Honda de mettre un terme à sa collaborat­ion avec Ten Kate, fin 2018, l’équipe est repartie au charbon cette année avec Yamaha et Loris Baz. GPRacing a enquêté sur la fameuse méthode de travail de l’équipe néerlandai­se. Au programme, beaucoup de sérieux !

C’ était quelque chose qui était pratiqueme­nt devenu impensable. Le partenaria­t liant Ten Kate et Honda, riche de neuf titres en Supersport et d’une couronne en Superbike avec James Toseland en 2007, était en effet devenu, au fi l des années, l’une des associatio­ns les plus prolifi ques de la grille de départ. Même leurs derniers résultats communs, qui étaient tout de même un petit peu décevants, ne semblaient pas, de l’extérieur, pouvoir entacher cette solide relation. Quelques jours seulement après la dernière course de la saison 2018, au Qatar, la fi rme japonaise décidait pourtant de mettre un terme à cette fructueuse histoire. Cette annonce a été vécue comme un choc et a constitué une véritable surprise dans les rangs de tous les acteurs du championna­t. Jonathan Rea, qui a remporté sa première course en Superbike avec Ten Kate en 2009, a d’ailleurs semblé sincèremen­t affecté par cette nouvelle. Fabien Foret, qui l’observe sur le bord de la piste depuis plusieurs saisons désormais, a, lui aussi, une histoire commune avec la formation néerlandai­se puisque c’est lui qui a offert à Ronald et Gerrit Ten Kate leur premier titre de champion du monde Supersport en 2002. « Johnny a été affecté par cette annonce car c’est quelqu’un de très humain et il a trouvé assez moyenne la manière dont

Honda a remercié Ten Kate, raconte le

Charentais. Cette scission a été surprenant­e car on pensait qu’ils étaient inséparabl­es. Ten Kate a toujours donné le maximum. On a d’ailleurs pu voir qu’en changeant d’équipe, les résultats de la Honda n’ont pas fait un bond en avant, loin s’en faut ! Ils ne méritaient pas ça. » Ronald Ten Kate, le patron, était bien évidemment au coeur de la machine à ce moment- là. Avec sa crinière ondulée et son regard perçant, il a donc dû gérer cette situation qu’il n’avait pas du tout prévue. Assis autour d’un verre en compagnie de GP Racing à Magny- Cours, en septembre dernier, il semblait toujours aussi surpris,

près d’un an plus tard. Il explique : « La façon dont cela s’est terminé avec Honda a été un vrai choc. On a quand même été ensemble pendant vingt ans... Et nous avons gagné dix titres de champion du monde ! Je ne m’attendais pas à ce qu’ils annoncent, lors de notre dernier jour de contrat avec eux, qu’ils arrêtaient notre relation alors qu’on avait déjà tout planifi é : les essais hivernaux, notre équipe technique... »

RIGUEUR EXIGÉE

Quelques semaines plus tard, Ten Kate commençait cependant à plancher sur d’autres solutions pour revenir rapidement à la compétitio­n. Pour cela, ils pouvaient s’appuyer sur le sérieux et la rigueur qui ont toujours fait leur renommée. Sébastien Charpentie­r connaît bien cette méthode.

Il l’a en effet observée pendant de nombreuses années. Avant même qu’il ne pose ses fesses sur la CBR, le natif de La Rochefouca­uld avait accompagné son ami Foret pendant sa campagne victorieus­e en 2002. Cette année- là, il conduisait et lavait le campingcar que les deux hommes partageaie­nt pour se rendre sur les courses. Sur les circuits, il lui préparait également quelques plats de pâtes. Une véritable aventure humaine entre deux amis. Même s’il ne roulait pas, Sébastien s’est alors servi de cette expérience pour observer et apprendre. Quand Ten Kate l’a contacté pour l’engager en 2005, Charpentie­r, qui avait bouclé la saison précédente sur les chapeaux de roues avec le team Klaffi en terminant sur le podium des quatre dernières courses, avait donc déjà une petite idée de ce qui l’attendait. Pourtant, lors de ses premiers tours en essais hivernaux, le Français a réussi à être encore surpris. Sébastien, qui deviendra double champion du monde Supersport avec Ten Kate, en 2005 et 2006, se rappelle notamment d’une séance d’essais à Almeria, en Espagne : « C’est là que je me suis rendu compte que j’étais en train de faire des choses très différente­s. J’étais rapide aussi bien en simulation de course que sur un tour chrono. Je me suis donc posé et je me suis dit que j’allais pouvoir jouer

« NOTRE MÉTHODE ? METTRE TOUTES NOS TRIPES DANS LA COURSE »

KERVIN BOS

le titre en 2005. J’avais tout à ma dispositio­n : le meilleur sponsor, la meilleure machine et surtout, la meilleure équipe. Une véritable armée. Chaque personne était à sa place, du motoriste au télémétris­te, en passant par le mec des suspension­s. Ils étaient vraiment tous à l’écoute. La façon de travailler me plaisait beaucoup. C’était l’idéal car ça faisait grandir tout le monde. On avait les meilleurs technicien­s. On collaborai­t étroitemen­t avec WP. Ma relation avec mon télémétris­te était parfaite. On passait nos soirées à travailler après avoir mangé... Et je sais que c’est encore comme

ça aujourd’hui ! » Après plusieurs mois de négociatio­n avec Yamaha, Ten Kate a en effet retrouvé la compétitio­n au mois de juin dernier à Jerez avec ce même état d’esprit. Dans l’impasse après la fi n de son aventure sur la BMW Althea, Loris Baz s’est, dès ses premiers pas chez Ten Kate, rendu compte de cette méthode de travail propre à l’équipe. D’ailleurs, quelques mois seulement après que ses mécanicien­s ont découvert la R1, le Haut- Savoyard recevait déjà une première évolution moteur made in

Ten Kate, une de leurs nombreuses marques de fabrique. Kervin Bos, le team manager, cheveux parfaiteme­nt coiffés, pense cependant que cette méthode relève surtout d’une certaine façon de voir la course. Il confi e : « Je pense que c’est une manière de penser. Et l’état d’esprit de Loris est la même que la nôtre. Nous mettons toutes nos tripes dans la course. Nous ne faisons pas de bla- bla. Nous ne voulons pas montrer des choses folles. Nous voulons faire des choses folles. Nous n’avons peur de rien ! »

Dixième du championna­t l’an dernier en ayant loupé toute la première partie de saison, Loris, qui est également parvenu à battre à plusieurs reprises les pilotes offi ciels Yamaha, veut bien évidemment continuer sur cette lancée cette année.

RETROUVER LA VICTOIRE

Comme à l’époque des Charpentie­r, Vermeulen, Muggeridge ou Toseland, il peut également s’appuyer sur les compétence­s réunies dans l’atelier- concession de

Ten Kate, à Nieuwleuse­n, à une trentaine de kilomètres de route du circuit d’Assen. Florian Marino connaît bien cet endroit. À dix- sept ans, après avoir terminé vicechampi­on du Superstock 600 derrière Jérémy Guarnoni sur sa CBR du team junior de Ten Kate, le Cannois a en effet poursuivi son aventure avec la structure néerlandai­se en montant en Mondial Supersport en 2011 où il terminera huitième du championna­t. Il dit : « Leurs locaux sont magnifi ques. Il ne peut rien y avoir de mieux pour une équipe qui doit préparer une moto de course. C’est le paradis pour tout le monde, à la fois pour le team mais aussi pour le mec qui a besoin d’une pièce racing ou d’une fringue. Ça sent la compétitio­n, ça sent la moto ! »

Loris Baz ne dit pas le contraire. Car si Ten Kate reste une structure privée dans la galaxie Yamaha, elle peut en effet être totalement considérée comme une entité à part entière. « C’est une grosse puissance de développem­ent, confi rme Loris. C’est comme si j’évoluais un peu dans une équipe offi cielle, même si on ne peut pas vraiment

dire ça car les moyens sont forcément différents. » Au niveau des objectifs, on retrouve en tout cas les mêmes exigences. Ronald Ten Kate ne cache pas que son but, à terme, est de redevenir champion du monde : « Tout est réuni désormais pour retrouver la première place. Et puis, à chaque fois qu’on participe à une course, c’est pour être

champion du monde. » Il faudra donc battre Jonathan Rea qui, peut- être plus que jamais, fait fi gure de favori à sa propre succession cette année, tout en se méfi ant des débuts de Scott Redding en Superbike chez Ducati ou des premiers pas de Toprak Razgatliog­lu sur la R1. La grille, cette saison, est d’ailleurs l’une des plus excitantes depuis plusieurs années puisque Chaz Davies, les deux pensionnai­res de chez BMW, Tom Sykes et Eugene Laverty, ou encore Michael Van der Mark voudront également occuper le haut de l’affi che. Le retour offi ciel du HRC en Superbike pour l’arrivée de la nouvelle Fireblade, avec Alvaro Bautista et Leon Haslam, pourrait encore pimenter la compétitio­n. « Pour nous, l’objectif, c’est d’être régulièrem­ent dans le Top 5 mais aussi d’essayer d’être le plus possible sur le podium, annonce Loris. Il y aura des courses où on aura des coups à jouer. Je pense vraiment que sur certaines manches, on pourra se battre pour la victoire. »

L’histoire des Français avec Ten Kate a toujours été fructueuse. Outre Foret, Charpentie­r et Marino, le regretté Maxime Berger avait également brillé avec eux en Superstock 1000. Aujourd’hui, c’est au tour de Loris Baz de faire triompher la fameuse méthode Ten Kate.

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SSP. Le début d’une longue série puisque, après le Charentais,
Chris Vermeulen 3 s’emparera du titre en 2003, alors que Karl Muggeridge 2 sera couronné la saison suivante. Celui qui allait devenir, quelques années plus tard, le roi du Supersport, Kenan Sofuoglu 4 , a lui aussi recueilli ses premiers lauriers dans les rangs de la structure néerlandai­se. 5 Grand copain de Foret, Sébastien Charpentie­r deviendra, lui, champion en 2005. Il doublera la mise la saison suivante. 6 James Toseland est, à ce jour, le seul pilote à avoir gagné un titre en SBK pour Ten Kate.
7 Le jeune Florian Marino en action. 8 Michael Van der Mark a obtenu le dernier titre de Ten Kate, en 2014. 5
1 C’est Fabien Foret, en 2002, qui offrira à Ten Kate le premier titre de champion du monde SSP. Le début d’une longue série puisque, après le Charentais, Chris Vermeulen 3 s’emparera du titre en 2003, alors que Karl Muggeridge 2 sera couronné la saison suivante. Celui qui allait devenir, quelques années plus tard, le roi du Supersport, Kenan Sofuoglu 4 , a lui aussi recueilli ses premiers lauriers dans les rangs de la structure néerlandai­se. 5 Grand copain de Foret, Sébastien Charpentie­r deviendra, lui, champion en 2005. Il doublera la mise la saison suivante. 6 James Toseland est, à ce jour, le seul pilote à avoir gagné un titre en SBK pour Ten Kate. 7 Le jeune Florian Marino en action. 8 Michael Van der Mark a obtenu le dernier titre de Ten Kate, en 2014. 5
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Gerrit Ten Kate suit avec attention les chronos. « C’est quelqu’un que j’apprécie beaucoup » , dit Charpentie­r.
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Tout un programme. Charpentie­r a également suivi de près la carrière de Maxime Berger 4 qui deviendra à deux reprises vice-champion du Superstock 1000 sur la CBR néerlandai­se, en 2008 et 2010. « Il y avait une véritable transmissi­on dans le Junior Team » , raconte Seb, qui a suivi les pilotes évoluant dans cette structure après sa carrière. 5 Avec une Honda en bout de développem­ent, Johnny Rea a réalisé des prouesses. 6 Loris Baz a bien l’intention de faire revenir Ten Kate au premier plan. Et ce, dès 2020 !
1 Après sa carrière en Grands Prix, Nicky Hayden a atterri en SBK chez Ten Kate. L’Américain remportera d’ailleurs une victoire remplie d’émotion en deuxième manche à Sepang, en 2016. 23 et La rigueur de Ronald Ten Kate et le savoir-faire des mécanicien­s. Tout un programme. Charpentie­r a également suivi de près la carrière de Maxime Berger 4 qui deviendra à deux reprises vice-champion du Superstock 1000 sur la CBR néerlandai­se, en 2008 et 2010. « Il y avait une véritable transmissi­on dans le Junior Team » , raconte Seb, qui a suivi les pilotes évoluant dans cette structure après sa carrière. 5 Avec une Honda en bout de développem­ent, Johnny Rea a réalisé des prouesses. 6 Loris Baz a bien l’intention de faire revenir Ten Kate au premier plan. Et ce, dès 2020 !
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